https://resources.huygens.knaw.nl/retroboeken/declercq/whole_transcription?source=2

Deel II (1811-1812)

pagina:

∙[kaft met op de rug een etiket met daarop geschreven]No. 2

∙Particuliere

∙Aanteekeningen

∙W. de Clercq

∙1811/12

∙[daaronder een etiket met signatuur]F

∙II

∙[Op het voorplat een etiket met daarop geschreven]1811 en 1812.


pagina: 1

Mémoires

Lundi 2 sept. 1810 [1811] Voilà le jour par où je commence.

C'est le premier jour de la foire institution qui fut utile

mais qui par l'occasion où l'on se trouve dans les

grandes villes pour pouvoir se procurer tout pour son

argent a beaucoup perdu de son crédit.

Une baleine avait été prise près de Monnikendam

elle était longue de 30 pieds. Je la vis dans une barque.

La tête était mutilée et elle commençait à se putréfier

et répandait une forte odeur. Des négocians l'avaient

achetée pour f 400.

Bertuch nomme cette espèce Nordkaper Balaena

Musculus et Lacepede dans l'histoire naturelle des

Cetacés. Baleineoptere Museau pointu.

On racontait qu'il s'était vérifiée une prédiction du

fameux Ludeman qui disait qu'on aurait la paix

dans l'année qui serait remarquable par les signes

suivans

1. Il croîtrait des roses aux saules.

2. Une cigogne nicherait sur le toit de l'église neuve.

3. Les légumes et fruits seraient mûrs une mois avant

le terme ordinaire

Ces signes sont accomplis. Je vis ces prétendues roses

qui sont composées de feuilles de saule. Bonheur à ceux qui

le croient mais par malheur je suis fort incrédule

pour la science divine de l'astrologie.

Le club du Lundi eut lieu. Nous fûmes fort gais. On fit des

gasconnades sans nombre. Le médecin nous montra l'ordre

de St. Michel porté par le grand Deruiter. Par la

négligence de l'orfèvre les chaînes d'argent auxquelles

cette croix avait été attachée furent jetées dans le

creuset. Une parente de De Ruiter avait été forcée

par la misère à vendre les marques honorables qui

distinguaient ce marin qui fut toujours héros

et honête homme. Sic transit gloria Mundi.


pagina: 2

On y voyait l'archange terrassant le dragon dans un cadre

émaillé. L'ouvrage était assez beau.

3 Sept. Point de nouvelles. Mon pauvre Papa est

encore malade de la goutte.

4 Sept. Nous fûmes tous chez le grand papa. Ce

bon vieillard était fort gai et se réjouissait de

voir tous ses petits enfants en si bonne santé autour

de sa table.

5. 6. 7. 8. Je passai ces quatre jours à Rupelmonde. La

famille Van Heukelom y était logée avec Madlle

C. Lange jeune personne très aimable. Le tems

était superbe et le ciel sans aucun nuage tandis

que le soleil sans nous accabler de ses rayons,

en les lançant plus obliquement embellissait

les objets d'une aimable lumière. Nous fîmes

vendredi un tour à Ter Aa et Breukelen. Samedi

à Vreelandt et Dimanche à Sterrenschans. Le reste

du tems fut employé à divers exercises. Nous fîmes

une excursion dans le bateau qui était a moitié

rempli d'eau et nous nous exerçâmes a ramer les

yeux fermés. Les arbres fruitiers enchantaient

nos yeux pas le nombre de leurs fruits.

Le poisson dont on avait retiré environ f 1000 en le

montrant aux curieux a été revendu pour f 600.

Des professeurs de Leyde sont venus en ville pour

s'en procurer la possession.

Une Comète a paru dans notre système solaire. Je

la vis le 8. On ne pouvait distinguer qu'une espèce

d'étoile nébuleuse.

On a recommandé aux prédicateurs de prêcher la

soumission à l'empereur en désignant les jours de

8 et[?]15 septembre comme très convenables pour

cette exhortation.

On dit que l'empereur viendra ici le 20 ou 21

de ce courant. Mais d'autres contredisent cette

nouvelle et assurent que son départ a été différé.


pagina: 3

Lundi 9 sept. La Comète fut encore visible.

Nous la vîmes chez mon oncle de Vos par un

télescope ce qui ne produisait pourtant aucun

effet.

Il s'éleva une vive dispute entre J.d.V. et D.D. au sujet

de la prééminence de leurs discours prononcés à

leur sortie de l'école latine. J.d.V. avait choisi le discours

de Sophonisbe à Massinisse et l'autre la plainte

de Niobé. La première était cependant bien

supérieure.

Mardi 10. Je fus faire une visite au pauvre M.

C. Schroder il était tout à fait changé et extré-

mement faible. Le médecin dit qu'il a l'éthésie.

Je fus aussi au Westermarkt et au Botermarkt

où la foule était extrême. Il y avait les jeux accoutumés

des marionettes, des soi-disants Ceylanais mangeant

des poules toutes crues, un rival de Simson, un Ventri-

loque, un théâtre optique, des expériences physiques

le nain S.J. Paap, un enfant de 11 ans qui pesait

des centaines de livres, etc. etc.

Mecredi 11 Sept. Je fus à la loterie dans le Munt

on distribue des billets qui content 2 sous et dont

il y en a 14 et alors on fait tirer une lettre d'un

baquet si c'est une consonne on tire quelque chose

selon eux de la valeur d'un florin, si c'est

une voyelle de la valeur de f 4 et enfin

l'aigle impérial de la valeur de seize

florins. On reçoit des marques qu'on peut échanger

ensuite pour plusieurs effets tels que de la poterie

des tabatières des liqueurs etc. La foule y était

si terrible que c'était avec la plus grande

peine qu'on pouvait se procurer quelques billets.

Le plus souvent on ne tirait rien.

Jeudi le 12 sept.

Je fus avec mon oncle de Clercq chez Mr. Byben

qui donnait dans le Théâtre Allemand de

l'Amstelstraat une représentation de

feux chinois. Il y avait trois cadres l'un à


pagina: 4

côté de l'autre. Le plus grand était de 5 pieds et demi.

Il y avait le dessin de plusieurs très belles illumina-

tions, mais la société était peu nombreuse et

en général la représentation triste puisqu'on devait

être dans l'obscurité. Nous vîmes aussi le jeune

homme de 290 [onl.]. Il avait les mains fort petites

mais les jambes étaient des masses de chair.

Samedi 14 sept.

J'avais été invité à Kennemeroord par mon oncle Rahusen.

Je me rendis à ce lieu charmant où je trouvai D. Rahusen

un Mr. Decourt négociant de Dordrecht. Ma cousine

Rahusen Mlle P.C. Ten Cate et M.J. et E. de Clercq. Nous

fîmes après-dîner un tour à Heemstede petit village.

Le chemin menait à travers des prairies et nous

retournâmes par le Agterweg. Ils sont charmans ces

environs de Harlem. Une rivière où des ruisseaux

sont les seules choses qui s'y laissent désirer.

Dimanche 15.

Nous allâmes dans le Hollewagen au bois et

fîmes le tour de la ville. Sur ces buitensingels on

a des vues superbes sur les dunes éclairées par le

soleil. Les Tilleuls dans le bois étaient pour la

plupart déjà privés de leurs feuilles. Nous

nous rendîmes ensuite au Geleerde Man. Le ciel

était serein et ce jour fut presque trop beau pour

le mois de septembre. Nous nous promenâmes

encore dans le bois. Après-dîner nous eûmes encore l'occasion

de voir knuppelen un pauvre chat enfermé dans

un tonneau qu'on devait en faire sortir avec

des morceaux de bois qu'on jète contre le tonneau.

Le tonneau était presque entièrement cassé

mais Messire le chat refusait toujours d'en tirer.

Aussi, Messieurs les paysans manquaient

souvent leur but.

La famille Hartzen vint à Kennemeroord le

soir. Les jeunes gens dansèrent au son de

la flûte de Kees quelquefois remplacée par


pagina: 5

par le clavecin de l'aimable M.R. Tout alla

à merveille. Madlle A.E. Hartzen qui réunit

beaucoup de grâces à une jolie figure dansa

supérieurement bien.

Lundi 16.

Nous fûmes de bonne heure en ville et je

commençai à traduire les lettres à T.E. à N.

Le soir le club fut chez nous. W. de Vos et D.D. firent

une partie de cartes (jassen) en latin. Dylius

paya la glace à la crème qu'il nous devait

en expiation de la sentence inconsidérée sur

les complimens de Masinisse à Sophinisbe.

On ouvrit ce jour sur la bourses une caisse

avec le titre Annonces de la chambre de commerce.

On n'imprime point ces annonces de peur que

l'ennemi n'en aye[?] trop tôt connaissance. O

lepidum caput.

Mardi

Je vis une très belle vente de tableaux chez M.

Croese on y remarquait entr'autres

Une chute d'eau par Ruisdaal

Un très beau paysage par Moucheron le père

Une chasse au sanglier par Snijders et Rubbens

Une Madelaine de Guido

Deux paysages de Hobbema

Deux paysages de Barbius[?]

Un tableau de famille par van der Tempel

Le jeu à la boule par Ostade

La mort de Procris par Mieris

Une armée Romaine triomphante par Van der Ulft

Un cheval par Potter

Un homme lisant devant une fenêtre par où

entre le soleil par Van Strij

Un hyver par Ruisdaal

Un très beau tableau de Wouwerman

représentant le commencement d'une chasse.

Depuis Mardi 17 jusqu'a Vendredi 27.

∙Je fus encore le jeudi au Botermarkt avec C. et S.

Nous vîmes le petit homme de Zandvoort qui

est vraiment curieux, il montait sur un petit


pagina: 6

cheval tirait du pistolet, etc.

Vendredi j'allai à la campagne en barque. La compagnie

était plus nombreuse que divertissante. Excepté

le chuchotement de deux jeunes hommes qui paraissaient

assez fat et le caquet de trois vieilles servantes

on n'entendait guère parler. Aussi sans m'embarasser

de la compagnie je me mis à lire dans les révolutions

de Portugal qui me menèrent jusqu'à la fin du

chemin. Il faisait une pluie terrible. Mon grand Papa

fut fort aise de me voir.

Le lendemain Nous fîmes une petite promenade

et puis un tour en voiture à Maarssen avec Mlle

Lange le tems était fort beau.

Dimanche nous fûmes nous promener à Vreelandt.

Mr Wip avec son épouse et son fils

dînèrent chez nous. Ce fils qui a été en pension à

Elburg, est maintenant au Bureau du maire,

le garçon est vif enjoué et avait beaucoup gagné

dans l'espace de quelques années que nous ne

nous étions pas vus.

Cependant tout retentit de la nouvelle intéressante

que S.M. I. et A[?] se rendraient dans la bonne ville

d'Amsterdam. Une publication du Maire servit à

y préparer les esprits. Aussitôt les villages furent

aussi en mouvement à Ouwerkerk il y a un

arc de triomphe. À Abkou on en érige 3 et

Loenen et le district de Mijnden s'empressent

à en élever un.

Je placerai ici quelques détails en égard aux prépa-

ratifs qu'on fait à Amsterdam ils vont jusqu'au

27.

Le commissaire de police a fait défendre toutes les

petites boutiques brouettes etc. qui couvraient

les places publ. où obstruaient le passage dans les

rues. Le panorama doit être abattu. Plusieurs

des plus belles maisons d'Amsterdam ont été

mises en réquisition pour recevoir des comtes, des

ducs, des dames, etc. On augmente le nombre des

gardes d'honneurs à pied et à cheval. On prépare des

illuminations sur le Hooge Sluis sur le pont près

du Brouwersgracht. Il y a un arc de triomphe

dans le reguliers Breestraat la fontaine du bonheur

placée sur le Heeremarkt sera posée sur le

Nieuwmarkt.


pagina: 7

Vendredi 4 Octobre. Les préparatifs continuent

encore. Tous les jours on diffère d'un jour l'arrivée de

l'Empereur et cette arrivée premièrement fixée à

Mercredi ensuite à Vendre ou Samedi aura lieu selon

l'opinion Dimanche ou Lundi. Mercredi nous eûmes

chez nous les deux Mess. Walré le lieutenant et le sourd

nous nous amusâmes fort bien, ils dînèrent ici avec

Kramerus et demeurèrent fort tard.

Sur le brouwersgracht il y a un temple au milieu

duquel s'élève une fontaine. C'est une très belle pièce.

Sur le pont du Hartestraat il y a un trophée

où l'on voit les canons et un caducée.

Sur le pont du Leidsche Gracht il y a un trophée avec

les attributs de Neptune.

Sur le spiegelstraat il y a une belle étoile.

À la fin du Keizersgracht il y a une belle fontaine.

Sur le pont des amoureux il y a trois colonnes sur

la plus grande on avait une statue pédestre. Entre

ces colonnes a disposé des arches ce que fera un bel

effet tant à l'occasion des illuminations qu'à l'occasion

du feu d'Artifice qui aura lieu à cette place.

Dans le Plantages il y a une grand arc de triomphe

où il y a en haute l'inscription

Ceasari augusto invicto post bella in Italia

Hyspania Germania Egypto Lusitania feliciter gesta

post innumera proelia et victorias marisque

libertati fere confecta Amstelodamum tertium

caput Imperii intrante senatus populus que

d.d.d.

Un peu plus au dessous on voit les 5 traités de paix

qu'il fit concluré[?]

Paix de Luneville

Amiens

Presbourg

Tilsit

Vienne

et sur les deux colonnes ses principales batailles

avec les années

Bataille d'Arcole Bataille de Jena
des Pyramides Eylau
de Marengo Friedland
Austerlitz Wagram

pagina: 8

Sur le Muider et Amstelstraat les habitans

ont placés devant leurs maisons des paliers qu'ils

ont couverts de feuilles de buis ou du sapin. Ceci

produit un spectacle fort singulier. Devant l'église

des Juifs portugais on voit une arche.

Sur le reguliers Breestraat on voit un second arc

de Triomphe où l'on a représenté sur les deux

colonnes, des figures [onl.] soutenant un

trophée. En haut on lit l'inscription suivante

Imperium sacrum genium Napoleontis primi

imperatoris pacificatoris ovantes triumphantis

omnes heroes antiquitatis medii aevi et nostrorum

temporum superantis artium et scientarium protectoris

musa vetat mori.

Aux deux cotés de cet arc ainsi que de celui du plantage

on a érigé des échafaudages propres à servir d'orchestre.

À la bourse il y a une décoration qui entoure la statue du Mercure.

Sur le Doelensluis on voit une décoration

qui représente le derrière d'un vaisseau.

Sur le Leliesluis on voit deux palmiers et au milieu

les chiffres de leurs Majestés.

Devant Felix où la ville donnera une fête à sa majesté

on a élargi le canal d'une vingtaine de pieds.

Plusieurs propriétaires de maisons ou de chambres

sur la route de S.M. on eu l'occasion de les louer pour

le jour de l'entrée à des prix considérables.

Mardi 8 octobre 1811

Puisque il n'était pas probable que S.M. viendrait avant

Lundi j'allai encore avec mon grandpère à Rupelmonde.

La fontaine placée sur le Heeremarkt a

été transportée sur le Nieuwmarkt. Le Panorama

a été démoli et tout se prépare à l'arrivée de S.M.

Sur le chemin du Nieuwersluis s'élevaient encore

de nouveaux arcs de triomphe et des festons de verdure

et de fleurs couronnaient les maisons situées sur

son passage. Malheureusement ces ornemens étaient

pour la plupart flétris et au lieu de l'image de


pagina: 9

la joie n'offraient que l'image de la destruction.

Au Nieuwersluis et même dans notre résidence

s'élevaient des décorations de fleurs. Cependant la très

prudente administration de cette contrée qui

craignait que la couleur de quelques fleurs rappelle

aux Hollandais ce nom d'orange jadis si cher à une

grande partie de la nation ordonna qu'on ôtât

indistinctement toute fleur de la couleur jaune

et les préposés qui annoncèrent cet ordre remplirent

dignement leur ministère en exerçant eux-mêmes

sans miséricorde la sentence prononcée contre ces fleurs.

Nous apprîmes Dimanche au soir que l'empereur

était arrivé le jour-là à Utrecht avec son

épouse que devant son palais il était monté à

cheval pour faire un tour par la ville que non

seulement il avait reçu les placets qu'on lui

présentait, mais qu'il avait montré la plus

grande affabilité envers le peuple qui l'entourait

et qu'il avait défendu à ses soldats de l'écarter.

En revenant dans la ville nous apprîmes qu'on

avait donné l'ordre à toutes les personnes qui

demeuraient dans la ville sur la route de l'empereur eussent

soin de se pourvoir du pavillon français et de se

préparer à voir leur maison ornées de verdure

par des préposés de la mairie. Ceci a eu lieu en effet.

On a commencé hier dans le Kalverstraat il y avait

une foule de monde innombrable. Des troupes de gens munis de branches de chênes

se frayaient une voie et attachaient les

dépouilles des forêts sur les palais de briques.

Les branches disposées en guirlande reposaient sur

des guirlandes de toile rouge blanche ou bleue

ce qui forme un très joli effet. Ceux qui avaient

osé, se fiant à leur propre goût prendre eux-

mêmes le soin d'embellir leurs maisons

virent ces ornemens irréguliers déchirés impitoyable-

ment, et furent réduits à voir leurs fenêtres ornées

de la même manière que celles de leurs voisins

qu'ils avaient voulu surpasser.

Talma a amené avec lui M. Damas Mlle. Duchesnois

et Mlle. Bourgoing. Ces quatre artistes ont déjà


pagina: 10

∙quelques représentations et Talma surtout

remplit tous les spectateurs d'admiration. Le

théâtre peut à peine contenir la foule des curieux.

∙Hier nous fûmes au jour de famille où nous avons

bien ri. Le médecin a conté nombre d'histoires

qui tous ont été impitoyablement interrompus

par son cruel Aristarque.

Il fait une grande chaleur pour le mois d'Octobre mais

les

chemins sont insupportables puisque le sable dont

on a partout couvert les rues s'est couverté en

une épaisse boue.

idem

On raconte comme une chose certaine que S.M.

viendra demain. Les gardes d'honneur ont reçu l'ordre

de se rendre à dix heures à la bourse. Le Kalverstraat

était encore plus brillant que hier puisque à chaque

maison on avait attaché un pavillon. Ceci a eu

lieu jusqu'au Plantage. Une foule de gens de

tout sexe de tout âge et de toute classe s'y précipitaient

en foule. Dans toute la ville il règne une confusion

extrême. Là vous voyez des piétons, et surtout

des gens du peuple contempler tout dans une admiration

muette (bouche close à cause de la Police) là on voit

des carosses et des équipages brillans remplis de

femmes et d'enfants se succéder. Là l'on voit

des gens s'avancer en portant sur leurs

épaules de longues palissades qui doivent servir à

composer une barrière qui défende l'enclos

du perron des importunités des passans là des

gens tout couverts de verdure fendent la foule

d'un pas précipité. Là des juifs vont criant

des guirlandes de feuilles à trois sous l'aune. Là

des hommes grimpent en haut pour attacher

les guirlandes tandis que les tranquiles habitans

tout ébahis regardent ce beau ménage. On entend Toullard[?]

toutes les personnes qui se rencontrent s'adresser ces deux

questions Savez vous quelque chose de nouveau? Quand

vient l'empereur et cette arrivée qu'on regardait il

y a quelques semaines plutôt comme un sujet de douleur

que d'allégresse et dont personne ne se souciait occupe

maintenant le public de plus vieux au plus jeune. O Tempora.


pagina: 11

Sur les grands marchés on établira des

loteries de vivres dont les pauvres gens reçoivent

des billets gratis. On en distribue à chaque communauté.

M. Talma a été engagé par l'administration du théâtre

français.

Le tirage de la conscription a eu lieu. Plusieurs

connaissances tombaient dans les termes.

Samedi passé on a célébré les noces de A. de Clercq

et Mr. Brand. Elles ont été très brillantes. Le

frère de la fiancée a donné un très beau feu

d'artifice.

J'ai vu hier au spectacle Français la Métromanie

pièce qui m'a singulièrement amusée. M. Morel

dans le rôle de Francalien et Mr. Garnier dans

celui de Danis n'ont laissé rien à désirer. Cette

pièce en vérité est charmante.

On donnait aussi Le retour du croix ou le portrait

mystérieuse farce où l'on parodiait les sublimes

mélodrames aux aventures incroyables et aux

belles sentences. C'était fort gai mais selon

la gaieté des Français qui dégénère vite dans le

genre équivoque ou profane.

Lundi 30. On a continué avec ardeur les prépara-

tifs pour l'arrivée de S.M. On a arrosé de sable

les routes qui mènent au palais pour faciliter

les couriers. On continue à démolir tout ce que

peut offusquer le passage.

Samedi. Je suis allé avec Kramerus et ma cousine

P.C. Ten Cate à Rupelmonde. Il faisait un tems affreux et dans

la voiture même on n'était pas à l'abri. Nous nous

amusâmes à divers jeux. Dimanche matin nous

fîmes un tour de promenade à Maarssen et fîmes

une visite à Mr. P. Bronkhorst qui s'offrit à nous dans

le costume le plus singulier. Il nous lut une

lettre de sa chère épouse dont la lecture pensa

nous faire crever à force de retenir nos ris, tant à

cause du bel organe et de la belle manière de lire du

lecteur qu'à cause du stile de la lettre. Il nous

fit voir ensuite sa campagne grande de

trois arpens qui était assez jolie. Ensuite il nous

régala sur la vue d'un cochon gras.


pagina: 12

Dans tous les villages il y avait des marques

publiques de la joie des rustiques habitans. Plusieurs

arcs de triomphe décoraient le chemin. Le premier

était au premier Tolhek. On y lisait ces mots

Napoleon le grand

Héros de l'univers

Un second était a l'entrée d'Abcou il y avait ici

à Napoleon le grand

Il y avait dans Abkou un troisième qui n'étaient

pas encore achevé.

À Baambrug et À Loendersloot on en voyait pareille-

ment. À Baambrug il y avait À l'empereur et l'impératrice.

Entre Baambrug et Loendersloot on avait d'après

l'instruction du maire érigé devant les campagnes

et les maisons des paysans des petites portes de

verdure et de fleurs ce qui présentait un coup

d'oeil assez joli.

À Loenen l'arc de triomphe était fort beau. Il était

de deux colonnes autour desquels rampaient

des guirlandes. Des jeunes filles de Loenen complimenteront l'Impératrice.

L'arc de triomphe à Mijnden avait été installé et

décoré par douze jeune filles de Nieuwersluis avec

une gaîté villageoise.

Breukelen avait son arc de triomphe avec inscription

latine.

Maarssen en avait trois. Le premier portait

cette inscription

Spes magna pacis dum numina sancta precamur.

Un second était dédié a l'Impératrice et au Roi de Rome.

Il arrive ici de jour en jour de nouveaux personnages

appartenans à la suite de l'empereur. Le duc de

Bassano est logé chez Mr. Hope et le duc de Castiglione

chez Mr. Bakker.

La police continue à faire des règlemens pour empêcher

toute confusion. On a défendu de se promener en

carosse pendant les fêtes ou illuminations.

Les comédiens sont déjà arrivés ici.

On ne sait si S.M. arrivera dans sa bonne ville

demain ou Mecredi. Le prince de Plaisance est

allé à sa rencontre.


pagina: 13

Mercredi

Octobre 1811

Enfin vint ce jour si longtems attendu où l'empe-

reur des Français devait faire son entrée dans

la troisième ville de son empire. Le tems était beau

et tout le monde s'empressait de se rendre aux

lieux où il pourrait voir la procession. À onze

heures environ nous nous rendîmes à la maison

où J. Walré occupait deux chambres dont une donne

sur la rue. Cette maison était

située entre le Heilige weg et le Munt dans le

Kalverstraat. Le Kalverstraat était occupé par les

bourgeois de la garde nationale situés cependant

à une assez grande distance les uns des autres.

Fenêtres perrons tout était rempli d'une foule

innombrable de curieux qui les yeux éhabis

attendaient peut-être dans une indifférence parfaite

le passage de leur maître. Et c'était les mêmes Hollan-

dais qui - mais pourquoi rappeler des faits glorieux-

c'étaient les mêmes hollandais qui avaient applaudi

au prince d'orange qui avaient dansé la carmagnole

sur le Dam qui avaient consenti à l'élévation

de Schimmelpenninck, qui avaient crié le vive

le roi, et maintenant vive l'empereur. Tel a toujours

été le peuple tel il sera toujours. Et on voulait faire

il y a peu d'années de cette multitude un corps plein de patriotisme

de vertu d'honneur!!! Mais c'est assez nous arrêter

à ce sujet et je crois que pour la plupart des gens

la curiosité était le principal attrait. C'était mon cas. Je voulais

voir l'homme qui de simple particulier s'était élevé

au trône le plus puissant de l'Europe le vainqueur

de l'Egypte et d'Austerlitz et de Jena. À deux heures

et demi on vit arriver premièrement des lanciers de la garde

à cheval. Leur uniforme était rouge, ils portaient

des très beaux casques et des lances, à l'un des bouts desquels

était attaché un petit pavillon. Suivait un

corps de lanciers en uniforme bleu sur des chevaux

blancs. Ensuite quelques curassiers[?] à cheval. Puis trois

carosses attelés de 6 chevaux avec des dames

de la cour et le carosse de l'impératrice attelé de

8 chevaux qui était très grand et très brillant avec

plusieurs glaces (se qui a donné peut-être

naissance à l'histoire du carosse de crystal). Elle

était richement habillée et avait le visage couvert


pagina: 14

d'un voile. Après cela venait encore carosses

et une grande multitude de curassiers à cheval

en uniforme bleu au blanc. Telle était la suite

de l'impératrice.

Après cela venait la garde d'honneur à cheval en

habit vert et culotte rouge. Ce corps était très beau.

Suivaient encore des curassiers et enfin plusieurs

chefs et généraux à cheval parmi lesquels était

l'empereur. Assis sur un cheval blanc en habit

bleu avec une écharpe rouge et un chapeaux tout

simple ce qui le faisait surtout reconnaître.

Il était fort gros et un peu courbé. Il

était fort gracieux et saluait à droite et à

gauche. Après cela venaient neuf carosses accom-

pagnés de chasseurs où étaient le préfet et

d'autres personnages de distinction.

Enfin venaient les gardes d'honneur à pied et

les mariniers suivis des gendarmes. Une file d'une

trentaine de carosses fermait la marche. C'était

eux qui contenaient les membres du tribunal

de première instance du conseil d'État etc.

Le passage de tout cela avait duré environ trois quarts d'heure.

Jeudi le 10 octobre 1811

Une illumination a eu lieu hier. Elle était fort

simple aucun des édifices ni décorations publiques

était illuminée. Tout cela était réservé pour la

grande illumination qui aura lieu aujourd'hui. Les

garde d'honneurs à pied font le service devant le palais.

Le Dam a été décoré de la même manière que le Kalverstraat.

Ce matin l'empereur a été au chantier. Il y est allé en barque.

Après son retour l'impératrice fit le même trajet.

J'étais alors au marché de grains. Il se répand une rumeur

que des barques chargées de grands personnages s'approchent.

Tout le monde se précipite vers la balustrade. On vit

arriver alors une chaloupe décorée de l'aigle impérial mise

en mouvement par 8 à 10 rameurs de la garde impériale.

L'impératrice y était avec trois ou quatre de ses dames.

Elle était mise fort simplement. Le concours du monde

était fort grand tant sur les ponts que sur les bateaux,

situés dans le Damrak. On entendait crier Vive

l'impératrice ou plutôt un bruit confus et sourd. Je

ne puis nier que de pareilles scènes ne produisent

sur mon esprit une forte émotion. J'aime tout


pagina: 15

ce que impose tout ce que se fait en public avec

solemnité et mon plus grand plaisir serait de

pouvoir me transplanter sur les places publiques

d'Athènes ou de Rome, lorsque l'admiration suivait

le héros du jour qui avait sauvé sa patrie où le

poète qui la célébrait dignement. Cependant ces

cris m'affectèrent d'un sentiment douloureux. Lors

qu'on pense que sur cette même place s'embarquèrent

les magistrats catholiques et les religieux lors

de la révolution dans le 16me siècle quand la ville

fut livrée à Guillaume 1er que ce même Dam vit

successivement tant d'illustres princes qui tous

sont engloutis dans la nuit du tombeau

et que maintenant un Corse, ennemi du commerce

qui faisait fleurir cette ville règne sur ces lieux

affranchis pas nos aïeux. Alors mais pourquoi

parler de nos aïeux. Laissez cela aux enfans

qui peuvent à la bonne heure

cueillir quelques notions de notre histoire dans

les écoles. Mais un homme d'esprit ne peut plus

s'arrêter à pareilles choses. Nous sommes français

et même on a défendu de mettre dans un vers latin

batava juventus. L'empereur même a déclaré

au maire qu'il ne pouvait pas comprendre de

quoi nous nous plaignons que nos villages étaient

florissans qu'on voyait bien autre chose en

France. Ainsi c'était nous reprocher le peu que

nous avions conservé après tout de tribut et d'impôts

c'était nous reprocher notre activité qui tâche

encore de réparer faiblement les maux qui

nous accablent. Il disait qu'il avait levé deux

conscriptions dans une année, qu'il en lèverait

encore plus que si nous voulions partager les

prérogatives de la France nous en devions aussi

partager les fardeaux. Ainsi quand nos villes et

nos fertiles campagnes et villages seront chargées

en déserts quand on n'y verra plus que des

femmes, des vieillards décrépits et des hommes


pagina: 16

incapables de travailler. Quand peut-être faute

de bras pour pourvoir à notre défense la mer

aura repris son empire et roulera ses vagues dans

les rues d'Amsterdam c'est alors que nous serons

français. Mais c'est assez approfondir ce sujet.

Une particularité remarquable c'est que une

heure avant le passage de l'empereur on vit passer

un cortège de prisonniers espagnols qui

étaient presque sans habits et dans la plus

profonde misère. Cela aurait dû servir à montrer

les fruits de la victoire.

Il y a eu sur le Kadijk un incendie qui a consumé trois

maisons. Cette aventure dans tout autre

tems aurait fait beaucoup de bruit et bien on

n'en parle[?] la[?]. L'empereur est le seul sujet des discours

d'une ville entière.

Vendredi le 11 octobre 1811

Hier enfin a eu lieu l'illumination générale. Le tems était

très beau. Une foule de peuple remplissait les rues.

Le petit temple sur le pont du Brouwersgracht est

une des choses les plus jolies que j'aie vues. Nous vîmes les

grandes illuminations suivantes

Le temple du pont du Brouwersgracht

L'illumination du prince

L'illumination du maire

Les deux palmiers sur le pont du Leliegracht

Le bureau de poste qui était très joliment décoré

La bourse qui faisait aussi un très joli effet

L'hôtel de la mairie

Le vaisseau sur le Doelesluis

L'illumination du préfet dans le Doelestraat

Les belles colonnes sur le pont des amoureux

La fontaine située à la fin du Keizersgracht

L'arc de triomphe dans le Reguliers Breestraat

Une étoile située sur le pont du reguliersgracht

Une pareille sur le pont du Spiegelstraat sur le Keizersgracht

Un temple pareil à celui du Brouwersgracht sur le pont

du Koningsplein

Une trophée sur le pont du Keizersgracht sur le Leidsche gracht

Une décoration sur le pont du Wolvestraat sur le Heeregracht

Une gloire sur le pont du Hartestraat sur le Keizersgracht

Une décoration sur le pont près du Houtmarkt


pagina: 17

Nous ne pûmes arriver dans le Plantage à cause de

la presse terrible de manière qu'on était presque écrasé.

On dit que l'Empereur a traversé

les canaux dans un yacht le soir de l'illumination.

Quant aux illuminations particulières elles étaient comme

à l'ordinaire pour la plupart une simple latte avec quelques lampions.

Cependant quelques-uns pour fêter ce grand jour avaient

mis un double rang ou avaient bordé leurs fenêtres.

Quelques maisons de grands personnages étaient décorées

plus magnifiquement.

Ce matin encore j'ai vu l'empereur passer en barque dans

le Damrak. Une foule terrible obsédait les ponts et les

bateaux.

Samedi 11 Octobre 1811

Hier après être revenu du marché j'étais occupé

à lire dans l'antichambre quand tout à coup un cri confus

se lève. Je m'élance sur la rue et bientôt j'apperçois[?] l'empereur

qui traversait en bateau le Keizers et Heerengracht.

Je pus alors fort bien le distinguer. Il avait un uniforme

vert et regardait par sa lorgnette.

Lundi 13 Octobre 1811

Samedi je fus au spectacle on donnait Iphigénie en

Aulide. Après la petite pièce on attendit quelque tems

et tout à coup on annonce l'empereur. Il vint avec

son épouse et tous deux se tinrent un moment debout et

firent leur révérence au peuple. L'empereur s'était

habillé comme à l'ordinaire mais l'impératrice était

fort richement vêtue et avait un diadème de diamans.

À leur arrivée commencèrent les cris. Il faut cependant

avouer que quelques français présens au spectacle

avaient bien le haut ton. La salle était décorée

de bougies et on avait distribué parmi les spectateurs

des branches de laurier. L'Imp. sans être belle a un

air de jeunesse et un visage assez agréable elle est

longue et pâle. À peine L.M. furent elles arrivées qu'on

leva la toile. Elles se retirèrent à la fin du quatrième

acte. La pièce m'enchanta car quelle jouissance d'entendre

les vers de Racine déclamés par Talma. Cet acteur

ravit tous ceux qui le voient par sa voix claire et sonore

son appareil majestueux. Enfin on ne pouvait

voir en lui qu'Achille surtout dans la scène


pagina: 18

avec Agamemnon lorsqu'il met la main à

son épée et à la scène du 5me acte où il quitte Iphigénie.

C'est l'Achille d'Homere Madll. Duchesnois a deployé

beaucoup de talent dans Clytemnestre quoi qu'elle ne

puisse être comparée à Madm. Wattier. Elle crie trop

et n'a pas assez de noblesse. Cependant lorsqu'après

avoir foudroyé Agamemnon par ce terrible morceau

vous ne démentez point une race funeste

et lorsqu'elle se jète sur sa fille et l'ammène avec

elle ou lorsqu'elle se jète aux genoux d'Achille

alors on ne peut qu'admirer.

Mll. Bourgoing a bien rempli le rôle d'Iphigénie ce rôle

doux et charmant qui doit toujours intéresser.

M. Garner et Lagardère ainsi que les autres acteurs

qui remplissaient les autres rôles ont fait leur mieux

cependant l'on reconnaissait toujours les acteurs

du drame ou de la comédie.

Hier on allumerait enfin le fameux feu d'artifice

sur lequel on a débité tant de contes et de mensonges.

À entendre parler les gens il n'aurait produit que

le petit effet de faire sauter en l'air le Hoogesluis

entier. Il paraît cependant que la grande pièce que

quelques-uns évaluent à 1500 Livres de poudre à canon

a été défendue par l'empereur. Nous allâmes chez mon

cousin Kops. Nous n'avions cru nous trouver là en

famille mais nous fûmes bien etonnés de

voir arriver bientôt une foule de personnes

de toute espèce et dont le nombre [onl.] monta

bientôt à une cinquantaine. Cependant nous

attendîmes en vain le feu d'artifice et après avoir

été debout dans l'attente pendant quelques heures.

Nous retournâmes enfin avec la triste consolation

que ceux qui avaient du attendre le feu d'artifice

dans le mauvais tems (car il faisait un

vent affreux) avaient été bien plus mal partagés

que nous.

Hier la distribution des vivres par loterie aux

pauvres gens a eu lieu. Cependant les prix étaient

comme 1 à 4.


pagina: 19

Mardi 15 do.

Il est difficile de croire tous les discours qu'on attribue

à l'Empereur. L'un raconte ceci, l'autre cela. Nous allons

passer quelques anecdotes concernant son séjour ici.

Mr. Schim lui ayant dit que puisque ses mesures défendaient

le commerce extérieur il facilitait du moins celui de

l'intérieur. Il répondit Monsieur j'entre parfaitement dans

vos principes. Il fut invité à dîner chez l'empereur

avec le Prince et deux autres seulement et leur

conversation fut fort longue et fort animée.

À Utrecht parlant avec quelqu'un qui était

issu des fugitifs lors de l'édit de Nantes il dit à un prêtre

catholique qui assistait à cette audience "Voilà votre

ouvrage.

Ayant éternué lors de son entrée à Amsterdam un

garçon lui dit Dieu vous bénisse. Quelques jours après

il fit appeler ce garçon lui donna 5 Napoleons et offrit

de l'admettre dans une de ses écoles militaire.

Voyant Mr. Krayenhof exministre de guerre. Il dit:

Quoi l'on ose me présenter un tel homme Monsieur vous

avez bien mal conseillé mon frère. Il répondit Sire

je le lui conseillerais encore jusqu'à la fin de ma vie.

L'Empereur parut interdit et Kr. ayant continué Mais Votre

Majesté connait son frère. S.M. répondit Je connais

mon frère et je connais aussi ceux qui l'ont conseillé et

lui tourna brusquement le dos.

Parlant avec Me. Braunsberg du jeu il ditMadame

vous êtes femme d'un négociant ainsi vous jouerez

certainement gros jeu. Elle répondit Pas à présent sire.

On rapporte qu'il a dit en parlant de son frèreMon

frère est un fou et qu'il a adressé aux envoyés

des Juifs ce compliment mignon Je vous déteste.

Nous fûmes hier au jour de famille. Je lus

un vers que j'avais fait sur la mauvaise réussite

du feu d'artifice et qui fit beaucoup rire. Mon grand

père était terriblement verbeux.

L'empereur est parti ce matin pour den Helder.

On dit que l'amiral de Winter lui a préparé

là une fête choisie.


pagina: 20

Mecredi 16. Puisque le départ de S.M. l'Empereur

pour De Helder ne nous fournit plus l'occasion de parler

de fêtes ou de préparatifs je vais noter ici quelques

anecdotes relatives à son séjour ici.

S.M. est arrivé à Zaandam accompagné seulement de l'imp.

de la duchesse de Montebelle avec ses enfans de deux grenadiers

et de quelques autres pages et personnages de sa suite. Le

signal qui annoncerait son arrivée avait manqué. À

peine sut en son arrivée. Les deux maires n'étaient pas

prêts et à peine lui a t-on fait voir la maison du

Czar Pierre. Alors sont venues encore quelques jeunes

filles qui devaient présenter un bouquet mais qui

n'ayant pas eu le tems vinrent dans leur costume

ordinaire et firent leur compliment. L'Empereur cependant

riait à gorge déployée et en fut fort content et même dit

tout haut Il faudrait donner une dot à cette fille.

Mais personne ne répliqua et les jeunes filles se retirèrent.

Enfin voyant que personne ne se souciait d'eux l'empereur

dit à sa suite Messieurs le tems se couvre embarquons nous.

Il attrapa encore une vieille femme à qui il fit ôter

son bonnet pour voir sa coiffure. Enfin ils s'embarquèrent

dans un yacht que l'empereur acheta tout de suite

et donna en cadeau selon les uns au batelier et

selon les autres à celui qui l'occupait ce jour le gouvernail

l'ayant emprunté à l'un de ses amis. Le grenadier

qui avait accompagné l'empereur à cette expédition et

qui raconte ces particularités disait qu'il n'avait jamais

vu l'empereur en si bonne humeure qu'en ce pays-ci.

D'autres personnes assurent la même chose.

L'Impératrice a été hier encore en bateau et fera

aujourd'hui une pareille expédition.

Les gardes d'honneurs ont eu l'honneur de garder le

palais. Les Français ont dit que cet honneur n'avait prèsque

été accordé à aucun corps de gardes d'honneurs pas même

à ceux de Paris cependant je crois que le nôtres s'en

seraient fort bien passés. Plusieurs sont déjà malades

puisque à leur garde de nuit ils n'osent avoir

ni redingotte ni manteau. Un d'eux s'étant endormi

il s'écria à demi réveillé Qui vit - La Garde - Arrêtez.

Monsieur on n'arrête pas la garde.

Snoek a joué très bien Hamlet la semaine passée. Talma

s'étant rendu chez lui, lui dit qu'il n'avait jamais vu

si bien remplir ce rôle.


pagina: 21

Jeudi 17 Octobre 1811 Hier nous vîmes

encore l'impératrice en bateau. Elle a été avant

hier à Broeck. Sans être belle, elle a cependant un

air de fraîcheur et de jeunesse.

Étant à table nous fûmes abordés par mon grand Oncle

de Vos qui venait me prendre pour aller au théâtre

hollandais. Je n'y résistai pas. On donnait Omasis

ou Josef en Egypte traduit du Français de Baour

Lormian par M. Westerman. Cette pièce est assez bonne

il y a des morceaux pathétiques. Snoeck jouait le

rôle d'Omasis Jelgershuis Simeon,

Rombach Rhamnes Madle. Greveling Almais,

Westerman Jacob Mlle. Kamphuisen Benjamin.

Ce sont surtout les deux derniers actes qui raniment

le vigueur de l'action qui languit un peu dans

les trois premiers. Le caractère d'Omasis est bien soutenu

celui de Simeon est peut-être un peu outré. La

mauvaise déclamation des acteurs Hollandais

me frappa surtout ce soir puisqu'il n'y avait que

quelques jours que je venais d'entendre Talma. L'oncle

nous fit rire durant la représentation par les excla-

mations brusques que le jeu des acteurs ou les

circonstances de la pièce lui arrachaient quelque-

fois.

Nous vîmes après une pièce intituléeLes arts re-

conduits par Mars sur le Parnasse à l'occasion de l'entrée de S.M. par M. van Ray.

Ce van ray est auteur de quelques petites comédies, il participe

à la censure des livres et n'a pas rougi de faire défendre

l'impression du 3me volume des poésies de Helmers qui

contenait un poème sur la grandeur de la

Hollande. Il est d'une très basse extraction

car sa mère fut une femme publique. Cette pièce

était digne de son auteur car le contenu en était

difficile à comprendre. C'était une mélange de

pantomine de danse de déclamation et de chant.

Snoeck était Apollo, Mme. Wattier Melpomene et

Majofsky Jupiter, mais leurs rôles

réunis ne fournaient pas plus d'une trentaine de

mauvais vers. Cependant le courier assure qu'ils

se sont surpassés eux-mêmes dans cette pièce.

Une pareille en français intitulée les chanteurs

de Sardam a été jouée par les artistes français


pagina: 22

n'a pas mieux réussie. L'auteur en était M. Chaset auteur de quelques vaudevilles.

Celui-ci était déjà en habit galonné derrière les

coulisses pour se montrer quand on demanderait l'auteur.

Mais il n'a pas eu ce plaisir. Il paraît qu'il a été

loué pour faire ici des vers pour S.M. car il est l'auteur

de la misérable traduction d'une misérable pièce

Hollandaise où on fait parler le palais et d'une

épigramme ou petit conte intitulé le Tapis à l'enchère

qui ne vaut pas mieux. Les poètes Hollandais n'ont

point encore célébré S.M. Helmers s'est éloigné de la ville pour

ne pas voir la bassesse des Hollandais et il est

fort malade. Le médecin Kleinhof a fait

un vers Latin. Parmi la suite de l'empereur se

trouve M. Pair, directeur de la musique de la

chapelle de l'Empereur qu'on dit être un des premiers

componistes de l'Europe.

Vendredi 18 Oct. 1811

Pour diversifier les sujets je rendrai compte ici de

quelques livres lus depuis 1 sept. et je continuerai

avec cette notice.

Wagenaar J'ai enfin fini son volumineux

ouvrage que j'ai lu en entier excepté les deux volumes

qui vont depuis le commencement du règne de Philips

jusqu'à la fin du gouvernement de Leicester

que j'ai lus dans Hooft. Je crois qu'on trouverait

avec peine un historien aussi exact et clair que

Wagenaar. Son stile n'est jamais diffus. Cependant

ce ne sont pas de ses brillantes narrations qui

nous plaisent dans un Titelive ou un Vertot, ou de

ses apperçues de ces pensées judicieuses et de ces morceaux

d'éloquence que nous rencontrons dans Robertson,

Tacite, Hooft ou Salluste. Aussi c'est très rare quand

il en vient jusqu'à faire une remarque et quoique

je n'aime point ces historiens enflammés par l'esprit

du parti cependant des réflexions judicieuses semées

ça et là ne font que rendre plus agréable la lecture

de l'histoire. Il faut aussi avouer qu'il a trop

négligé l'histoire des moeurs des coutumes de

la civilisation des arts et de sciences. On pourrait


pagina: 23

l'accuser d'avoir été peut-être trop exact. Surtout

il est fort prolixe dans les détails des négociations

et des traités. Ce qui est pourtant une des parties les

plus ennuyeuses de l'histoire moderne. L'histoire

depuis l'abdication de Charles 5 jusqu'à la paix

de Nimègue est sans doute l'époque la plus intéressante

de notre histoire. Car après cela jusqu'à la fin

de 1711 nous ne paraissons jamais que dans un rôle

subalterne. On n'entend plus parler d'aucun illustre

marin depuis Ruiter et C. Tromp, d'aucun illustre

général enfin on ne voit plus de ces hommes qui

affrontèrent tous les dangers pour étendre notre

empire ou notre commerce. Cependant l'intérêt

quoique beaucoup moindre se soutient encore jusqu'à

la mort de Guillaume 3 où il baisse encore

car l'histoire de la guerre de la succession d'Espagne

se rapporte presque uniquement à ce que firent

les autres puissances. Il est aussi à remarquer

que tandis que dans les époques précédentes Wagenaar

pouvait puiser d'une foule d'historiens tels que

Hooft, van Meteren, Reyd, Bor, Brand, Strada, Benti-

voglio etc. il ne trouvait ici aucun historien

remarquable. Lamberti soutient encore les

premières années du 18me siècle. Cependant après

la paix d'Utrecht on voit régner une longue paix

et le lecteur se console de l'aridité des détails

par la consolation du bonheur dont on jouit

dans de tems-là. Car les moindres particularités

touchant les traités d'Hanovre et de Séville [onl.]'y sont

traités miniteusement tandis qu'on n'apprend

rien de la situation du pays les [onl.] que lors

de la révolution en 1747 que le récit des faits passés

dans les villes de la Hollande devient de

nouveau intéressant. Cependant on peut dire

que peu de pays ont une histoire si correcte

si véridique et si impartiale.

Quelques traits de la vie de Frederic Guillaume 3

par Dampmartin.

Le Dampmartin auteur de plusieurs ouvrages

historiques a été ici comme émigré et doit être


pagina: 24

un homme d'une vaste Érudition. Cependant on

ne peut disconvenir que l'ouvrage noté ci-dessus ne

porte l'empreinte de la prévention et de l'esprit

de parti. Le style en est diffus et difficile à lire. Frederic

Guillaume y est presque élevé aux cieux et sa

passion pour la comtesse de Lichtenau y est aussi

traitée sous l'aspect le plus favorable.

Mémoires de la princesse Wilhelmine de Prusse.

∙Les mémoires sont fort agréables à lire moins pour

la valeur des faits historiques que pour voir un tableau

vivant des tracasseries et des intrigues de la cour. J'ai

entendu que le Journal de l'Empire en disputât

l'authenticité mais je ne puis comprendre comment

une autre personne serait descendue à des détails

si minutieux. Je n'oserais point en assurer

l'impartialité puisque il est bien difficile de voir

sans prévention des personnes qui vous tiennent

de si près ou des actions qui nous intéressent parti-

culièrement. Il faut pourtant convenir que

c'est un ouvrage fort attachant à lire.

Baur 4de deel

Cet assemblage de biographies a le défaut que ces

vies trop courtes s'effacent les unes les autres et

ne laissent pas d'impression durable dans la mémoire.

Je ne puis pas dire que j'y ai puisé beaucoup de

nouveau excepté pourtant les vies de Clement 14

et Pie 6, qui m'intéressaient fort. L'histoire d'un

enfant prodige, Heineke est très particulière on

y trouve entr'autres les vies de Dubois, Menzikof

Potemkin, Iwan Ankerstorm, Damiens Phebe

Daun, Clerfayt, Boerhave, Oosterdijk.

Hugo de Groot en Reigersbergen par Loosjes.

C'est un ouvrage excellent et après Lijnslager

un des meilleurs ouvrages de cet auteur que je

connaisse. Le caractère de Maria Reigersbergen

surtout est supérieurement bien peint. Il

y a même plusieurs morceaux qu'on pouvait

nommer poétiques.


pagina: 25

Samedi 19 Octobre 1811

L'empereur est revenu Jeudi soir en ville. Les gardes

d'honneur avait eu une peine infinie à la suivre.

La plupart étaient succombés en chemin. L'un avais

la patte de son cheval cassée l'autre était tombé

sous son cheval etc. Il y en avait seulement quatre

qui l'avaient suivi jusqu'à Halfweg mais ce fut

aussi le terme de leurs efforts. Si l'on veut lire des

particularités sur le séjour de S.M. l'Emp. au Helder et

de l'imp. à Harlem on peut lire les gazettes où les

choses sont du moins traitées avec adulation mais

quant à moi puisque je n'écris que pour moi-

même je rougirais trop ensuite de n'avoir pas parlé

le langage du coeur.

Toutes les décorations pour les illuminations étaient

abattues le pauvre Kalverstraat dépouillé de ses festons

et de ses jolis pavillons quand tout à coup le bruit

se répand que l'on est occupé à rebâtir l'arc de

triomphe du Plantage et que S.M. l'empereur d'Autriche

se rendra ici pour rendre une visite a sa fille à

qui l'on dit que notre climat convient merveilleusement.

Le tems seul pourra démontrer la vérité de cette

assertion quoique pour moi j'y ajoute très peu de foi.

Lundi 21 Octobre 1811

Samedi au soir mon papa fut au spectacle. On donnait

Olympie (en holl). À peine la pièce fut elle finie qu'il

s'éleva un cri confus au feu au feu, la consternation

se répand aussitôt dans l'assemblée en un moment le

parterre et les loges sont désertes. Tout fuit

et s'élance vers la porte. Cependant rien n'annonce

un incendie, les acteurs lèvent la toile. Snoeck et

Jelgerhuis avec tous les autres acteurs se montrent

sur la scène pour montrer la fausseté du

bruit mais ils ne peuvent se faire entendre. Enfin

on apprend que ce n'est qu'une fausse allarme commencée

par quelques misérables garçons assis au Paradis. Le

calme renaît et bientôt le théâtre est plus plein

qu'auparavant.

On avait enfin fixé à hier au soir l'époque

où l'on verrait ce fameux feu d'artifice. Nous nous

rendîmes encore chez le cousin Kops, où nous

trouvâmes à peu près les mêmes convives mais

le nombre en étais beaucoup moindre. Je me


pagina: 26

nichai sur le garnier. En effet le feu d'artifice

commença bientôt. Mais à part un superbe bouquet

on ne vit rien de remarquable à moins qu'on

ne veuille compter quelques

fusées lancées de tems en tems. Tout paraît avoir

été gâté par l'humidité. L'empereur avait honoré

ce divertissement de sa présence, et je crois

qu'il en aura été bien mécontent. En effet cela

ne valait pas la millième partie du bruit qu'on

en a fait.

L'empereur a encore donné audience hier. Il était

en très bonne humeur. Lorsqu'on vient à cette audience

on n'a point lui faire un discours mais seulement

répondre aux demandes qu'il daigne vous faire.

À Hoorn on a été fort attrapé. Ces bonnes gens

avaient appropriés pour lui une maison entière

avec une salle d'audience qu'ils avaient décorée soit

par ses portraits soit par des tableaux qui

représentaient ses victoires. La seule chose qu'on

a pu lui persuader a été celle de galopper par la

ville d'un bout à l'autre.

Pour preuve qu'il est bien loin des craintes

que quelques-uns lui ont attribué peut servir

entr'autres qu'à De Helder il est avancé sans escorte seul au

milieu de 3 ou 400 prisonniers espagnols qui

étaient là occupés à travailler.

Passons aux nouvelles littéraires

Haller Alfred Ce livre moitié philosophique moitié

historique et moitié romanesque est un ouvrage

estimable où les avantages d'une monarchie tempérée

sont vivement démontrés. Il contient des particularités

fort intéressantes sur Alfred le grand.

Meissnet Alcibiades 4 vol.

Cet ouvrage qui peint à merveille le caractère

à la fois voluptueux et héroique d'Alcibiade dans un

très beau style est fort intéressant. Il est seulement

à regretter qu'on ne sache pas toujours si tel ou

telle anecdote est tirée des historiens ou de l'imagination

de M. Meisner. Sous cet aspect la derrière partie

l'emporte sans doute sur la première en vraisemblance. Car de


pagina: 27

quelle longueur ne sont pas les dialogues d'

Aspasie avec Glycérion. Il est malheureux que

Socrate ne puisse pas y jouer un plus grand rôle.

Schiller Wallenstein

Je ne sais pas si on ne pourrait nommer cette pièce

une des plus intéressantes de cet auteur. Sans doute

Don Carlos, la Pucelle d'Orléans contiennent

de plus grandes beautés mais cette majesté, cette

terreur qu'inspire ce formidable Wallenstein et

qui n'est ternie que par son irrésolution le beau

caractère de Max Piccolomini la mort cruelle

du héros tout cela attache vivement. Cependant

comme ouvrage dramatique quelle différence y

a-t'il encore avec les chefs d'oeuvre du théâtre français.

Turandot est une petite pièce assez plaisante

tirée des mille et une nuits.

Mackbeth est traduit de Shakespear.

Weisse 1e Theil

Eduard 3 Cette pièce est très froide et paraît être

le commencement de l'auteur. Un jeune prince qui

est toujours de l'avis du dernier qui parle. Une

mère qui presse son fils à faire tuer ses deux oncles

et qui lui fait tuer son père qu'il ne connaît pas

tout cela pour un amant boel offre peu d'agrémens. La

fureur d'Isabelle seule et ses remords sont

énergiques.

Richard 3 Cette pièce est a mon avis meilleure.

La cruauté de Richard et son amour même

ont trembler sa fureur et sa perte satisfont

les specateurs.

Crispus C'est le même sujet de la Phèdre de Racine

mais tandis que celui-ci fait tomber le plus grand

intérêt sur cette femme coupable Weisse ne fait

craindre que pour son Crispus.

L'accusation et la déclaration d'amour sont plus

belles dans Racine puisque Fausta n'est pas une

femme atroce et que son crime peut être excusé

d'autant moins qu'il n'y a pas de question de

la mort de Constantin. Celui-ci aussi au lieu

du voeu de Thesée livre son fils à sa femme qui l'accuse


pagina: 28

ce qui est injuste et cruel. Cependant la fermeté

et l'héroïsme de Crispus qui meurt empoissonné

dans les bras de son ami et de sa maîtresse intéressant

vivement et plus encore que le récit fabuleux de

la mort d'Hippolyte.

Mustapha et Zeangir

Le sujet de cette pièce est intéressant. L'héroique

résignation de Mustapha l'amitié de Zeangir

est très bien décrite. Cependant on voit trop depuis

le commencement que Mustapha doit périr. Le piège

dans lequel le fait tomber Rustan est un peu

trop grossier. Les remords de Soliman sont les remords

d'un tyran et son caractère à ce mélange de férocité

et de défiance est dignement peint. La mort de

Zeangir par laquelle Roxane se voit arraché

le seul fruit de ses crimes termine dignement la pièce.

Hagedorn gedichte 3 Th.

Ce poète est un des plus estimables de ses compatriotes

puisque on y voit partout briller dans ses ouvrages l'honnête homme

et l'ami de la religion.

Le 1e volume contient les poésies morales qui ne

sont pas les moindres et où brille le poème sur

le bonheur et un recueil d'épigrammes, parmi

lesquelles il y en a de très jolies.

Le 2 volume contient des fables et des contes d'après

La Fontaine Bocace et d'autres auteurs inconnus.

On y remarque un style élégant et facile.

Le 3e volume contient des odes pour la plupart galants

ou bacchiques mais parmi lesquelles il y en a de

très belles. Une surtout en l'honneur de Bacchus

m'a plu supérieurement.

Des notes judicieuses prouvent une vaste érudition.

Winterbloemen 1ste deel door Bilderdijk

Depuis longtems l'Ossian Hollandais n'avait rien

produit. Mais les Winterbloemen ne valent pas les Na-

jaarsbladen. Ce n'est pas que Bilderdijk ne reste

toujours Bilderdijk, mais on est las de ces adorations

continuelles d'Homère de ses invectives contre

les étrangers et surtout de ses éternelles jérémiades.

Ce que m'a plu le plus dans ce volume sont

deux imitations d'horace et une épître de

Turnus à Enée.


pagina: 29

Lundi 21 Octobre. S.M. a été hier à Muiden et à

Naarden.

Pour diversifier le sujet je rapporterai un discours entre

le ministre de l'intérieur et Eymer heuker[?] du marchée

de grains. Il m'a paru assez curieux. Il se faisait par

interprète. Mais le voici dans les deux langues.

Mint. Vous êtes négociant d'Amsterdam. Ey. Ja zijn Exc.

M. Combien de grains y a t'il dans la ville. E. Vierduizend

last. M. Est-ce assez. Neen zoo de Keizer van tijd tot tijd

Vriesland, Groningen en Nimwegen vrij laat dan wel.

M. On a déjà exporté de Groningue tant de milliers

de quintaux . Ja maar dat waren vijf soorten van

graanen bij en vooral haver. La liberté d'exportation

ne peut-être donnée depuis Nimègue on en exporte de là

plus au sud. Il faut en chercher au nord. Wat noemt Z.E.

't noorden. La Russie la mer Baltique Depuis Petersbourg

jusqu'à Hambourg. Indien Z.E. ons schepen en zekerheid

kan bezorgen willen wij 't wel haalen. Quelle est

la cause du moins de débit des grains. Eertijds was

het débit 15000 last en nu 3000. Dat komt omdat de

arbeiders geen geld verdienen en omdat de stad vol armoede

is. Zoo ook door de laage prijs der groentens. Ik heb vijf en

twintig raapen voor vier duiten en een grote kool voor

een stuiver kunnen krijgen. Dat komt door de douaniers.

Ik ben onder mijn soort een rijk man geweest. Er

staan drie kisten op mijn kantoor die plagten vol

te zijn nu kan je er wel thee in komen drinken. Men

houdt het geld op andere plaatsen. En de dure vragt.

Ik heb over negenhonderd gulden een acquit van

vier gulden betaald. Et qui retire l'argent de cet

acquit. De Douaniers. Sacre bleu. Mais j'ai moi-même fait acheter

des grains. Ja te Hamburg maar zullen die in magazijnen

gelegd worden. Non vous et tout autre pourrez les

acheter et je compte qu'ils feront baisser la prix des

grains de dix pour cent. Ils seront ici dans cinq

jours. Ja dan zal 't laat worden.

Il reste à rapporter de dimanche que le soir durant

le feu d'artifice les tours furent illuminées par des

flambeaux nommés feux de Bengale qui répandaient

une clarté extrêmement vive ce qui fit croire à

plusieurs personnes qu'il y avait du feu.

Tout le Kalverstraat par où devait passer S.M.

était illuminé.


pagina: 30

Mecredi 23 Octobre 1811 Nous fûmes hier au soir

aux français. On donnait Le Babillard, Iphigénie en Tauride.

Le Babillard est une petite pièce assez jolie où Gargier

jouait très bien.

Dans Iphigénie Talma remplissait le rôle d'Oreste.

Mll. Duchesnois celui d'Iphigénie et Damas celui de

Pylade. Talma répandait sur son

rôle cette mélancolie qui quelquefois se changeait

en fureur et quelque fois dans un morne silence.

C'était dans la première scène du second acte où il vient

enchaîné qu'il fallait le voir lorsqu'il voit l'abyme

ouvert sous ses pas et les serpens siffler autour de

sa tête. Quelle noblesse ne montrait-il pas dans

ses adieux à Pylade et dans cette situation terrible

ou Iphigénie lui rapporte le nom d'Agamemnon.

Damas jouait le rôle de Pylade avec assez de noblesse quoi

qu'il passe trop souvent les bornes du naturel.

Mlle. Duchesnois me plut assez dans le rôle d'Iphi-

génie quoique ses crimes et sa laideur rebutent aux

premiers instans. C'était surtout le 3ème acte

où ces acteurs se sont signalés dans cette scène où

Orestes et Pylade se disputent la mort. Cette tragédie

est très intéressante et on y remarque de très

beaux vers.

En revenant du spectacle nous voulûmes passer

près de Felix car cet édifice était illuminé à l'occasion

de la fête que la ville y donnait à l'empereur. Arrivés

près du huidenstraat nous voulûmes passer de l'autre

coté du Keizersgracht. Mais le passage était barré

par des gendarmes. Nous nous arrêtâmes quand

tout à coup l'empereur qui revenait de Felix

passa. Premièrement l'on voyait des garde d'honneurs à cheval.

Ensuite des carosses accompagnés de houssards et

de pages à cheval portant des flambeaux. Suivaient

encore d'autres voitures et une escorte de

curassiers. Tout cela allait ventre à terre.

Felix était joliment illuminé. Il y avait une décoration

devant cette maison, consistant en un temple surmonté d'un

soleil. Le canal était illuminé par des guirlandes

de lampions qui allaient d'un arbre à l'autre et

par les illuminations particulières.

La foule dans les environs de cette illumination

était innombrable.


pagina: 31

Jeudi 24 Octobre C'est aujourd'hui que leurs majestés

sont parties de cette ville. L'E. à 7 et l'I. à 9 heures. Ils

ont fait cadeau à M. Bakker chef des gardes d'honneurs à cheval

et M. Gulcher chef de ceux à pied à l'un une tabatière

et à l'autre une bague enrichie de brillans. On estime

la valeur de l'un de l'autre de ces présens à 100 ducats.

Hier au soir L.M. ont assisté au spectacle. Les hollandais

donnaient Phèdre.

Les personnages qui ont vu l'E. de près ne peuvent

reconnaître à sa vue le héros vainqueur de l'europe.

Si on ne le savait pas on ne verrait pas là l'Empereur.

Il a donné ici plusieurs décrets qui doivent attester sa bienfai-

sance. C'est seulement dommage qu'il y en a

un qui établisse la régie sur le tabac ce qui prive

ici une infinité de personnes de leur gagne-pain.

Je reviens de Felix et je donnerai ici une courte

description des changemens qu'on a fait à cet

édifice pour l'approprier pour la fête.

Devant l'entrée de la salle du concert on a placé

une alcôve de rideaux bleus avec des bordures en

rouge et jaune. Une lustre y brûla.

La salle du concert est drapée jusqu'à une certaine

hauteur de soie bleue en forme de rideaux. Dans

les intervalles on voit 8 miroirs au dessus

desquels sont attachés des drapeaux. En entrant

on a à droite et à gauche deux orchestres.

Au fond de la salle où était ci-devant l'orchestre

on a placé une estrade de quelques marches. Là

sous un dais rouge on a placé deux sièges pour

leurs majestés. À droite et à gauche de ces sièges

on voit un trophée où on remarque une armure

complète du tems de la chevalerie. Tout ceci

produisait un fort bel effet.

Dans legehoorzaal

on a peint les colonnes et la plus grande partie de

la salle en blanc. Au fond où était la chaire

on a élevé un orchestre peint en blanc et rouge.

Les rideaux sont également de blanc et rouge.

Des lampes sont suspendues. Les murailles sont

peintes d'une couleur bigarrée fort faible. Sur ce

fond on voit de distance en distance des lyres.

Cette chambre a un air encore plus gai que

la salle du concert.


pagina: 32

Il y avait une foule de monde qui

venait voir toutes ces décorations. La fête a fort bien

réussi. Aussi tout était-il arrangé avec goût et

doit avoir été encore bien plus frappant le soir

lorsqu'il était éclairé par cette foule de lumières et

lorsque tant de personnes bien habillées s'y promenaient.

Cependant on convenait que le local était fort

petit. Premièrement on avait eu l'idée de faire

un plancher plus haut qui serait commencé un

peu au dessous de la base des fenêtres. Ceci aurait

été ridicule. Il n'y a point eu de souper mais on

y a présenté toutes les rafraîchissemens possibles.

Mr. Zuilen van Nieveld qui a chanté les couplets a

reçu un collier composé d'un double rang de perles

avec une de ces petites montres que les dames portent

sur leur sein.

Mr. Rendorp colonel de la garde d'honneur et M. Gobius

chef des Mariniers ont reçu parcellement l'un une

tabatière avec le chiffre de l'Empereur, l'autre une

bague.

On a eu moins de facilité à voir l'Impératrice que

l'Empereur puisqu'en sortant elle avait presque

toujours une voile ou du moins un chapeau qui lui

couvrait la figure. Elle paraît être très timide du

moins en présence de l'Empereur. Étant à Harlem

comme parmi les jeunes filles qui lui présentaient

le bouquet il y en avait de fort grosses contrefaites

laides où qui boitaient, elle dit à une des dames

de sa cour que ses demoiselles devraient être un peu façonnées.

Talma joue à soir Mahomet. On dit à ce sujet

que La Rive dit un jour qu'il avait étudié ce rôle de

vingt manières différentes et n'avait pas encore

pu parfaitement y réussir que M. de Voltaire

paraissait avoir eu du plaisir à faire un rôle

propre à désespérer tous ceux qui voudraient

jamais entreprendre de la jouer. On dit aussi

que Talma n'a pas beaucoup de plaisir à

le jouer puisqu'il dit qu'il n'a pas pu encore

y réussir à son gré.


pagina: 33

Vendredi 25 Octobre 1811

Le Maire van Brienen a reçu de S.M. une riche tabatière

decorée du portrait de l'Empereur.

L'Empereur a son départ hier a ditJe viendrai bientôt

vous revoir.

J'ai encore oublié de noter qu'à Felix on avait pratiqué

une sortie de derrière qui passait par l'atelier d'un

charpentier. Tout le monde excepté l'Empereur et

sa suite devait passer par cette partie.

Aujourd'hui hier et avant-hier les gazettes sont rem-

plies de décrets impériaux. Il y en a trois aujourd'hui

qui commandent l'érection d'une maison de force d'un

aqueduc pour conduire de l'eau douce à Amsterdam et

d'une garde de nuit. Tout cela sera payé par les habitans.

Toujours des nouveautés mais non des améliorations.

Samedi 26 Octobre

L'Empereur a donné au Schout bij nagt Vandoren une tabatière

avec son portrait on en estime la valeur à 20000 fr.

Nous parlâmes hier quelqu'un qui revenait de Dantzig.

Il nous dit que cette ville était on ne peut plus malheu-

reuse qu'aucun négociant était presque sur bon pied

et qu'outre le manque du commerce cette ville

surpassait en maux les deux autres villes d'Elbing et

de Konigsberg, puisqu'elle avait en quartier une armée

de 28000 français dont 16000 étaient occupés sans

relâche aux fortifications et rendaient cette ville

une des plus fortes de l'Europe. On y avait en cette

année 10 Licences pour commercer avec l'Anglettere.

Il y avait une grande abondance de grains et d'autres

productions et l'on pouvait placer son argent à de

forts hauts intérêts puisque les Polonais devaient

avoir de l'argent pour le produit de leurs terres. La

vie n'y était pas chère.

À cause d'un décret de l'Empereur sur le payement

des dettes de la ville les actions sont montées en

trois jours depuis 16 jusqu'à 58.

Le départ de l'Empereur a fait rentrer le calme

et le silence dans la ville.

Le seigle était encore monté hier de 6 à 8

florins d'or.


pagina: 34

Littérature

Gallerie interessanter Personen 1 und 2 tln.

durch Schiller 1804.

C'est un ouvrage fort intéressant. On y trouve des

notices succinctes sur des personnes qui se sont distinguées

dans la révolution. Il y en a à la vérité qui sont trop

courtes pour donner une juste idée de ces personnages

mais quelques-unes comme celles de Buonaparte La

Fayette Moreau sont assez détaillées. Celles des anciens

tems sont en trop petit de nombre. Nous donnons ici dessous

une notice des biographies que cet ouvrage contient.

1.

Joseph 2 Empereur d'Autriche 1741-1790 régna 10 ans

Gustave 3 roi de Suède assassiné. 1746-1792 - régna 21 ans

Cathérine 2 Impératrice de Russie 1729-1796 - régna 34 ans

Bonaparte général, premier consul. 1769-...

Reubeel membre du directoire 1746-...

Carnot membre du directoire 1753-...

La Fayette Général Major en Amérique puis Commandant

de Paris, émigré 1757

Bemourier officier de cavalerie, puis commandant en Pologne

lors de la confédération, commandant de Cherbourg enfin

général de l'armée du nord et émigré 1739

Pitt politique Anglais 1759...

Kaunitz ministre en Autriche sous Marie Thérèse 1711-

1794

Herzberg premier ministre de Frédéric le grand 1725-1795

Potemkin Général en chef sous Cathérine 2. 1736-1791.

Loudon Feld-maréchal des Autrichiens vainqueur à

Kennersdorf, général distingué contre Frédéric 2 et contre

les Turcs 1716-1790

Mirabeau orateur révolutionnaire membre de l'as-

semblée nationale 1749-1791

Robespierre tyran révolutionnaire terroriste 1759-1794

Danton Terroriste, guillotiné 1759-1794

Marat tyran révolutionnaire assassiné 1743-1793

Eulog Schneider Ecclésiastique. Poète. Auteur. Terroriste.

guillotiné 1756-1794

Franklin Libraire Philosophe. Auteur. Physicien.

Politique un des fondateurs de la liberté de

l'Amérique 1706-1794


pagina: 35

Cook voyageur anglais. 1728-1788

Mohamed faux prophète 571-632 - 10 Hegira

Cromwell Protecteur d'Anglettere 1599-1658

Jeanne d'Arc Pucelle d'Orléans, brulée comme sorcière

1412-1431

Ulrich von Hutten Gentilhomme allemand, chevalier

illustre, guerrier valeureux, homme de lettres auteur,

luthérien 1488-1523

Petrarca Poète Italien 1303-1374

2.

Marie Thérèse Imp. d'Aut., Reine de Bohème et Hongrie

1717-1780. Régna 40 ans.

Friedrich der einzige roi de Pruisse 1712-1786 régna

40 ans.

Stanislaus August roi de Pologne abdiqua en

1795-1732-1798

Prince Eugène général Autrichien vainqueur dans

les batailles de Zenta, Turin, Hochstadt et Belgrade.

1663-1736

Prince de Coburg général Autrichien deux fois

vainqueur des Turcs ensuite vainqueur des français dans

les pays-bas en 1794. 1737-...

Wurmser général Autrichien conquit les fortifica-

tions Françaises à Weissenburg et Lauterburg en 1793.

1724-1797

Suworow Général russe vainqueur en Turque, Pologne

et Italie 1725-1800

Pichegru Général français dans la Hollande et sur

les rives du rhin. Accusé de conspiration et déporté à

Cayenne en 1797. 1761-...

Custine Général français sur les rives du rhin et

général en chef de l'armée du nord, guillotiné 1740-1793

Moreau Général français dans les pays-bas puis géné-

ral en chef de l'armée du Rhin, fit une retraite admirable

en 1796, fut battu en Italie 1799, fit une campagne

glorieuse en Allemagne en 1800. 1763-...

Hoche Général en chef de l'armée de la Moselle

puis de l'armée des côtés à Brest, forma le projet d'une

descente en Angleterre 1768-1797


pagina: 36

Charette Général des royalistes dans la Vendée

(chouans) fusillé 1763-1797

Barras Membre du directoire, écarté par le premier

consul 1755-...

Merlin von Douai Ministre de justice et de police

durant la révolution 1752-...

Sieyes Ecclesiastique puis membre du directoire pro-

tecteur de la 3me constitution 1748-...

Voltaire Poète lyrique, épique, tragique, comique, phi-

losophique, déiste 1694-1778

Necker Trois fois ministre de Finances auteur de

plusieurs ouvrages 1732-...

Fox Ministre d'Angleterre puis chef de l'opposition dans

le parlement. 1749-...

Paine faiseur de brosses ensuite commis de Douane

passa en Amérique, écrivit un livre fameux sur les droits

de l'homme ensuite repris dans la convention nationale

à Paris repasse en Amérique mais s'est fait haïr 1737-...

Bahrdt Théologien hétérodoxe, directeur d'un institut

d'éducation et aubergiste, auteur de plusieurs ouvrages

1741-1792

Ninon de l'enclos femme fameuse par son esprit et

sa beauté 1616-1706

Shakespeare premièrement marchand en laine, ensuite

le premier des auteur tragiques de l'Angleterre 1568-1618

Colomb navigateur à qui on doit la découverte

de l'Amérique 1442-1506

Münzer chef des anabaptistes en Allemagne qui

engagea les paysans à la révolte, décapité 1490-1525

Tököly chef des insurgés Hongrois contre l'Empereur

1656-1705

Dimanche 27 Octobre 1811 On dit que l'Empereur a

donné à Mad. Wattier-Ziesenis une pension de 2000 francs.

Talma n'a pas si bien réussi dans Mahomet que dans

ses autres rôles.

Le théâtre fut désert lors du bénéfice de Mad. Duchesnois.

Aussi elle donnait Phèdre qu'on avait vu la même

semaine de Madme. Wattier et en outre les autres rôles

étaient bien mal remplis. Cromène Blache jouait

le rôle d'Hippolyte. On dit que premièrement à la vue du peu de

monde elle ne voulut point jouer.


pagina: 37

Hier le départ de Madlle. Cramer eut lieu. Quoiqu'il

fut longtems attendu et même désiré cependant

son départ ne laissa pas de nous attrister surtout lorsque

Mietje nous rapporta le misérable logement qui

serait sa demeure.

Nous fûmes hier au soir chez mon oncle de Vos. Il

nous fit voir de très belles estampes entr'autres

un superbe portrait de l'ancien Pitt. Un pareil de Fox

des estampes d'après des tableaux de Wouwermans, Kobel

l'ancien, Bakhuizen, Hobbema, Berghem, Dusart.

Le naufrage d'un vaisseau Anglais et la mort du capitaine

avec toute sa famille. Le portrait en grand de Louis 16.

Ses adieux à sa famille. La mort de Socrate d'après David.

Les fils de Typo Saib délivrés aux Anglais. Charles 1e

Cromwell dissolvant le long parlement. La mort du général

Wolf. La mort du général Pierson. La sortie de Gibraltar.

La victoire de l'amiràl Howe. Le combat sur l'île de

Jersey. Le grand assaut sur Valenciennes avec plusieurs

autres encore très belles Marguerite d'Anjou devant Eduard 4

Garrich dans plusieurs rôles et dans

King Lear. Une estampe de Shakspear's Much to do

about nothing.

Littérature

Weisse Trauerspiele 2 th.

Die Befreyung Thebes Cette pièce est assez intéressant.

Le danger croît d'acte en acte. Le caractère de Chorin

celui d'Aspasie de Callicratides sont très beaux et la

mort de ce dernier en tirant la flèche lorsqu'il a entendu

les mots de Thèbes est libre sont heureusement emprun-

tés de la vie d'Epaminondas. Le rôle d'Arete est faible

et Pelopidas et Epaminondas ne se montrent pas assez

dans une expédition dont cependant selon l'histoire

ils eurent presque seuls l'honneur.

Atreus et Thyestes Encore cette terrible histoire

d'Atrée dont on a fait déjà tant de tragédies. Cependant

celle-ci a une toute autre catastrophe. Thyeste

après sa fuite a violé une fille pendant la nuit près

d'un temple. Celle-ci s'est marié à Atrée et son fils n'est

que le fils de Thyeste sans qu'il le sache. La peste règne

à Argos et ne peut-être appaisé par le retour de Thyeste.

Thyeste est ramené et Atrée ordonne à Aegiste, son

prétendu fils de tuer Thyeste. Celui-ci reconnaît son fils par

un glaive et aussi la femme qu'il viola. Il paraît que

cette femme (la reine) est sa fille. Elle se tue de désespoir

Aegiste par vengeance tue Atrée et remonte avec

son père sur le trône d'Argos.


pagina: 38

Il faut convenir que cette catastrophe satisfait mieux

que celle de Crébillon puisque Atrée a encore la douleur

de voir triompher Thyeste. Cependant celui-ci qui

premièrement a enlevé la femme de son frère et qui

ensuite de but en blanc en viola une autre ne

peut pas nous intéresser beaucoup. Aegiste tue

aussi Atrée avec trop de sang froid et en général

cette pièce est assez barbare. Mais le 3e acte où Aegiste

veut tuer Thyeste et reconnaît son père est très

beau.

Rosamunde

Voici encore une pièce non moins barbare. En effet

il paraît que cet auteur a eu plus le pinceau de Cribillon

que celui de Voltaire ou Racine.

Rosamunde est une princesse mariée à Alboin

roi des Lombards qui a vaincu et fait mourir son père.

Elle le fait périr par vengeance et s'enfuit avec un

certain Hellmich à qui elle se marie et avec sa

fille Abissuinthe. Ils reçoivent un asyle chez Longin,

exarque de Ravenne qui devient amoureux d'Abissuinthe.

Rosamunde croit cependant être aimée de

Longin et pour lui faire place elle n'a rien de mieux

à faire que d'empoisonner Hellmich, mais celui-ci s'en

étant aperçu lui fait boire le reste du poison. Alors

les deux amans sont réunis.

Le rôle de Rosamunde est énergique celui d'Abissuinthe

a de beaux morceaux. Mais Hellmich est un bon

homme et ce Longin aussi. Cette pièce est écrite en

vers rimés ainsi que ceux du 1r volume mais La délivrance

de Thèbes et Atrée sont en jambes. En tout je crois que quoique

on ne puisse point accorder à cet auteur le génie

de Schiller que cependant ses tragédies sont des ouvrages

de mérite.

Romeo et Julia Tragédie en prose imitation de Shakepeare.

Je ne l'ai point lue mais d'après ce que j'en ai lu je

ne la crois pas si énergique que l'original.

Le 3 vol. qui je n'ai point lu contient deux

tragédies en prose Die Flucht et Jean Calas.


pagina: 39

Lundi 28 octobre

Hier nous fûmes à l'église chez M. Koopmans. Son

sermon roulait sur le mépris des choses mondaines.

Il était assez rempli de lieux communs.

Voici encore quelques détails sur la fête de Felix.

L'empereur et l'impératrice étant entrés, les demoiselles

présentèrent leur bouquet à l'impératrice. Après cela

ces deux personnages s'assirent et il régna un morne

silence. Les chambellans prirent leurs places derrière

leurs majestés et d'autres grands personnages encore

derrière eux. Ce silence fut interrompu par un signal

que le maire donna de son chapeau plumé au Mr. Joder

pour commencer la cantate. Lorsqu'elle fut achevée

la silence recommenca encore jusqu'à ce que quelques

gardes d'honneur prirent des dames par la main

et commencèrent à former une quadrille qui fut

dansée. Il y en avait trois. Après cela on dansa une

Anglaise fort monotone et ensuite une walse composée

par M. Pair. On forma ensuite encore une quadrille

quand tout à coup l'Empereur se leva. Aussitôt la

musique cessa et les danseurs s'écartèrent pour

lui faire place. Alors L'emp. fit le tour des dames de l'un

côté suivi du maire du prince de Neuchâtel et des autres

grands et l'Imp. en fit de même de l'autre côté suivie

de ses dames. L.M. adressaient à chacune quelques

mots en passant. À la porte ils se rencontrèrent et

aussitôt ils sortirent de la salle avec tout leur

cortège. Aussitôt l'ordre qui avait régné disparut

tout ce mêla et à peine pouvait on comprendre

qu il n'y avait qu'un moment que la salle avait

contenu encore beaucoup plus de personnes.

L'Empereur et l'Imp. n'avaient presque dit mot.

Car ils étaient à une telle distance qu'ils devaient

se pencher l'un vers l'autre pour se dire quelque

chose. Et sa M. l'Emp. ne pouvait pas même feindre de s'amuser

fort, car j'ai parlé quelqu'un qui lui a vu lâcher

un bien gros bâillement.

Nous fûmes hier chez le grandpapa où nous

fûmes régalé sur une tête de veau.


pagina: 40

Mardi 29 Octobre

Le seigle était encore monté de 8 fl.

∙À l'assemblée nous trouvâmes l'antagoniste du médecin

dans une petite attaque de fièvre. Ceci bannit tant

soit peu les disputes. Cependant nous eûmes beaucoup

de plaisir. Bruto et Netto jouèrent encore un grand rôle.

Littérature

Die nacht eines Fluchtlinges von Kotzebue 3 act.

Je lus cette pièce chez Duicker. Elle est fondée sur une

anecdote historique et assez intéressante. Charles Edouard

le prétendent en est le héros.

Samedi 2 Nov.

Le cours de cette semaine n'a offert presque aucun événement

remarquable digne d'être placé ici. Le nouveau règlement

d'études de mes soeurs a été reçu avec applaudissement

et suivi avec zèle.

Mecredi on a procédé à l'élection d'un tribunal de commerce

depuis 10 h. jusqu'à 4 et 1/2 et puis depuis 7 h. jusqu'à l'heure

de la nuit. Je noterai ci-dessus les membres élus.

Mon oncle de Vos est assez incommodé. Il a la bouche

pleine d'abces.

Le seigle est monté encore d'une trentaine de florins.

Hier 118 id. 244 gd. 119. 120. 122-248. 250. 255 gd. Aujourd'hui

121 H.[graanmaat] 256. Cette augmentation est étonnante.

Littérature

Deutschlands Orginaldichter 1 & 2 Theil

ou morceaux choisis des meilleurs poètes Allemands.

Il y a des odes superbes de Klopstock et des morceaux

charmans d'autres poètes. Mais en général je trouve

que les poètes de cette nation dans leurs odes [onl.]

se répètent souvent. C'est toujours à Bacchus sur

l'alliance du vin et de l'amour etc. Ramler ne me

plaît pas trop, il a trop d'expressions ou

de comparaisons dérivées du latin. Je trouve que

la langue Allemande n'a pas assez d'harmonie pour

se passer de la rime mais surtout ces fréquents

enjambemens qui s'y rencontent me déplaisent.

La Romance est une espèce de poésie où je trouve

que les Allemands excellent surtout, quoique

nous avons entr'autres des

romances charmantes de Bilderdijk.


pagina: 41

Suite

On a premièrement des odes et chansons de

Ax, Blum, Burger, Claudius, Cramer, Dusch,

Eschenburg, Gleim, Gottter, Hagedorn, Holty, Jacobi,

A.S. Karschin, Von Kleist, Klopstock, von Kronegk,

Lessing, Michaelis, Freiherr von Norrmann, Ramler,

Schiebeler, T. Schmidt, Thomsen, Uz, Weisse, Zacharia,

Boie, Denis, von Gerstenberg, Hartmann, Kretschmann,

F.L. Graf zu Stolberg, Voss.

Des Romances de

Eschenburg, Bertuch, Burger, Claudius, Crome, Gleim,

Gotter, Hagedorn, Holty, Lowen, Michaelis, Schiebeler,

F.L. Graf zu Stolberg.

Des Élégies de

Eschenburg, Holty, Klopstock, K.E.K. Schmidt, Unzer,

Voss (Voyez morceaux choisis T. 11 no. 50 à 60)

Lundi 4 Nov. 1811

L'Empereur a donné à la ville d'Amsterdam 30000 florins

pour les pauvres. Notre communauté cependant n'en

reçoit pas plus que 62.10,-. La plus grande désolation

règne ici parmi ceux qui faisaient des affaires en tabac.

C'est aussi une chose fort cruelle.

À Harlem l'Empereur s'est moqué du légat de Teyler disant

que celui-là avait bien mal placé ses fonds.

La semaine passée des gens entrés chez une femme

agée et après l'avoir assassinée ont emporté tous

ses effets.

Mon oncle de Vos est malade du scorbut à la bouche.

Hier je fus à l'église chezBakker. Il prêcha le pen-

chant de l'homme à la sensualité (Paul Épitre aux Romains

7 v: 14-15). Son sermon contenait de très bonnes réflexions

sur le gouvernement des passions.

Hier Talma jouerait pour la dernière fois. J'y fus. On

donnait Oedipe. On donna premièrement Champagnac

et surette petit vaudeville assez agréable. Enfin l'on vit

Oedipe et Talma s'y montra dans le triomphe de l'art.

Premièrement l'on voyait l'homme calme qui se croyait

vertueux d'époque en époque il devenait plus sombre

jusqu'à l'explosion terrible. Sa fureur était terrible.

Quand le prêtre l'accusait. Mais on aurait du le voir

dans cette superbe scène du 4e acte où

il confie à Jocaste les horreurs de son sort


pagina: 42

∙dans ces terrible mots:

Vous frémissez madame.

Ensuite quand Icare lui rapporte qu'il n'est pas le

fils de Polybe, lorsqu'il arrache son secrèt à Phorbas

lorsqu'il crie aux dieux.

·Et vous m'en punissez.

Dans ce monologue au lieu de cette terrible fureur de

ces élancées sur le théâtre qu'on aurait vu faire

par tout médiocre acteur, il restait immobile sur

la place et même dans un égarement il était

encore obsédé par l'horreur. On le voyait se courber

vers l'ombre de son père. Enfin il sortait par ces

terribles mots qu'il adresse à Jocaste

·Vos destins sont remplis.

Laius était mon père et je suis votre fils.

Mad. Dauteuil remplit avec beaucoup de noblesse

le rôle de Jocaste. On voyait qu'elle avait profité de

Talma et de Md. Duchesnois. Elle eut de très beaux

momens. Son costume était fort riche.

Les autres étaient tous remplis plus ou moins mal.

Blache était le grand-prêtre Lagardère Dimas et ensuite

Icare mais surtout Garnier qui jouait le rôle de

Philoctète et qui marchait avec un carquois énorme

un arc de cuivre et un terrible casque remplit vacquilla[?]

au plus mal qu'il était possible.

Quand la représentation fut finie on cria Talma

Talma. La toile fut levée et Talma dans ses habits ordinaires

se passa sur le théâtre conduit par Morel. Celui a rassemblé

les papiers jetés sur le théâtre et avertit le public

qu'il l'était que les commissaires en fussent instruits.

Peu après il revient et lit deux vers à la louange

de Talma. Le troisième était ainsi

Chaque rôle nouveau vous est une victoire

Vous remplissez tous nos désirs

Talma rien ne manque à ta gloire

·Othello manque à nos plaisirs.

La toile fut baissée mais aussitôt on entendit de tous

côtés des cris Othello Othello. La toile fut encore levée

et M. Morel dit au public

Messieurs quelque sensible que soit M. Talma à

l'accueil que vous lui faites il ne peut point

remplir vos désirs. Un ordre impérieux le rapèlle

à Paris. Aussitôt on n'entendit plus rien

que quelques siflets qui accompagnèrent

l'acteur qui avait fait cette belle annonce.


pagina: 43

Voici les listes des pièces que Talma et les

acteurs français ont donnés ici.

Adelaide T. Vendome
Phèdre D. Hippolyte
Du. Phèdre
B. Aricie
Andromaque T. Oreste
D. Pyrrhus
Du. Hermione
B. Andromaque
Iphigénie en Aulide T. Achille
Du. Clytemnestre
B. Ipigénie
Hamlet T. Hamlet
Du. Gertrude
B. Ophélie
Zairi T. Órosmane
B. Zairi
Gaston et Bayard D.Nerestan
T. Bayard
D. Gaston
Andromaque Du. Euphémie
Ipigénie en Aulide
Iphigénie en Tauride T. Oreste
Du. Pylade
Du. Iphigénie
Mahomet T. Mahomet
B. Palmyre
Phèdre (ben de Duc) D. Phèdre
Rhadamiste T. Rhadamiste
D. Arsame
Hamlet Du. Zenobie
Philoctète T. Philoctète
Manlius ben: de Talma T. Manlius
Oedipe T. Oedipe

Un des chefs d'oeuvre de Talma paraît être le Hamlet

mais Oedipe n'est aussi pas une de ses moindres pièces.

Dans Manlius il doit fort briller, aussi surtout lors-

qu'en faisant lire à Servilius la lettre qui rapporte

sa trahison il lui dit. Qu'en dis-tu.

Orosmane doit être un rôle qu'il ne convient lui-

même ne pouvoir pas bien jouer. Il l'a joué par

complaisance pour Mad. le Bourgoing qui a

rempli le rôle de Zaire. À Paris même c'était un

acteur nommé la Torse qui remplit ce rôle. Talma reçut

de l'Empereur 2000 francs pour ses leçons de déclamation

20000 fr. et puis tire du théâtre 20000 francs

par année.


pagina: 44

Mardi 5 Novembre 1811

Hier nous eûmes le plaisir d'apprendre la nouvelle

du mariage prochain entre Mon oncle van Heukelom

et Mad. Walbeek, elle nous fit beaucoup de plaisir. Le

médecin hier en paraissait jaloux. Il disait qu'elle aurait

du moins le prendre qu'il serait venir[?] avec quelque chose[?]

que l'oncle n'avait pu etc. etc. Enfin il dit mille autres

folies.

Nous eûmes hier au soir la première assemblée des

Catechumènes. Voici les héros:

P. Bel Leenderts P. Ten Cate
P. van Eeghen van der Smisse W. de Clercq
G. Lange J. Bruin
C. Hartsen A. Waerman
T. Hollerman Langerhuizen

Hier je vis un petit livre doré fort joliment relié en

maroquin qui contenait les prières pour Napoléon

écrites en hébreu et en français. Elle était composée

en grande partie par le grand Rabbin Moïse Saul

(connu par le dessin de l'oncle) qu'ils sont flatteux ces

juifs. Ce sont eux qui ont reçu aussi avec tant de

pompe Guillaume 1 à son arrivée ici.

Voici la liste des membres du tribunal de commerce.

Juges:
W. Willink J.T. Pontoi
A. van der Hoop J. Teysset
J.G. van der Meulen P. Wendorp
G.D. Crommelin D. Bierens
[accolade willink t/m crommelin:] 2 ans. [accolade pontoi t/m bierens:] 1 an.
Suppléans:
J. Bernts C. de Lepel
J. Danckerts W. van den Broek
T. Gülcher P. van Lennep
P. van den Broeke M. Broere
Joh. Jorisse J. Gall von Frantensten
G. Schimmelpennink B. Kramer
J.M. Trassinet W. Bruin
J.L. Momma G.H. Meijer
[accolade bernts t/m momma:] 2 ans. [accolade lepel t/m meijer:] 1 an.
President:
P.A. van de Eis.

pagina: 45

Samedi Si l'on voulait rapporter ici tous les bruits

populaires on pourrait faire une ample collecte.

L'empereur a exigé de toutes les maisons d'orphelins

au dessus de 15 ans pour recruter les régimens de

pupilles.

Nous avons perdu un digne homme dans la personne

du professeur Hesselink. Il reúnissait une grande

érudition à une grande amabilité et une grande

aptitude pour enseigner. J'ai suivi sous lui l'année

passée un cours de mathématiques.

J. Biben a été chez moi. Il a été 14 jours à Schokland et Urk

et quelques semaines sur les côtés de l'Overijssel. Il part

la semaine prochaine pour Paris.

Littérature

Schiller Dreiszigjährigen[?] Krieg 3 v.

Il y a peu d'ouvrages historiques dont la lecture est

si attachante que celle de ce charmant ouvrage. Le style

en est clair et facile et entremêlé de réflexions et

de tableaux très bien placés. On pourrait le recommander

à chacun (pourvu qu'il aime l'histoire) et je trouve cet

ouvrage digne de la réputation qu'il a acquis en Allemagne

(J'en ai fait un extrait) on y trouve outre cela

les vies des personnes suivans

Le cardinal de Richelieu

Maximilien duc de Bavière

Amalie comtesse de Hesse

Le chancelier Oxenstierna

Wallenstein

Eschenbrug Beyspielsammlung

Ceci est un assemblage de morceaux choisis en Grec

Latin Italien Français Anglais Allemand. L'auteur

y a joint des notices succinctes sur les auteurs et leurs

ouvrages. Je vais noter ici les morceaux en marquant

d'une croix celles qui m'ont plues par excellence.

Table
Phaedrus Aquila et Cornix, Vulpes et corvus
Avianus Asinus Pelle leonis indutus
Christ Formida et Cicada
Desbillons Homines duo caecus et claudus

pagina: 46

La Fontaine Renard et cigogne, Cigale et Fourmi
La Motte L'homme instruit de son destin
Richer Le hibou l'allouette et le Pan
Le Noble Le renard et le corbeau
Dorat La chouette. Le dévoument généreux
Aubert La merle
Imbert Le lion jugé
Didot La course des chevaux +
Gay The council of horses
Denis The fox and the grapes. The cock and the fox
Moore The goose and the swans
Boner Vom unwerthen Amt[?]
Burkard-Waldis Vom lugenhaften Jüngling
Hagedorn Der Fuchs und der [onl.]
Der Bey und der Post +
Gellert Der Jüngling und der Greis
Das Kind mit der Scheere +
Lichtwer Die zwei Kaninchen
Die seltsamen Menschen +
Gleim Die Biene
Beratschlagung der Pferde
Lessing Zeus und das Pferd
Der Affe und der Fuchs
Michaelis Der Bauer unter der Eiche
Willamor[?] Die Katze. Die Maus
Zacharia Die Spinke und das Podraga
Nicolai Der Rabe und die Eiche
Das Schilforohr und die Eiche
Pfeffel Das Johanniswürmchen
Der Schmetterling und die Biene
Von zwei Frischen[?]

Conte

1) sérieux

Ovidius. Niobe

Mallet. Edwin and Emma

Goldsmith. The country clergyman

Jerningham. The deserter +

D. Arnaud. Le courtisan +

A. Lambert. Pigmalion +

Gellert. Der arme Greis +

Hagedorn. Der Sultan und sein Vizier Azem


pagina: 47

Kleist. Emire und Agathocles

Wieland. Balsora

2) comique

Chaucer. The freres tale

Dryden. Theodore and Honoria +

Swift. Baucis and Philemon +

Prior. Protegenes and Apelles

Pope. The merchants tale

La Fontaine. La matrone d'Éphèse

Grécourt. Le cuisinier scrupuleux

Piron. Le cordelier cheval +

Voltaire. Les trois manières +

Dorat. Theone et Kia +

Hagedorn. Johann der Seifensieder

Rost. Der blöde Schäfer

Wieland. Schach Lolo +

Nicolai. Die Bückligen[?]

3) allégorie

Claudian. In nuptias Honorii et Mariae

Rousseau. La Morosophie

Voltaire. Thélème et Macare +

Pope. The temple of fame +

Lowth. The choice of Hercules +

Parnell. An allegory of man +

J.C. Schlegel. Krieg der Schönheit und des Verstandes

Gotz. Das Vergnügen

Herder. Die Lillie und die Rose

Nacht und Taf[?]

Die sammerung[?]

Idylle

Vergilius Daphnis
Nemesianus Bacchus
Calpurnius Amphiteatrum
Vida Noce[?]
Sannazaro Galatea
Rapin Alphonsus
Ronsard Éelogue[?] sur la mort de Marguérite
Racan Plaintes d'un amant
Segrais Uranie
Mad. Des Roulières Le mouton le Ruisseau
Fontenelle Ismène
Gresset Le siècle pastoral

pagina: 48

Léonard Le Bonheur
Berquin Milon
Spenser The sheperd's calendar
Ambrose Philips Mico Argol
Gay The ditty
Pope Winter or Daphne
Messiah +
Collins Hassan oriental eclogue +
Shenstone Disappointment
Gesner Phillis Cloe
Von Kleist Irin +
J.S. Schmidt Moses
Blum Laurens und Palämons Lob
Voss Der Geburtstag
Bronner Die belohnte Wohltat

Deutschlands orginaldichter 3

On a premièrement des odes spirituelles. Je trouve

toujours dans celles-ci une espèce de monotonie et

de prosaïsme qu'il est difficile d'éviter selon moi.

Klopstock est le plus poétique en ce genre et Gellert

le plus raisonné. Ceux de Lavater sont trop longs.

Parmi les pièces que le rédacteur nomme

Didactiques on trouve plusieurs petites pièces char-

mantes de Gleim et un joli poème contre les Déistes

par Gotter dans un style familier et badin.

On a trouvé celui qui avait commis le meurtre de

cette femme mentionné ci-dessus. Il l'a commis avec

sa fille. Il se nomme Pasman. Il a déjà confessé

son crime.

Lundi 11 Novembre 1811.

Les facteurs du marché de grains ont été convoqués

chez le Maire et là on leur a signifié qu'ils eussent

à donner une notice de tous les grains qui se

trouvent à cette époque dans les magasins d'Amsterdam.

On vient de perdre M. de Bosson un des plus habiles

accoucheurs de cette ville. Il avait été en fort bonne

santé mais après avoir rendu des secours à une femme

accouchée il tomba frappé d'un coup d'apoplexie

à terre. Ce fut chez un apothicaire près du

Heerestraat. Là on le mit au lit et il y mourut

après quelques jours sans avoir repris connaissance.


pagina: 49

L'élection du tribunal de commerce est annullée

puis qu'elle n'avait point été accompagnée des formalités

requises.

Hier nous avons entendu un fort beau sermon de

M. van Goeuns qui tournait principalement sur le carac-

tère de St. Paul (Épître aux romains).

Je dînai chez mon grandpère avec M. van Goeuns, J. Cops,

J. de Vries et L. Wirtz.

M. de Vries nous lut un morceau d'une belle traduction

des noces de Thetis et de Pelée de Catulle par Bilderdijk.

M. Scheltema maintenant juge de paix à Zaandam et connu

par son érudition dans notre histoire et littérature

a trouvé un manuscrit fort précieux, contenant des

Mémoires sur le séjour de Czar Pierre à Amsterdam

et Zaandam. On y fixe[?] comme l'origine de l'afection[?] de

Czar Pierre pour Zaandam. Ayant eu une maladie

dans sa jeunesse on avait du chercher à l'amuser de

toutes manières et un Zaandamois avait le mieux

réussi à l'amuser en lui construisant des petites

barques. C'était aussi dans le commerce de cet

ouvrier qui partit ensuite pour son pays qu'il reçut

quelque notion de l'Hollandais. Il arriva à Amsterdam

sur un Keuler Aack mais ne voulut pas s'y arrêter

et partit avec le même batîment. Parmi les habitans

que cet équipage grotesque avait attirés sur le

rivage se trouva l'ouvrier connu par le Czar. Celui-ci

l'appela aussitôt par son nom et lui dit Je viens

loger chez toi. En vain l'ouvrier lui représenta

qu'il avait une vieille mère qui logeait chez lui

il n'en démordit pas. La mère dut déloger et Pierre

vint à loger dans l'appartement de la mère. Il

ne demeura à Zaandam que 14 jours.

Napoléon en voyant la maison du czar avait

dit On peut bien être grand empereur sans être

charpentier.

L'Empereur a demandé à Leyde s'il y avait des traductions

d'auteurs classiques en Hollandais et surtout de

Plutarque. Il a doit

avoir dit environ ces mots "Ne faites point à autre

ce que vous ne voulez pas qu'on vous fait. Ainsi

votre [onl.] et surtout obéissez au prince voilà le principal


pagina: 50

préceptes de la religion. Pour le reste nous

verrons cela dans l'autre vie."

Jeudi 14 Novembre 1811

Lors du séjour de l'empereur dans cette ville la malheu-

reuse situation des affaires était effacée ou du moins

étourdie par la foule des plaisirs et des spectacles. On

commençait avoir d'un oeil plus favorable ce souverain

qui nous avait été si terrible depuis sa capitale.

Des espérances trompeuses naissaient dans le coeur de

quelques individus. Mais bientôt tout s'évanouit et

les Hollandais furent accablés de nouveaux maux. En

effet quand on considère l'Europe que de ruines

de désolation mais il en a été ainsi de tous tems.

Là où l'oeil humain ne peut percer veille[?] pour nous un

Dieu le vengeur du juste et l'ennemi des méchans.

Un de nos concitoyens revenant d'un voyage de france a

raconté à ses amis l'état misérable des ports de la france,

de Marseille, Bordeaux, Rouen. Ici on a exigé absolument

qu'on livrait 500 orphelins au dessus de 15 ans. Les

régens de l'Oranje-appel maison où sont maintenant

nos orphelins se sont vus contraints de les livrer.

Ceux de l'Aalmoezeniershuis sont partis hier.

C'était un spectacle douloureux (à ce qu'ont assuré des

témoins) de voir tant de parens se presser vers les orphelins

pour prendre adieux le dernier congé, tandis que des sergens

les retenaient et voilà ces Saturnia régna qu'on nous

prédit!!!

Mardi 19 Novembre 1811

Point de nouvelles et un rhume que j'ai eu m'a empêché

d'apprendre beaucoup de nouveau. Nous eûmes hier

chez Marchand l'explication du chap. 9 (de l'épître aux

Rom). Dans le club le pauvre D.D. fut terriblement

tourmenté. On lui acheta le produit du compte du

rabbin pour 20 ps. Il ne pouvait pas comprendre

l'imbécillité de cet achat.

On parle de la réduction de toutes les communautés

religieuses et sectes.

∙1) Katholiques.

∙2) Calvinistes

∙3) Luthériens

∙4) Juifs


pagina: 51

Il y a eu une vente dans le brakke grond

où j'ai acheté quelques livres. On vendait assez à

bon marché excepté quelques ouvrages recherchés

comme un De Lille complet en 17 vol. f 72,-. Les lettres

à Emilie f 26,-.

Littérature

Deutschlands orginaldichter. 4 v.

Ce volume contient

1) des poèmes didactiques comme Dusch Wissenschaften in

[onl. Gotisch]. C'ést un beau poème d'où j'ai copié quelques

morceaux. On y trouve aussi Wilhof Die [onl. Gotisch]

[onl.]. C'est un poème dirigé contre ceux

qui admettent le système der [onl.] Welt.

2) des épigrammes.

3) des idylles parmi lesquelles il y en a deux très jolies de Voss.

Eschenburg vol. 2.

Voici la liste des morceaux intéressans que renferme

ce volume.

Sinngedichte Griechische Anthologie
Martialis
Katullus
Ausonius
Von Lorgarn Allamanni
Wernicke Giov. della casa
Hagedorn Zoredano
Kästner Casoni
Ewald Guarini
Lessing Zappi
Von Kleist Marat
Göcking St. Gelais
Kretschman Gombaud
Maynard
J.B. Rousseau
Seneca
Panard
Piron
Waller
Butler
Dryden
Prior
Swift
Pope
Opitz
Oleavius
A. Gryphius
C. Gryphius +

pagina: 52

Madrigal

Petrarca. T. Tasso Lemene

Montreuil Moncrif Lainez

Hagedorn Götz

Sonnette

Petrarca, Bernardo Tasso, Annibale Caro G. della Casa Pucci

Scarron, Fontenelle, Regnier, Desmarais.

Shakespeare Milton.

Opitz, Flemming, Schiebeler.

Rondeaux Voiture Mad. Deshoulières Götz

Triolets St. Amand Ranchin Hagedorn

Improntu Hamilton L'Attaignant

Logogryphes Ung: Dufresny Wieland

Bouts rimés Gotter

Satiren

Horatius, Juvenalis Persius

Arioste Alamanni, Salvator, Rosa, Menzini, Dotti, Gosri

Regnier Boileau

Donne, Rochester, Pope, Swift, Young, Churchill, Johnson,

Rachel, Canitz, Haller, Hagedorn, Rabener, Michaelis, Stolberg.

Poèmes didactiques philosophiques

Pythagoras, Solon, Theognis, Phocyclides

Syrus, D. Cato.

Lukretius aus dem ged De natura rerum
Polignac Anti Lucretius
Brown De immortalitate animi
L. Racine La religion +
Voltaire La loi naturelle Epîtres morales +
Pope Essay on man. Moral essays +
Waller Divine love
Prior Solomon, the progress of mind
Young Nights
Akenside Pleasures of imagination
Ogilvie Providence
Hayley The triumphs of temper
Pyle The progress of refinement
Opitz Ruhe des Gemüts: Vielgut +
Zernitz Von den Endzwecker der Welt +
Haller Von dem Ursprung der Uebels
P Hagedorn Die Glückseligkeit
Juiro[?] Versuche vom Menschen
Gellert Reichtum und Ehre
Giseke Einflusz des Geschmacks +
Von Creuz Die Gräber +
Kastner Streit zwischen Vernunft
und Glaube +

pagina: 53

Von Cronegk Der Winterabend +
Wieland Die Natur der Dingen
Gleim Halladat
Withof Sinnliche Ergötzungen
Moralische Ketzer
Uz Die kunst fröhlich zu seyn
Dusch Zuverläszigkeit der Vernuft

Diedrich avait perdu les autres volumes ce

qui me fit beaucoup de peine.

Jeudi 21 Novembre 1811

Voici encore deux anecdotes qui ont rapport au séjour de l'em-

pereur dans cette ville.

Les ouvriers qui travaillaient au Quartier St. Charles avaient

ordre les jours que l'empereur sortait de se poster sur le Dam

et de crier Hoezee. Ensuite ils devaient autant qu'il

leur serait possible occuper le long de son trajet les ponts

et canaux par où il passait pour faire la même cérémonie.

2. Dans le Joodenbuurt on avait ouvert une souscription où

chacun qui avait souscrit pour crier Hoezee reçut ensuite

un florin. Il y avait 300 souscripteurs.

L'assemblée chargée d'élire de nouveau le tribunal de

commerce est comparu hier on a élu les mêmes de l'élection

précédente excepté

à la place de M. Bierens J.S. van der Poll
Wielink

Parmi les nouvelles absurdes qui circulent journellement

se trouvent celle qu'il règnerait à Groningue une peste

et que la grande cour était décorée d'un drapeau noir

avec une tête de mort.

Que depuis Tienen et Zeeburg même jusqu'à l'autre extrémité

de la ville on ferait une digue pour empêcher les

inondations et le (afslibbing).

Ceux des conscrits ou remplaçans partis d'ici donnent

dans leurs lettres de forts tristes détails sur leur

situation.

Quoi qu'au milieu de Novembre le tems n'est pas encore

froid et très beau.

Au marché on se repose enfin car les prix sont

plutôt plus bas que plus haut. Le Colzat est monté

3 à 4 L. dans quelque tems, l'huile ƒ 65. L'orge est aussi

monté depuis quelque tems.


pagina: 54

Littérature

Archenholz Geschichte des 7 jährigen Krieges 2 v.

L'auteur de cet ouvrage estimable paraît s'être donné

beaucoup de peine pour fournir un récit exact des

événemens remarquables de cette guerre. Il

fut pendant la dernière partie de cette guerre officier

dans le régiment Prussien de Torcade. On ne trouve point

ici des portraits brillans mais des peintures qui paraissent

copiées d'après nature et des détails intéressans. Tels

sont la bataille de Torgau et le bombardement de

Dresde. Enfin selon moi c'est un bel ouvrage je l'ai

lu avec un grand plaisir. On voit dans le récit du

terrible état de l'allemagne de ce tems là un exemple

que dans nos malheurs nous n'avons point encore le

droit de nous plaindre (v. Extr).

Meisner Criminal Geschichten 1 v.

Ce livre est extrait en grande partie des skizzen du cet

auteur fameux. Je ne saurais juger du style qu'on dit être

la meilleure prose de l'Allemand. Les tableaux qu'il présente

sont souvent terribles et ils m'ont

assez attaché. Il y en a aussi quatre d'après Fielding.

Parmi ceux qui me plaisent le plus sont les suivans

Meurtre causé par la perfidie d'une amante.

Meurtrière Incendiaire et infidèle à l'honneur et pourtant

seulement une fille malheureuse.

Meurtrier par jalousie et des circonstances survenantes

Meurtre de la justice française / La perruque.

Il y en a plusieurs autres d'intéressantes. Elles sont au

nombre de 37. Celles qui suivent parmi lesquels il

y a celle du docteur Junker sont pour la plupart

d'un autre genre.

Matthison Gedichte 1 v.

Ces poésies sont presque toutes du genre Lyrique et

sentimental. Plusieurs ont ce qui me déplaît souvent

dans cette poésie c'est qu'ils ne disent rien. Quoique

plusieurs ont dit qu'en fait de poésie il s'agissait

seulement quo modo on disait quelque chose cependant

je trouve que chaque pièce de vers doit toujours avoir


pagina: 55

un certain but. Il y a cependant de fort jolies pièces dont

je veux copier quelques-unes. Mais les mêmes idées

retournent souvent. Parmi ceux qui sont plus étendus

on trouve [onl. Gotisch] Die Sehnsucht nach Rom

Die Wanderzeit Elegie auf ein [onl. Gotisch]

qui m'ont fort plues.

Mardi 26 Novembre 1811

Il a [onl.] maintenant l'on verra de belles choses.

On établira des Lycées des universités. Les maîtres de

pension n'osent éduquer des enfans au dessus de

l'âge de 9 ans et ils n'osent leur enseigner que les

premiers élémens.

Un maître allemand s'est brûlé la cervelle d'un

coup de pistolet. Il était à 10 heures le soir dans

une auberge et fut aux lieux avant de s'en

aller. L'hôte étonné qu'il ne revenait pas ouvre la porte.

Il entend partir le coup de pistolet. Il ne sait à qui il

fut destiné. Il appelle ses gens on apporte de la

lumière et on trouve le malheureux noyé dans son

sang.

On entend toujours de nouvelles épreuves pour remplacer

les marchandises coloniales. Les bons

bourgeois font déjà usage du café artificiel. D'autres

boivent de la chicorée (suikerij) toute pure. D'autres font

des mélanges. D'autres boivent du café de gland, d'autres

y mettent de vieilles fèves. Quant au tabac on y met

3/4 de chicorée (krulendijvie) on a fait des expériences

avec le miel. J'en ai goûté et ceci m'a plu beaucoup plus

que je ne le crus.

Littérature

Heinrich der Löwe 2 Th.

Cet ouvrage est l'histoire de ce prince traité d'une manière

dramatique comme l'Alcibiade de Meisner. Mais il

s'en faut de beaucoup qu'elle soit si intéressante.

Aussi il y a quelque chose de peu naturel dans une histoire

toute en conversations. Celle-ci est divisée en 6 Abschusze

qui sont autant de pièces. Je fais suivre ici une

courte notice de la vie du héros.


pagina: 56

Henri le lion était fils de Henri le généreux duc

de saxe et de bavière. Celui-ci poursuivi par l'empereur Conrad

mourut dit-on par le poison. Son fils né en 1129 et âgé de

dix ans lors de la mort de son père fut élevé par son oncle Welf

et sa grand-mère Richsa. Il se distingua bientôt dans tous

les exercices chevaleresques. Il céda la Bavière à sa

mère Gertrude qui se maria à Henri d'Autriche.

Henri fit ses premières armes contre les Esclavons qui

habitaient La Poméranie, qu'il soumit. Lorsque Frédéric

fut empereur il fut lié avec lui d'une étroite amitié

et lui sauva la vie dans un combat à Rome. Sa renommée

se grandit tellement qu'on parlait partout du grand duc

(von dem groszen Herzog). Il fit ensuite une croisade

et pendant ce tems l'empereur avec lequel il avait

déjà eu dispute au sujet de l'élection du pape tâcha

de lui aliéner ses sujets. Henri à son retour refusa

d'accompagner l'empereur en Italie et dès lors celui

a conçut contre lui une haine terrible jointe à l'envie

des princes de l'empire. Henri fut condamné sur des

raisons frivoles et sans fondement et mis dans le

ban de l'empire. Ce prince malheureux se vit attaqué

de tous côtés. Il fut réduit à la seule ville de Braunswick

et quelques états adjacens. Il fit enfin la paix par laquelle

il conserva Braunswick mais dut se retirer pendant

trois ans de l'Allemagne. Il se retira chez son beau-Père

Henri 2, roi d'Angleterre dont il avait épousé la fille

Mathilde princesse pleine de talens en secondes noces.

Il revint en Allemagne avant le terme expiré à la sollicita-

tion de l'électeur de Cologne jadis son ennemi. L'empereur cependant

en partant pour la terre sainte ne voulait point laisser

Henri en Allemagne et celui-ci dut s'expatrier de

nouveau. Cependant comme ses ennemis violaient

la trêve il revint en Allemagne et fit la guerre

avec quelque succès. Il se réconcilia enfin avec

Henri fils de Fréderic. Son fils Henri épousa

la fille de l'oncle Palatin. Henri le lion mourut

à Brunswick en 1195. Il fut un prince brave et

religieux éclairé pour ces tems là où les princes

étaient les serviteurs des abbés et des moines. Il

protégea surtout les études de l'histoire et fit

rassembler les vieilles chroniques.


pagina: 57

Jeudi 28 Novembre 1811

Mardi nous eûmes chez mon oncle Van Heukelom

une petite partie de danse. Il y avait environ une trentaine

de personnages tant grands que petits. Nous nous

amusâmes fort. Je fis à ce propos une réflexion. Pline dit

Mirum est ut animus agitatione motuque corpus

excitetur. En effet jamais je n'ai plus d'idée à faire

de vers qu'après avoir dansé ou lorsque

par exemple à la campagne je me suis donné beaucoup

de mouvement. Ce fut à Rupelmonde que je fis le vers

sur la noce d'argent dorée, le poème déchiré sur Rupelmonde,

le vers adressé à Biben et plusieurs autres. J'y commençai

aussi Hueskar et les Indiens et même à ce que je

crois Lady Sidney. Le soir en revenant de la danse

j'avais ainsi qu'après le bal du Casino mille projets.

Je voulais recommencer de nouveau le poème sur

les plaisirs dont je ne puis cependant pas encore

concevoir des idées bien nettes. Il faut que bientôt

je me remette un peu à la poésie. L'idée de Miltiade

malgré ses défauts, me paraît toujours assez bonne

et même les Espagnols me remontent quelquefois en

tête. Il a longtems que je ne fis rien. Mais je forme

pourtant beaucoup de plans et il ne tient qu'à un

moment heureux de les développer. Mais c'est assez

de cela. Passons à autre chose.

Le jury a absous un homme convaincu d'avoir blessé

sa femme d'un coup de pistolet tiré à dessein dont elle

n'était cependant pas morte. On l'excusa puisqu'il

fut prouvé qu'il avait quelquefois des actes de

folie.

Ayant reçu un billet d'entrée je me rendis à la

mairie où se tiennent les délibérations de la cour

d'assises. Je fus introduit dans une chambre spacieuse

où il y avait une éminence avec des gradins pour les juges

suivaient des bancs pour ceux qui comme moi

avaient des billets enfin le peuple qui s'y attroupait

en foule était placé derrière une barrière. Il s'agissait

de l'affaire de deux servantes qui avaient volé et

transporté des effets de la valeur de quelques florins.


pagina: 58

Lorsque je vins je vis rentrer la cour d'assise qui

fut instruit publiquement que le jury

avait déclaré que les accusées étaient coupables.

Les membres du tribunal étaient habillés en

noir mais le président ainsi que M. Tadema le

procureur impérial avaient des manteaux

rouges. L'avocat M. Tonné avait une toge noire

un rabat et un drôle de bonnet sur la tête. Les accusées,

deux femmes vieilles et laides furent conduites

dans une enceinte destinée à cet effet par des

soldats. Le Procureur impérial voulait que ces

femmes fussent punies par une réclusion de

9 à 10 ans, mais l'avocat voulait adoucir de beaucoup

la punition. Cependant ses raisons n'étaient pas

toutes également convaincantes. Après quelques

débats tous les juges s'en retournèrent

dans une autre chambre pour y délibérer et

fixer la sentence. Les accusées furent reconduites.

J'attendis en vain la décision de la cour et dus

m'en retourner enfin sans avoir vu la conclusion.

Le jury est fini aujourd'hui. C'est un poste fort

importun pour ceux qui ont des affaires. Ils n'osent

pas se séparer avant la décision. Celle ce doit être

oui ou non. Il y a eu des jours où ils ont été

assemblés pendant 24 heures. Cependant dans un

cas pareil on leur donne à dîner.

On dit que cinq frégattes sont partis pour les Indes.

Point de nouvelles. Le prix des grains est baissé. Le Coolrat

monté de 3 L. est baissé de L. 2 surtout puisque la gelée

n'a pas continué. Il fait un tems assez

humide. Le thermomètre est de 48 à 52 degrés.

Mon grandpapa de clercq est dangereusement

malade. Un vomissement de sang, maladie que il avait

eue il y avait une trentaine d'années et dont

il conservait toujours les symptômes s'est renouvellée.

Il a été saigné ce matin et est aujourd'hui dans

la même situation mais il n'ose ni lire ni


pagina: 59

écrire ni beaucoup parler ni fumer ce qui est

bien cruel pour quelqu'un d'une nature aussi

active.

Lundi 1 dec.1811. Je fis hier une bêtise des

plus grandes. J'allai m'asseoir dans le premier banc de

diacre dans la grande église sans penser où j'étais. Maman

qui l'avait aperçu me fit heureusement dire de m'en

aller et par là la pièce finit qui autrement aurait

pu avoir des suites désagréables. Plusieurs personnes

avaient déjà fait des réflexions mordantes le dessus

sûrement parce qu'ils croyaient que c'était par orgueil.

L'aurait été un orgueil bien mal placé. Il faut ajouter

que la porte de ce banc était ouverte ce que ajoutait à

l'illusion.

Hier au soir nous eûmes encore une illumination

générale. C'était bien beau. Chacun l'avait fait avec

la plus grande économie possible. C'était une race

de lampions dont la plupart étaient éteintes par

le vent depuis l'un bout du canal à l'autre

on ne voyait personne se promener sur les rues

en effet c'était une illumination digne de l'importance

que nous mettions dans ce jour ce sont les paroles du Maire.

Il est venu de Paris un rapport fort favorable sur la

société du nut van 't algemeen que le prince lui-même

a lu avec beaucoup d'emphase.

À Leide il y a une dispute violente entre les étudians

et les officiers françois. Ils se sont cités les uns les

autres et à une auberge hors de la ville sont comparus

en effet vingt officiers et 30 étudians. Les premiers alors

à qui le courage manquaient, on dit on refuse le combat

et le commissaire de Police a fait retourner tout le

monde chez lui.

Mon grandpère de Vos prêcha hier au midi sur l'usage

de la raison on en ademettant des témoignages humains

ou divins (révélation). C'était un fort beau sermon,

mais comme à l'ordinaire assez profond. Aussi l'auditoire

était il fort loin d'être nombreux.

Le courir d'Amsterdam paraît maintenant sous le

nom de Feuille Politique du département de Zuiderzee.


pagina: 60

Littérature

Kleist. Gedichte

C'est un charmant auteur. Il était capitaine en

service prussien et fut tué à la désastreuse

bataille de Kunnersdorf, on trouve dans cette collection

huit odes assez jolies.

Des Lieder. comme disent les allemands parmi lesquelles

on remarque des jolis morceaux.

Des Idylles. Ce que me déplaît en général dans les idylles

en sont deux espèces. Notamment une celle où un berger

ou une bergère se plaignent de l'infidélité de leurs

amans ou maîtresses et celles où deux bergers se disputent

le prix du chant. C'est ce qu'on retrouve éternellement dans

toutes les pastorales modernes et dans celles de

ce Gesner qu'on élève jusqu'aux cieux. Parmi celles-ci

qui sont en petit nombre on remarque Irin c'est

le conseil d'un vieux pêcheur donné à son fils. Cette

pièce est charmante et si elle n'eut été trop longue

je l'aurais copiée.

Les Contes et les Fables sont en trop petit nombre.

Parmi les Épigrammes il y a quelques-unes assez

saillantes.

Parmi les Rhapsodies on remarque une tragédie en prose

ou plutôt l'idée d'une tragédie comme l'a dit l'auteur lui-

même. Elle n'est qu'en trois actes et encore ceux-

là sont fort courts. Le sujet est la mort de Sénèque.

Dans le 1r acte ... Un des amis de sénèque et Pompeja retirés

à leur campagne vient engager le philosophe à retourner à Rome.

À 2. Un capitaine vient pour chercher Sénèque. Un de ses

amis se présente à lui sous ce nom. Mais sénèque rectifie la

méprise.

À 3. On voit la mort de sénèque au milieu de ses amis.

Pompeja se perce au milieu d'un de ses évanouissemens

le croyant mort. Il arrive un messager qui rapporte tous

les miracles arrivés à la mort de sénèque.

Le printems. C'est un ouvrage charmant on voit

là un vrai peintre de la nature comme Thompson.

C'est premièrement l'arrivée du printems qui chasse l'hiver

les beautés de la campagne opposés à l'horreur de la guerre

la description d'une ferme le tableau de la pluie

bienfait ici qui féconde la terre et enfin un hommage

au créateur.


pagina: 61

Puis le même poème en Italien.

Ensuite un poème héroïque nommé Cyssides et Pachis

en trois chants. Ce sont deux amis Macédoniens assiégés

dans une forteresse par les Grecs après la mort d'Alexandre

et qui sont tués tous deux. Ce poème ne m'a pas singuliè-

rement plu quoiqu'il y ait cependant de belles descrip-

tions.

Voyez pour Kleist T. 11. 31. 32. 33. 34. 35. 36. 37. 38. 39.

Mardi 3 Décembre 1811

Ce maître allemans nommé Schmiede qui s'est brûlé la

cervelle comme nous l'avons dit plus haut avait été auditeur

à une armée mais s'était évadé avec la caisse et avait

changé ici son nom. C'était un athéiste déclaré.

M. Stuart dans ses prières pour l'empereur a passé les

bornes de la décence car il a dit que l'empereur était un

instrument dans la main de la Providence, pour notre

bonheur. Lorsqu'il annonça qu'il allait prier pour lui

la moitié des fidèles est sortie de son église.

C'est une particularité d'être notée que hier malgré le vent

qu'il faisait le tems était si doux qu'ayant été obligés

d'ôter le feu d'une chambre à cause de la fumée nous

ne souffrîmes aucunement du froid.

Il règne actuellement beaucoup de maladies.

Pour prouver quel était le concours du monde lors de

l'illumination, il suffit de dire qu'au milieu de la

soirée on a volé chez une quantité de personnes les lampions.

Dans un recueil qu'on ferait pour démontrer les lumières

répandus, dans le 19e siècle on pourrait placer un vers

sur la comète placé dans le journal de l'empire

et dont les dernières vers sont

Pourquoi s'embrasser de mille sotsdit-on

N'est-il pas évident que c'est l'être suprême

Qui regardant la France et content de lui-même

Vient visiter le grand Napoléon.

On doit hésiter si l'on doit admirer le plus le comble

de l'impiété de la bêtise ou de l'ineptie. L'auteur a encore

eu l'impudence de signer son nom et sa qualité de

géomètre. Il a bien profité de la géométrie celui-la.

C'est pousser la flatterie bien loin. Et si j'étais un homme

tel que l'empereur je ne souffrais pas qu'on me

louât d'une si sotte manière.


pagina: 62

Hier je lus un vers au jour de Famille dans lequel

je blâmais le médecin de son ignorance dans l'hist.

de Josef. Je lui en faisais un petit extrait et

ensuite je lui fis cadeau au nom du jour de famille

de la vie de Joseph par Hulshof. Je lui donnai en même

tems une liste d'ouvrages pour consulter à ce sujet

et quatre estampes qui expliquaient l'histoire.

Gr. de Vos lut un vers sur les prédicateurs calvinistes.

On résolut de disputer publiquement des thèses et

le grand-papa de Vos fut chargé d'en composer quelques

unes.

Mecredi 4 Décembre 1811

Les Gazettes d'Amsterdam et de Harlem paraissent

maintenant sous le titre de Feuilles d'annonces etc.

Littérature

Shakespeare King Henry 5 and the first part of K.H. 6.

Je vais faire l'extrait de ces deux pièces historiques puisque

la vérité y est assez bien ménagée de manière que le

grand Marlborough ne rougissait pas d'avouer qu'il

devait la plus grande partie de ses connaissances dans

l'hist d'Angl. aux pièces de Shakespear.

Henry 5.

1. Deux évêques font la louange du prince et parlent d'un

édit prononcé contre les donations faites aux Ecclésiastiques.

Henri vient et se fait représenter par l'archevêque de

Canterbery les droits qu'il a sur la france. La guerre

contre la France est résolue. Les ambassadeurs de France

entrent et au lieu de tribut apportent une caisse avec

des boules. Des déclarations de guerre succèdent à ce sarcasme.

2. Henri se dispose à partir. Il fait arrêter trois conspirateurs

Scroop et Gray et Cambridge.

Paris. Délibération du roi de france et de ses conseillers.

Un ambassadeur anglais vient demander qu'on livre

le royaume à Henri qui a un droit incontestable sur

lui. Le roi de france refuse cette demande mais propose

envain d'accorder au roi sa fille Cathérine avec deux

duchés insignifians.

3. On livre un assaut aux murs de Harfleur. Le

gouverneur capitule ensuite.

Les Français prennent la résolution de s'opposer

avec énergie à Henri.

On raconte que le duc d'Exeter a emporté un poste.


pagina: 63

Les anglais reçoivent un héraut français qui demande

qu'ils implorent leur grâce.

4. Les Français campés près d'Agincourt font des bravades

sur leur victoire certaine.

Les anglais quoique postés défavorablement se préparent

au combat. Henri gagne la bataille d'Agincourt.

5. La paix se fait entre la France et l'Angleterre. Henri épouse

Cathérine, fille du roi de France.

Vendredi 6 Décembre 1811

Si j'avais commencé plutôt ces mémoires j'y aurais pu placer

des détails du règne de Louis 1e ou d'autres événemens

que les circonstances présentes font plutôt sortir que

rentrer dans la mémoire. C'est pourquoi je suivrai ici l'occasion

d'en raconter quelque chose de tems en tems.

Lundi 9 Décembre 1811

Samedi avec la barque de dix heures je partis pour la ville

d'Harlem. Le tems était diablement froid et surtout au

passage de Halfweg le vent balayait le visage d'une manière

rien moins qu'agréable. Je trouvai dans la barque

J. Walré. J'arrivais chez M. et Madame van der Vlugt tous

deux fort gais surtout l'épouse. Là j'appris que je devais faire

un vers pour lire le soir au Leerzaam Vermaak ce que m'em-

barassa fort. J'assemblai pourtant en hâte quelques

rimes et j'en fis un morceau, fort mal cousu à la vérité.

Nous nous rendîmes le soir à Leerzaam vermaak. La

grande pièce était Misantropie et Repentir. Quoiqu'on

puisse en dire malgré tous les défauts de cette pièce elle

sera toujours une des meilleures de l'auteur et le sujet

est intéressant. La salle de Leerzaam vermaak est petite

mais les décorations sont assez jolies.

Mr. Walré remplit avec beaucoup d'énergie le rôle de [onl.]

et Mr. Gerling celui d'Eulalie d'une manière charmante.

V. Loosjes avait le rôle de Bitterman et avait

beaucoup d'originalité dans cette carricature. Son fils

était représenté par W. Walré. C'était le premier rôle

d'importance qui celui-ci jouait. M. et Madame Kops

étaient le comte et la comtesse. Ces rôles ne se montraient

pas beaucoup mais Madame Kops doit avoir un

très beau talent pour la tragédie.


pagina: 64

W. van der Vlugt était le major Harst il joue avec

noblesse et déclame très bien.

T. van der Vlugt qui représentait le vieillard était

tellement masqué qu'il était impossible de le

reconnaître. Il imitait fort bien la voix cassée d'un

vieillard.

C. Walré était la soubrette. Elle avait fort bonne

mine et joua assez bien.

P. Mabé était le valet de l'inconnu. C'est un jeune homme

qui ne fait qu commencer. Il est un peu trop raide mais

cela ne lui allait pas mal dans ce rôle.

On donna après Hij moet duelleren. C'était une farce. W.

van der vlugt jouait fort bien le rôle d'un jeune capitain

de houssards et M. Kops[?] d'une vieille femme méchante

et coquette. Mais P. Mabé jouait l'amant d'une manière

beaucoup trop froide. Il devait baiser sa maîtresse C. Walré

mais il le fit bien gauchement. Il était tellement

embarassé avec son épée que tous les spectateurs en riaient.

G. et W. Walré étaient deux valets et V. Loosjes était un

homme devenu [onl. Gotisch] par l'argent de

sa femme et qui ne s'amusait qu'à prendre des papillons.

Il faisait mourir de rire.

Après la représentation nous nous rendîmes dans un salle

où les membres avaient toujours un souper dans lequel

j'eus l'honneur d'être admis. Il y pend un tableau où

sont représentés M. Walré et G. Kops (déjà mort) dans la partie

de chasse de Henri 4. Tous les acteurs peuvent jouir de ce

souper. Nous fûmes fort gais. Je dus lire mon vers qui

plut plus qu'il le méritait. Mr. Walré le lut ensuite

beaucoup mieux que moi. C. Walré chanta ensuite

quelques couplets. Nous retournâmes chez nous dans une

telle obscurité qu'on ne pouvait pas voir devant soi.

Hier nous fîmes quelques visites. Étant chez Mr. Walré

j'y vis la collection des ouvrages de Democriet. Il y avait

entr'autres Bombastus poème héroïque en 8 chans avec

de très beaux dessins par Van der Walle. Ce doit être

un des meilleurs ouvrages de cette société. Il

y avait toute une caisse de manuscrits.


pagina: 65

Je fus aussi dans une espèce de café nommé blondrage.

Il n'y vient qu'une société particulière.

Le soir nous eûmes la compagnie de Mr. Stierling et

son épouse. Ce Mr. Stierling est aussi un membre de

Democriet et c'est un médecin fort habile. Il a connu

Bilderdijk à Brunswick et a écrit un ouvrage contre

son poème sur la maladie des savans par rapport aux

connaissances médicales qu'il lui dispute: Nous vîmes

des dessins de Waterloo, Langendijk et autres et fîmes le

soir des bouts rimés. Il ne savait plus rien de ses vers,

mais nous récita des morceaux, d'un portrait, de l'age d'or,

d'un vers contre Napoleon et d'un vers sur la naissance de son enfant.

Voici encore quelques anecdotes.

Mr. Walré avait donné au directeur de police une liste

de pièces pour les faire approuver on a rayé A. Hambroek,

J. Simonszoon de Rijk, Jacoba van Beijeren et presque tous

les ouvrages de Kotzebue.

Je lisais d'un de mes connaissances un rapport d'un discours

tenu par M. Gogel dans l'assemblée du Syndicat. On avait

inséré de tems en tems l'éloge de l'empereur son voyage était

représenté comme un événement qui avait tout décidé et

réparé tous les désordres qui pouvaient encore régner. Ceci était

entremêlé partout, par ordre supérieur.

Bilderdijk était quelque part et avait apporté un fragment

de son poème sur la maladie des savans. Walré prend le papier et

lit un morceau. Bilderdijk est touché

jusqu'aux larmes et s'écrie De qui sont ces vers, ce ne

sont pas les miens.

Samedi 13 Décembre 1811

Lundi nous eûmes la compagnie du prof. Siegenbeek.

Il est fort taciturne et ne parle pas beaucoup. Il a maintenant

un collège sur l'histoire de la littérature dans les diverses

langues d'après la renaissance des lettres. Dylius a bien

peur quand il y a quelque personnage étranger. Aussi il

fut bien tourmenté au sujet d'une histoire qu'il fit.

Je lus mon vers de Leerzaam vermaak et les deux bouts

rimés. On distribua des thèses qui doivent être disputées

publiquement le lundi suivant. Mecredi j'assistai

pour la première fois aux leçon de lecture que donne

mon cousin J. Kops aux étudiants. Nous lûmes la

bible Gen. Cap. 37 et 39 et puis un cantique. C'est une


pagina: 66

chose surprenante lorsqu'on voit combien de

choses il y a à observer dans la lecture. C'est comme

Marcel disait que de choses dans un menuet. Jeudi

nous eûmes la répétition de deux petites pièces que

nous jouerons Lundi prochain chez le grand-père.

La première est De toren van Ravenna et la seconde

De poeet en de Dokter. Elles sont toutes deux de ma

composition. La dernière a réussi assez bien. Peu

s'en fallait que tout n'eut été dérangé puisque

ma tante d. l'était fâchée que ses filles n'avaient

pas de plus grands rôles. G. et Gr. de Vos jouèrent

très bien mais pour moi je fus pour ainsi dire

en frénésie car je ne fis que rire du commencement

jusqu'à la fin. Il a fait très mauvais tems

cette semaine et surtout des forts brouillardes.

La matière qui fait naître le plus d'anecdotes est

maintenant l'adoption de nouveaux noms par les

Juifs et la saisie des Mendians. Un vieux Juif a

reçu le nom de Crispin un autre s'est appelé Hope,

un autre Keizerwil etc. Les mendians étrangers

seront renvoyés et d'autres reçevont un bedelbrief.

Il y a en [onl.] un homme qui s'est brûlé la cervelle.

Mais une chose vraie c'est que dr. Verschuur qui à sa campagne

au Vuurst vit près de Baren vit un carosse arrêté par les

mauvais chemins et un français qui jurait et tem-

pêtait contre le cocher qui voulait joindre un 3me cheval

ce que l'autre refusait disant que ce n'était que pour

augmenter les frais. Des menaces on en vint aux faits

et le Français après avoir roué de coups de pieds l'homme

et les chevaux voulait tirer son pistolet sur lui. Verschuur

parvint à l'appaiser en quelque manière courut à Baren et

revint avec des gendarmes pour arrêter Mr. le françois

qui montra sa carte et qu'on reconnut être - Mr.

Deviliers Duterrage. Son épouse à ses côtés nageait en pleurs.

Le commissaire qui était là à l'étroit loua les

gendarmes de leur exactitude fit atteler le troisième

cheval qu'on amenait déjà et promit de payer l'argent.

Je continue encore à traduire Pline le Jeune et à

lire Apulée. M. Tissot est enchanté [onl.] nouvel ouvrage

il veut la traduire et y joindre des estampes.


pagina: 67

Il s'est presque crevé les yeux à force de lire cet

ouvrage dont le caractère est si diablement petit.

Au reste il fut fort entiché de Juvenal mais il est

bien revenu ensuite.

Voici une conversation entre l'empereur et

le Prof. Kemper

Emp. Qu'enseignez-vous.

Kemp. Le droit naturel, le droit des gens.

Emp. Il y a aussi un droit du canon.

Kemp. Sire nous espérons que sous vos auspices le

droit du canon et celui des gens se concilieront.

Littérature

Gleim's Werke

1. Th. Lieder 2 Reisen. Je connais peu d'auteurs qui me

plaisent autant dans la poésie légère que ce Gleim. Cependant

je trouve les vers qu'on voit dans les derniers volumes plus

anacréontiques et plus agréables encore.

2. Th. Preussische Kriegslieder. C'est un genre presque

nouveau. Ce sont des vers supposés écrits par un vieux

grenadier sur les batailles de 1756 et 1757. Le style quoique

fort simple est cependant nerveux et présente

quelquefois de belles images. On y trouve

1756

À l'entrée de la campagne

Avant la bat. de Rosbach

Après la bat. de Lowositz

Après ,, ,,

1757

Après ,, ,, Lissa

À l'entrée de la campagne

À l'impératrice après

Avant la bat, de Prague

la prise de Breslau

Avant la bat. de Collen

Après ,, ,,

3. Fabelen. Je trouve qu'il n'y a point de genre où

les poètes se copient plus les uns les autres que

dans la fable. Phèdre a copié Ésope, La Fontaine Phèdre

et combien n'y en a-t-il pas qui ont copié la Fontaine.

Hagedorn a pillé une foule de fabulistes. Gay et Gellert

sont encore des plus originaux. Florian a copié Gay.

Il faut aussi avoir beaucoup d'esprit pour imaginer

une belle fable. Parmi celles de Gleim il y en a

de fort belles mais parmi cette quarantaine nous

en voyons 26 empruntés de La fontaine d'autres de Gay


pagina: 68

et je me rappelle d'avoir lu plusieurs imitations de

celles qui sont originales. On doit encore faire abstraction

de celles qui n'ont rapport qu'aux circonstances et qui

ainsi ne plaisent pas toujours.

Les plus jolies sont

Der [onl. Gotisch]

Die Katze die Maus

Der Raupe der Schmetterling

[onl. Gotisch]

[onl. Gotisch]

Die Gartnerin Die Biene

Trois romances héroï-comiques qui sont assez jolies

quoique la dernière l'histoire d'un capitaine hollandais

qui logeait dans une baleine est trop extravagante.

Th. 3. Der Tod Adams. C'est un drame de Klopstock versifié

par Gleim. C'est un bel ouvrage. L'idée de la mort pour ce

père des hommes en effet doit avoir été terrible. Voici

un court extrait.

Seth et Selima fille d'Adam qui doit se marier ce jour s'étonne

de la mélancolie qui règne sur le visage d'Adam. Adam

découvre à Seth que ce jour doit être celui de sa mort et

que lorsque le soleil sera couché il mourra. Ceci lui est

prédit par l'ange de la mort.

Adam est appuyé sur l'autel d'Abel qu'il conserve dans

la cabane et où est son tombeau. Selima annonce q'un

homme sauvage veut parler à son père. Kain entre et maudit

son père de lui avoir donné le jour et croyant ensuite

l'avoir tué et sort dans le plus grand délire. Adam reste seul

avec Seth et veut écarter sa famille.

Ève vient annoncer à Adam qu'on a retrouvé un

de ses fils les plus chéris et est effrayé de son apparence

terrible. Trois mères lui apportent pour la première

fois leurs enfans. Il embrasse encore sa famille. Seth

annonce que le soleil se couche Adam meurt

Weltrichten [onl. Gotisch]

(il entend enfoncer le rocher fatal)

Tod du bists [onl. Gotisch]

Mad. de Genlis a imité cet ouvrage dans son Théâtre sacré.

4 Th. On voit premièrement une pastorale Der blöde

Schäfer dont le sujet est assez amusant.

Puis une grande quantité de vers Anacréontiques.

Je connais peu d'auteurs qui en ayent saisi si bien

le ton. Il règne une variété étonnante et toujours

le poète vous présente des objets agréables sans cependant

être indécents.


pagina: 69

Une traduction Anacréon Je n'en ai lu que l'ode de

la colombe pour la comparer à celle de Nieuwland et

celle du poète Hollandais m'a parue bien supérieure.

Des traductions d'Horace. Je trouve quand on peut lire

Horace en original les traductions ne valent pas trop au

moins qu'elles ne soient comme celles de Bilderdijk.

Alexis und Elise en trois chants est une romance charmante

et naïve.

Lundi 16 Décembre 1811

Je fus samedi chez mon grand-père de Vos il avait un petit

livre latin composé par divers auteurs,

sur divers sujets en grande partie comiques comme Ulularia

ce qui était un traité complet sur les hiboux et tout ce

qu'on pouvait alléguer en leur faveur Laus fumi Laus

podagrae, Oratio funebris in canem in Gallum in felem.

Chez mon cousin Kops des voleurs sont entrées pendant

la nuit ont fait presque le tour de toutes les chambres

et ont pris ce qu'il leur plaisait.

Hier D. Koopmans nous a entretenu sur la vraiegodzaligheid

c'était un peu sec et assez rempli de lieux communs.

Littérature

Fielding. Journey to the next world

L'auteur après sa mort fait le voyage vers l'enfer avec quatre

ou cinq autres esprits. Ils arrivent dans la ville des maladies

(city of diseases) où chacun fait une visite à la dame qui

l'a dépêché d'ici bas. Ils passent ensuite près du palais

de la mort et vont faire leur cour à l'empereur.

Ils arrivent enfin vers Minos. Celui-là n'admet que

ceux qui se sont fort distingués en bien ou en mal car

pour les autres chez que le bien et le mal se balance

pour ainsi dire il les renvoye sur la terre et ils doivent

tirer un nouveau lot dans la roue de la fortune.

L'auteur est admis dans l'Elysée où il est fort étonné

de rencontrer Julien l'apostat qui lui raconte

l'histoire de ses transmigrations en: esclave, Juif

général héritier charpentier beau sot (fop) Moine

joueur de violon sage roi fou mendiant homme d'état

soldat tailleur alderman poète chevalier et maître

de danse. Ici l'histoire est tout à coup interrompue et

on voit arriver Anne de Boulen qui fait l'histoire

de sa vie. Ce petit ouvrage est écrit avec beaucoup

de sel et d'agrément.


pagina: 70

Mardi 17 Décembre 1811

Hier nous nous assemblâmes chez le grand-père où nous

jouerions nos comédies. Le Binnenkamer avait été

transformé en salle de spectacle à l'aide de deux paravents

dont l'un formait une tour dans la première pièce et

l'autre servait à cacher les acteurs qui n'étaient pas en

scène. Mon oncle de Vos était le souffleur et fit un petit

prologue. J'étais le chevalier Amadis, Guill. de V. le comte

G. l'écuyer, Mieko une paysanne et M.d.C.

et E.d.C. ses filles. Nous chevaliers, nous étions magnifiquement

équipés avec nos sabres, nos boucliers et nos chapeaux

plumés. La pièce fut assez bien jouée et produisait un assez

grand effet. Aussi la mort d'un revenant et l'apparition

de Grisers sur la tour sont des coups de théâtre d'importance.

Après que la sonnette qui annonçait la retraite eut

retentie, la scène fut changée et nous fîmes deux chambres

de l'un côté on voyait celle du poète et

de l'autre celle du médecin. L'une et l'autre entouré de ses

attributs. N.B. G. de Vos avait apporté une foule de petites

bouteilles avec des médecines qu'il avait préparées lui-même

de craie d'encre etc. Je fus le poète W. d. V. joua très bien

le rôle du médecin et G. celui du valet. Ma soeur fit rire

de son bizarre accoutrement. In toto cette pièce fit

beaucoup rire et surtout le pauvre médecin. Au reste c'était

lui qui m'avait provoqué.

La comédie ainsi achevée au contentement général on en

vint à ses fameuses thèses. Le grand-oncle défendit une

thèse, qui disait qu'on devait ériger un tribunal de médecine.

C'était le vieux point sur lequel j'ai déjà fait des odes.

Mais le bon homme n'y comprenait rien disait ne

pas croire ce qu'il soutenait et tomba accablé par Dylius.

Mon Père dut défendre la thèse que les femmes sont

plus propres à la médecine que les hommes. J. de Vos

l'attaqua vigoureusement mais cette dispute fut trop longue

et on fut obligé de la faire cesser. D. soutint contre le

grand-père une thèse sur les avantages de l'éducation

publique sur la privée mais on défendit et attaqua mal.

Mon oncle de Vos soutint que Platon avait banné les

poètes à juste titre de sa république. Dylius et moi

nous opposâmes. Je défendis deux thèses la première


pagina: 71

qu'il ne serait pas à désirer que l'homme inventât

l'art de voler, 2. que l'accumulation de grains ne prévenait

pas la famine. La première thèse fut vigoureusement

disputée. Mais enfin cet exercice finit par nous ennuyer

et je ne crois pas que nous y reviendrons en longtems.

Littérature

[- J'ai entre les mains un fort joli ouvrage du baron de

Risbeck sous le nom de [onl. Gotisch]

Je vais en faire quelques annotations

pour me ressouvenir. Le voyage commence en 1780.

Kehl forteresse bâtie par Louis 14.

Carlsruhe résidence d'un [onl.] de Bude. Les fabriques ont

encouragées dans cet état.

Bruchsal résidence de l'évêque de Speyer.

Speyer petite ville impériale que subsiste du commerce en bois.

Stutgard Le prince jadis dissipateur s'est adonné a la

philosophie.

La souabe subsiste en grande partie de l'agriculture.

Les montagnes du Wurtemberg offrent des aspects fort pittoresques.

La petite principauté Hohenzollern est la [onl.]

de la famille des rois de Prusse.

L'apparence du lac de Constance est superbe.

On remarque à Constance la différence de l'énergie

et l'activité avec les villes Helvétiques. Les préjugés

des Catholiques, la mauvaise éducation, l'orgueil de

la noblesse en sont la cause.

Augsburg Cette ville est dans le déclin. Les moeurs

n'y sont corrompues. Le commerce est fort diminué.

München

On a ici un théâtre mais on n'aime que les pièces

remplies de meurtres et extravagances.

L'auteur est un bon homme mais le timon de

l'état est dans les mains des moines et des femmes.

Il y règne la dépense et la profusion.]

Jeudi 18 décembre 1811

J'entendis hier à Felix un discours du prof. Kemper

sur O.Z. van Haren. Je vais noter ici quelques particulari-

tés de cet homme illustre.

Il naquit en Frise d'une famille fort illustre et dont

l'origine remonte dans les tems les plus reculés. Cette


pagina: 72

famille vécut premièrement à Maastricht. Un van haren

signa la requête des nobles et fut chambellan de

Guillaume 1er et ensuite de Guillaume Louis stadhouder de

Frise. Un autre Van Haren servit l'état dans douze ambassades.

O.Z. van Haren fit ses première études dans le latin à Zwol et visita

ensuite les universités de Franeker et d'Utrecht. Il fut étroitement

lié a ce Guillaume 4 qui n'avait que quelques années de

plus que lui. Il fut premièrement élu membre du gouvernement

de Sloten et succéda ensuite à son oncle comme grietman de

Westwolderadeel. Par ses talens distingués et par la faveur

du prince il fut nommé député de la frise à la Haye et

prit place dans l'assemblée des états généraux. Là il

s'attira l'amitié du greffier François Fagel et de Bijnkershoek tous

deux déjà avancés en âge. Il estimait surtout le premier

jusqu'à l'adoration. Lors de la guerre de la succession d'Au-

triche il fut Gedeputeerde te velde fut ensuite envoyé aux

cantons suisses pour demander du secours en troupes et

nommé enfin ambassadeur à la négociation de paix d'Aix-

la-chapelle. Il conserva toujours l'amitié de Guillaume 4

et de la gouvernante. Cette dernière le chargea de

composer une oraison funèbre sur son époux et de mettre

par écrit ses observations sur le gouvernement de cet

état pour l'usage de son fils. Après sa mort van Haren fut

entouré d'ennemis qu'il s'était en grande partie attirés par

les conseils qui tendaient toujours à conserver la

neutralité entre la France et l'Angleterre. Une accusation

particulière contre lui fut érigée en affaire d'état. Van

Haaren dut s'éloigner et se livra ensuite au repos. Il eut

là encore des malheurs consistans en des attaques que

quelques furieux firent sur sa maison et dans l'incendie

qui consuma sa bibliothèque et tous ses manuscrits

et que quelques-uns supposent avoir été excités

par ses ennemis. Van Haaren a laissé après lui son oraison funèbre

sur Guillaume 4. Un disc. sur la vie du gouv. gen. Kamphuys

et sur la persécution des chrétiens en Japon. Il avait

composé une vie du pensionnaire fagel et une histoire du

Hollandschen krijgsdienst mais ces derniers ouvrages ainsi

que tout le fruit de ses recherches et travaux furent perdus.

Il existe encore de lui une histoire contemporaine de la

patrie mais elle n'a pas encore été trouvé. Son plus

fameux ouvrage est le poème der geuzen. Le prof.

nous cita Le retour d'un fils dans les bras de sa mère

et l'action héroïque de Rochus.


pagina: 73

Littérature

Geschiedenis der vereenigde Nederlanden

dep. Tom. 11-25.

J'ai lu cet ouvrage pour compléter mon cours d'histoire

touchant feu notre république puisque ce tome 11 commen-

ce là où Wagenaar finit. Cette histoire raconte les faits

et c'est aussi le plus grand éloge qu'on puisse en faire. Car

l'histoire est racontée par un père à son fils ce que ne

produit rien du tout et a trop l'air d'enfantillage.

L'auteur n'indique aucune source dont il a puisé pour

son ouvrage ce que Wagenaar fait avec tant d'exactitude.

Il effleure souvent des points importans et appuye singu-

lièrement sur des circonstances peu intéressantes comme

sur des remonstrances au gouvernement sur des requêtes

sur des émeutes insignifiantes.

Il ne nous donne pas la moindre notice sur le caractère

des personnages de son histoire tandis qu'il raconte

avec exactitude sur les voyages du prince et de la princesse

sur les auberges où ils logèrent etc. En effet je n'ai aussi

fait que parcourir les derniers volumes qui m'ennuyait.

On pourrait appeller cette partie de cet ouvrage Extrait

des gazettes.

Vert. Weber Sagen der Vorzeit[?]

C'est un assemblage d'histoires de la chevalerie fort bien

écrites. Il y en a je crois plus de neuf volumes. Je n'en

ai lu que deux qui contiennent

Männerschwur und Weibertreue

Der Harfner

Das Ritterwort

Wollf

Das heilige Kleeblatt

Der Mühler im Schwarzthale

Der grosze Bruder

Briefe eines reisenden Franzosen

C'est un ouvrage fort intéressant sur l'Allemagne écrit

par le baron de Risbeck. Je n'ai lu que la première partie

contenant le séjour de l'auteur à Stuttgart Salzbourg

Munich et Vienne. Il traite de tout de la politique de

l'économie des moeurs du théâtre.


pagina: 74

Lundi 23 Decembre 1811

On vient d'arrêter ici une femme scélérate qui a trompé

beaucoup de gens.

Veuve d'un médecin à Alphen elle a changé son nom en

celui de Willink et s'appuyait sur cette famille riche

et considérée. Elle était accompagné de deux hommes qu'elle

disait être ses hommes d'affaires. Elle loua une grande

maison sur le Heerengracht. Elle acheta des

meubles et autres effets en quantité pant les uns

d'argent comptant les autres en partie avec

des promesses. Cependant plusieurs de ces effets vendus

par elle furent trouvés par les anciens propriétaires

ce que excita des soupçons. Le commissaire de police s'arranga

les frères Lurasco qui avaient une bonne somme à

prétendre. Ceux-ci demandent de l'argent on veut

les payer d'excuses, ils insistent et font un train terrible.

Le commissaire de police entre alors comme pour dissiper

le tumulte. En attendant plusieurs créanciers qui avaient

eu vent de l'affaire s'étaient assemblés et crient à

tue-tête Voilà ma pendule, mes tapis, mon secrétaire etc.

Ils s'avance enfin un homme fort grave qui après avoir

demandé silence, dit Messieurs vous avez le bonheur de

pouvoir encore désigner vos effets mais pour moi

(montrant sa bouche) tout est passé par-là (c'était le

rôtisseur). Enfin on exige que la dame paye. Elle

est fort confusionnée. Eh Madame, Donnez donc des sûretés.

N'avez vous point des obligations. Je n'en ai pas.

Alors elle est saisie et conduite à la maison de correction

avec ses deux complices. On raconte de ces fripons-là

l'anecdote suivante. Il vient un monsieur chez une femme

qui vend des dentelles. Il en achète pour quelques centaines

de florins. Il fait chercher de sa voiture une boîte y met

les dentelles et l'a fait rapporter. Mais tirant sa bourse où

se trouvent 20 à 30 Louis d'or. Il dit Madam j'apperçois

à regret que je n'ai pas assez d'argent sur moi. Garçon

rendez moi la boîte. Nous la cacheterons vous

l'apporterez chez moi et je vous payerai. Il s'en va. La

femme va après quelque tems à l'adresse indiquée

on ne connaît point ce monsieur. Elle n'en est pas

plus inquiétée mais comme personne ne vient elle

ouvre la boîte après quelque tems et n'y trouve -

rien. Le valet en posant la boîte dans la voiture

avait habilement escamoté les dentelles.


pagina: 75

Je fus hier à l'église le matin chez J. Kops qui prêcha

sur le miracle de Jesus en nourrissant 5000 hommes

c'était plutôt un tableau élégant et le midi chez

mon grand-papa qui fit un très beau sermon sur l'annoncé

à Marie.

∙[- Jeudi 26 Décembre 1811

∙Je viens de relire quelques tragédies de Vondel. Je vais joindre

quelques remarques sur elles mais ce sera en hollandais.

Maria Stuart

∙Men bemerkt spoedig dat de liefde voor den roomschen

godsdienst onder anderen de dichter aangespoord heeft

tot het vervaardigen.]

Vendredi 27 Déc. 1811

La colonie de Batavia a été prise par les Anglais.

C'était une nouvelle qu'on attendait depuis bien

longtems. Il y avait une expédition de particuliers

qui devait partir mais à présent ils s'en garderont

bien. Quelques frégates devaient aussi partir incessam-

ment. M. Daandels qui est revenu il y a peu de Batavia

doit en avoir rapporté un trésor considérable conquis

sur le roi de Bantam.

Il paraît être presque évident que l'empereur accordera

des licences pour tirer du sucre et du café

d'Angleterre moyennant une double importion.

Le prince de Ponte comparaît lui avoir joué un

mauvais tour puisque les Anglais importent librement

leurs marchandises en Suède. On dit qu'il a déjà fait

confisquer les revenus de ce prince situés en France.

Les rapports qu'on entend faire de l'Espagne deviennent

de plus en plus alarmans. Il doit régner une entière

famine dans ce pays qui n'est plus approvisionné par

la Hollande et l'Afrique où pendant trois années les

moissons n'ont pu être recueillies et où tant de

milliers de français, anglais et insurgens ravagent

les contrées. Je parlai quelqu'un qui tenait d'un

seigneur portugais arrivé ici à Amsterdam que

les généraux les plus humains même faisaient atterrer

un village par leurs troupes et les habitans devaient

apporter tous leurs comestibles qui étaient enlevés

avec promesse d'un payement prochain.


pagina: 76

Mr. Langhorst qui a fait pour affaires un voyage

en France se trouvant à Bayonne avait passé les

frontières et arrivait à un endroit à deux heures

de distance qu'il apprit avoir reçu la jour précédent

la visite d'une troupe d'insurgens. On lui fit les

plus pressantes exhortations pour l'engager à retourner

sur ses pas ce qu'il fit aussi. Pour un simple courier

il faut une escorte d'une centaine d'hommes avec

deux pièces de canon. On rapporte aussi des troubles

qui seraient arrivés à Paris et à d'autres endroits de

la France, mais je n'y ajoute aucune foi.

Je fus hier au soir du mon oncle de Vos pour voir

des dessins. Il y avait entr'autres M. Willink B.

de Bosch Muller Molquenboer, Roos Engelberts, Jolles Apostool

J. de Vries Van Hal Van Drielst Van dijk. Nous vîmes

premièrement des dessins de figures et historiques des

maîtres hollandais flamands français et Italiens.

La dédication du temple par Luiken. L'adoration des mages

par Bloemaart .Le (titelplaat) frontispice des métamorphoses

d'Ovide par Picart. Une tête par Lairesse Marie Tesselschade

par Galswijk. Un portrait par Visser. Une allégorie par Le Brun.

Moise devant Pharaon, et L'expérience par Poussin. Une scène

de l'enfer par Rubbens. La femme adultère aux

pieds de Jésus Christ par Rembrand. Une tête de lionne

par Snijders Jésus au Berceau par Pater Segers. Une

scène villageoise par Teniers une sainte famille

l'ascension de Marie un ange par divers maîtres

Italiens. Une procession par Vanius.

Nous vîmes ensuite des paysages par Verboom Ruysdael

Rogmans A. van der Velde W. van der Velde. Le colysée

par Berghem Ostade Waterloo.

Il y en avait encore une foule d'autres superbes

dessins. Nous eûmes après cela une collation

qui fut égayée par les chants de Mr. Roos dans

la manière populaire. On récita ensuite à l'envi des

anecdotes et des épigrammes de Langendijk Vos Huighens

et autres. Mr. Apostool nous fit rire ensuite par quelques

parodies de Rusting.


pagina: 77

1812

Vers la fin de l'année passée j'entrepris de noter

quelques traits de ma vie dans cette époque, avec des

réflexions sur ma lecture. J'espère continuer dans cette année

ce travail tant pour ma récréation que pour m'exercer

dans le stile français.

Mecredi 1 Janvier 1812.

Voilà donc une nouvelle année commencée. Un horison

nébuleux se développe dans le lointain, mais Dieu

peut tout changer. La nouvelle année nous trouva chez

mon oncle J. de Vos où nous étions gaîment assemblés.

Cependant la triste perspective de l'avenir ramenait

bientôt une tristesse qui cependant était effacée

par le souvenir du bonheur dont la providence nous

fit jouir dans le sein de nos familles. Que cette journée

doit être attristante pour tant de personnes qui dans

l'année passée ont perdu leur gagne-pain. Hier les

boutiques des marchands en tabac étaient assiégées par

le peuple et c'était une grâce si l'on en pouvait acheter.

La populace criant Nous ne nous soucions pas du

tabac de l'empereur.

M. van Brienen a mandé par une circulaire qu'il quitte

son affaire.

La semaine passée on a fait une irruption dans la

cuisine de mon oncle de Vos où l'on a dérobé plusieurs

effets appartenans aux domestiques.

Jeudi 2 Janvier

C'était hier une affluence de complimens à n'en point

finir. Tout le monde vous abreuvait de souhaits qui

pourtant ne signifient rien. Comme un exemple de la belle

discipline et de l'ordre admirable qui règne ici dans le

gouvernement on peut citer le trait suivant.

M. de Veer fut appellé par le maire à ce que je crois avec

tous ceux qui possédaient des postes dont il se formait

là une réunion de tous les ordres de la société.


pagina: 78

Il y apprit par un papier qu'on lui foura dans les

mains qu'il était devenu Expéditeur de la 1er classe

de l'octroi d'Amsterdam et qu'il devait revenir à 8 1/2.

Il revint en effet à l'heure indiquée sans savoir ce

que c'était que son poste et il s'en retourna à 2 1/2 heures

de la nuit sans en savoir rien de plus. Voilà comme

les choses vont ici.

Il se trouve ici plusieurs conscrits qui ont déserté leurs

drapeaux. Les malheureux!!

Le nombre des lest de seigle et de froment arrivés ici pendant

le cours des 6 dernières semaines se montre à 3500.

Le nombre des marchands de tabac était 700. Il n'y en a que

200 de conservés.

Nous eûmes chez mon grand-papa de Clercq un souper de famille.

C'est d'après le sens de l'almanach.

J'entendis le sermon de Mr. Stuart sur le texte suivant

Laat hen hunne dagen tellen opdat zij

een wijs hart bekomen. Ps. 50 v. 12

Vendredi 3 Janvier

On raconte beaucoup de diverses insurrections qui doivent

avoir eu lieu même dans Paris et surtout parmi la

noblesse Italienne.

Samedi 4 Janvier 1

Il a paru un ouvrage avec le titre Règlement de l'octroi

d'Amsterdam. C'est ce livre qui contient toutes les impostions

relatives à la ville qu'on doit payer. Il mécontente beaucoup

de gens.

Plusieurs employés qui avaient perdu des postes assez considéra-

bles en ont reçu en échange d'autres qui ou donnent des

appointemens si minces qu'on ne puisse en subsister

ou impose les conditions les plus humiliantes. Quant

à tous les postes lucratifs ce sont des français qui les

reçoivent. Injustice criante.

Quant au loix il règne ici encore une jolie confusion.

Et comment messieurs les Français veulent-ils faire

exécuter des loix qu'ils comprennent ni servent

eux-mêmes dont pour le plus souvent ils tirent

de fausses conclusions.


pagina: 79

Littérature

De drie mannen

C'est une traduction de Picard. On a donné cette pièce au

théâtre hollandais. Comme la plupart des pièces de picard elle

est entièrement en intrigue. C'était aussi un sujet trop

français pour pouvoir plaire à notre public. C'est une

diseuse de bonne avanture qui fait donner des leçons à

un mari trop jaloux et à un autre qui l'est trop peu.

Dimanche 5 Janvier 1811

Littérature

Euterpe par Kantelaar et Siegenbeek

Ce volume contient

Un discours de M. van Lennep contenant un coup d'oeil

rapide sur les causes de la décadence des lettres chez un

peuple. Il regarde le siècle de la poésie épique comme le

premier et dans son plus grand éclat lorsqu'un peuple ne

fait que sortir de la barbarie suit ensuite la poésie lyrique

et enfin la tragique. Il compare la décadence des lettres

chez plusieurs peuples. Ses appraçus[?] sont justes son

stile nerveux et enfin c'est fort beau morceau.

2. Notice sur Verburch ou Van der Burg.

L'époque de sa naissance est ignorée. Il fut l'ami de Hooft

Huygens Brosterhuisen etc. Il fut fort loué par les

auteurs de ce tems comme poète érotique. Il fut secrétaire

du duc de Brederode et assista à plusieurs ambassades comme

à celle qui avait pour objet le mariage de Guillaume 2.

Il fut ensuite agent des états à Liège et passa la fin de

sa vie dans la retraite à Amsterdam où il mourut en

1660. On trouve encore de ses vers hollandais dans

divers recueils, au nombre de 18.

3. Sur E. Koolaert geb. Hoofman

Cette femme peut être celle qui parmi son sexe a le

plus excellé dans la poésie dans notre langue. Elle

naquit en 1664 à Haarlem se distingua tôt et apprit

le latin et le grec. Elle se maria à Pieter Koolaert

qu'elle aimait beaucoup mais qui se ruina par sa

folle prodigalité. Elle le suivit à la cour de Hesse

où il obtint un poste mais après sa mort elle

fut presque réduite à l'indigence. Elle surpassa

son sexe autant en talens qu'en vertus. Plusieurs

vers cités dans cette notice sont superbes.


pagina: 80

Theorie der bijschriften dans une lettre de J.

Lublink à J. de Vries. Il exige que chaque Bijschrift

soit une espèce de récit et cite quelques exemples de

lui-même et d'autres.

Menschenkennis de volmaaktheid bevorderende

Une ode par Arntzenius qui contient de très beaux morceaux.

Lundi 16 Janvier 1811

Hier nous fûmes à l'église chez mon grand-père mais je

ne compris pas grand-chose à la dernière partie du sermon.

Il roulait sur le texte qui dit que c'est le pain de l'âme qu'il

faut rechercher.

Il culbuta une chaise dans le Heerengracht évènement admirable

du moins il attira beaucoup plus de monde que l'église.

Je vais apprendre le grec.

Mardi 17 Janvier

On racontait qu'il y avait une sédition assez considérable

à Paris et l'on débitait une foule de contes.

Annales du Lundi.

1re Séance chez l'oncle.

M. Kemper avec son épouse y assistait.

On trompa le bon homme Dylius. Mon oncle de Vos s'étant

déguisé en cuisinier au moyen d'une serviette et d'un bonnet

de nuit lui fit accroire que tous les membres s'étaient

masqués. Il donna dans le panneau et s'affubla

d'un habit de mon oncle avec sa perruque. Il entra tout

fier et fut fort étonné de trouver toutes les personnes

dans leurs habits ordinaires.

À table nous fûmes magnifiquement régalés.

Je lus un vers sur le N. an.

Dylius raconta deux histoires assez naïves.

Kemper offrit à J. de Vos de le faire dîner chez le prince.

Minuit sonna c'était l'anniversaire de mon

grand-père. Nous lui adressâmes premièrement quelques

impromptus et ensuite nous remplîmes à nous quatre des

boutrimes en son honneur. Dylius avait fini le

premier et était tout fier, mais sa dernière

ligne était de quelques pieds plus longue que les

autres. Celui de Kemper était le meilleur et le

mien le plus sale. Nous conservâmes celui du professeur

et livrâmes les notres à l'oubli en les déchirant.


pagina: 81

Mecredi 8. Janvier

J'assistai hier à la distribution des prix de l'académie de

dessin de cette ville, dans l'église des Remonstrans.

N. Loots fit à cette occasion un discours en poésie.

Il y avait un grand concours de monde et aussi de dames.

L'orateur fit premièrement ses excuses aux trois ministres

d'oser monter sur une chaire si souvent sanctifié par

leurs discours. Il passa ensuite à son sujet qui fut

l'éloge de la beauté. Il demanda pardon à Bilderdijk

d'avoir choisi un sujet chanté par lui. Il montra la

beauté comme une divinité insensible toujours variée

et échappant à toutes les définitions. Il la montrait dans

une fleur dans un beau paysage tandis qu'elle

abandonne le palais des grands. Il peignit ensuite un

philosophe courbé sous le poids de ses méditations

pour définir la beauté quand tout à coup une vierge

dont il fit une fort jolie description lui dit

... omhels haar beeld in mij.

Il montra ensuite la beauté sous toutes les formes dans

le beau désordre des astres. Il la montra née aux

premiers rayons du soleil.

Gij huwde de eerste lente aan de eersten morgenstond.

Il reconnut ensuite la beauté comme source des arts.

Il peignit l'état végétant de celui qui ne reconnaît

point son empire. Il parla de l'influence de la beauté

sur les états.

Gij spraakt door Helena en Troje stond in vlammen.

La beauté désarma même les Dieux, elle monta jusque

dans l'Olympe il peignit son culte sous le nom de Venus.

Ensuite il la perd de vue il reconnaît et admire

l'harmonie de l'univers, il reconnait encore la

beauté comme la source de la musique.

Après cela il la revoit sous la forme de la peinture et

passe de là à l'occasion de la distribution des prix.

Ce vers était en général fort beau quoiqu'il y eût

de tems en tems bien quelques expressions surannées à la manière

de nos nouveaux Philosophes comme

gij mensch

Wanneer gij goden maalt

En dat een hoger beeld nog faalt

Zoo maalt - geen zelven

puis ses fréquentes rapproches

d'un artiste avec un créateur un dieu.


pagina: 82

In totum c'était un ouvrage digne de son auteur. Il

employa différentes mesures. Une même de 7 1/2 à 8 pieds.

Étant descendu il fit en prose la distribution des

trois prix qui consistaient dans les gravures de

Lairesse de La Farge et une médaille. Les trois

dessins couronnés furent pendus devant la chaire.

Après une exhortation à la bienfaisance Loots remonta

sur la chaire et récita un vers de reconnaissance

à tous ceux qui avaient contribué à cette fête.

Il renfermait de fort beaux morceaux comme en

recommandant la bienfaisance envers cette académie il

fit la comparaison d'une mère qui quoique sa portion

de pain soit devenue moindre distribue encore ce que

lui reste à ses enfans. C'était superbe.

Parlant du penchant pour les arts qui régnait encore

chez nous il finit par la comparaison d'un cygne qui

quoique obligé à traverser un marais fétide où elle

perd quelques plumes reparaît avec plus de majesté

dans une belle rivière dans sa première blancheur.

C'était aussi dans des vers magnifiques.

Pendant les intervalles la musique y jouait son rôle.

Anecdotes contemporaines

Deux paysans parlant de l'entrée de l'empereur dans

Amsterdam et s'étonnant de la simplicité de son costume

l'un d'eux dit Dat geloof ik wel ik doe ook mijn beste

rok niet aan als ik mijn koeien ga melken.

Un autre demandait pourquoi certain seigneur

ne portait point de gants dit Il a toujours les mains

dans nos poches.

M. le Franck van Berkhey récitait il a plusieurs années

un vers sur la délivrance de leyde. Il disait que quand

un nouveau tyran voudrait jamais usurper le pouvoir

dans cette ville

zij de eerste kogel voor mijn grijzen kop gespaard.

Un tisserand qui avait écouté attentivement fut

tellement transporté qu'il s'écria tout à coup

En God ... de tweede voor de mijne.

Politique

L'empereur a décrété une nouvelle conscription

parmi ceux qui sont nés en 1790.


pagina: 83

∙Quelqu'un lié d'intimité avec le préfet et qui dînait

souvent chez lui, dit qu'il lui a assuré, qu'il voyait

qu'on voulait ruiner ce pays et que sa retraite

n'aurait d'autre suite que de faire place à d'autres qui

seraient encore bien plus mauvais que lui quid[?] est

veritas.

Hier les bruits sur les troubles dans Paris continuaient

encore.

On est en général fort mécontent de la répartition

des impôts de la ville. Il y en a une de 15 sur chaque vache.

Il vint quelqu'un à la porte avec des veaux fort jeunes

et exigea une pareille imposition de ces bêtes qui ne

valaient pas plus de 4 escalins de sorte que le propriétai-

re aima mieux abandonner tout son troupeau.

Le brabançon qui vendait cet été les loix françaises

débite maintenant les tarifs des francs et des florins

mais je crois avec peu de fruit.

Jeudi 6 Janvier

Point de nouvelles seulement quelques bruits populaires

que les sots ou les ignorans peuvent seuls croire.

Mon G.P. de Cl. qui a été encore indisposé au commencement

de cette semaine est un peu mieux maintenant.

Le tems conserve encore toujours la même température le

Therm: 38 à 42 cependant il a fait assez froid pendant

les derniers jours.

D'après le conseil de mon oncle de Vos je me suis remis

à dessiner des têtes des mains etc. Plusieurs de

mes amis copient des estampes en couleurs ce que je trouve

une fort mauvaise manière. A. Fock en avait achevé

deux dont l'une représentait l'enlèvement de Dyonise

et l'autre Tésée et Philomèle après avoir été violée.

Outre la société de poésie qui tient aussi ses séances

dans le local de Concordia et qui est assez suivie

on peut compter parmi les assemblées littéraires

de cette ville une réunion de jeune poètes: A. Hartsen

A. van Halmael le jeune Boscha C. Buys etc. Un

de mes amis qui y assista s'était fort amusé.

Van Halmael avait récité les deux derniers

actes d'une tragédie intitulée Coriolan A. Hartsen

excelle surtout dans les vers burlesques et équivoques.

C'est un jeune homme de beaucoup de talent.


pagina: 84

Hier un certain Mr. Schenk doit avoir récité

dans Felix la traduction d'un morceau de

Young sur l'immortalité de l'âme.

Parmi les poètes naissans on peut compter une Mll. van Hulst

à peine âgée d'une quinzaine d'années. Elle sait plusieurs

langues et possède beaucoup de talens. Entr'autres on

m'a rapporté qu'elle fait déjà des vers depuis l'âge de

6 ans. Dernièrement elle doit avoir adressé un

fort joli vers à Mr. Snoek après qu'il eut joué le

Beverley. Je désirerais fort voir de ses productions. En

cas que je fus grand poète j'aimerais à encourager le

talent naissant. Mais peut-être aussi par le penchant

naturel aux hommes prennent-ils de l'ombrage.

On raconte la mort de C. Grafstede. Ce jeune homme était

fils d'un Heuker qui fut fort protégé par notre comptoir.

Après la mort de son père il lui succéda dans le

maniement de ses affaires. Il fut fort protégé et

pour lui donner du crédit nous passâmes avec trois

autres une guarantie de 10 m. florins. Il négligea

son commerce et enfin nous dûmes payer la

guarantie et nous reçûmes en remboursement

des assignats dont plusieurs avaient été distribués

à beaucoup d'autres créanciers. C'était quelqu'un

qui pouvait mentir diaboliquement et qui avait

encore un orgueil sans bornes. Enfin il tomba dans

la dernière conscription et apparemment n'ayant pas

trop d'argent à fournir il partit lui-même après

avoir extorqué par des menaces de

l'argent aux boulangers. Nous entendîmes peu

après qu'il était malade à l'hôpital d'Anvers

et même on dit qu'il s'est privé lui-même de

la vie.

Il ne paraît depuis quelque tems rien de nouveau

dans notre littérature. Une foule de codes et de

Manuels nous inondent de toutes parts. Joignez à cela

des traductions de quelques romans de La

Fontaine et voilà tout. Les almanacs qui ont paru

ne signifient pas grand chose. Une pour l'instruction d'un

ménage. Une autre over de muzen en gratiën où

il a des copies de tableaux assez joli et une

collection de petits vers dont la plupart par

Westerman. Aussi une très belle élégie sur la

mort d'un enfant par Kantelaar.


pagina: 85

Vendredi 10 Janvier

Je fus hier au soir à Felix. Ce fut Mr. Bilderdijk qui y

tint un discours sans titre. Le titre qui selon moi lui

serait le plus convenable serait La vérité de l'immorta-

lité de l'âme démontrée par l'imperfection de la félicité

humaine. Il y avait des morceaux superbes comme entr'-

autres la réponse au sage qui disait que la félicité humaine

était dans la science. Que savez-vous o mortel disait-

il. Il faisait ensuite la description des idées qu'avaient

eu les anciens peuples de l'immortalité. Il récita

ensuite l'extension d'un chant des Indous à l'égard

de l'immortalité. Il finit par une fort belle ode.

Il doit avoir lu dans une autre société un vers

sur le monde des esprits qui doit être encore

plus beau.

Il n'a pas une manière agréable de réciter quoiqu'elle

soit selon les règles de l'art. Mais sa voix est trop

faible et pas assez sonore. Aussi

plusieurs placés au fond de la salle n'avaient pu

le comprendre entièrement.

Il devient de plus en plus dangereux de parler en

public sur des événemens politiques. J'ai entendu

dire que quelques-uns avaient été arrêtés pour avoir

dit. On dit que Marmont est grillé.

On a répandu parmi le peuple que l'empereur était

prisonnier.

Mardi 14 Janvier 1812

Annales du Lundi 2e Séance

Le médecin dut quitter l'assemblée pour une indisposition

survenu à M. Tin van Keulen. Nous apprîmes qu'il visitait

300 maisons et qu'il n'avait perdu que 11 personnes durant

le cours de l'année passée.

Pour vanter ses connaissances en théologie il rapporta qu'il y avait

dans la bible les mots de bloote billen et aussi que le roi Sedekras

donnait au prophète Jeremie chaque jour eene bolle uit

de bakkersstraat. Il entreprit à cet effet une gageure et

fut malheureusement pris au mot en disant qu'il payait

quand il gageait. Le prix fixé était une portion de glace.


pagina: 86

Il gagea ensuite avec J. de Vos qui soutenait

qu'il ne pourrait trouver ces textes en moins de 5 minutes.

Il les avait notées ce que n'empêcha pas qu'il fut longtems

à chercher quoiqu'il gagnât l'escalin[?] qui fut payé

tout de suite.

Il fit trois histoires de culottes tombées de M. van der Kemp, Jaarspel[?]

en Van Eijk. Il avait tellement brodé la seconde que Ignatius

lui rompit en visière et lui raconta comment l'affaire

s'était passée. C'était arrivé à un diacre député à une

assemblée Synodale.

L'oncle P. d. C. raconta une histoire d'un ministre qui

culbuta les fesses nues au milieu de l'assemblée. Elle

ne fit pas beaucoup d'effet.

Mon oncle de Vos débitait entr'autres hier qu'il tenait d'un

officier de génie qu'on érigerait sur les cotés des tours divers en

plusieurs étages. En bas il y aurait des réservoirs d'eau douce

plus haut un magasin de poudre ensuite un magasin de vivres,

ensuite des lieux habitables et ensuite sur la plateforme

un retranchement où seraient posés plusieurs canons. Ces

tours seraient construites en talus de manière à pouvoir

résister à tous les boulets.

Point de nouvelles. La conscription répand ici la désolation

surtout parmi les personnes qui ne sont pas assez riches pour

pouvoir payer des remplaçans dont le prix augmente toujours

on se plaint aussi beaucoup de l'effet désastreux de

l'octroi d'Amsterdam.

Dimanche j'entendis un sermon sur l'entretien de la concorde

par mon grand-père. Il m'avait fort plu. C'était dans un

tout autre genre qu'à l'ordinaire.

Les prix du froment et du seigle sont encore montés

excessivement. Plusieurs négocians en autres articles

viennent chez nous pour spéculer.

125 H. R319 gd.

128 H. Norder vaut 310 gd.

120 H. Rogge 257

Les prix des autres grains n'ont point éprouvé

de variations considérables.

Après un tems doux qui a duré beaucoup de tems

il commence enfin à geler. Cet événement relève les

espérances des patineurs.


pagina: 87

Jeudi 16 Janvier. C'était mon anniversaire. Je reçus

quelques petits cadeaux de mes frères et soeurs.

J'entendis le soir à Felix un discours de M. Scheltema sur

le séjour de czar Pierre à Sardam. Outre d'autres informations

il avait recueilli la plus grande partie dans un journal

écrit dans ce tems la par un certain Norme alors Vroedschap

de Sardam. J'en ai donné déjà une idée plus haut mais je

veux donner ici quelques anecdotes.

Il ne fut à Sardam en 1797 que quatorze jours. Après cela il fut au

chantier de l'amirauté à Amsterdam et il fut présent

à la construction d'une galiote dont on lui fit présent et

auquel il donna le nom d'Amsterdam.

Rien ne l'importunait et ne le fâchait tant que la foule des

curieux. Quelqu'un le fixait de trop près il lui détacha[?]

un soufflet. Un autre jour étant dans le petit bateau

(boeier) qu'il avait acheté le maître de la barque qui allait

à Amsterdam voulut passer près de lui pour donner à ses

passagers la liberté d'observer le prince. Il se fâcha tellement

qu'il lui jeta deux bouteilles à la tête.

Rien ne lui faisait plus de plaisir que d'être appellé Pieter

Baas. Lorsqu'on l'appellait Votre Majesté ou Monsieur il

vous tournait le dos.

Son principal ami à Zaandam fut un certain Kalf

dont le fils après avoir beaucoup voyagé s'établit à

Halfweg et changea son nom en celui de Marquis des

Veaux. Lors de son second voyage visitant avec ce

Kalf le père une église mennonite qu'on venait d'achever

et où Kalf était ministre (liefdeprediker) il lui dit

de faire un sermon mais bien court Kalf était monté

en chaire dit les mots suivans Pensez bien Parlez

bien et agissez bien. Le czar en fut fort content et

dit à son prêtre qu'il devait aussi en faire de pareils.

Ils étonnait tout le monde par son extrême intrépidité

dans tous les dangers. Il alla un jour de Zaandam à

Amsterdam malgré la tempête la plus violente.

Parmi sa suite il y en avait plusieurs et entr'autres

le prince Mensikof qui furent employés les uns comme

faiseur de barques d'autres pour la construction de mâts.

Ceux-ci se plaignirent beaucoup au commencement

de la douleur que souffraient leurs mains qui

n'étaient pas accoutumés à des pareils travaux. Le

prince Sibiliski qui était celui qui se conformait

le plus aux manières de Czar.


pagina: 88

Ses amis à Amsterdam étaient surtout le bour-

guemaître Nicolaes Witsen Adam Zilt et les deux

van der Heijden qui l'instruisaient en diverses choses.

Il conserva toujours une bienveillance particulière pour

les Hollandais et surtout pour les Zandamois. Il en

avait toujours beaucoup dans ses chantiers et les

capitaines de vaisseau hollandais avaient toujours

un libre accès dans son palais. La lettre que lui

écrivirent les Zandamois lors d'une cherté de drains

est remarquable par sa naïvité. Dans les chantiers de

Bedford il se faisait appeller encore Pieterbaas van

Zaandam. Il avait voulu introduire dans son empire

la langue hollandaise et avait à cet effet fait traduire

plusieurs ouvrages en russe et fait imprimer en deux

colonnes. De ce nombre étaient la bible et quelques

ouvrages sur les sciences et les mathématiques. Mais

ceci ne réussit pas et ce ne fut que dans la construction

des vaisseaux qu'on conserva les termes d'art hollandais.

Le roi d'Angletterre lui avait fait présent d'un

fort beau jacht et il lui fit cadeau d'un diamant

précieux négligemment enveloppé dans un papier

gris. C'était bien une vraie image de son caractère.

Lorsqu'il revint en 1717 il était plus avilisé que

la première fois. Il voulut voir l'ouvrier Kist chez

qui il avait été logé lors de son premier voyage mais

celui-ci refusa de se rendre auprès de l'empereur

disant que celui-ci lui devait encore de l'argent

pour son louage.

Il fit bâtir une maison en deux étages à Petersbourg

dont une chambre n'est meublée que de fûts

transportés tout exprès de Zaandam. Son résident

ici avait eu ordre d'acheter pour Cathérine un ameub.

complet d'une maison hollandaise avec des tableaux

de maîtres hollandais etc. Pour Catherine

cet ouvrage précieux ne fut point envoyé à cause

d'une brouillerie qui survint entre lui et le

Czar.

[NB: volgend gedicht in handschrift ondersteboven:]

[-iest ... men pluckt geen roos of voelt

De doren die de hant quetst, hoe men woelt

Om rijckdom, hoe men zweet om eer en staten,

'T genoegen vlught, al lagen al de straten

Met kronen gout en scepteren bezaeit.]


pagina: 89

Vendredi 17 Janvier

Littérature

Kotzebue Johanna von Montfaucon

Voilà encore une de ces pièces qui font courir le peuple

au spectacle mais qui signifient très peu. Ce sont toujours

des caractères d'une générosité ou d'une monstruosité hors

de la nature. Le parti le plus juste triomphe toujours. Puis

encore une amourette, une reconnaissance, des châteaux des

preux chevaliers des assauts, des combats, des bourreaux, s'il

se peut une prison, une noce et un niais. Il y a aussi beaucoup

de cela dans la pièce nommée ci-dessus. Cependant il y a des

beaux morceaux et le rôle d'un jeune homme qui doit ou

laisser périr son bienfaiteur ou perdre en le sauvant à jamais

sa maîtresse est frappant. Mais voilà aussi ce qu'il y a de

meilleur. On a vu cent fois un chevalier menaçant une femme

de faire tuer son fils si elle ne veut l'épouser des personnes

de distinction déguisés en hermité[?]. Au reste il y a des belles

décorations et beaucoup de mouvement et c'est ce qu'il

faut à notre public.

Loots werken

C'est une collection de la plupart des ouvrages de Loots.

De overwinning op Chatam C'est selon moi le chef d'oeuvre de

l'auteur et un des plus beaux morceaux de poésie que possède

notre langue. Loots excelle surtout dans ses images et

ses comparaisons et celles-ci brillent surtout dans cet ouvrage.

Tout y est superbe. Ce serait un morceau à apprendre par coeur

d'un bout à l'autre.

De Dwingelandij Lierzang Premièrement je trouve cette

pièce un peu trop longue et quoiqu'elle renferme des images

superbes cependant je trouve qu'il règne trop d'exagération.

Eeuwzang C'est encore un ouvrage excellent. Le léger tableau

qu'il fait premièrement des siècles passés et ensuite des

progrès des arts et de la civilisation dans le dernier siècle

et les gémissemens qu'il exhale en faisant mention des

désastres de la révolution m'ont fort frappés.

De Volkswoede Cette pièce sur la mort des de Wit m'a

moins plue. Je trouve aussi que la versification ne n'en est

pas si coulante que celle des autres ouvrages de l'auteur.

L'idée de faire adresser des avertissemens à de Wit par des grands hommes

victimes comme lui de la rage du peuple m'a paru fort

poétique.

Les rapprochemens de notre ancienne gloire le tableau

de notre situation présente et les voeux pour l'avenir


pagina: 90

nous intéressent dans Amsterdam mais l'auteur convient

lui-même qu'il n'avait pas eu l'occasion de le retoucher.

Léonidas n'était pas le genre de l'auteur qui est plus

admirable lorsque dans une belle ode il est transporté

au ciel dans son vol audacieux. Ici l'histoire fournissait

trop peu de matière à l'essor des fictions du poète. Aussi l'on

voit qu'il s'est efforcé de rendre dans ses vers tous les

bons mots de Léonidas. Mais ceci n'empêche pas que

ce soit encore un bel ouvrage.

De voortreffelijkheid van den mensch in de beoefening der

schone kunsten. Prononcé à l'occasion de la distribution

des prix à Felix Meritis. Voilà l'auteur encore sur son

terrain et comme il sait tirer parti de son sujet. C'est

surtout le dernier morceau cette contemplation d'un tableau

du déluge ne laisse rien à désirer et est au-dessus de

toute louange.

Il n'a pris pas moins d'essor dans l'Élégie sur la mort

de Kuiper mais je trouve que l'effet en est toujours

terni par les vertus presque divines qu'il attribue

à son héros que l'on sait n'avoir pas tant excellé dans cette

partie. Comme M. Stuart a dit que lorsqu'il passait des

nuits entières hors de sa maison. C'était une preuve de

son génie qui lui faisait négliger le son de songer au

tems. La dernière comparaison de Loots avec les

derniers momens d'un cigne quoique souvent employée

est ravissante.

En général Loots est et sera toujours un de nos plus

grands poètes pour les images pour le fini de l'exécution

et l'harmonie des vers.

Le règne de Louis 11

Voilà encore un ouvrage comme il y en autant. C'est un extrait

de l'histoire de Louis 11 fort court et qui est peut-être

plus propre à embrouiller qu'à débrouiller la mémoire.

L'auteur cherche ensuite dans ce règne les causes

de la révolution parcourt à cet effet les règnes suivans

comme tant d'autres ont déjà fait et finit par un

hommage au héros qui a débrouillé le chaos de

la révolution. Le style est assez agréable mais je

ne serais point étonné si l'auteur n'eut eu plus

d'idée à faire une spéculation pécuniaire que littéraire.

Reis van Mungo Park 3 vol.

C'est un des voyages les plus intéressantes que j'aie

lus depuis longtems. L'auteur a sans doute fait

de grands services aux géographes. La vérité perce


pagina: 91

dans ses récits. On lit avec intérêt ses détails sur sa

prison à Benown par les maures sur le bon caractère

des Nègres sur l'excellent nègre Karfa etc. et on y voit

en même tems un très joli tableau des petits rois

de cette partie de l'Afrique de leurs déprédations de

leur commerce de leurs guerres etc. Il est dommage

que l'auteur n'ait pu parvenir jusqu'a Tombut et

Koussa qui doivent être des villes fort grandes et

peuplées mais il ne put pénétrer jusques là à cause

qu'il était sans ressources et que ces lieux sont habités

par les maures qui sont inhospitaliers cruels et fort

intolérerans envers tous ceux qui ne son point Mahometans

comme eux.

Vondels treurspelen

Dans le dessin de repasser encore notre littérature j'ai

lu la plupart des tragédies de Vondel et toutes les fois

que je les relis j'y trouve de nouvelles beautés. J'ai lu

pour la première fois Jozef in Egipten et je trouve le

caractère de Jempsar supérieurement bien. Ce n'est pas

comme chez Phèdre un amour criminel mais c'est la

volupté qui parle par elle. Palamedes Lucifer et Gijsbregt

me paraissent les chefs d'oeuvres de l'auteur puis

Jefta et les Gebroeders où il y a aussi de fort beaux

morceaux et Les Leeuwendalers sont aussi un ouvrage

charmant. Quel dommage que tant de personnes qui

disent aimer notre littérature ne connaissent pas

de pareils ouvrages. Quel génie fécond n'avait pas ce Vondel.

Les étrangers le connaissent si peu que je lus

un ouvrage où on donnait à Vondel le nom du Shakespear

de la Hollande. C'est à la manière des Français pour effrayer

les gens par de grands mots mais on verra qu'il n'y

a point d'analogie entre ces deux grands hommes

lorsqu'on les lit puisque Shakespear est l'auteur

qui s'est le plus écarté des Grecs tandis que Vondel

les suit avec un scrupule terrible car p.e. l'idée de manquer

à une règle dans l'avant-scène lui fit pendant longtems

perdre l'idée de faire Jefta. J'admire ces deux

génies immortels mais les rapprocher ce serait comme

si on appellait Klopstock le Voltaire de l'Allemagne.


pagina: 92

Samedi 18 Janvier 1811 [1812]

Hier mon oncle Van Heukelom avait été fiancé. Premièrement

nous aurions eu une souper à cette occasion chez mon grand-papa

mais son indisposition avait fait évanouir ce projet et nous

fûmes à un thé chez Mon oncle Rahusen. Toute la

famille Van Heukelom y était aussi. On fut premièrement à

promener en long et en large discourir quelque peu. En-

suite on joua et on se retira à onze heures. C'était toute la peine

mais c'était bien désagréable de retourner chez soi lorsqu'on

commençait à avoir du plaisir et lorsqu'on était en état

de veiller encore quelques heures avec la plus grande facilité.

Ce sont des plaisirs français que nos pères n'ont jamais eu et

qui ne sont pas à désirer.

Lundi 20 Janvier 1811 [1812]

Je fus avec Mlle. Motie et les petites Van Heukelom voir

un cabinet de figures de cire sur le Dam. En vérité

il était beaucoup plus joli que ceux que nous voyons

d'ordinaire aux foires. Il y avait de fort belles figures entr'autres

Venus et Adonis qui s'entrelaçaient des guirlandes ces

figures étaient nues et d'une grandeur plus que naturelle

on les faisait tourner de manière qu'on les voyait

aussi par derrière et ces parties-là n'était pas moins bien

faites. Il y avait une Madelaine copiée d'après une

statue de marbre posée dans le parc de Bruxelles

une tête de Voltaire après sa mort, Buffon, Charlotte

Corday et Marat, Jeanni Albert, et plusieurs petits bustes

superbes entr'autres une tête d'enfant dont une moitié en vie

et l'autre morte. En totum ceci mérite bien l'attention

des amateurs.

Hier je fus à l'église chez mon grand-père

de Vos. Il récita ce sermon sur la lettre de St. Paul à

Philémon dont j'avais déjà lu une partie. Quoiqu'il

y eut comme à l'ordinaire beaucoup de remarques

saillantes ce n'était pas un sermon pour la

multitude.


pagina: 93

Mardi 21 Janvier 1812

Annales du Lundi

3ème Séance

chez le grand-papa

Avant mon arrivée on était déjà scandalisé des cartes de

visite de Dylius où il avait l'impudence de mettre Doktor

Dylius.

Vers le souper il vint quelqu'un pour parler à mon

grand-papa celui-ci revint en nous présentant M. Numan

disant avoir appris de lui quelque chose que l'intéressait.

J'étais trop éloigné du haut de la table où se trouvaient

M. Numan Mon oncle de Vos et mon Papa et P. de C. pour bien saisir

la conversation mais elle tournait sur des torrens qui

tombèrent dans les mets chez un ami de J. d. V.

Au dessert il parut une grande boîte de carton et chacun

attendait avec impatience ce que en sortirait croyant

qu'il y aurait quelque chose à manger mais on fut bien

étonné quand mon grand-père ouvrant la boîte après

beaucoup de pourparlers en tira un vase de fleurs de papier

très artistement faites par un ami de M. Numan et qu'il à

ce dernier avait apportés. Ensuite parut la glace qui fut

reçue avec des grands applaudissements et consumée avec

plaisir. Je lus un petit impromptu de 8 vers fait à ce sujet.

On fit voir un dessin de Mlle. Zwijndregt représentant

De boutade[?] et des copies de G. de Vos d'après Numan. Le premier

article éprouva des contestations mais le second fut

comblé d'applaudissemens. M. Dylius communiqua

à l'assemblée qu'il avait pris des engagemens avec M. Falck.

Le pauvre D. fut accablé d'énigmes et de charades et de

koopjes. Entr'autres il ne pouvait deviner quels hommes

n'étaient pas morts sous le nouveau test. Mon grand-père

interrompit les huées en faisant une motion en

l'honneur de mon anniversaire. D. m'adressa à cette

occasion l'impromptu suivant

Sier van uw jaren

Blijf lang welvaren

Ce vers fut vivement critiqué J. de Vos dit

Moog gij nog veele jaren

Zoo gelukkig als thans verjaren

J'y répondis par un impromptu adressé à D.

L'oncle invita l'assemblée à venir manger des choux

chez lui.

Ce même membre avait fait la semaine passée une

proposition d'aller tous habiter un château qui

était à vendre près de Vreeland. Cette proposition fut rejetée.


pagina: 94

On dit que la guerre va éclater entre la Russie et

la France et même l'on parle d'une coalition de

puissances du Nord puisqu'aussi l'ambassadeur en Suède

est parti sans prendre congé.

Les remplaçans deviennent rares et chers.

J'ai entendu que quelqu'un se rencontra il y a quelque

tems avec deux Français qui apprenaient

l'allemand. Leur en ayant demandé la raison. Ils

répondirent Quand le vieux père mourra le beau-fils

dira cela m'appartient et puis nous aurons des postes

en Allemagne.

Les grains sont encore environ un même prix 120 N. G. R. 260,

124 H. R. 320 Raapoly 62.

Il commencera à ce que je crois enfin à geler.

Samedi 24 Janvier

Nous fûmes hier à un souper chez le grand-papa de Clercq

où nous nous amusâmes beaucoup. Il y régnait beaucoup

de gâité quoiqu'on fût plus de 30 personnes. Il y en avait bien

une [onl.] assis sur la belle alcôve dont nous avons

si souvent fait un théâtre.

Littérature

Pope's works vol. 1 & 2

On trouve dans ce recueil

Pastorales

Ce fut un ouvrage de la jeunesse de l'auteur. Je n'aime pas les pastorales

en général à moins qu'elles ne soient fort jolies. Il y a quelques

belles idées dans celles-ci. Il y en a quatre sur les diverses saisons

et une cinquième qui a pour titre Messiah est sublime.

Elle est pour ainsi dire une paraphrase de la prophétie

d'Isaie à cet égard. On y a joint des comparaisons avec

le Pollio de Virgile.

The Forest of Windsor

C'est un fort joli poème où il y a des belles descriptions.

La fin qui consiste dans la prédiction que fuit la

Tamise du bonheur de l'Angleterre est aussi fort belle.

Essay on criticism

C'est un poème qui ne se fait pas tant remarquer par le

coloris brillant et la verve qui règne dans l'art

Poétique de Boileau que par la justesse des idées et


pagina: 95

des figures et par le bon sens qui y règne et l'élégance

de la diction.

The rape of the lock

Ce poème ne saurait être mis en parallèle avec le Lutin

il y règne bien moins de fécondité. C'est une certaine Bélinde

à qui un baron (on ne sait pas qui) coupe une boucle

de cheveux après beaucoup de peines pour la retrouver

elle est emportée au ciel et changée en astre.

Cependant cela n'empêche pas que ce poème ne soit

fort agréable à lire. La description de la [onl.] de la

mélancolie sont fort jolies et la fable du Sylphis

et surtout le discours d'Ariel ainsi que la description

du jeu d'hombre m'ont fort plues.

Sappho to Phaon

Eloise to Abelard

Personne n'a jamais à ce que je crois constaté la beauté de

ce morceau où l'on voit toute l'impétuosité et

les feux de l'amour.

Vol. 2

The temple of fame

Ce poème ne m'a pas trop plu. Je ne suis pas grand amateur

d'Allégories surtout lorsqu'elles sont si longues. Il y a cependant

des idées ingénieuses.

Deux contes imités de Chaucer.

Celui de January and May ou l'histoire d'un vieux chevalier

qui se marie encore et que sa femme mène par le nez.

Ce conte est assez curieux.

Un autre intitulé The wife of Bath est l'histoire

d'une femme qui a eu cinq maris et qui avoue de les

avoir bien tourmentés tous.

Suit un grand morceau consistant dans le premier livre la Thébaïde de

Stace. Comme le commencement ne m'en plaisait pas

je ne l'ai pas lu ainsi que les imitations de divers

poètes Anglais qui ne intéressent pas si l'on ne connaît

ceux dont l'auteur a imité la manière.

Quelques poésies fugitives parmi lesquelles se font remarquer

4 ou cinq fort jolies épîtres en vers.

Une vingtaine d'épitaphes parmi lesquelles celles

sur Eliah Fenton, sur Guy et Newton m'ont

surtout plues.


pagina: 96

Lundi 27 Janvier 1811 [1812]

Je fus hier à l'église chez Mr. Coopmans, il devait faire

une oraison funèbre sur le Professeur Hesselink. L'église

était fort remplie et il y avait beaucoup de professeurs

invités par Mr. Coopmans. Il y avait de belles choses dans

son discours mais on convenait en général qu'il était

trop long. Il parla premièrement de la carrière littéraire

du défunt, ensuite de sa manière d'enseigner à ses étudians

et des livres qu'il avait publié ensuite de son caractère

et enfin de sa vie privée comme époux père avec

l'histoire de sa mort. De tems en tems on apprenait

de beaux traits mais les détails minutieux étaient

répandus avec trop de profusion car le talent d'un

orateur consiste principalement à savoir l'ensemble

et de le présenter sous des points de vue frappans.

Son texte était Lazarus onze vriend slaapt. C'était une

fort belle idée, mais il en tira peu de parti. Son exorde

comprenait la contraste lorsqu'on regarde un cadavre

avec l'idée que tout est fini vu avec celle d'un être

immortel. Il raconta premièrement d'une manière fort

succincte l'éducation du prof. prem. à Groningue ensuite

à Lingen sous le prof. van de schank[?] enfin à Amsterdam

sous Here Oosterbaan ensuite il fut ministre à Bolsward

enfin successeur d'Oosterbaan à Amsterdam pour la partie

théologique et morale mais en 1800 il joignit les sciences

philosophiques telles que la logique la Physique et

la Géométrie. Outre plusieurs traités sur différens sujets

dont quelques-uns furent couronnés par Teyler il

composa son Uitlegkundig woordenboek qui lui

succeta[?] des désagrémens parmi ceux qui pensaient différe-

ment. Quoique son caractère fût fort doux il fut en butte

aux accusations de quelques malveillans qui voulurent

le noircir comme néologue et même révoquer en doute

son honnêteté et sa franchise. Il avait un jugement

juste un esprit éclairé et une grande aptitude

à enseigner car il savait tout éclaircir pour ses

disciplines. Une difficulté qu'il avait à s'exprimer donnait

à sa voix une lenteur et une monotonie désagréable.

Il était moins l'instructeur des étudians que leur

ami et ils avaient recours à lui lorsqu'ils désiraient

quelque conseil. D. Koopm. qui avait été son élève pendant

20 ans cita quelques traits de ses recommandations aux

étudians pour prêcher ainsi qu'un morceau de son dernier sermon.


pagina: 97

Ensuite l'orateur entra dans le détail de ses malheurs

de ménage de la mort de ses deux épouses de ses fils dont

le second Fedde donnait de grandes espérances et ensuite

il s'étendit fort sur sa dernière maladie et sur ses

différentes rechuties sur la peine qui lui causait

le sort de son fils qui tombait dans la conscription.

Cette partie-là était sans contredit trop longue. Plusieurs

femmes répandrèrent[?] des larmes en quantité mais les

pleurs d'une femme ne démontrent pas toujours

l'éloquence du discours. Un des traits qui me touchaient

vivement mais que d'autres regardaient comme d'assez

peu d'importance fut le suivant. On trouva un jour

pendant sa dernière maladie en prononçant ses mots

Ik verlang na huis na huis en montrant du doigt le

ciel. In toto pour celui qui ne connaissait point Hesselink

il régnait une superfluité de détails qui ne pouvait

pas l'intéresser telles que la description de sa figure,

de sa marche. Je ne veux nier que l'orateur ne fut

touché jusques au fond du coeur mais ce n'est pas encore là

l'éloquence et tout le monde ne va point à Corinthe.

Une fois il parut en fureur et fit de violentes

apostrophes à la mort mais la fin on voyait bien

que l'art y perçait trop. Le sermon dura aussi deux

grandes heures. Je m'y étais rendu à 1/a[?] passé pour

pouvoir me procurer une bonne place et à 1 heure

j'y étais encore. Aussi j'eus pendant tout le

jour un mal de tête affreux.

J'eus pendant cette semaine une composition avec

Bruin. Sa versification commence à devenir beaucoup

plus aisée je crois qu'il aura beaucoup de talens

pour le genre satyrique. Il m'a lu le fameux

vers sur Kolf dont il avait

été en secret l'auteur un très joli vaudeville

sur le régie tabac et un morceau assez long contentant

le tableau du gehoorzaal à Felix après le concert où

les jeunes gens des deux sexes se réunissent alors

pour boire le punch.

Annales du Lundi

4ème séance chez l'oncle


pagina: 98

Nous vîmes tous chez l'oncle pour le dîner

des choux qui préparés par Wijntje furent excellens.

Le premier sujet de discussion fut l'oraison funèbre

sur M. Hesselink. J. de Vos soutenait que ce

n'était pas un ouvrage supportable qu'il n'y avait

point d'éloquence de stile de goût. Le grand-papa avec

mes chers parens entrèrent en brèche pour le pauvre

ministre qui était encore foudroyé par Loyola.

Après l'assoupissement de ce différent il vint[?] un billet

pour le médecin et chacun crut que ce cher convive

nous abandonnerait quand il nous dit que ce n'était qu'une

invitation d'entendre une leçon du professeur Vrolick

sur les artères du ventre.

J. de Vos qui in fas et nefas ruit[?] déclina le talent

des deux illustres musiciens Boers et Brachthuizen.

On fit entrer Wijntje et le médecin à qui les dames avaient

promis un baiser à condition qu'il en donnerait un à

cette chaste vierge se leva après de vaines tentatives et

malgré la défence d'Ignace la planta contre le mur et

lui imprima un baiser doux et sonore.

Comme nous avions promis d'avoir un vers sur les

choux je lus un petit vaudeville qui en vérité ne

signifiait pas grand-chose quand le médecin tira

à son tour un papier de sa poche et se mit a déclamer

un vers où malheureusement les rimes courtes étaient

un peu trop employées. Il remercia l'oncle de son régal

et après avoir dit que l'année depuis la dernière fête

était révolue il annonça qu'il ferait à ce sujet une

proposition en vers mais il entendait ses chevaux

et devait partir. La dernière partie du vers fut fort applaudie.

On loua les idées mais on blâma la versification.

Après cela il se leva une dispute au sujet de l'histoire

de M. Vroom devenu suspect et devant signer tous

les jours son nom à la police pour avoir entendu

les propos de deux hommes qui marchaient devant

lui. Le grandp. déclama vivement contre cette

histoire.

Le soir je revins à la charge. Dyl. en attendant avait

raconté une foule de faits peu vraisemblables

qu'il y aurait une imposition sur les chauffe-pieds

que Maman serait élue dans la société maternelle

qu'on courrait risque de payer quelques florins en

faisant l'aumône à un mendiant. La chose la plus

intéressante qui arriva ce soir fut l'explication


pagina: 99

plus précise que donna Dylius à sa proposition disant

qu'il proposerait l'alternative d'une partie d'hyver ou

d'été.

Le discours que nous tint hier au soir M. Koopmans fut très

joli il raconta entr'autres l'anecdote suivante:

On parlait dans une société de jeunes gens sur l'époque où l'on devrait se

repentir (bekeeren) et un des plus sérieux dit le dernier jour

de sa vie. On se récria sur l'inconhérence de ces mots.

Quand le ferez-vous donc lui dit un de la société. Aujourd'hui

car je ne puis jamais être assuré que je vive demain.

On a des lettres des orphelins engagés comme soldats

dans lesquelles ils se plaignent fort de leur situation.

On parle beaucoup de guerre.

Les prix des grains continuent encore à hausser

considérablement.

Février

Samedi 1er Février

Il s'est passé peu de fort remarquable dans le cours de

cette semaine. Mardi je fus à souper chez M.J. van

Heukelom qui selon l'assurance qu'il en avait donné

serait de la dernière familiarité. Mais ce fut bien autre

chose. Nous fûmes reçus dans une belle chambre ou

il y avait une quantité de personnes. J'eus ensuite le

bonheur de jouer avec Mll. van Halmael et Mr.J. de Lanoy

et j'eus le contentement de perdre mon argent par le

jeu misérable de quadrille à trois. La table était servie

avec luxe et abondance. J'étais encore à côté de cette

Mll. van Halmael (laide à faire peur) à qui je ne pus

arracher le mot. Cependant le discours s'anima au

dessert. M.B. van der Vliet avait fait venir sa guitare

et chanta plusieurs airs fort jolis. Il chanta aussi

des duos avec sa soeur. M.J. van heukelom récita

quelques couplets à l'honneur de la fête. On voulut

forcer M. van Halmael qui a le ton bien décidé à réciter

mais celui-là tint ferme et ce ne fut qu'à force de

prières qu'on put lui arracher un vers de Bilderdijk.

Je récitai le doucereux morceau qui finit mes Indiens

et M. van der Vliet un morceau tiré du mérite des

femmes par Legouvé et M.J. van Heukelom un

rôle dans la manière de Sterk. Enfin nous nous séparâ-

mes à 3 h.


pagina: 100

J'avais annoncé cette semaine à Quicker sa clôture

définitive et à Ferguson sa suspension une fois par

semaine.

Mecredi mon grand-père m'annonça que M. Bosscha se

chargerait de m'initier dans la langue d'Homère.

Une pièce qu'on avait annoncée comme superbe intitulée

la bataille de Sontenor a été jouée quelquefois ce doit

être ce qu'on a joué de plus mauvais pendant quelques

années.

Les Français ont pris Valence.

Une chose qui a causé beaucoup de combustion dans

le genre commercial c'est la banqueroute des caissiers

Kerkhof Hobius et Chemet. On dit que le déficit est de plus

de 6 cent mille florins. Ce sont surtout des raffinadeurs

en sucre qui y perdent.

Cette semaine a offert un intérêt bien décidé pour plusieurs

personnes à causé du tirage de la conscription qui a eu

lieu. Dans l'un canton la proportion est beaucoup plus

favorable que dans l'autre. Le prix des remplaçans est de

ƒ 2 à ƒ 3000. On rapporte un joli trait du préfet. Ayant

demandé à quelqu'un ce qu'il y avait de nouveau celui-ci

dit que la conscription répandait la consternation

et la désolation partout. Oh, oh reprit-il ce sont là

mes plus beaux jours!!! Dicta digna terroris.

On raconte que l'impératrice veut se retirer dans un

monastère de jalousie parce que l'empereur a fait un enfant à

Madme. Montebella. Il ne faut pas voir de si près sur

cela.

On raconte que le roi de rome est un petit monstre

qu'il est tout tête.

Les grains sont encore montés cette semaine 127 H.

Norder 335.

Nous eûmes quelque chose à faire par l'ordre

qui nous reçûmes d'acheter 50 Lest de Colzad.

La noce aura lieu le soir et le récit en

aura lieu demain si nous vivons et sommes heureux.

L'avoine a aussi pris quelque faveur pendant le

cours de cette semaine.


pagina: 101

Lundi 3 Février 1811

C'était samedi le jour qui était destiné pour la noce. Je fus

après dîner chez mon grand-papa pour conférer avec

M. Bosscha sur l'apprentissage du Grec un migraine le

retint chez lui. J'y vis le poème De aequalitate

hominum par De Bosch où se trouvent de beaux

morceaux et qui est précédé d'une très belle ode d'Oosterdijk.

Je me rendis ensuite chez mon oncle Rahusen où tout

était déjà en règle et où toutes les dames étaient rendues

bien parées. Après le Boston on se mit à table pour y

souper d'une quantité de mets dont l'énumération serait

fastidieuse. Au dessert je lus mon vers que j'avais

bien retrouché et dont j'avais retranché la moitié consistante

dans la peinture d'un bon mariage et d'un célibataire.

Après moi M. Lannoy récita un vers intitulé La victoriade

chant héroïque faisant allusion au nom de Victoire de

la fiancée. Nous apprîmes depuis qu'il avait le

même vers en hollandais en poche. On se sépara à 3 heures

et malgré toutes les délicatesses qu'on offrit je suis bien

aisé de n'avoir dans longtems une pareille fête.

Pour surcroît de malheur un fatal lendemain

m'appella encore hier. J'espère pouvoir travailler ou

lire un peu plus dans cette semaine.

Je fus hier encore à l'église chez mon grand-père. C'était

sur l'emprisonnement du christ. Il fit un exposé de

ce qui s'était passé et après cela quelques considérations

sur la conduite des Apôtres du Christ et de Judas.

À la bourse Samedi on a appris la faillite des frères

de Lange agioteurs, qui doit être considérable.

Littérature

Leven en Character van Hulshof door De Vos

J'ai lu avec plaisir cette esquisse de la vie d'un grand

homme et je gagerais bien que tout lecteur impartial

ne le trouvât bien préférable à celui de Koopmans. Le morceau

sur le fils de Hulshof est très touchant. Mon grand-père

exigea que je le lui lusse et il visa encore des

larmes d'attendrissement à des souvenirs si chers. Un

des ouvrages les plus beaux de Hulshof doit être son

discours où il combat l'optimisme ou le

système De Leibnitz et Wolf. Des étrangers et

entr'autres le célèbre Merian en ont reconnu et

publié le mérite.


pagina: 102

Annales du Lundi

5e Séance

chez J. de Vos

La première partie du souper fut assez calme on laissa

raconter en paix à J. de Vos l'histoire du jeune meurtrier

de Bruxelles à J. Walré l'histoire de son bureau des bons

du Syndicat et des perquisitions de son frère pour être

placé et à Dylius et P. de Clercq l'histoire du

chien enragé de l'Overtoom et du valet de Mr. Steiger.

Au dessert D. ayant fait faire silence et dit qu'il allait

parler sérieusement avoua que des affaires domestiques

avec la famille Vollenhoven le forçaient de différer

son invitation jusqu'au départ de son contribernal. Nous

lui demandâmes son vers et il récita quelques fragmens

d'un entier qu'il avait pu construire. On applaudit cependant

à ses bonnes intentions. J. de Vos s'était érigé en président.

Il dit que l'assemblée était convaincue de la sincérité de

ses démonstrations et de la justesse de ses motifs, qu'elle

préférait la partie d'hyver à celle d'été. Ces motions

furent applaudie. On décréta de part et d'autre comme

à l'ordinaire qu'il n'y aurait pas de vers et que le souper

ne serait pas brillant. D. proposa de venir tous en

masquerade. Cette proposition fut rejetée.

Littérature

Esprit des Journaux

Il n'y a pas beaucoup de nouveautés.

L'Argonautique de Valerius Flacus trad. par Dureau de

Camalle

Hist. littéraire d'Italie par Guinguené on donne de

grands éloges à cet ouvrage.

Précis de la géographie universelle 3 v.

La lyre sacrée contenant des morceaux de Racine Rousseau

Racine le fils Le Franc de Pompignan les poèmes de

Sobre Ruth le jour des morts par Fontanes.

Lettres de Mad. de Pompadour 4 vol.

Dans les Théâtres

La mort d'Annibal trad. en 3 actes où on a remarqué

du génie mais qui n'a pas eu de succès.

Concisca ouvrage d'un Jésuite que l'on a voulu faire

regarder comme le modèle des deux gendres. Cette

pièce n'a pas eue beaucoup de succès.


pagina: 103

Il y a aussi un trait d'un enfant en Amérique qui

a une aptitude singulière pour les calculs.

Parmi les hommes illustres morts l'année passée on compte

François Péron auteur du Voy. aux îles australes.

Marie Joseph Chénier

Esmenard

Nicolai auteur du voyage en Allemagne

Pallas

Parmi un de ces livres que le désir d'écrire ou de se

singulariser enfante, on peut compter les tribulations ou

misères de la vie humaine trad de l'Anglais. Ce n'est

qu'un compilation de vexations ou petits désagremens

qui peuvent vous arriver dans différentes occupations

de la vie et cela continue pendant deux gros volumes.

Pope's works 3 and 4

J'ai lu avec enthousiasme et admiration l'admirable

Essay on man qui est après les Géorgiques de Virgile

un des plus beaux ouvrages que je connais en ce

genre. Les moral épistles qui suivent et qui traitent

du charactère des femmes de l'usage des richesses et contiennent

aussi des remarques fort judicieuses et des portraits

fort piquans. Suivent des imitations d'Horace et des satires

de Donne qui ne m'ont pas fort plus. Aussi il faut convenir

que la satire dans une langue étrangère est difficile

à comprendre parce qu'on fait toujours allusion

à des choses que le lecteur ignore. Ce défaut est encore

plus marqué dans la dunciade. Aussi ne l'ai je pas

lue puisqu'elle ne m'offrait pas assez d'intérêt.

Mecredi 6 Février

Hier les grains étaient encore montés 127 H. N. D. 402

121 H. À[?] 300 gd.

On vient de publier le catalogue de Monsr. De Bosch

et ceci m'a donné l'idée de mettre ici quelques

anecdotes sur lui.

Il avait été destiné à devenir apothicaire. Mais telle

était son goût pour la littérature latine qu'il était

occupé à piler des drogues avec un Nepos devant

lui.

Après un certain poste de la chambre des comptes étant

libre son père l'ambitionna. Il alla faire une visite


pagina: 104

à son oncle Bernardus de Bosch pour le prier d'employer

son crédit près du bourguemaître. Celui-ci lui

répondit[?] brusquement qu'il ne voulait point mendier

des postes pour sa famille. Le jeune homme [onl.]

l'idée d'obtenir lui-même ce poste. Mais son oncle lui dit

Ni toi ni ton frère, vous ne l'aurez. Piqué il se

rend à l'instant chez le bourguemaître et lui fait

la demande. La femme de celle-ci qui dirigeait toutes

les affaires s'était mêlée au discours le postulant

dit Madame je suis venu pour parler à Mr. le

Bourguemaître et non à vous. Il obtient le poste mais

le pis était qu'il était complèttement ignorant dans

l'Arithmétique qu'il apprit cependant en très peu de temps. Je tiens

ces détails de lui-même lorsque je fus avec lui chez

mon grand-père de Vos et que j'expliquai devant lui

un morceau de Sloris[?] dont il fut fort content.

Je n'ai jamais vu d'un homme si entiché de

son grec et de son latin. Ses auteurs favoris étaient

Homère Terence et Nepos. Il poussait l'estime

pour les anciens jusqu'à l'adoration. Dans le discours

que j'eus alors avec lui le mot on dit m'était échappé.

Mr. De Bosch me serra la main et me dit Mon ami

applique-toi à comprendre un auteur latin et quand

tu sais cela ne t'embarasse pas de tout ce que les

hommes peuvent dire de toi.

Une autre fois je le recontrais à Rupelmonde. J'étais encore

fort petit et les vers de Van Alphen faisaient mes délices.

On en parla tandis que notre de Bosch vantait Luiken.

Je me mis en posture et je récitai avec toute l'onction

dont j'étais capable un vers fort long de Van Alphen.

J'avais cru recevoir bien des applaudissemens et je

tombai de bien haut quand De Bosch me dit en me

montrant quelques vers sous une estampe représentant

un enfant qui prie et me dit Mon ami si tu avais

appris ces six lignes tu en aurais plus profité

que de tout ce que tu as récité. Il dit de la chambre

à coucher de Rupelmonde qui regarde sur le Vecht

que c'est là qu'il désirait faire un vers. Après dîner

il déserta la compagnie qui prenait le thé dans

le Tuinkamer et allait chez les servantes qui

étaient sur le steiger disant qu'il ne voulait pas

se laisser enfermer.


pagina: 105

Samedi 8 Février

C'est une chose surprenante que l'on s'accoutume

autant aux circonstances malheureuses qu'heureuses.

Lors de la réunion de notre pays avec les Français il

paraissait que nous serions entièrement anéantis. Un

farouche désespoir régnait sur tous les visages. Mon grand-

père même avait dit Ce sera bien assez si nous conservons

seulement du pain bis. Toutes mes réflexions pour atténuer

l'impression profonde de ses désastres était traité d'en-

fantillage. Tous les maux qu'on ne voyait qu'en perspective

sont arrivés. Et cependant tout retombe dans une apathie

et indifférence qu'on ne puit expliquer. La régie et les

droits réunis ont causé cependant encore quelques

milliers de plaintes. Je ne doute pas que le peuple ne

fut prêt à se soulever. Il est toujours avide de

changemens. Je veux donner cependant ici quelques détails

sur les deux émeutes de l'année passée.

C'était sur notre canal chez Mr. ... qu'on faisait la

visitation par rapport aux denrées coloniales. Déjà le

matin on s'était apperçu de quelques mouvemens. Parmi

les douaniers qui faisaient la visite il y avait un hollandais

le fils d'un boulanger, devenu douanier après avoir

trahi son père en indiquant les denrées qu'il avait

cachées. Ceci lui avait surtout attiré la haine du peuple.

Aussi lorsqu'il rentra à cette maison dont il était

sorti pour un moment un sergent dut lui faire

place avec son épée. Le peuple était resté autour de

la maison dans une attitude menaçante jusqu'à ce

qu'enfin environ à 2 heures un douanier en habits particuliers

chargea sans qu'il fut attaqué son fusil et tira

(par méprise soit seulement pour effrayer) et un homme

innocent qui venait seulement pour voir ce qui en

était fut tué sur le pont.

L'autre émeute aurait pu devenir plus dangereuse. Elle

était occasionnée par un transport de conscrits trop

faiblement gardé. On les dispersa et on délivra les

conscrits ceci arriva près du Jodenhoek. Cependant

les soldats s'étant avancés on tira sur le peuple et

quelques-uns furent tués ou blessés. Je sais quelqu'un

de mes connaissances qui fut au Jodenhoek au moment

de cette émeute et qui m'assura qu'il y régnait la confusion

la plus horrible. Près du Nieuwmarkt les Français


pagina: 106

furent aussi battus. Le Haarlemmer schuit où

se trouvaint aussi des conscrits fut attaqué par des

poissardes et l'on coupa la corde. Sur le Haarlemmerdijk

un commissaire de police fut maltraité. Il régnait une

consternation extrême ce jour là en ville. C'était un

Jeudi. Il arriva cependant comme dans toutes les

séditions qui n'ont pas de but déterminé et qui ne

sont point faits à l'instigation de quelque grand c.a.d.

les attroupemens se dispersèrent enfin. La suite cependant

en fut plus malheureuse. De tous ceux qui avaient

été arrêtés trois furent condamnés à mort. Il y avait

parmi eux un mauvais sujet nommé Piet met de Kruk

qui avait déjà été l'instigateur de séditions dans le

tems du prince d'Orange. Je n'ai point entendu de

particularités touchant le second, mais le troisième

était un jeune homme dont le sort fatal intéressa

toute la ville. Il était garçon-barbier et d'une conduite

irréprochable. Son accusateur était un sergent "diender"

qui était reconnu pour un coquin, avec un conscrit

à ce que je crois qui cependant peu après rétracta

son témoignage. Convaincu de son innocence il était

fort gai et ne s'attendait à rien moins qu'à ce que

lui devait arriver. Le jeune Mr. Van der Pol était son

avocat. Mais celui-ci fut interrompu plusieurs fois dans

sa défense avec la dernière brutalité. De son côté le garçon-

barbier avait produit des témoins qui assuraient où il

avait été pendant ce matin fatal. Il n'y manquait que

quelques minutes et si la supposition de l'accusateur

eut été vraie il auraut du dans ces minutes courir

d'un bout de la ville à l'autre y prendre une pierre

la lancer courir à toutes jambes vers celui

qui attendait ses services et être calme comme à

l'ordinaire. Le témoignage de sa vie et de ses moeurs

n'effectua rien. Il dut mourir. Son camarade qui

rasait mon oncle de Vos le parla encore quelques

heures avant sa mort et lui dit au nom de Dieu

Jean dites-moi êtes-vous coupable. Il lui répondit Je

dois mourir dans peu d'heures et pourquoi voudrais

je donc dire un mensonge. Je témoigne devant Dieu

et ma conscience que je suis innocent. Les soldats qui

devaient tirer sur lui étaient si troublés que

la première fois[?] manqua de le tuer et qu'ils changèrent pour la

seconde fois et le malheureux martyr fut

renversé dans son sang. Je parlai sur cette affaire


pagina: 107

Mr. Van Hall qui était presque malade de l'émotion

que lui avait causé cette mort. On a su depuis

d'une femme qui avait entendu parler dans la maison de force: quelques

officiers membres du conseil,

deux ou trois jours avant le jugement et qu'alors ils s'étaient

dits ceux-là mourriront. O nefas dignus Erinnis.

Le suivant exemple démontre quelle force les

passions peuvent déjà avoir dans un enfant. À Bruxel

sur un bal d'enfants un garçon de 14 ans selon

quelques-uns fils d'un boucher engage une demoiselle

pour danser avec lui. Elle lui répond Je ne danse pas

avec le fils d'un boucher. Il répond Je me vengerai

avant de sortir de la salle. Il court chez lui, y prend un

couteau revient au bal et tue par méprise une

autre fille l'unique espoir de ses parens. Dans ses

interrogations il n'a témoigné point de remords s'écria

qu'il fut fâché de s'être mépris dans sa vengeance.

Cette semaine-ci on donnerait ici le spectacle

d'un ventriloque qui consisterait en trois pièces. On

attendit bien longtems après la première lorsqu'enfin

au lever de la toile un suppôt du ventriloque entra

en scène et assura le public qu'on n'avait plus

rien à attendre puisque M. le ventriloque venait

d'être arrêté. Tout le monde courut hors de la salle et

on vit M. le ventriloque emmené par deux gens de

Justice. Quelqu'un dont il avait acheté pour une

certaine somme s'était rendu au spectacle et son

argent ne lui pouvant pas être remboursé du

montant de la recette il avait fait arrêter notre rire[?]

en montant la plus grande impolitesse envers l'honorable

public qui se vit mené par le nez comme dans

la fable de Hanswurst par Gellert.

Voilà les prix des grains encore montés

120. 121 H. Over Rogge 304. 308 et même 310. 312 gd.

124 H. vr. J. 392 gd.

97 H. N.W.G. 170 gd.

87 H. 96 gd.

Il faut pourtant enfin que cela finisse ou je crains

fort que M. Napoléon ne saisisse un prétexte

qui serait peut-être trop juste, pour mettre fin

à cette montée exorbitante et pour s'arracher

le suprématie aussi dans cette branche de

commerce.


pagina: 108

Lundi 10 Février 1811 [1812]

Je fus samedi au théâtre Français où je m'amusais fort

bien quoiqu'en effet il y eut une grande quantité de

nos nouveaux frères au parterre.

La jeunesse de Henri 5 en 8 actes

Henry 5 infidèle à son épouse s'amuse à toutes sortes d'expéditions

nocturnes. Le comte de Rochester son ami et son favori

promet de le corriger lorsque la main de Lady clara en

sera le prix. Ils vont à une taverne déguisés en matelots

pour voir la nièce de l'aubergiste ancien corsaire dont

un des pages est devenu amoureux et qu'il visite sous le

nom de Georgini[?] maître Italien. Dans le discours on parle

de Rochester et le bon aubergiste dit que sa nièce est en

même tems nièce de Rochester qui ne s'intéresse pas à son

sort. Le comte part et laisse le prince dans l'embarras

qui ne peut pas payer. On le prend pour un frippon. Une montre

qu'il donne pour gage et qu'on reconnaît appartenant

à la couronne confirme cette supposition. Le prince furieux

contre Rochester et au désespoir se trouve enfermé et échappe

enfin par une fenêtre et arrive au palais après bien des

fatigues. Lady Clara le surprend dans son bel équipage. Elle

introduit chez lui le capitaine et sa belle nièce qui viennent

rapporter la montre et qui sont fort étonnés de

reconnaître à la fin leurs deux frippons. Rochester reçoit

sa grâce avec la main de Lady Clara et le page celle

de la jeune fille. Le prince demande à tous le plus grand

secret et promet de se corriger. Cette pièce est fort amusante surtout dans les derniers actes.

Les rôles étaient fort bien remplies. La Gardère

était le prince Garnier le comte de Rochester. Morel le

vieux capitaine Mad. Dauteuil Lady Clara Mlle. Dangeville

la jeune fille. Ces acteurs sont vraiment des artistes

très estimables surtout Garnier qui sait se plier à tous

les rôles.

Champagnac et Surette Vaudeville par Charet Champagne

est devenu riche veut afficher un luxe ruineux et [onl.]

toutes sortes de maîtres. Surette jeune fille qu'il a

autrefois aimée paraît chez lui sous divers déguisemens

enfin tout se découvrent et ils se marient. Il y a de

fort jolis couplets.

Les bourgeoises de qualité en 13 actes par Dancourt

C'est une critique fort gaie de ces bourgeoises qui

prétendaient à des titres ou à un mariage avec des

nobles. L'intrigue n'en signifie pas grand chose

mais les caractères sont fort plaisans. Mad. Dangeville

remplissait supérieurement bien le rôle d'une

femme qui voulait à toute force être comtesse.


pagina: 109

Hier chez Coopmans sur St. Pierre. C'était un fort

beau sermon.

Mardi 11 Février

Annales du Lundi

Il ne se passa pas beaucoup. Les esprits étaient assez calmes.

J. d. V. soutint qu'on vendrait de ses ouvrages chez M. de Bosch. Le

grand-père reprocha à D. d'avoir oublié son grec. Je lus

une pièce d'un anonyme qui ne réussit pas et ensuite ma

satire sur Amsterdam.

Je dois encore revenir sur notre marché de grains où

tout monte de plus en plus. Même dans des articles

dont on est encore approvisionné tels que le blé noir et l'avoine.

Il y a des personnes qui veulent absolument employer leur

argent en grains et tous ceux qui par la régie ont perdus leurs

affaires se sont saisi avidemment de cette occasion pour

remplacer leurs profits. Aussi tout va-t-il avec une fureur

que les courtiers seuls qui y font leur profit peuvent

comprendre. Cependant il y a plusieurs personnes qui

songent pourtant à faire leur retraite. Les prix de tout

étaient montés hier.

127 H. Nassau Dietse

430 gd.

120 H. Brab: Rogge

315 gd.

101 H. W.G.

185 gd.

86 H. Hav.

106 gd.

101 H. Am: Boek.

45 L.[?]

Parmi les personnes dont les causes doivent être portées

devant le Jury est celle d'une femme de Wijk te Duurstede.

Celle-ci avait appris par le moyen d'une élève le contenu d'un

testament de sa tante qui reposait sous son patron par lequel

son mari aurait un héritage de ƒ 5000. Pour s'en assurer plus

vite elle empoisonne sa tante mais soit qu'elle

conservât l'amitié pour la élève ou qu'elle voulait s'approprier

encore plus directement l'argent elle n'imagina rien de

mieux que d'empoisonner son mari. On dit qu'elle a fait

périr de la même manière son père. Quoiqu'il en soit elle

a été arrêtée avec le clerc et une servante qui la secourut

dans ses complots atrocés. M. Kramp qui l'avait vue souvent

dans sa prison à la maison de force dit qu'elle ne donnait

pas des preuves de la moindre sensibilité et que même

l'idée de périr par la guillotine ne produisait aucune

impression sur elle. Elle a avoué le meurtre de sa tante

et de son mari mais elle nie avec obstination celui de son

père surtout aussi puis qu'en ce cas-là la peine est plus grave

et qu'avant la guillotine on a la main droite coupée.


pagina: 110

Mecredi

Hulshof Lijkrede op Klaas de Vries

Voilà une excellente oraison funèbre: Quelle simplicité

quelle éloquence. Klaas de Vries était un ministre mennonite

homme instruit et qui attirait surtout nombre de gens

à sa prédication par la simplicité et la naïveté et la

facilité de ses sermons. Son caractère fut excellent. Et

hulshoff lui a érigé un monument qui durera autant

qu'on lira notre langue. Comme une preuve du style toujours

beau et souvent sublime de l'auteur peut servir la

figure suivante.

Deze waarheid zal bestaan, zelfs wanneer het bezielde stof

dat dit gebouw vervuld in lijken zal veranderd zijn.

Il suit plusieurs vers qui ne signifient pas grand chose.

Celui de De Bosch est un de ses premiers. Celui de W. Kops

littérateur savant mais qui ne prétendait

nullement à la poésie finit par ce vers.

De Vries was Hulshofs lof de lofspraak Hulshof waardig.

Jeudi 13 Février

Voilà que hier une partie de de la contre-révolution

a eu lieu sur notre marché sur la nouvelle qu'on

avait défendu dans la belgique la distillation des

liqueurs fortes et la crainte que ceci aurait pareillement

lieu à Schiedam. Le seigle fut vendu 13 fl. plus bas.

On a ranimé le propos de l'amalgame des

cultes et l'on dit que le régisseur est déjà en ville.

Mélanges

Un des hommes les plus singuliers que notre patrie ait

produit dans le dernier temps est sans doute Haafner.

On en peut juger par ses ouvrages. Cependant on a accusé

sa véracité et ses avantures romanesques ainsi que

son style poétique pouvaient naturellement faire

naître cette idée. Cependant plusieurs personnes qui

l'ont connues ont assuré que c'était un homme

absolument sans prétention ou enflure. Mon grand-

père de Vos l'a connu et était charmé de son esprit. Deux

choses dans son voyage avaient entr'autres été révoqués

en doute. C'était son séjour dans la caverne et

la morsure d'un serpent. À l'égard du premier article

il lui dit venez chez moi et je vous montrerai les

lettres des Anglais qui ont visité cette caverne

après moi et à l'égard du second il montra

quelques doits encore roidis par la cicatrice de

cette terrible morsure.


pagina: 111

Dryden works v. 1 & 2

D'après le plaisir que Pope en général m'avait

causé à la lecture j'avais espéré que Dryden

compté parmi les plus fameux poètes anglais ne

m'en ferait pas moins, mais ces deux volumes m'ont

fort trompé dans mon attente.

Le premier volume commence par un éloge de Cromwel

rempli d'un bout à l'autre des flagorneries les

plus basses. Suit un poème sur la restauration de

Charles 2 où celui-ci est élevé

jusqu'aux cieux. Ceci ne donne pas une idée

avantageuse de l'auteur.

Vient ensuite un poème que l'auteur se plaît d'appeler

historical et dans lequel il célèbre l'année 1666 à

laquelle il donne le nom d'Annus mirabilis. Il fait

là l'apothéose de la guerre avec la Hollande et la

description de toutes les batailles navales mais il

parle de nos ancêtres avec le mépris le plus révoltant

et selon lui la bataille de 4 jours fut gagnée par

les Anglais. Il y a de beaux morceaux sur l'incendie

de Londres mais les flatteries de Charles 2 dans cet

ouvrage ainsi que dans deux poèmes qui suivent

sont insupportables. C'était sans doute à propos de

ce poème que Loots a dit.

Grijp Dryden nu de lier gesnaard om laf te vleijen

Zing kruipend voor uw vorst gelijk weleer gij deed

De glorie van zijn volk daar 't felle slachting leed

Un poème sur la révolte d'Absalon. Tout est ici allégo-

rique. Charles 2 est David Le duc de Monmouth Absalon

Shaftsbury Achitophel etc. Je trouve ce poème froid

à glacer.

Je veux bien convenir que je ne comprend niThe

medal ni Mac flecnoe The layman's faith qui se rapportent

tous deux aux circonstances aussi que long

poème au commencement du 2 vol. intitulé

The panther and the hind qui est tout à fait

allégorique sur les disputes et les cabales de la

cour.

Quelques épîtres sur différens sujets où il

y a beaucoup d'esprit et de poésie.

Une infinité de Prologues qui sont

diablement ennuyeux à lire.

Quelques élégies parmi lesquelles il y en a

d'assez jolies.

Vide T. 12 No. 79 80 81.


pagina: 112

Point de nouvelles politiques rien exceptés des

événemens qui arrivent de tems en tems et qui

vous forcent à garder la plus grande circonspection

en rue puisqu'on arrête les gens pour les moindres

bagatelles. On a même pour tirer encore quelques florins

fait revivre l'affaire des passeports et arrêté force

gens qui n'en avaient point.

Littérature

Shakespear. Henri 6 2 & 3 Richard 3 Henry 8

Plus je lis les pièces de Shakespear plus je m'amuse

et plus je trouve quelle profonde connaissance il avait

du coeur humain. Quoique j'aie lu dans un ouvrage

Anglais qu'on devait ranger les trois parties de Henry 6

parmi les moindres ouvrages de Shakespear je ne suis

pas de cet avis et j'y trouve de fort beaux morceaux.

Richard 3 est sans doute supérieur son caractère

est supérieurement bien peint et il s'y trouve

des scènes superbes.

Henry 8 est encore plus historique. On voit que

l'on est dans un tems plus civilisé, mais l'art avec

lequel certaines parties sont conduites est fort beau.

Le caractère de cette bonne Cathérine et de Wolsey

sont fort bien peints ainsi que les menées des

courtisans.

J. Bruin m'a lu hier une pièce en un acte qu'il a

intitulée La métromanie et dont l'idée n'est pas

mal choisie mais un peu forcée.

Mecredi 19 Février

Annales du Lundi chez P. d. C.

C'est par là que je veux commencer. C. Walré et D. Rahusen

y étaient aussi l'on fut fort gai et fit toutes sortes de

folies. Dylius était parfaitement en bonne humeur

il osa gager avec mon grand-père un régal de glace qu'une certaine

expression (wie die een toren gaat bouwen zit niet eerst

neder en overrekent de kosten) se trouvait dans le vieux testa-

ment au lieu qu'elle était dans le nouveau. Ainsi défait

on lui conseilla de ne plus exposer ses connaissances

théologiques mais bientôt il y retomba en disant qu'un

texte (de vliegen doen de zalve des Apothekers stinken

en opwellen) se trouvait dans les proverbes où l'ecclésiaste.

Mon grand-père gagea que ce mot ne s'y trouverait point.

On fit chercher la bible et Dylius fut vainqueur.


pagina: 113

Il fut alors bien glorieux de sa victoire. Il raconta

premièrement que quelques dames s'étaient trouvés

mal de l'usage d'une espèce de café artificiel ainsi que le

conte qu'on avait fait d'une femme qui avait mis au monde

un enfant moitié loup et moitié ours. Il avait été voir

cette femme à l'hôpital et lui avait trouvé le ventre

d'une circonférence fort étendue mais elle n'avait encore

rien produit.

On parla ensuite du chant. J. de Vos chanta l'air de

Pierlala à la manière Italienne et Dylius chanta

plusieurs airs du mariage secret mais ce n'était que

Parlando. On lui fit ensuite imiter Dessaur. On

fut très gai mais un rhume que j'avais me

gâta le plaisir de la soirée.

J'ai été beaucoup occupé des préparatifs de la fête chez

Dylius.

Parmi les mesures paternelles de S.M. pour le bonheur des

Amsterdammois on peut compter le décret qui lève la garde

soldée parmi la réserve des deux conscriptions. On a déjà donné

ƒ 2200 pour un remplaçant dans cette garde ce que est en grande

partie occasionné par la crainte que ces gardes ne soient

bientôt employés autrepart car après de telles mesures

on doit se défier.

Au marché la stagnation causée par la crainte qu'on rétracte

la permission de distiller des liqueurs fortes a cessé et

les prix sont montés considérablement. Hier un seul

courtier a vendu 900 L. 120 H. R. 330 gd. Ces prix sont

énormes et peut-être ils deviendront bientôt plus

énormes encore.

Une pièce qu'on a donné avec assez de succès au théâtre

Hollandais est le moulin d'Auerstad dont le sujet est tiré

d'une anecdote arrivée dans le tems des dernières guerres

des français. Il y a entr'autres une scène où l'on voit

un champ de bataille semé de cadavres c'est une idée digne

de nos Racines modernes qui pensent faire oublier la

faiblesse de leur exécution par la pompe des décorations

et du spectacle. O lepidum caput.

Le grand-père de Vos fit un beau sermon sur le désespoir

de Judas mais sa voix et sa déclamation furent si

faibles que peu de personnes pouvaient l'entendre

et encore moins le comprendre.


pagina: 114

Littérature

Dryden T. 3. Cowley. Denham

Partout j'ai lu que M. Dryden avait été un des poètes les

plus féconds de son pays, et voici encore un volume qui

ne contient que des imitations. Je dois aussi observer que

plus je compare la langue Poétique de l'Angleterre avec

la nôtre et la française je trouve dans cette dernière

beaucoup plus de force et dans l'autre beaucoup plus

d'élégance que chez nos confrères insulaires. Mais passons

à Dryden.

Palamon et Arcite conte de Chaucer qu'on pourrait tout

aussi bien appeller un poème à cause de la noblesse du

style et de l'action voici le sujet.

Thesée est excité par les veuves des sept chefs

morts devant Thèbes à assiéger cette ville. Il la prend et fait entr'autres

prisonniers Palamon et Arcite tous deux princes du sang

liés par la plus étroite amitié. Cependant l'amour qu'ils

conçoivent tous deux dans leur prison pour Emilie soeur

du roi d'Athènes met la discorde entr'eux. Arcite est relâché

à la prière de Périthous sous condition expresse de ne

jamais paraître sur le territoire d'Athènes. Il tombe malade

d'amour et déjà l'un pied dans la tombe se déguise part

pour Athènes et occupe bientôt une place distinguée

à la cour. Un jour il se plaint dans un lieu écarté des

obstacles qu'éprouve son amour. Palamon son rival

échappé du prison se trouve caché dans ces lieux et le

reconnaît. Ils prennent la résolution de disputer la

belle en champ clos. Mais au plus fort du combat Thesée

arrive avec sa suite on lui conte l'affaire. Il veut premièrement

les condamner à mort mais ensuite il leur donne la

liberté et exige que dans un an ils viennent reprendre

le combat chacun accompagné de cent chevaliers. Le roi

fait en attendant construire un cirque somptueux

et fait tout préparer pour rendre cette fête brillante.

Les champions arrivent. Arcite implore la faveur de

Mars et l'autre celle de Vénus. Le vieux Saturne décide

que le favori de Mars sera vainqueur et que celui

de Venus aura la belle. Palemon perd le combat mais

Arcite victorieux fait une chute qui lui coûte la

vie et Palemon voit enfin son amour couronné.

Tel est le sujet de ce poème intéressant où il

se trouve de fort belles descriptions.

Quelques fables d'après Ovide et le 1er livre de L'illiade.


pagina: 115

Sigismonda et Guiscardo de Boccace

La belle Sigismonda est fille de Tancrède prince de

Salerne qui la chérit tendrement. Mais importée par

l'amour elle contracte un mariage secret avec un

simple gentilhomme nommé Guiscardo. Son père

s'en apperçoit et après avoir vainement tenté de

persuader sa fille il fait périr son amant et lui

envoie son coeur. À cette effroyable vue Sigismonda

s'empoisonne.

Ce conte est assez joli mais je trouve que Sigismonda

fait un peu trop la raisonneuse.

Cowley

Voilà encore un poète anglais qui ne me plaît pas trop.

Il n'y a aussi ici qu'une trentaine de vers de lui. Cela

s'appelle je crois de la poésie légère mais en ce genre-là

nous avons de meilleurs poètes.

Parmi ce petit nombre il y a encore des imitationes d'Anacreon,

de Catulle, d'Horace et de Martial. Je me suis accoutumé

une fois pour toutes de ne pas lire ces éternelles

imitations des poètes latins.

Puis viennent encore des vers sur la mort d'un tel et

d'un tel qui quelques jolis qu'ils puissent être

ne vous intéressent jamais beaucoup.

Les morceaux les plus jolis de cette collection sont

selon moi The complaint et surtout la belle ode

To Light.

Denham

Voilà encore un joli poète. On trouve ici un petit

poème champêtre intitulé Cooper's hill. J'ai découvert

entr'autres ici un larcin de M. Delille qui a traduit

presque mot pour mot le morceau sur la chasse

de Denham. C'est un peu trop fort. Il s'est bien gardé

de joindre ce morceau aux autres descriptions de

la chasse qu'il place dans ses notes.

The progress of learning quoique moindre est aussi

un joli poème.

Puis encore quelques pièces fugitives parmi lesquelles

The petition of the poets to the house of commons et

Friendship against love and marriage m'ont le

plus plu.

La traduction du 2 livre de l'Énéide.


pagina: 116

V. der Palm Bijbel voor de Jeugd vol. 1

V. der Palm ne peut rien écrire qui soit mauvais. C'est

incontestable. On remarque dans cet ouvrage qui contient

la paraphrase des premiers chapitres de la Génèse jusqu'à

Noé la même clarté d'idées et l'éloquence qui brille dans

ses ouvrages. Mais l'auteur ne se serait-il pas laissé

entraîner par son imagination brillante pour

former des hypothèses plus convenables dans un ouvrage

à Systemis que dans un livre destiné à donner à des

enfans la notion de la bible. On peut remarquer ceci

surtout dans l'explication qu'il donne de l'histoire

du serpent.

Bilderdijk Fingal

J'ai relu avec beaucoup de plaisir cet ouvrage du

premier de nos poètes. Il est vrai que les redondances

continuelles d'Ossian et les mêmes images fatiguent

mais c'est aussi une versification telle que celle de

Bilderdijk qui seule peut les faire excuser.

Kuthullijn vice-roi de Kormak dans Erin (Irlande)

est attaqué par Zwaran roi de Lochlin (Norvège). Il doit

faire une retraite mais Fingal roi de Morven (Écosse)

venant au secours de ses alliés défait Zwaran à son

tour le fait prisonnier et le force à la paix.

Au reste comme le dit Bilderdijk avec vérité on ne peut

pas appeller ceci un poème épique ce ne sont que des

chants héroïques. Aussi ces chants sont-ils remplis

de toute espèce d'épisodes et d'aventures de toutes

sortes de Héros qui sont récités par les bardes lorsqu'ils

doivent fêter par leurs chants les repas de leurs

rois.

M. Koopmans a fait cette semaine à Felix un discours

sur le professeur Hesselink comme Philosophe

Physicien et Mathématicien qui a été fort goûté.

Bilderdijk a récité hier un vers sur le monde des

esprits mais l'élévation de son sujet joint à

extrême faiblesse de son organe a fait que ses

accens n'ont pas produit beaucoup d'effet sur

les âmes de la plupart de ses auditeurs.

Le seigle était monté jusqu'à 120 H. 346 gd. mais

la nouvelle des restrictions qu'on imposerait sur

la liberté de la distillation des liqueurs fortes en

a fait baisser le prix de 10 gd.


pagina: 117

Mardi 25 Février 1812

Encore tout rempli des plaisirs de la veille je n'en puis

rien imaginer de mieux que de coucher au plus vite

quelque chose sur le papier.

Fête de Dylius

Nous nous assemblâmes tous après 6 heures en différens

costumes. Mon papa était ministre ma mère sa femme

C. Walré une paysanne dans le rôle de Kaatje dans la

partie de chasse de Henri 4 et P. de Cl. portefaix C. d. C. paysanne

allemande C. de Vos frisonne et son mari Paysan. Quant

à moi j'étais paysan ou garde comme on voulait m'appeller.

Dylius était tout surpris de nos costumes. Il vit mon papa au

bout de l'escalier et se mit toute de suite au fait en

disant Dag professor Paradijs. Nous vîmes qu'il s'était

fait beaucoup de changemens dans la chambre. Van Huissen

était disparu le tableau de Rembrand avait remplacé

Boerhave. On voyait Walacus et deux portraits

anglais etc...! Bientôt le médecin qui était disparu

revint dans un costume superbe de chambellan rouge

brodé en or. Nous en fûmes ravis et lui fîmes

remarquer qu'il n'y manquait rien que des boucles d'or

qui furent aussi bientôt ajoutées. Chacun enfantait

mille propos joyeux qui se rapportaient à son déguisement.

Les deux vieux pères ne tarissaient pas Leurs ris.

Enfin l'oncle lut une espèce de sermon en vers sur

la médecine avec une quantité de mots Arabes qu'il

avait tiré d'un ouvrage de Pater Abraham. C. Walré lut

vers composé par son père et dont un livre de [onl.]

intitulé Nut der Soberheijdt faisait l'argument. Après

cela on fit une excursion à la chambre à coucher où on

trouva tout le cabinet joliment arrangé dans une

fort jolie armoire vitrée. Il nous montra différentes

curiosités qui excitaient aussi la curiosité surtout

celle des dames. Après que tout eut été admiré à

loisir on proposa une partie de cartes et lorsqu'elle

fut terminée il nous invita au souper. Les deux

battans s'ouvrirent et nous ne vîmes non seulement

tous les dessins marqués de notre ancienne bien-

veillance encadrés, mais aussi une lampe austriche.

Le souper fut splendide. Nous eûmes de la biche, du dindon de la soupe

de la gelée du brochet du saumon, des légumes une tourte

des pâtés à la viande de la gelée de pommes de chêne enfin

toutes sortes de délicatesses. On apporta le dessert mais

nous attendîmes longtems après la pièce de milieu

et bientôt on vit arriver le mont Parnasse où si

se promenaient toutes les muses. Il y avait des vers

allégoriques et entr'autres un vers

d'anniversaire sur C. Walré par J. de Vos.


pagina: 118

C. Walré chanta des couplets fort joli composés par son père.

Mon oncle de vos et moi nous sortîmes pour nous

habiller et après avoir pris quelques morceaux de

l'excellente glace aux pêches nous jouâmes notre dialogue.

Le parnasse s'étant levé il en avait pour sortir un ballon

avec divers hommes dans un petit bateau portant

des devises en l'honneur de l'amitié. Bientôt la

glace disparut et on vit paraître un tour de

friandises et de confitures. Les dames remplirent

leurs cornets de papier de toutes les jolies choses

qu'il y avait entr'autres des nides[?] de [onl.]. Bien-

tôt nous découvrîmes une composition allégorique

où Dyl. avait voulu représenter toute la famille

sur le parnasse en poupées avec un

vers allégorique. Enfin on demanda l'auteur et

Dylius parut. Cette fête avait été charmante. Le

vieux jean avait servi en bonnet de nuit et

le jeune jan en femme car le médecin lui

avait pris son bel habit de livrée. On proposa l'invitation

de F. v. Heukelom pour se rendre là après deux lundis qui fut acceptée.

Jeudi 27 Février 1812

Dans longtems je n'ai pas parlé de nouvelles politiques

et en effet j'en sais bien peu. La circulation ordinaire

des nouvelles et tout respire un calme plus dangereux peut-

être que la tempête. On dit que toutes les lettres destinées

pour la Suède sont arrêtées à Hambourg.

J'ai renvoyé le maître alllemand le grand Quicher. J'en ai vu

jamais homme si flegmatique et si sec. Dans les derniers

tems il entrait dans la chambre avec ces mots Guten Abend

Herr Du Clercq. Wie befinden Eure Papa und Mama.

Il corrigeait machinalement qu'une traduction puis

Haben Sie nun kein Feder? Il tirait un tome

des comédies de Kotzebue de sa poche. Je lisais. Il me

reprenait deux ou trois fois pendant la lecture et proférait

quelques acclamations quand les acteurs se disaient des

insolences comme de Ach Herr-je Wer sagt das. Il avait

encore deux phrases [onl. Gotisch]

das Getreide noch nimmer. Puis quelques minutes avant

huit heures il saississait son livre disait Wollen wir

nur aufhören et sortait. C'était toujours le même manège.

C'était un bon homme et qui savait bien les principes

de sa langue et voilà tout. Il donnait des leçons

en anglais et en français. Étant occupé un jour

lorsqu'il vint à lire dans un volume des british

poets je lui en montrai le texte et lui demanda


pagina: 119

s'il connaissait cet ouvrage. Il jeta les yeux sur le mot

Edinburgh mot imprimé au bas de la page pour

notifier le lieu de l'impression et dit aussitôt Ach

ja der Edinburgh ist ein groszer Mann der hat viele

schöne Bücher geschrieben. Un grand défaut qu'il avait

était sa curiosité qu'il fit violemment agir dans

ses premières leçons mais il s'en abstint enfin lorsqu'il

vit que je n'avais aucun plaisir à répondre à ces

questions indiscrètes.

En Anglais je traduis De indianen in Engeland et je lis

The life of King John de Shakespeare. M. Ferguson me

plaît beaucoup. C'est un homme qui a beaucoup plus

de connaissances qu'on le dirait supercifiellement.

En Latin Pline et Tacite. M. Tissot vient de perdre

sa femme. Cette perte l'aflige vivement et le contrarie

fort puisque non seulement il se voit forcé de soigner

les détails du ménage mais aussi de laisser ses

enfans seuls chez lui.

J'en suis au Grec avec M. Bosscha. C'est un homme qui

me plaît fort quoiqu'il ne soit pas entièrement libre

de la rouille de pédantisme dont aucun maître d'école

ni recteur ne peut se préserver. Nous en sommes main-

tenant aux Aristus et en général aux verbes. Ce

sont ces contructions que je trouve fort difficiles dans

le grec.

Le dessin va assez bien. Je n'y deviendrai cependant jamais

un fénix. D'après le conseil de mon oncle je suis retombé

au milieu des têtes des mains et des pieds.

La catéchisation continue aussi encore. Mes

réponses sont sur certains sujets beaucoup

meilleures que sur d'autres. En général je trouve

que Mr. Koopmans traite la chose un peu superficielle

du moins je ne me sentirais pas encore disposé à

faire ma confession de foi après un tel cours et j'aime-

rais surtout à faire encore des recherches sur

les bases fondamentales de la religion et consulter même

à cet égard les écrivains qui en sont les ennemis.

Alors le reste de l'édifice est facilement bâti

car nous ne sommes plus dans un siècle où l'on n'a

attaqué que les vétilleries des sectes entr'elles mais

jusqu'à l'existence de Dieu, de notre âme la naissance

de Jésus Christ et ainsi c'est plutôt sur de

pareils sujets qu'il faut s'armer que sur des disputes

entre les Réformés les Mennonites etc.

Je lis avec beaucoup de plaisir sur la bible l'ouvrage

de Niemeyer.


pagina: 120

La lecture de J. Kops. C'est encore là une occupation

qui m'ennuye assez. Il dit trop souvent la même

chose et la lecture d'autres finit bientôt par

vous ennuyer. Nous lisons maintenant Stijl. C'est

un ouvrage de beaucoup de mérite que j'espère bientôt

lire en entier.

Géométrie et Physique. J'ai négligé un peu ces deux

articles dans les derniers tems. Je vais bientôt me

remettre à la Physique. J'ai repassé il y a peu les

commencemens de Wolf.

Extraits d'Histoire. J'en fais encore avec ardeur car

je trouve que c'est là le meilleur moyen de se planter

l'histoire en tête. Celui qui m'occupe maintenant est

l'extrait de l'Histoire de la révolution.

Copies. Je trouve encore une des occupations les plus

agréables celle qui me retrace les morceaux des meilleurs

auteurs. The british poets et quelques poètes Hollandais

me fournissent une ample collection plus grande

que je suis en état de copier chaque semaines.

La copie des sentences a été un peu négligée. Pope

m'a fourni beaucoup de phrases heureuses.

Je continue encore à être grand amateur de

la poésie. J'ai entamé avec Bruin une tragédie sur

la mort d'Hannibal mais les vers en l'honneur de

Dylius et de ses fêtes m'en ont empêché dans les

dernières semaines.

M. Van der Palm a prononcé hier à Felix un discours

qui doit avoir été fort beau. Il a parlé de la poésie arabe

dont il a cité un exemple après avoir décrit les moeurs

et le génie de ces peuples. Il a fini par un exemple

de la poésie Hébraïque.

Le misérable van Ray qui ose interdire la publication

à nos meilleurs ouvrages a donné une traduction de

Cendrillon où il a fait un haché misérable de ce joli

opéra. La traduction est si pitoyable que quel-

quefois elle contredit les règles du bon sens.

La jolie Romance de Je suis votre servante. La petite

cendrillon est terriblement massacrée. L'épître de dédication

à Made. Kamphuizen est au dessous de toute critique.

Parmi les fautes grossières qui s'y trouvent on lit

entr'autres De huis der Vorst. De pareilles jolies expressions

y fourmillent et c'est là l'homme qui est le censeur de

tous les nouveaux ouvrages. On a défendu de dire dans une

pièce daar komen de franschen zij hebben honger en

dorst et dans une autre de parler de moutons

Espagnoles. O lepidi capites.


pagina: 121

Jeudi 5 Mars 1812

Encore une Semaine de passée et point d'annotations.

Cependant bien de fêtes deux bals! C'est beaucoup. Le premier

fut chez Boissevayn. De jolies filles de la gaîté enfin on

s'amuse mais jamais presque oublie.

Les Annales du Lundi

Chez le grand-papa

On célébra les fiançailles de M. Dylius et de Mll. Walré

et but des conditions à leur santé. Le grand-père fit son

régal de glace. Je lus mon vers sur les amusemens de la

semaine passée. J. de Vos gronda le médecin de nous avoir

trop bien régalés. On récita et chanta les vers de J. Walré

on décréta que toutes les pièces lui seraient envoyées.

Une société de jeunes gens des deux sexes avaient

formé la résolution de jouer une pièce. Ils l'avaient

apprise et la représentèrent dans un local que mon

oncle Rahusen leur prêtait. C'était une maison qu'il avait

dans les Houttuinen. Cette partie lui plut tant qu'il

résolut d'en donner une seconde à ses frais. Ceci donna la

naissance à cette partie. On s'assembla dans la maison mentionnée

ci-dessus. Le théâtre était joliment établi sur un

grenier avec des bancs en amphithéâtre et une fort jolie

décoration. La première pièce fut l'assemblée de famille de

Ribouté.

Un riche propriétaire est mort et a laissé une fille qu'on

ne croit point légitimée. Il est mort sans faire de

testament mais ce fait est ignoré et on suppose que cette Angé-

lique est unique héritière. On convoque une assemblée de

famille. Les membres de cette famille sont: Araminthe

jeune veuve coquette sa soeur Rosine personne assez insigni-

fiante Valmont fat de Paris Torlis banquier fiancé à

Angélique et Valère jeune officier amant d'Angélique tous

nourris des bienfaits du père d'Angélique. Enfin

Valville frère du défunt misantrope et philosophe.

Araminte et Valmont obsèdent Angélique de flateries

mais lorsqu'on apprend qu'elle n'a rien ils la traitent

indignement et font renoncer fortes à son mariage

avec elle. L'assemblée de famille a lieu. Blainville confond

les ingrats en leur montrant un acte par lequel Angé-

lique est légitimée. Il se retirent confus. Valère reçoit

la main de sa cousine. C'est une pièce assez bien écrite

et en fort bons vers.

Blainville H. Willink Il était entièrement masqué

et eut en effet de fort beaux momens.

Valère J. v. Eeghen réussit beaucoup moins aussi

il faut convenir que c'était un rôle ingrat. Mais il

avait dans tous ses mouvemens et actions trop de

froideur et de raideur.


pagina: 122

Valmont J. Vollenhove Il n'avait pas besoin de

sortir beaucoup de son caractère pour ce rôle qu'il exécuta

fort bien.

Torlis J. de Lanoy Il joua fort bien et observa

fort bien tout qu'il devait.

Le Notaire Beirenbroek C'était dommage que ce rôle

était si petit car il l'exécutait avec beaucoup de justesse.

Fabrice A. Hartsen Il joua ce rôle avec beaucoup de gaîté.

Angelique C. Bruin C'était vraiment au dessus de toutes

louanges. La charmante naïveté qui régnait dans

son jeu était adorable surtout lorsqu'elle conjurait ses

parens de lui laisser le portrait de son père.

Araminthe J. Hartsen joua avec beaucoup d'enjouement

et de vivacité.

Therèse et Rosine S. & D. Kool C'étaient deux petits

rôles assez insignifians. La première se faisait remarquer

par des gestes qui étaient tout de travers.

De toneelrepetitie par H. Hartsen.

Van der Scherm notaire est jeté dans le tragique et lui

et sa chère famille ne font que répéter et jouer la

comédie du matin au soir. Ils ont pour compagnon un

acteur nommé Rolberg amoureux de Klaartje, servante

du notaire. La famille de celui-ci doit jouer l'assemblée

de famille celle qui doit jouer le rôle d'Angélique est tombée

malade. Rolberg fait consentir Klaartje à s'évader et veut

l'introduire comme l'actrice qui remplacera le rôle

d'Angélique. À l'instant Van der Scherm s'avance dans

le costume le plus grotesque et répétant le passage où

Hamlet est poursuivi par l'ombre de son père. Sa fille

et un monsieur qui entrent en répétant l'assemblée de

famille le troublent dans ses rêveries. Il est au

comble du désespoir surtout parce qu'il croit qu'ils

répètent Cendrillon. Sa femme au grand panier le calme.

Il promet d'assister à la répétition. Rolberg offre son Angélique.

Dans l'intervalle M. et Madame van der Scherm répètent

la scène où Hamlet fait jurer sa mère sur l'urne de

son père. Ils se servent à cet effet d'une théière. Enfin

les acteurs arrivent, on rapporte la nouvelle de l'évasion

de Klaartje ce qui met Mad. v.d. Scherm au désespoir. On

reconnaît Angélique. Celle-ci tombe aux pieds de sa

maîtresse et demande sa grâce. Elle est accordée et

on la marie avec Rolberg.

Cette pièce est écrite en vers Hollandais mais on y a mêlé

une terrible quantité de phrases françaises.

J. v. Eeghen dans le rôle de Rolberg jouait mieux que dans

la grande pièce.

A. Hartsen et J. Hartsen dans les rôles de Mr. et Mad. van

der Scherm ont captivé tous les suffrages.


pagina: 123

J'avais composé un petit vers français pour jeter sur le

théâtre. Je l'avais déjà fait lire à H.W. qui le lut mais

bien mal. On appela l'auteur quelques-uns demandaient

l'auteur de la pièce, d'autres celui du vers. Ceci occasionna

une grande confusion. À cela se joignait encore qu'on ne

put réussir à lever la toile. On aurait voulu que j'eus

paru, mais dans ce cas ils auraient pu m'envoyer quel-

qu'un. Enfin A. Hartsen parut et le spectacle finit.

Le bal qui suivit fut fort gai.

Point de nouvelles politiques. On raconte que les français

ont été battus à Rugen.

On gagne beaucoup d'argent au théâtre hollandais

par la représentation d'une misérable traduction de

Cendrillon par van Ray.

Vendredi 6 Mars

Depuis quelque tems les prix de nos grains ont cessé de prendre

faveur. Cependant ils sont encore montés à des prix exorbitans

mais la grande quantité de bleds qu'on envoie de l'Issel

et d'autres départemens étonne les spéculateurs. Le maire a

convoqué chez lui plusieurs négocians en grains et leur a dit

que vu la grande différence des prix du bled dans les

villes Anséatiques S.M. avait résolu de diriger les speci-

laams[?] des négocians vers ce point afin de se procurer ici

une plus grande quantité de bled et que non seulement

on arrêterait toute entrave mais qu'on pourrait se procurer

les permis avec la plus grande célérité. Cependant cette

déclaration a fait très peu d'effet sur les négocians à

cause de la longueur et de la difficulté de la route et n'a

eu aucune influence sur notre marché.

Hier au soir j'entendis à Felix un discours du Prof. Bosscha.

Il commençait par dire que quoiqu'on ne pût point se glorifier

d'avoir pris naissance dans un état aisé ou d'une famille

illustre, que cependant ces prérogatives n'étaient

du moins pas sans valeur. Qu'il en était de même avec l'amour

et le devoir de soutenir la gloire du Pays où l'on était né.

Il s'entendit sur l'ingratitude et l'esprit supercifiel des

étrangers qui après avoir allumé chez nous le flambeau

de leurs sciences nous représentaient comme un peuple

chez qui quelques rayons de civilisation venaient de

percer tout nouvellement. Il s'étendit premièrement

sur le caractère moral des habitans, puis il retraça l'origine

des sciences chez nous. Ils s'étendit beaucoup sur les Bataves

mais un sommeil presque invincible suite du bal de la

nuit passée m'arrêta en ce moment. Il parla ensuite

d'Érasme d'Agricola et de plusieurs autres savans et


pagina: 124

dit que comme ce n'était qu'à la littérature ancienne

que les peuples de l'Europe devait leur civilisation il serait

de la plus grande ingratitude de ne pas honorer ces hommes

qui s'étaient distingués en rassemblant, en éditionnant

ou en expliquant les acteurs latins ou Grecs. Il parla

beaucoup sur ce chapitre et y revint à chaque instant. Il

nous montra Schultens et Valkenaer dans la littérature

étrangère, Grotius dans la théologie et le droit naturel.

Il dit enfin que s'il voulait considérer ces grands hommes dans toutes

les classes il aurait beaucoup trop longtems à faire et finit

son discours qui avait duré plus d'une heure et demie.

Littérature

Conseils à ma fille par Bouilly 2 v.

Ce charmant auteur avait captivé tous les suffrages

par les contes à ma fille. Ceci sous le titre de conseils renferme

une nouvelle série de contes pour une jeune fille plus

âgée. C'est un style charmant mais les sujets comme dans

presque tous les ouvrages français sont souvent un peu

trop forcés et romanesques Parmi les plus jolies on trouve

Les oiseaux de Mad. Helvetius

La robe de Mad. Cotin

L'arbre de Catinat

Le premier pas dans le monde

Les dangers d'un bon mot

Le choix d'un époux etc.

Mardi 10 Mars 1812

Encore une comédie chez Cramer. Qui est ce Cramer. C'est

un f. dans l'étendu du terme. C'est un petit fat qui après

avoir écrit sur le théâtre français un espèce de journal

sans sel nommé De Kraai s'est mis aussi en tête d'écrire

des comédies ou rhapsodies. La première fut De hut in 't bosch.

Elle est presque illisible. Car sans parler de l'invraisemblance

de sujet cette pièce est si longue et surchargée de déclamations

qui ne signifient rien qu'elle déplaît à tout le monde.

Cependant on la joua souvent et avec un grand concours

de spectateurs. Het vissersmeisje eut encore plus de succès.

C'est bien une rhapsodie on y voit des combats des poursuites

des fuites une noce et un bouffon. C'est tout ce qu'il faut

pour plaire sur une scène où à la 1er représentation on n'a

pu trouver de place pour voir la Cendrillon

maltraitée par le misérable van Ray. On dit que Cramer

va publier un nouveau chef d'oeuvre nommé Het Geraamte

et un vaudeville nommé Het spook en de broeibakken.


pagina: 125

11 Mars

Enfin revenons à notre partie. Nous nous assem-

blâmes déjà à 6 heures dans une maison vide où il

n'y avait que quelques bancs pour les dames les messieurs

avaient la permission de se tenir debout. J'y trouvai très

peu de connaissance et nous fûmes pendant un couple

d'heures à nous promener en long et en large. Enfin

on monta à l'assaut et après avoir franchi une

infinité d'escaliers on arriva au grenier où devait se donner

la représentation. Les bancs étaient tous d'une égale

hauteur mais pour faciliter la vue on avait ménagé

un certain espèce entre les spectateurs et le théâtre.

La toile était assez joliment peinte avec la devise rien

sans peine. Il faut savoir que c'était Cramer qui à la

fois avait été le charpentier et le peintre de son théâtre.

On commença par Bruis et Palaprat traduit en prose

Hollandaise par un certain Van der Vijver, maître d'école

qui était en même tems acteur. Langhorst et Herstman

étaient Palaprat et Bruis. C'était très bien. Zwaving le duc

de vendôme. Il n'était pas là son rôle aussi l'exécuta-

t-il assez mal ainsi que Mad. Cramer le charmant rôle de

danteuil. Ce n'aurait pas été si mal si elle n'eut mal

prononcé tous les mots. La décoration était une chambre

avec des colonnes rouges. Cramer fut un assez bon huissier.

Après avoir attendu un tems excessif nous montâmes

pour voir Philoctète joué par Langhorst. C'était vraiment

quelque chose d'extraordinaire. Ce n'était qu'un amateur mais

c'était superbe dans un rôle aussi difficile que Philoctète

on voyait sa douleur enfin c'était un nouveau Talma

et tous les spectateurs en étaient ravis. Hersteman

était Pirrhus et Van der Vijver Ulysse. Ce n'était pas mal

mais ce n'était point Langhorst. Les costumes étaient

fort jolis. Hercule joué par Cramer au lieu de descendre

dans un nuage ne se fit entendre que derrière les coulisses.

On a donné Mardi un nouvelle représentation de ce Philoctète

seul où plusieurs acteurs ont assisté mais tous étaient

ravis.

Enfin on donna Le chanoine de Melan. C'est l'affaire de deux

officiers français qui viennent chez un chanoine manger

son soupé et épousé la prétendue de son neveu.

Cette pièce est fort gaie. Zwaving jouait très bien le chanoine.

Cramer remplissait le rôle si horriblement fou du neveu.

Son épouse était Célérie et une petite Mle. Abo Lareviante.

C'était aussi assez joli mais en général rien ne ressemblait

à Philoctète. C'est un phénix dans son genre. Bruin

dit dans un vers qu'il récita à la fin de la pièce.

O Lankhorst in uw spel erkent men Talma weer.


pagina: 126

Il a paru une loi de Mr. le préfet contre tous les foncti-

onnaires publics qui ont transgressé les loix en exigeant

des largesses pécuniaires. M. Abbema le souspréfet a été

mis en prison pour avoir pris des sous pour son signature

pour chaque Attestation de vita on dit qu'il sera condamné

à mort (Quelle apparente justice). Il me souvient d'une

anecdote de Diogène à ce sujet. Voyant conduire en prison

quelqu'un qui avait volé une fiole du trésor public d'Athènes

il s'écria voilà deux grands voleurs qui en conduisent un petit.

Enfin le 2 et 3 Mars on a décidé la cause importante des

empoisonneurs de Wijk bij Duurstede et la cour d'assises a condamné

à mort: la femme Brummelkamp Gerrit

Verkerk le clerc son amant et Anna Rijswijk la servante

comme complices du meurtre de Mad. Beerenburg qui avec son mari de-

meurait dans la maison de Brummelkamp à qu'il avait promis

de lui laisser une partie de son héritage et enfin de celui du

mari Brummelkamp. L'histoire de cette femme que j'ai

entendu raconter avec des détails circonstanciées est entr'autres

une preuve comme on peut être entraîné

petit à petit au crime le plus endurci tel que celui de cette

femme dont l'insensibilité était portée au point que quelques

jours avant la mort de son mari elle lui préparait ses habits

mortuaires et que lorsqu'il était tourmenté par les angoisses causées par le

poison elle lui donna de l'eau qui ne devait servir

qu'à aggraver son mal. Son mari était entièrement adonné

à la boison et ce fut proprement la cause des malheurs et

des crimes de la femme. Elle avait plusieurs enfans. On a

encore tenté d'excuser la complicité de la servante en lui

supposant alors dans un état de maladie ou de déraisonnement.

Il paraît que dans ces derniers tems l'on veuille excuser

tous ces empoisonneurs de cette manière. Or je demande

qu'est que c'est que la démence. C'est un état où la

raison ne peut agir sur nous. Et l'homme maîtrisé

par ses passions est il raisonnable. Comme cela on pourrait

toujours excuser les criminels de cette espèce car à

bien considérer tout il y a bien des foux sur la terre.

Comme cet homme qui dans le jury passé on a absolu quoiqu'il

eût tiré sur sa femme seulement par ce qu'on avait cru

prouver qu'il était fou à cet époque. S'il était fou il

fallait donc l'enfermer car le renvoyer qu'est-ce autre

chose que de lui donner des lettres patentes pour assassiner

tous ceux qu'il voudra. Cependant les trois condamnés

en ont appelé au tribunal de Cassation à Paris.


pagina: 127

Annales du Lundi

Nous fûmes chez mon oncle van Heukelom par reconnaissance

de toute la gaieté qu'il avait cherché chez nous l'été passé. Dyl.

fut faire une visite à une dame dont la peau est hérissée

de pointes lorsqu'il a la fièvre. Nous n'apprîmes rien de nouveau

c'était la présence de la Demoiselle qui par ses ariettes et

sa fausse mort nous a occupé bien longtems.

À notre marché l'orage est tant soi peu passé et la calme

renaît 120 H. gr. Rogge 320 gd.

Littérature

L'histoire de la Révolution par Bertrand du Moleville

14 v. en 8o.

C'est un ouvrage que j'ai lu avec beaucoup de plaisir. L'auteur

ex-ministre constitutionnel de marine est fort impartial

quoiqu'il soit porté pour la côté royaliste. Je crois bien qu'on pourrait

de tems en tems y trouver des inexactitudes mais en général

l'ouvrage est écrit avec soin et pureté. Il n'y a que quelques

personnes dont il forme dans l'un volume un portrait

différent que dans un autre. Parmi eux est roland[?] que

lors de son ministère il fait considérer comme un homme

lâche et faible, gouverné par sa femme et lors

de son suicide comme un homme qui avait des sentimens

élevés et de l'énergie. Mais ces fautes sont bien rares. D'après

le plan d'ouvrage il devait aller jusqu'un jour de Brumaire mais

il ne va malheureusement que jusqu'au dix-huit fructidor[?].

J'en ai fait l'extrait.

Le 16 Mars

Il paraît que le tems ne se fatigue point a être fort

froid quoiqu'il ne gèle point.

Les deux Mr. Kramer et Van Sprekens se sont enfin

séparés. En effet deux hommes pareils ne pouvaient pas

longtems harmonier ensemble. Van Sprekens est un

homme très zélé par son négoce, mais qui en outre manque

entièrement d'éducation et de civilisation. Cramer au

contraire est quelqu'un qui passe tout le jour à fréquenter

les théâtres où les acteurs à faire des comédies ou les

apprendre. Enfin c'est un homme qui met la plus

grande affectation, et fatuité dans sa voix ses manières

et ses habits. Si l'on entend le récit des négligences de

Cramer il faut convenir en effet qu'elles sont exorbitantes

comme p.e. un jour il emporte toutes les notices du prix

courant des huiles pour les distribuer à la bourse

et n'y vient point. Un autre jour il est chargé


pagina: 128

de faire parvenir à Mr. Braunsberg une notice

d'une vente faite pour leur compte, mais il n'en fait rien.

Cependant Cramer rejète la faute sur son compagnon il

dit que celui-ci a fait des spéculations et s'est enrichi avec

l'argent de son père qu'il n'a point d'égards

pour lui etc. O lepidum caput.

Mardi 17 Mars 1811

On rapporte beaucoup d'excuses en faveur de la cause ci-dessus

on dit que violente hémoragie fut la cause qu'il ne vint

point à la bourse. Du moins[?] présent il dit qu'il s'a bien

s'appliquer.

Helmers a récité la semaine passée à Felix un vers sur

le commerce. Il commençait en se représentant s'être dans

un temple de Mercure où on fait des sacrifices à ce Dieu. Puis

il fit un tableau du nord et du midi, de leurs productions et

comme ils étaient réunis par le commerce. Ensuite il fit

un tableau de notre grandeur et commerce passé et finit par

une perspective assez heureuse pour l'avenir.

J'ai parlé quelqu'un qui a lu le rapport de Mr. Noel et Cuver

sur l'état de l'instruction publique dans la Hollande.

Ils donnent les plus justes éloges aux Hollandais surtout

aux écoles de la ville et du nut van 't algemeen qui disent

ils surpassent tout ce qu'on voit de pareil en Europe

mais ils blâment fort la rouille de pédantisme qui est

encore attachée à l'école Latine.

L'Athenaeum illustre conservé son nom et son existence.

Annales du Lundi

On fêta le Mariage de Dyl. Plusieurs baisers furent volés

avec force on eut des histoires en foule jusqu'à ce qu'enfin [onl.] le

dessert. D. fit le récit de tous les maux de se marier

qui fut énormément long. Aussi racontait-il toutes

les particularités et était-il interrompu sans cesse.

J'avais fait pendant ce tems un extempore que

je lui lus.

Encore Cendrillon toujours Cendrillon. On va donner un ballet

de l'illustre petit poucet.

Il fait froid, le coolzad est monté 1 L. La liberté des distilleurs

des liqueurs fortes est permise derechef. Le seigle n'est

pourtant monté que 3 fl. ce qui m'a étonné si le gel

continue la graine de choux montera bientôt

encore plus considérablement.


pagina: 129

Jeudi 19 Mars 1812.

Hier je fus à Felix où j'entendis un vers de Mr. Helmers sur le

bois de Harlem. C'était comme à l'ordinaire chez cet auteur

beaucoup de morceaux brillans mais l'ensemble ne me

plaisait pas trop. Aussi il faut avouer que sa mauvaise

prononciation (car il ne peut prononcer l'r) détruisait

souvent l'effet de ses beaux vers.

Il commença par dire: Qu'un autre chante les lieux

charmans, où de riches vallons entrecoupent des montagnes

etc: je ne les chante pas. Mais c'est le bois de Harlem qu'il

chantait. Il faisait une description des fleurs qui parfu-

maient ce bois et des troupeaux qui erraient à travers

les ombrages, quoique je n'aie jamais l'honneur de les

voir, il faisait des descriptions du porc de la brebis du

cheval et qui je trouvais cependant fort déplacées.

Bientôt il en revint sur ces déclamations si chéries de

nos poètes philosophes. Il racontait sa longue maladie

et dit-il lorsque mes yeux s'ouvrirent dans la lumière

je n'allai point rendre grâce au créateur dans de fragiles

enclos (leeme hutten) mais ce fut au Spanjaardslaan où rien

ne me séparait de lui. Il répéta bien quatre fois cette

figure ainsi que les récits de l'indépendance du poète. Alors il

franchissait l'espace, comme à l'ordinaire nageait dans

l'éther traversait les septimes solaires, forçait tous

les princes et les tyrans à comparaître devant son tribunal

et cherchait au firmament des planètes éteintes etc.

Ces phrases revenaient sans cesse. On se douta bien qu'il évoqua

les ombres de Ripperda, de Kenau Hasselaar etc. etc. même

des Bataves mais c'était beau. Il adressa ses chants aux

pavillon et aux autres palais qui entourent cette enceinte.

Ceux-la dit-il n'était pas comme les pyramides les fruits

des sueurs des humains mais ils étaient les fruits

de l'industrie et du commerce. Il fit aussi la peinture du

Bois lors d'un jour de fête, mais les principaux traits en

étaient pris de la description du jardin de Kensington par

Delille. Encore des grandes phrases sur les poètes. Enfin

le tout finissait par un morceau sur L. Koster

et une violente diatribe contre les tyrans qui disait-il

malgré tous vos efforts il ne vous est plus possible

d'établir votre empire par l'ignorance ou la superstition.

Il a employé dans les deux vers suivans des mots qu'on

ne trouver point je crois chez aucun poète

Hier graast de moederkoe ver van haar hokkelingen

Wijl jonge vaerre en pink al dartlend om haar springen


pagina: 130

Quelqu'un auquel je parlai la semaine passée et qui en

qualité de Harlemois distingué était à portée de le savoir

me dit que cette ville était dans l'état le plus désastreux.

La semaine prochaine on devait annoncer à quelques milliers

de pauvres qui tiraient du pain de la ville qu'ils ne pouvaient

plus compter sur cette assistance. On redoutait même une

insurrection à la suite d'une pareille mesure. Les maisons

de charité étaient dans l'état le plus déplorable. Ce qui

était le pis de l'affaire c'est qu'on avait une somme suffisante

provenance des importations[?] pour la ville, pour pouvoir non

seulement payer les créanciers mais continuer à soulager

les pauvres. Cependant on n'osait pas toucher à cette somme

d'après les ordres de Mr. Alphonse et il était probable qu'elle

serait envoyée quelqu'autre part. Ici on dit que le gouver-

nement a disposé arbitrairement d'une partie de l'argent

de la ville par lequel elle devait payer ses dettes. Je veux

croire que l'empereur soit innocent de pareils abus qui

même sont souvent redressé lorsqu'on a de bonnes adresses

à Paris mais n'est-ce pas une faute essentielle dans un

état despotique que des subalternes puissent décider

arbitrairement dans des choses pareilles.

Pour prouver encore quelle foi on doit ajouter aux rapports

des étrangers fanfarons peut servir l'anecdote suivante.

Un professeur allemand dans un petit village de silésie avait

fait afficher dans toutes les gazettes de l'Europe qu'il possédait

un lycée où l'on apprenait le nec plus ultra

pour l'extraction du sucre des beteraves. Un de mes amis

J. Lucht s'y rendit mais non seulement ils furent renfermés

dans de misérables huttes de terre qu'il était impossible

de réchauffer mais même on leur donna une nourriture

insupportable qui les rendit tous malades et

enfin on s'apperçut que M. le professeur n'était guère

plus avancé qu'on ne l'est ici.

Encore des contes politiques de toute manière. Harlingue

déclaré en état de siège. Une coalition de puissances

septentrionales un armement de tous les individus de

16 à 40 ans, un combat entre les conscrits hollandais

réunis aux Westphalingiens et les français etc.

C. Walré vient de nous quitter après le séjour de plus

d'un mois. Elle est toujours aussi forte aussi gaie

et même un peu trop volage in summa charmante.


pagina: 131

Littérature

Gibbon vol. 1 & 2

Je les ai lus avec beaucoup de plaisir ils vont depuis le

règne des Antonins jusqu'à celui de Claude le Gothique.

Le style m'en a beaucoup plu mais comme l'édition que

je lisais n'était point complète et que j'aime mieux

pouvoir la lire ensuite en Anglais j'ai jugé mieux de

différer la lecture des volumes suivans et je m'abstiendrai

ici de plus longs extraits ou d'un plus grand nombre de

remarques.

Vendredi 20 Mars

Depuis quelque tems nous goûtions un calme trompeur qui

couvrait l'abyme. C'est enfin aujourd'hui que l'explosion

s'est déclarée par le décret trop fameux de la garde nationale.

Je n'ai presque jamais vu régner une pareille consternation.

Et n'est-elle pas naturelle. Premièrement trois conscriptions

dans l'espace d'une année puis une garde soldée et maintenant

une garde nationale. Enfin sous quelque nom qu'on

veuille le déguiser on veut tous nous faire soldats. Et

pourquoi pour satisfaire l'ambition d'un tyran. Quelle

foule de réflexions affligeantes ne se présentent pas à

l'esprit. Cependant on doit avouer qu'il est à désirer que

la grandeur du mal réunisse en vain tous les esprits

vers un seul but et ce but doit être. Mais ne

pénétrons pas dans l'avenir, adressons

nos prières au Dieu de nos pères.

Littérature

Cornelius Nepos

J'ai relu avec beaucoup de plaisir cet ancien compagnon

de mes premiers travaux en latin.

Samedi 21 Mars

Aujourd'hui tout se constate et nous avons même

les règlemens dans nos papiers de cette garde nationale

qui sous quel titre qu'on veuille le déguiser n'est qu'une

conscription.

Je veux citer ici un trait de la bonté d'âme du préfet.

Lorsqu'il reçut les dépêches qui contenaient ce décret un de

ses commis homme de bonne famille et qui est tous les jours

avec lui était alors dans sa chambre. Quelle âge avez

vous demanda le préfet. Trente huit ans. Eh bien

vous marcherez. J'espère qu'on m'excusera à cause de

ma mauvaise vue. Non non reprit le préfet

en colère rien ne vous excusera. Peu après le fit


pagina: 132

la réflexion suivante. Quels commis prendrai-je alors. Eh

bien j'aurai des invalides.

Pour prouver l'ignorance de la plupart des employés

français il suffira de l'anecdote suivante. Il vient au

bureau des timbres quelqu'un pour demander des timbres

pour des lettres de change jusq'à 600.000 fr. Six cent

mille francs s'écrie un des directeurs je ne croyais pas

qu'il y avait tant d'argent au monde.

Maintenant une anecdote qui fait plus d'honneur à

l'humanité. M. Rouwenhof revenant un jour chez lui

dans la semaine derrière y trouva quelqu'un qui lui parla

en ces termes. M. vous m'avez sauvé jadis la vie. Des circonstances

malheuris m'ont jetées dans la misère mais à force d'industrie

je suis enfin parvenu jusqu'à pouvoir enfin me remettre

tant soit peu dans un état d'aisance. J'ai regardé comme

la dette la plus sacrée l'argent que je vous devais daignez

l'accepter. C'était un compte de 1792. M. Rauwenhof lui

fit en vain des instances pour lui faire garder son argent

et fut touché jusqu'aux larmes de cette preuve d'honnêteté.

Lundi 22 Mars 1812

Point de nouvelles rien que de la consternation.

Littérature

Dryden vol. 4e[?]

Ce volume contient la belle ode sur le pouvoir de l'harmonie.

C'est une pièce admirable.

The cock and the fox conte imité de Chaucer. Il est fort gai.

The flower and the leaf. C'est une espèce de vision allégorique

assez froide. Le poète est dans un bosquet où il voit les chevaliers

de la fleur et de la feuille qui se combattent. Mais la pièce

est un peu trop longue.

The wife of Baths tale. C'et une imitation de Chaucer

et le même conte que celui du chevalier Fox qui

est de Voltaire ou de la Fontaine et que Bilderdijk a si

supérieurement imité.

Puis quelques traductions d'Ovide.

Butler Hudibras 2 v.

C'est un espèce de poème burlesque ou satirique sur les illuminés

du tems de Cromwel. Il y a beaucoup d'érudition mais il est

tellement rempli de vieux mots et d'allusions qu'il est

fort difficile à lire pour les étrangers. Il est aussi fort

long de sorte que j'en n'ai lu que la première partie. Ce

Hudibras est une espèce de Donquichotte qui combat à tort

et à travers. Son premier exploit est contre des villageois

qui veulent faire combattre un ours. Il y a aussi une

foule de conversations entre lui et son équipe[?] et une scène

entre lui et un astrologue est ce que j'y ai trouvé de plus joli.


pagina: 133

Mardi 24 Mars 1812

Annales du Lundi

Encore bien de la gaîté. Le médecin avait un rhume violent.

Il dut chiffrer. Si un hareng et demi coûte un sou et demi

combien coûtent douze harengs. Il essaya de mille maniers

mais jamais il ne put réussir à comprendre cette somme.

J'avais fait une recension de quelques-uns de ses fragmens

de vers qui fut applaudie. Le médecin dit si l'on savait

quelle sédition il y avait eu parmi la garde soldée de Rotterdam

on lui demanda pourquoi. Parce que dit-il on a recueilli

tous les musiciens pour jouer un air devant Erasme qui

voulait danser. Pour surprendre de vos[?] il lui demanda

combien de pillules on pouvait fabriquer d'une drogue

un autre demanda au médecin en combien de seaux on

pourrait renfermer la mer. Il répondit qu'il l'ignorait.

En un seau reprit-on s'il était assez grand. P. de Clercq et

J. de Vos lui firent aussi le reproche de n'avoir pas encore payé

la somme d'un florin ou plus qu'il leur devait pour

l'anéantissement de leurs prétensions sur l'argent qu'il

avait gagné.

L'horizon se rembrunit toujours. Maudite conscription

sans cela je mènerais une vie douce et tranquille. Mais

pas tout à fait tranquille car je désire l'agitation mais

pas à un tel point Mr. T. a eu un plan qu'il ne serait

peut-être pas prudent de confier au papier. On

a convoqué des personnes je ne sais pour quele garde

nationale et on leur a donné tout de suite des armes

S'il y avait moyen de fuir la ty... . Combien je

bénirais la providence si je pouvais respirer sur un sol

plus libre. Hier M. Coopmans était aussi fort triste

mais enfin point de murmures.

Dieu sait ce qu'il nous faut beaucoup mieux que nous-

mêmes.

Mecredi 24 Mars 1812

L'espoir est une déité qui se plaît bien à tromper les gens. Les

bruits qui circulent parmi le peuple ne prétendent à rien moins

qu'à détrôner l'empereur ou à lui prêter les projets les plus extrava-

gans. On le fait voyager jusqu'aux bords du Gange.

Je veux citer ici le beau projet de M. [-Tissot] comme la preuve de

ma folie d'avoir pu y croire un moment ainsi qu'il paraît par la

note de hier.

Je fais avec lui un voyage en Suisse. Après quelques mois mes

parens reçoivent la nouvelle de ma maladie et enfin de ma mort.

On prend le deuil on fait annoncer mon douloureux trépas.

M.T. revient avec de faux certificats datés d'une des villages les

plus inconnus de la Suisse. En attendant j'ai changé mon

nom, mes parens m'envoient de l'argent et je commence un

petit commerce jusqu'à ce que les choses vont mieux.


pagina: 134

Littérature

Bagatelles. Promenades d'un désoeuvré dans Peters-

bourg 2 vol.

M. van Lennep qui avait été à Petersbourg nous avait

recommandé cet ouvrage comme un des livres les plus jolis

qui traitent de cette ville. En effet l'ouvrage m'a assez plu

mais le panégyrique continuel que l'auteur fait des Russes

me déplaît. En effet Petersbourg doit être une belle ville. Il

y a plusieurs monumens publics la statue de Pierre I, l'église

d'Isaac, l'église de Kasan où il y a de superbes colonnes de granit

etc.

C. Divinez où vous êtes. L'auteur suppose quelqu'un à qu'il bande

les yeux. Il le mène à St. Petersbourg. Il lui ôte premièrement le

bandeau dans le lieu où les vaisseaux marchands abordent ensuite

au jardin d'été, dans l'île de Krestowsky le séjour des bourgeois

devant Kammeniostrof île délicieux qui fait partie de la ville

dans la promenade près de l'amirauté, enfin dans la perspective

de la Newsky. Il croirait avoir été dans six villes différentes.

Voici les autres chapitres

L'aplomb, les Traversées, l'homme indépendant, La nuit et le jour, le

Piéton, Établissement d'utilité publique, les Équipages, La ressemblance,

Parlez au portier, La promenade a vue d'oiseau, La fête de la cour, le

pauvre diable, les conseils du promeneur, Les frileux, La vie comparée,

La police et contrepolice, Ne condamnez pas, la grande contestation,

La nécessité indispensable, Les distances, L'uniforme, l'Esprit de Trafic,

Les malheureuses, Le palais royal, Voir et être vu, Les gageures,

Le souterrain, La jeune cité. Vinavat, Le journal.

Vondel Gedichten

C'est une chose singulière que parmi les jeunes gens on connaît

quelquefois si bien les poètes français et si peu les nôtres. En connaît-

on ce sont Bilderdijk, Van Merken, Feith, Hoogvliet, Langendijk, Asschenberg, le

Gijsbrecht et quelques Morceaux de Vondel tandis que la plus grande

partie de Vondel ainsi que de Dekker Antonides Hooft Huygens etc.

sont parfaitement inconnus. J'en vois plusieurs raisons 1r le

vieux style qu'on y trouve quelquefois 2 et

principalement le peu d'intérêt que les sujets offrent souvent à

quelqu'un qui n'est pas versé dans notre histoire et surtout

l'extrême longueur des pièces et la voluminosité des ouvrages.

Je vais premièrement parler de ce que se trouve dans ce volume

et ensuite de ce que je choisirais pour une Édition choisie des oeuvres de Vondel.

Zegezangen Le premier poème est la conquête de Grol et

c'est vraiment une espèce d'épopée. Les figures les portraits les

fictions tout y est bien amené et c'est un poème qu'on

ne lit jamais sans plaisir.

Les autres sont beaucoup moins intéressants.

Il y a des odes sublimes mais il y en aussi qui ne peuvent être

lues avec plaisir comme sur des cérémonies catholiques sur

des saints, des papes etc. Il y en est de même des autres poésies

surtout des vers de noce.

Commençons donc

Zegezangen


pagina: 135

Verovering van Grol

Lijkoffer aan Maegdenburgh

Klinkdichten

Op het verongelukken van Roscius

Aan den Drost hooft

Op Pieter Kornelisz hooft

Begroetenis van Fredrik Hendrik. Ce vers est assez long mais il y a

de beaux m.

Op Fredrik Hendrik

Op Amelia

Het raadhuis

Lof der Zeevaert

Je sauterais la naissance du prince Guillaume Henriette Marie

t Amsterdam, ainsi que l'entrée de Marie de Medicis.

Lofrijmen

Op Amsterdam

Op de geboorte van Anna Roemers

Op den nieuwen atlas van de blaauwen

Op Daniel Zegers

Op Koningin Kristine

Op Joost Buijck

Op Geerart Vossius

Op Vondel

Lierdichten

Amsterdams Wellekomst

Inwijing der doorluchtige school

Huig de Groots verlossing

De Roomsche lier

Kasper van Baerles aanspraeck

Aen den Beeck

De Rhijnstroom

Spiegel van Marie Spiegels

Aan Vredewensch

Geboortekrans

De beurs van Amsterdam

Dankdicht aan Boreas

De getemde Mars

Bede voor 't Wale weeshuis

Bruiloftsdichten

Bruiloft van de Pol

Bruiloftsliet

De Haven

Hekeldichten

Roskam

Harpoen

Decretum Horrible Quelle énergie dans ce morceau et

quelle douceur dans la péroraison.

Jaargetijde van Oldenbarneveld C'est aussi un morceau

superbe.

Lijk- en grafdichten


pagina: 136

Aan Geraert Vossius

Kinderlijck

Op Izabel le blon

Mengelrijm

Aen den lasteraer van Huig de Groot

Op Hendrik Bloemaert

Gezangk

Vechtzangk

Zang

Beeckzang

Reij van Bacchanten

Princelied

Krancketroost

Ceci ne veut pas dire qu'il n'y a pas de beaux vers hormis ceux-ci

mais que ceux-ci sont propres à servir à donner une idée de

toutes les poésies de Vondel.

Vendredi 26 Mars 1812. Bilderdijk Mengeldichten

Faut-il souvent quelque sagacité pour démoler le génie de

nos anciens poètes et le démêler dans de vieux volumes tout le

monde peut sentir les beautés de Bilderdijk. Une imagination

toujours féconde des figures superbes des imitations qui

renchérissent presque toujours sur l'original voilà ce que présentent

tous les ouvrages de ce grand poète. Qu'on ouvre au hasard ces deux

volumes de sa poésie mêlée et partout on trouvera quelque chose de

joli.

Vol. 1e

Quelques traductions d'Ossian, Kathlin Komala Oïna Kroma

Oithona.

Trois Romances. Floris de 4d Beilaart Argine. Je doute qu'on

en puisse trouver de plus jolies. Quelle noble simplicité dans

celle de Beijlaart ce serait un morceau à apprendre par coeur.

Quelle richesse d'expressions dans le morceau intitulée de

Kranke quelle onction dans les deux pièces Het vertrouwen

et Zucht eens vaders.

Deux imitations de Theocrite

Paris oordeel est dans un genre plus gai. Le conte ne quadre[?] pas

bien selon loi avec la morale qu'en tire le poète.

2 vol.

Lathmon l'expédition d'Oscar et Gaal dans le camp ennemi

De Krijg met Karos contient la mort d'Oscar.

Les morceaux les plus jolis de ce volume sont: De kerker De

verovering Troostzang. Trois pièces pindariques sur une

noce La nuit imitation de l'écossais Et la superbe Romance

d'Ahacha. Elle est dans un genre tout à fait nouveau c'est

l'élégie d'une négresse de Guinée qui pleure la mort de

son amant. Toutes les images en sont tirées du pays et du

climat c'est un morceau curieux et touchant. On doit

admirer la fécondité du génie de l'auteur qui sait se plier

à tous les tems possibles. L'épopée la tragédie l'ode la romance

La pastorale l'Élegie La poésie légère, La poésie morale

il excelle dans tout.


pagina: 137

Vendredi 27 Mars 1811

Littérature

Manuscrits

1. Le Vers de Helmers sur le commerce mentionné ci-dessus.

Il s'y trouve de fort beaux morceaux mais il y a comme

dans tous les ouvrages de ce poète beaucoup de déclamation

et d'enflure. On doit aussi être historien et naturaliste pour

comprendre tous les noms étrangers insérés dans ce vers.

2. Un discours que Fokke a tenu sur Aristote. La première partie

contient la vie de ce philosophe la seconde part la notice de

ses ouvrages et enfin la 3e partie le détail de ses préceptes sur

la tragédie voici une courte notice de la vie d'Aristote extraite

de cette pièce fort bien écrite.

Aristote naquit à Stagyres. Il perdut de bonne heure son père

et resta sur la tutelle de ses tuteurs qui négligèrent son éducation.

Lorsqu'il eut en mains l'argent de son père il le dissipa entièrement

desorte qu'à 17 il n'avait plus rien et fut obligé de gagner sa vie

en vendant des petits pots de beaume. Il alla consulter l'oracle

de Delphis et les prêtres le conseillèrent de s'instruire dans

la philosophie et qu'il deviendrait un jour un grand philosophe.

Il alla à Athènes où il fut admis dans l'école de Platon dont

il fut un des disciples les plus célèbres. Il croyait pouvoir lui

succéder lorsque celui mourut après qu'il eut assisté à ses

leçons pendant plus de 20 ans, mais Speusippe neveu de Platon

lui succéda. Aristote se retira en Asie où il reçut une

lettre de Philippe qui l'engageait à se charger de l'éducation

de son fils Alexandre alors âgé de 15 ans. Lors du départ

de ce prince il voulut emmener à toute force Aristote qui

refusa de le suivre et lui donna Calisthène son disciple pour

l'accompagner. Il se rendit à Athènes où il succéda à

poste de Platon et Speucippe et il donna à cet école un

nouveau lustres. Dans quelques-uns de ses dogmes il était

d'une opinion toute contraire à celle de Platon, ce qui piquait

la curiosité. Il s'attira l'animosité des prêtres par ce qu'il

détournait ses disciples du culte et ce ne fut que la puissante

protection d'Alexandre qui put le soutenir. Celui-ci lui envoya

80 talens pour subvenir aux frais nécessaires pour recueillir

des sources pour composer une histoire naturelle. Après

la mort de ce prince on lui intenta un procès et il se retira

à Chalcis où il mourut dans sa 63 années. Ses amis pour éviter

à ses écrits la persécution des prêtres furent courir le bruit

qu'il les avait brulés. Mais on les enfouit dans une grotte

non loin de la ville où il mourut. La tradition s'en conserva

pourtant jusqu'à ce que quelques siècles après cette époque

un riche particulier de chios en fit l'acquisition et les fit

déterrer. Ces ouvrages avaient soufferts horriblement ainsi

il n'y a pour la plupart que des fragmens

mutilés qui soient venus jusqu'à nous on prétend qu'il

avait écrit plus de 400 traités sur différentes branches

de science et de littérature.


pagina: 138

Mardi 31 Mars 1812.

Voici une anecdote qu'on m'a assurée être de la plus grande

véracité.

L'empereur à son retour d'Amsterdam dans l'année passée

arriva au passage d'une rivière où la communication était

empêchée parce que la barque (pont) dont on se servait là

était dérangée. Il fallait pourtant que l'empereur passât.

Il fit premièrement demander aux gardes nationales et

d'honneur qui l'accompagnaient s'ils voulaient le transporter

avec tous ses bagages. Ceux-ci refusèrent ainsi que les habitans.

Puis il fit faire une pareille demande à ses soldats et reçut

une réponse négative. Alors il lui fit dire qu'en cas de refus

il les ferait décimer Qu'il le fasse, s'il l'ose lui répondit-on.

Il leur fit offrir l'avancement nouveau refus. Enfin ce furent

quelques prisonniers Anglais qui se trouvaient là qui exécutèrent

le transport à condition qu'il signât leurs passeports pour

l'Angleterre. Il le fit et passa.

On raconte que l'Empereur répudiera son épouse et qu'il

fera passer le roi de rome pour un enfant supposé. D'autres

disent que l'Imp. a demandé au sénat la permission de se retirer à

Vienne avec le roi de rome mais que non seulement on le lui

a refusé mais qu'on lui a indiqué Paris comme lieu d'arrêt.

On dit aussi qu'en Poméranie un régiment français a passé

entièrement du côté des ennemis.

Une femme du communité vint à l'imprimerie impériale pour

y acheter une gazette. On lui demanda quelle gazette elle

devait avoir. Elle répondit Ik moet die krant hebben daarin

staat dat de keizer weg is.

Il paraît se constater qu'il y a eu une émeute à Scheveningen.

Les habitans devaient donner leur contingent à la conscription

maritime. Ceux-ci consentirent à partir en cas que l'on

soignât leurs femmes et leurs enfans on leur donna

une réponse élusive. Mais ils se rendirent avec une troupe

nombreuse de femmes à la Haye où ils cassèrent les

vitres de l'hôtel du maire. On dit même que le préfet a été

menacé ou blessé. Il a cependant su calmer les esprits tout

est rentré dans l'ordre et on a levé le contigent.

Il est assez particulier de citer la seule festivité qui a eu

lieu l'anniversaire du roi de Rome. Toutes les sociétés publiques

les cafés etc. doivent se fermer à une heure fixe mais les

commissaires de Police ont fait savoir que pour ce jour-là

on pourrait s'amuser à son aise et rester un peu plus

tard.

Parmi les terribles impositions qui pèsent sur quelques classes

les traîneurs et les horlogers sont des plus maltraités. Les

derniers doivent faire marquer toutes leurs montres et payer

huit à neuf florins d'une pièce qui peut-être ils ne vendent

jamais. Ils doivent pareillement tenir note de toutes les

montres qu'on leur confie ne fût-ce que pour les remettre

en ordre avec les noms et demeures des propriétaires.


pagina: 139

Je fus encore Samedi à l'Examen de Phisique dans

Felix. J'étais fort étonné de ne pouvoir plus ouvrir la

bouche dans un endroit où pendant 6 années j'avais fait

briller mes talens oratoires. Il y en avaient qui répondaient

fort bien. Mais il y en avait beaucoup où l'on remarquait

plus le language du perroquet que celui du Physicien. En vérité

la Physique n'est pas une science si facile que

le croyent nos pédans. Ce n'est rien que d'apprendre par

coeur toutes ces formules, définitions et expressions vagues

mais il s'agit d'approfondir et alors ce n'est pas une science

pour des enfans. Il y a un pareil établissement

dans le nut van 't algemeen. L'instituteur ayant

demandé à un garçon s'il connaissait la physique

un des pédans qui assistaient à cette séance s'en effaroucha

fort et demanda. Comment il était possible de soupçonner

qu'un jeune homme ignorait les principes de la Physique

science qui, dit-il a pénétré également dans

le palais des rois et les huttes du pauvre. Serait-ce grâce à un

livre de Mr. Buys. En ce cas-là je crois que notre homme se

sera trompé car sans ôter à cette ouvrage le mérite qu'il

possède effectivement ce n'est pas là le livre à former des

Physiciens. La sottise d'introduire des enfantillages

dans un livre pareil tandis que les définitions sont souvent

impossibles à comprendre pour des enfans nuit beaucoup.

Plusieurs choses sont traitées beaucoup trop superfi-

ciellement. Pourquoi Buijs ne suit-il pas pour des

élèves plus âgés le cours de Van Bemmelen. Le jeune homme

de 16 à 17 ans et celui de 9 à 10 ne peuvent pas apprendre la

Physique dans le même cours.

Hier nous fîmes au milieu d'une pluie à vent le voyage

à Kennemeroord. On a fait de fort jolis changemens à cette

campagne. Tout commençait à percer plusieurs arbustes

étaient déjà en fleurs mais la campagne était encore

bien loin de présenter les attraits d'un jour de printems.

Mon pauvre papa a été bien malade de la goutte et l'est encore.

Annales du Lundi

On s'amusa beaucoup comme à l'ordinaire. Le pauvre

Dyl. fit beaucoup de contes et dut encore beaucoup souffrir.

Il demanda pourquoi il y avait tant d'oeufs à Pâques.

Il fit l'histoire du souper ennuyeux de la société des

noyés.

On reprit la somme des harengs il ne la comprit

pas encore.

Le D. disputa avec son fils sur la richesse des nations.

Enfin l'on eut toutes sortes de sujets de gaîté. On discuta

comment naissaient les chapons si le poulet respirait dans

l'oeuf, si l'homme respirait avant de naître si l'homme

était composé de deux moitiés égals etc. etc.


pagina: 140

Vendredi 2 Avril

Je fus cette semaine à la maison de Mr. De Bosch

pour voir la bibliothèque. Elle avait maintenant l'air

assez dérangé puisque toutes les reliures et grandeurs

étaient mêlées mais lors du vivant de M. de Bosch lorsque

toutes les livres étaient rangés selon leurs reliures

ou grandeurs elle doit avoir offerte un coup d'oeil

très beau. J'y vis aussi beaucoup de ces fameuses primae éditiones

ou principes. Elles sont textuellement copiées d'après

les manuscrits ainsi souvent il n'y a pas de titre. Il y a

même quelquefois les titres des chapitres en rouge avec des peintures.

Le caractère en est cependant fort distinct et beaucoup

plus joli que celui des impressions d'une cinquantaine

d'années après. Il y avait un Virgile un des premiers qui

ait été imprimé qui était tout à fait en lettres

capitales. On voyait aussi une prima éditio d'un Lactantius[?]

qui a coûté 7 à 800 florins. Il y a 40 exempl. d'Homère 100 de

Cicero 35 d'horace 28 de virgile et autant de Terence.

Homère, Terence et Nepos étaient les auteurs favoris

de de Bosch. Il y avait aussi plusieurs très belles éditions

modernes parmi lesquelles un virgile de Baskerville et

un de Didot. Quelques livres étaient superbement reliés

mais d'autres dans des simples reliures de corne

ainsi une classification plus élégante aurait bien mieux

fait ressortir la beauté des ouvrages bien relies.

Hier au soir on a représenté pour la première fois het geraamte

de Kramer. C'est à présent le plus sot mélodrame que j'aie vu.

Celui-ci est un enchaînem. de combats, de meurtres, de spectres

etc. et on n'y a oublié aucun des ingrédiens qui sont

nécessaires pour composer un pareil ouvrage. Cependant

l'enthousiasme du public a été furieux. Il y a eu un vacarme

effroyable on voulait appeller l'auteur enfin le bon

auteur n'a pas pu dormir de joie. Il a dit lui-même qu'on

lui donnerait bientôt le surnom du Kotzebue d'Amsterdam.

Quelqu'un lui demandait pourquoi après sa pièce

l'on ne donnait qu'un simple divertissement. Il dit

qu'après avoir vu son ouvrage on était tellement

enchanté qu'on n'avait plus rien à désirer. Quel

dommage que la scène soit ainsi dégradée et quelle

honte que nous rouillions ainsi notre goût non

seulement en souffrant mais en applaudissant à

a de pareilles bêtises.

Petit poucet n'a pas du tout réussi. On ne croit pas

qu'on en donnera une seconde représentation.


pagina: 141

Vendredi 11 Avril 1812

Annales du Lundi

Le professeur Kemper y assistait. Le pauvre Dyl. fut attaqué de

toutes manières. On disputa si l'on devait dire over drie eeuwen

ou na drie eeuwen. On voulut parier sur l'époque de la mort

de Haller. Le prof. raconta l'ineptie d'un professeur français.

J. de Vos assura que le nom de Polichinelle dans chaque nation

signifiait un manger délicat. Arlequino Hansworst John Ridding

Jean potage. Le Dylius donna trois mots dont nous devions

chercher l'étymologie.

Les bruits qui se répandent tendent tous à faire croire à la

guerre. On dit qu'en Russie il y a une levée en masse de tous les

hommes en état de porter les armes depuis 18-37.

Ici les conscrits qui ont tiré des hauts numéros sont déjà appelés

pour la garde nationale.

La pièce de notre cher Cramer dont le succès répondit tellement

à ses espérances a été tout à coup défendue. Une des raisons en

est qu'un des acteurs principaux chevalier du lion découvre

son bouclier et dit en s'adressant à son ennemi Le lion ne dort point

car il va bientôt signaler sa valeur contre un tigre sanguinaire.

Dans un autre endroit (un des deux lâches écuyers) berçant un

enfant dit j'aimerais mieux être fille d'enfant que soldat. Belle

raison pour défendre une pièce. C'est le misérable van Ray qui

est l'auteur de pareilles chicanes. Cet homme qui n'a pas le

sou à emprunté de l'argent à plusieurs personnes

et on n'ose pas le redemander de crainte d'être mis en prison

puisqu'il jouit du plus grand crédit chez M. Duterrage. On fait

refuser même de permettre l'impression de l'oraison funèbre de

M. Hesselink par Koopmans et cela parce que dans la prière on dit

wij bidden u voor alle vorsten der aarde en met name voor Napoleon

tandis qu'il fallait nommer Nap. tout seul et en outre par

ce qu'il prie Dieu d'accorder la sagesse à l'empereur.

∙J'ai été avant hier à Felix pour entendre un vers de Loots qui

en vérité était fort beau quoique j'ai entendu de lui de meilleurs

morceaux. C'était encore de l'homme du libre arbitre de

la vertu du devoir etc. etc.

Littérature

Poésie de Mad. de Salm 1 v.

Cette dame comme toutes les dames auteurs a à ce que je crois

une bonne dose de prétention. Ses vers sont agréables quoique

il s'y trouve ça et là des traits qui devraient être corrigés.

La meilleure pièce est sans doute l'Épître aux femmes. Il y a

beaucoup de vérité. L'auteur reproche aux hommes leur arrogance

et leur tyrannie en voulant seules s'approprier le domaine

des sciences et des arts. Elle combat toutes les objections qui

ont été faites aux femmes auteurs. Il y a dans cette épître


pagina: 142

des morceaux pleins de sel et de satire. Mais aussiqui

prouve trop ne prouve rien. Quoi dit-elle

Ce feu qui nous dévore est-il donc inutile.

Le Dieu qui dans nos coeurs a daigné l'allumer.

Dit-il que sans paraître il doit nous consumer.

Portons nous sur nos fronts écrits en traits de flammes.

Seules vous n'êtes rien puisque vous êtes femmes.

Non sans doute et il y aurait de l'injustice à refuser aux

femmes le commerce des muses qui étaient tous des jeunes

filles. Mais elle ne se contente pas de défendre les femmes

elle attaque l'homme.

L'homme enflé d'un orgueil sacrilège.

Rougit d'être égalé par celle qu'il protège.

Sa voix dès le berceau nous condamne à l'erreur.

Moins fort de ce qu'il sait que de notre ignorance.

Il croit qu'il s'agrandit de notre insuffisance.

Et sous les vains dehors d'un respect affecté.

Il ne vénère en nous que notre nullité.

C'est trop fort car puisqu'on ne fait pas une femme

pédante ou poète ce n'est pas la condamner à l'erreur. Elle

montre ensuite le déchaînement contre une femme auteur

et en peint les suites.

Quand il voit le besoin de distraire nos âmes.

Le porter malgré nous sur de coupables flammes.

Quand * il voit ses transports que réclamaient les arts.

Dans un monde pervers offenser ses regards.

Et sur un front terni la licence funeste.

Remplacer les lauriers du mérite modeste.

Ensuite elle détruit l'objection qu'on fait aux femmes auteurs

à cause de leurs rapports comme mère de famille.

Elle peint ensuite le bonheur d'épouse et une femme instruite

oui dit-elle.

Ne vaut-il pas bien mieux d'une ardente jeunesse.

Charmer par les talens la dangereuse ivresse.

Que de la condamner au plaisir dégradant.

D'inventer ou proscrire en vain[?]

viennent d'autres épîtres où il y a de fort jolies vers mais

qui sont bien inférieurs à l'épître aux femmes.

Épître à un jeune auteur

Épître à sophie sur les inconvéniens de la campagne

Il y a de fort jolis traits mais le sujet n'est pas joli. Cependant

les idées sont fort bien amenées. Mais qu'est-ce que c'est qu'un

poète qui n'aime pas la campagne.

Trois épîtres à Sophie sur le choix d'un époux. Il y a de

bonnes choses. L'auteur décide enfin qu'il faut épouser

un mari de trente ans.

*l'honnête homme


pagina: 143

Discours sur les dissentions des gens de lettres

L'idée en est fort belle.

Étrange aveuglement de la délicatesse.

On rougirait d'aller,même dans la détresse.

Dérober à l'auteur un or peu précieux.

Et le prix attendu d'un travail glorieux.

Ses succès, son bonheur, son trésor véritable.

On vient les lui ravir sans se croire coupable.

Scène héroïque à l'occasion du mariage de Napoléon

Pièce de flatterie délayée dans d'assez bons vers.

Les Poésies diverses ne me plaisent pas tant que les épîtres.

Il y en a beaucoup qui ressemblent à des couplets à refreins

ou des ariettes. La coquette est une des plus jolies. Il y a aussi

un traduction de Métastase.

Sappho trag. lyrique

Sappho est à Leucade où elle gémit du Pharon qui l'a abandonnée

avec Cleis, une de ses élèves. Damaphile qui se dit l'amie de cette

amante malheureuse veut la perdre excitée par la jalousie.

Cleis revient elle implore le pardon de Sappho... Bientôt

Phaon qui la poursuivit arrive. Sappho croit que son amant

revient à elle mais il s'est déjà réconcilié avec Cleis. L'oracle

parle.

Les tourmens de Sappho sont cessés en ce jour.

Phaon doit par l'hymen couronner son amour.

Phaon se croit alors obligé d'épouser Sappho. Il veut avoir

une dernière entrevue avec Cleis. Cependant Damophile a

fait apporter des gens qui les entraînent dans une barque.

Sappho apprend son malheur, elle se précipite du rocher.

Le temple est consumé par la foudre. La barque qui conduit

les fugitifs est abymée.

Voilà le sujet de cet opéra dont l'invention et le style sont

beaux.

Justinus

Cet auteur a un beau style et comme dit la Harpe il narre

bien. Il n'a pas tant de discours oratoires que dans les autres

historiens anciens. On ne trouve chez lui

que l'exhortation de Methudati à ses soldats pour combattre

les Romains. Au reste Justin adapte presque toutes les fables

au sujet de la monarchie assyrienne. Ce qui est assez intéressant

chez lui c'est l'hist. ant: des Carths et Siciliens.

Salzmann Gesch: van Ligthoofd

Cet auteur a écrit plusieurs ouvrages qui servent tous

à prouver quelque maxime, p.e. dans Karl van Karelsbergen

il prouve que souvent nous sommes la cause de nos propres mal-

heurs, dans Harreveld qu'on peut être libre dans quelque état qu'on soit,


pagina: pagina

dans Zwartmantel que tout ce que Dieu fait est bien fait

etc. Enfin cet ouvrage-ci doit prouver que souvent les mal-

heurs servent à nous corriger.

Ligthoofd jeune homme dissolu et paresseux est enlevé de force pour

devenir soldat et aller en Amérique. Dans son régiment il

reçoit premièrement les conseils d'un honnête capitaine puis

d'un bon Feldprediger mais il n'en profite pas déserte et prend

service comme matelot. Il fait naufrage et est sauvé tout

seul sur une île déserte où il est pendant quelque tems. Là

sa conversion commence. Il trouve un petit

garçon qu'il adopte. Un vaisseau américain les prend à bord

et les conduit en Amérique. Là il se met au service d'un [onl.]

qui reconnaît l'enfant trouvé par Ligthoofd pour son neveu.

Ligthoofd se conduit bien épouse à la fin une esclave et

devient un négociant bien estimé.

Cet ouvrage est je crois destiné par le traducteur à consoler ceux

qui tombent dans la conscription mais en ce cas là son but ne

sera pas rempli. Il n'est pas si bien écrit que les autres ouvrages

de Salzmann. Il y a aussi quelque conformité avec Robinson

et de ses idées disparates qu'on trouve chez tous les auteurs

Allemands. Cependant le style en est attachant.

Annales du Lundi

∙Prof. Kemper, J. Kops et sa famille assistaient à la réunion qui eut

lieu chez nous dans le grand sallon. On raconta des aventures de squelettes

confisqués pour l'usage des médecine. Dylius raconta qu'il avait mangé

de la [- viande] [onl.] humaine nommément les fesses d'une frisonne. À table

D. commença par attaquer le prof. sur le jour de la mort de Haller.

Celui-ci qui avait oublié l'affaire fit bonne mine à mauvais jeu

et terrifia son adversaire. On résolut d'aller chercher de la

glace mais c'était trop tard. D. tira un livre

fort sale de sa poche c'était le journal de Médecine de blum-

bach. Il y avait un portrait de Haller. On [onl.] l'universalité de

ce savant on dit qu'il était le seul qui pouvait être comparé

à Grotius. Kemp soutient[?] l'assertion contraire et montra que

Haller avait été fautif dans divers genres. D. raconta l'embarras

de M. van Lennep pour faire l'oraison de De Bosch. On blâma la

manière de vendre de M. den Hengst. Nous répondîmes aux

demandes de Dylius. Je racontai l'origine du mot Lummel.

P. de C. cita à l'appui de son étymologie de Plychinelle[?] en petit livre

intitulé ombre chinois. Kemper expliqua d'une manière

fort savante le mot Mannequin. J. de V. raconta que le peintre

Breugel avait fait un tableau du sacrifice d'Abraham où

ce patriarche ajuste son fusil tandis qu'un ange passe dedans.

Un des nombreux monumens que l'empereur fait construire déplai-

sait au public. C'était l'emp. lui même qui en avait

fourni le plan. Il dit à ce propos à l'architecte Il n'y a que

vous et moi qui le trouvent beau.


pagina: Pagina

[Pagina] 145

Il est dans cette ville un certain de Bré peintre qui doit peindre

deux tableaux avec des figures de grandeur naturelle. L'un

doit représenter le moment où il reçoit les clefs de la ville

et l'autre celui où il traverse le Kalverstraat.

Nous avons pris hier congé de M. Koopmans. P. de C. a remercie

au nom de tous. C'était très touchant. En vérité il a pris beaucoup

de peine mais pourtant nous aurions pu apprendre encore plus.

Littérature

Youngs Night Thougts 2 Vol.

Je n'ai lu dans longtems un ouvrage avec tant de plaisir. Celui-

ci enseigne les vérités de la morale et de la religion revetues

de l'attract brillant de la poésie. Chaque langue a dans sa

poésie une qualité particulière comme le français l'élégance,

le Hollandais la richesse d'expression. On peut regarder

comme la propriété de la langue Anglaise une énergie d'idées

et une breveté qui ne peut être trouvée dans la poésie d'aucune

autre nation. Les nuits de Young en offrent un exemple frappant.

Quelle richesse d'idées, quelle énergie! On ne peut cependant

pas disconvenir qu'il ne règne dans ces nuits une certaine

monotonie qui fatigue le lecteur et en rend la lecture difficile.

Mais cela pouvait difficilement être évité dans un ouvrage

si irrégulier roulant toujours sur le même objet. J'ai connais

deux traductions une de Lublink en Holl. qui est très

correcte et élégante et qui est enrichée de bonnes remarques.

L'autre est en Français de Mr. Letourneur. Celui-ci à la

manière française a tout à fait mutilé son auteur. Des

9 nuits de l'original il en a fabriqué douze en

transportant les morceaux d'une nuit à l'autre et en faisant

d'autres classifications. Il rejète même beaucoup de belles idées

et tout ce qui y entre par rapport à la révélation ce qu'il

rejète à la fin de chaque nuit. Voici leur titre

The complaint

Night 1 on life death and immortality
2 on Time Death and Friendship
3 Narcissa
4 The christian triumph
5 The relapse
6 The infidel reclaimed The nature of immorality
The proof of immortality
7
8 The man of world reclaimed
9 The consolation A moral essay of the nocturnal heavens
A night address to the deity

Les nuits qui m'ont le plus plu sont la 6.7e et 9e. La 7e surtout.

Il a un morceau sur les effets d'un système de l'anéantissement.

Annihilation qui est superbe. J'en ai copié la fin. La description

du jugement dernier et les méditations sur le firmament

sont aussi très belles.

Les trois personnes pleurées par Young sous le nom de Lucia,


pagina: 146, 147

Philandri et Narcissa étaient la première sa femme, les

deux autres deux enfans qu'elle avait eu d'un mariage

antérieur et qu'il chérissait tendrement. Dans la 8e nuit

il pleure particulière la mort de Philandri, dans la 3e

celle de Narcise et à la fin de la 5e.

Voici quelques preuves de l'immortalité:

Les révolutions continuelle de la nature

La progression continuelle de la nature

La grandeur et l'élégance des travaux de l'homme

L'insuffisance (ongenoegzaamheid de l'homme

Les talens et passions

L'augmentation progressive de ses talens

Sa crainte pour la mort

La nature de l'espérance

La nature de la vérité

La science et le génie de l'homme

L'ordre dans la création

L'ambition

L'avarice

Le plaisir

A paraphrase of the book of Job

C'est à dire une libre traduction en vers des derniers chapitres

de Job où le tout puissant lui parle. La version est assez élégante

mais je trouve notre traduction en prose beaucoup plus

énergique. Par ce qu'il y a plusieurs traits qu'on pouvait employer

dans la poésie orientale et non dans la nôtre et qui cependant

quand on les suppriment ôtent au poème beaucoup de

force.

Bilderdijk Mengelingen Deel 3 en 4

Encore des traductions d'Ossian De slag van Lora, De dood van

Kuthullijn.

Au reste des poésies légères qui ne m'ont pas beaucoup plu.

∙Deux morceaux Aan mijne vrienden et Uitboezeming dans

lesquels il décrit largement tous ses malheurs et puis

des vers sur les anniversaires de son épouse.

∙Ceux qui je préfère sont:

Eens grijzaarts waarneming

Hercules in de wieg d'après Theocrite

Ensuite des fables en prose parmi lesquelles il y en a d'assez

jolies et dont plusieurs ont des allusions aux circonstances

politiques lors de la rev.

4e Deel

Je trouve dans ce volume-ci peu de morceaux dignes de

Bilderdijk . Ce sont des jérémiades depuis le commencement

jusqu'a la fin des flatteries à Louis Nap. etc. etc.

∙Ce qu'il y de plus joli est

1. Leyden in verwoesting. Lierzang


pagina: 146, 147

2. Memoires 1812

∙Il y a de belles idées

Ja 't aardrijk beeft. - o God genade

Mijn kind omarming mij, gij mijn gade

'T is jezus regtstoel, hij genaak

Hoe boet na derdhalf honderd jaren

De schim van Valdes hier zijn wrok

Mij dunkt ik zie, ik zie hem waren

Hij schudt uw tempels en pilaren

Hij dreigt u nog met spanjes jok

Cependant il a fait de meilleurs odes.

Le touchant épisode de Camoens, Ines de Castro, traduit libre

Grootmoeders klacht trad. libre du frison de Gijsbert Japix

Minerva.

Les lignes suivantes peuvent prouver avec quelle bonté il

traite les Allemands.

Wreekt, wreekt de dichtkunst van den waan dier dwingelanden

Die 't ware dichtersvuur van uit onze eeuw verbanden

Wien vreemdelingen met de Grieksche Zanggodes

Geen Schillers drekhoop walgt bij 't goud van Sofokles

Die Klopstoks droomgebulk voor ware godenzangen

En Hallers laf gezwets voor godentaal ontfangen

∙...

In duitschen bastaartklap belachbren onzin kwaken

∙...

En 't hollandsch steeds gezond steeds ongewraakt verstand

Verruilen voor den waan van 't domst en geestloost land

Samedi 18 Avril

Il n'y a rien de nouveau. L'objet qui m'a le plus occupé cette

semaine a été la vente des livres de Mr. de Bosch. Les petits ouvrages

se sont vendu assez chers mais les grands pas trop. Le prof.

van Lennep achetait beaucoup. Les éditions grecques d'[onl.]

étaient vendus depuis 20-40. Les orateurs grecs de Reiske

valurent f 70. Hier on vendait les Poetae Minores ceux-ci

valurent fort peu d'argent aussi la foule qu'il y en avait

devait faire baisser la marchandise. Il faut aussi avouer qu'en

général les livres sont fort bien conditionnés. Il y en a

qui ont des reliures superbes en marroquin.

Les prix du Colzad qui avaient baissé énormément ont repris

quelque faveur. Gr. on 55 Lv. Oost 53. 5 à Z.

Le froment a monté tant soit peu mais le seigle

a pris de faveur 117 H. 296 gl. On dit qu'il dura monter absolument

à cause de la hauteur où en sont les prix ainsi que des autres

grains dans Paris et dans toute la France.

J'ai fait cette semaine avec J.B. une pièce pour parodier

les Mélodrames. Nous travaillons également à [onl.]

à notre Annibal. Le 2 acte sera bientôt fini.


pagina: 148, 149

Lundi 20 Avril 1812

J'ai été samedi passé au Théâtre français. On donnait

Le vieux célibataire. C'est vraiment une très jolie pièce on voit un

pauvre célibataire bon homme tout à fait qui se laisse duper par une

femme de ménage intrigante et par un intendant frippon qui ont

su noircir à ses yeux son neveu Armand. Cependant cet Armand

le sert sous le nom de Charles et sa femme sous celui de Laure. À la fin

tout se reconnaît le neveu est embrassé et les frippons chassé. Il

règne beaucoup de bonhomie dans cette pièce et il y a des morceaux

touchans. Aussi Garnier remplit-il supérieurement bien le rôle

du célibataire et Mad. Dauteuil celui de Mad. Evrard.

Les habitans des Landes C'est une farce. On va célébrer une noce.

Une dame américaine égarée vient avec une domestique noire.

Un voyageur pareillement égaré laisse son valet poltron tout seul.

Celui-ci lit dans un livre de son maître une description de l'Afrique

et croit en effet être dans le pays des Hottentots. La négresse qui

l'aborde et des paysans montés sur leurs échasses ne servent qu'à

constater son opinion. Tout ceci donne lieu à des scènes comiques.

Joli remplissait le rôle du valet.

Mardi 21 Avril 1812

Annales du Lundi chez l'oncle.

Premièrement les discours roulèrent sur la vente de de Bosch. Dylius

acheta les débris de la vente. On commença à table par deux anecdotes

de M. Kuiper qui avait un bâton s'appellant Lijdzaamheid et un autre

s'appellant lieflijkheid qui dit au commencement une prière Laat

ons met de steenen des geloofs de glazen des hemels indonderen. Il dit en

priant pour le bourguemaître Wij bidden u voor den groot achtbare

zondaar. D. qui avait à chaque moment des phrases latines dit le

vers latin suivant:

Fistula dulce canet voluorem dum decipit anceps

On en fit des traductions en vers dont aucune ne réussit. D. cita une

prétendue traduction de Cats réfutée par Kemper.

D. raconta une anecdote de Boscha qui selon lui avait essuyé de

fort mauvais traitemens de la port du Paradys. Jamais on ne lui

avait laissé raconter si paisiblement. Mais lorsqu'il eut fini Kemper

dit qu'il n'avait récité qu'un cas de mensonges et il exposa le véritable

état de l'affaire à laquelle il avait été intéressé lui même.

On prit la résolution d'aller chez Kemper cet été pourvu qu'il en

fit premièrement prévenir le jour de famille par une circulaire. Le

grand-père le refusa mais on resolut de l'y forcer puis qu'une société

a droit de disposer de tous ses membres.

L'affaire de Haller fut remise sur le tapis. Dyl. avait derechef un

livre très joliment relié de C. et P. de Cl. qu'il soutenait être le sien.

On met l'affaire aux voix. P. de C. s'érigea en président il déclara Kemper

coupable ainsi que G. de C., W. de C. Les trois enfans de de Vos avec

leur père voulaient conserver la neutralité. Jg. se déclara contre D.

Kemper devant parler il fit un franc aveu de ses fautes et dit

qu'au moment de l'assertion il ignorait complètement l'époque

de la mort de Haller mais qu'il avait payé d'imposture et qu'il n'avait

pas un que le médecin aimait en tant de vigilance qu'ainsi il

devait payer la glace puisqu'il avait perdu la gageure mais que

D. devait aussi en payer parce qu'il avait négligé de se rendre le marché

suivant chez De Bosch pour vérifier l'affaire.


pagina: 148, 149

On parla de woordenstrijd. Je paré de la [onl.] dit D. que vous ne savez pas

le mot en Grec. J.d.V. lui serrant la main dit: Je tiens le pore.

Logomachia. D. fut atténué. Il s'écria Dit koud ijs ligt mij

dwars in de maag. Il chercha en vain divers prétextes pour éluder

l'effet de sa gageure. Ainsi voilà trois portions de glace à venir car

on n'en a plus.

D. fit voir un bezoar. K. dit que c'était un oeuf pétrifié. D. avait peine

qu'il le cassât avec son couteau parce que alors en voyant les masses

de cheveux qui étaient deans il en aurait eu trop d'envie.

Kemper fut élu du consentement général membre honoraire du

jour de famille.

Mecredi 33 Avril 1812

Plaçons ici quelques anecdotes car pour des nouvelles politiques on

est bien assuré de n'en rien savoir. Car notre ignorance à cet égard

est si complète que nous ne savons pour ainsi dire que ce qu'on

veut que nous sachions. On a rempli quelques gazettes des détails

de la trahison d'un certain Michel employé au bureau de guerre

qui avait donné à l'envoyé Russe des copies de l'organisation

des armées.

Je fus hier à une vente des livres du feu Mr. Ameshof. C'est une collection

immense et cependant il ne s'y trouve que quelques livres

latins et le reste est hollandais. Le nombre des volumes théologiques

en 4o est 750 et en 8o 2400. On vendait les livres assez chers.

Il y avait un petit bouguineau qui avait en possession une édition

d'un ouvrage de Potter dont il avait déjà vendu avec profit une

centaine d'exemplaires. Voilà qu'on trouve dans ce livre un passage

où ce voyageur dit en parlant d'un village qu'il avait fort

souffert du passage des troupes français. Voilà qu'on ôte aussitôt

au libraire toute son édition sans lui rembourser une dute.

Un honnête bourgeois retournant avec un de ses amis d'une société

lui raconte l'émeute de la Haye. Un agent de police qui passe

près de là l'entend le saisit au collet et le conduit aux corps de garde.

Le prisonnier demande la permission d'aller avertir sa femme ou

de lui écrire un billet. Envain, il passe là toute la nuit. Le matin

il est conduit devant le comp. de police qui lui donne un verte

réprimande. Il répond: "M. je ne croyais point commettre un crime

en racontant une chose que toute la ville sait. Cependant vous

auriez pu m'envoyer chez moi pour me prier de me rendre chez

vous. Est il bien fait de faire saisir un honnête homme au collet

et de le reléguer une nuit entière parmi des goujats tandis

que son épouse est en proie à des transes mortelles." Pour toute

réponse le comm. lui indique silence et le fait

mettre à la porte par ses gens.

Voilà le despotisme!

A. Waarma se voyait menacé de tomber l'année suivante dans

la conscription. Sa mère ne pouvait lui fournir un remplaçant.

Il a donc pris service comme secrétaire à bord d'un vaisseau

commandé par le cap. Arents qui le chérit comme son fils. Il est

sur un schoeier. Leurs plus longs. voyages seront au Tessel et

l'hiver ils reviennent à Amsterdam. Ils sont maintenant au

lac de Haarlem. Ce garçon apprendra là [onl.] du pilote lt.

Losqu'il sera avancé il devient lieutenant. Ainsi ce garçon a

vraiment un heureux sort.


pagina: 150

Par contre tout le monde plaint pauvre Stultjes. Ce garçon

au comptoir de Mr. Langhorst soutenait par ses profits ses

parens. Il tomba cette année dans la conscription. Des amis et

bienfaiteurs lui achetèrent à ce que je crois pour f 1600 un haut

Numéro. La garde nat. est décrétée. Il doit marcher. On lui fait

encore une bourse. Mais les rempl. sont fort chers il en a eu

plusieurs qui ont été désapprouvés. Il a obtenu un nouveau

délai mais il est dans une situation bien triste. Et quand même

il peut se sauver qu'il n'est pas désagréable de contracter tant d'obligations.

Un des coups des vicissitudes de la fortune est un certain M. Hooi.

Il avait eu des années où il gagnait f 150000 dont il en donnait

70 aux pauvres. Il avait fondé un institut où il faisait instruire

des jeunes gens. Maintenant il est réduit au point de demeurer sur des chambres.

Littérature

Histoire des Wahalis 1 vol. Paris 1812 par L.A.

C'est vraiment un ouvrage intéressant puisqu'il nous retrace

la naissance et les progrès d'un peuple entièrement inconnu

jusqu'ici. Le style est correct sans être brillant ni enflé.

(Vide Ext.)

Heriadan, Barbarossa groot admiraal van Soliman

Encore une pièce des boulevards. Elle vaut un peu mieux que

les pièces de Cramer mais encore les mêmes caractères la

même intrigue que dans toutes ces pièces pareilles. Le rôle de

Barbarossa seul est quelquefois beau.

Laudatio Jani Dousae par Siegenbeek

Je ne saurais juger du style latin quant à la Laudatio

elle ne m'a pas excessivement frappée.

Il fut privé de ses parens à l'age de 5 ans et fut élevé par son oncle

qui le traita comme fils. Il étudia à l'école de Junius à Delft et

fit ensuite ses études à Louvain et à Driacum. Il vint ensuite

à Paris où il perdit son ami Fruitiers. Il se retira ensuite à Leyde

où il se maria. Ce fut comme commandant de cette ville qu'il

soutint le siège fameux. Il fut ensuite pendant vingt sept

ans curateur de l'académie de Leyde et fut là avec Heinsius,

Lipsius, Scaliger et autres savans de son tems. Il fut aussi plusieurs

fois ambassadeur en Angleterre. Ses poésies sont estimées de

tous les gens de lettres. Il avait une vaste érudition et une

mémoire prodigieuse. Plusieurs auteurs Latins ont été

enrichi par lui de commentaires. Il eut douze enfans dont

plusieurs périent avant lui entr'autres un qui s'appellait

Janus comme son père dont on a publié une volume de poésies

et qui mourut à l'age de 25 ans.

Cet ouvrage est enrichi d'une multitude de notes parmi lesquels

se trouvent des morceaux intéressans. On y trouve beaucoup


pagina: 151

de vers latins tant de lui que de ses contemporains et même un

vers hollandais de lui en honneur de Janus Secundus dont il

chérissait beaucoup les ouvrages au point que dans sa jeunesse

il les avait toujours en poche.

Les deux morceaux les plus curieux sont un tableau de l'érudition

de Dousa par Heinsius et un récit de sa mort par Bertus dans un

discours qu'il fit sur lui.

À la suite de tout ceci se trouve un vers latin misérable de Mar-

ron où il commence par Dousa et finit par Napoléon.

Lundi 27 Avril 1812

J'ai encore été la semaine passé au théâtre français. On donnait

Amphitrion. C'est une pièce de Molière fort gaie mais bien indécente.

Elle fut fort bien jouée. Garn. Amphitryon, La Gardère Jupiter, Calland.

Sosie et Joly Mercure, Mad. Dacit[?] Momène, mad. Dang. Cléanthis.

Cependant il faut convenir que plusieurs choses m'ont rebutées qui

n'étaient pas répréhensibles du tems de Molière p.e là où Sosie

reçoit une rouée de coups de bâton et là où il insulte Mercure

d'être un fils de catin.

Les mineurs de Beaujoing. Ceci a rapport à un triste événement

arrivé il y a peu à Liège. J'aurais cru que cette pièce aurait

brillé par les décorations mais le fait se passe hors de la scène.

On y a joint une petite intrigue amoureuse et un Mr. Trinquile

pour égayer la pièce. À la fin des couplets en l'honneur de l'emp.

et de l'imp. avec le refrein

C'est un modèle à suivre (on n'applaudissait pas)

Enfin tout en règles.

J'ai été à Harlem chez mon cousin Walré pour assister à une

représentation de Leerzaam Vermaak. Je partis Samedi. À Halfweg

on construit à tort et à travers de nouvelles batteries et fortifications.

La barque emmena en passant la moitié d'un pont construit à

la hâte pour faciliter les ouvriers.

Le soir nous fûmes à Leerzaam Vermaak. On donnait Le zilveren Bruid[?]

de Kotzebue. La pièce fut très bien exécutée. M. Walré Welling, Mad.

Kops son épouse, Mad.lle van der Hugt (qui jouait pour la seconde fois)

et C. Walré ses filles, W. Walré son fils, J. Enschedé le Houtvester. W. van

der Vlugt Lodewijk, J. van der Vlugt le lieutenant Huygens, l'adjoint

Kops le vieux comte, Just. Enschedé le secret de cabinet.

Il faut convenir que c'est une pièce touchante quoique comme

toutes les pièces de Kotzebue ce soit une bigarrure. Aussi la pièce fut-

elle supérieurement bien jouée excepté le rôle de comte qui était

insupportable. C'est une jolie société qui a subsisté plus de 25 années

mais ils craignent que faute de membres elle ne périsse. L'accessit

de deux nouvelles actrices y a donné beaucoup de Relief. M. Walré

est un homme universel il remplit toutes sortes de rôles depuis

un valet jusqu'à Agamemnon.

Après la représentation on soupa à de petites tables et l'on

dansa jusqu'à cinq heures. Il y avait de jeunes filles fort aimables.

La musique était abominable. La société était fort gaie.


pagina: 152

Je passai pareillement le jour de hier à Harlem mais je ne

m'amusai pas trop.

Mardi 28 Avril 1812

Annales du Lundi

D. commença par une description exacte de la guillotine qu'il avait

vue.

À table il osa imprudemment déclarer à J. de Vos que c'était une fort

mauvaise coutume d'encadrer des dessins qu'il n'avait vu cela chez

aucun autre. Alors les deux de Vos l'attaquèrent violemment. Ignace

lui dit qu'il tenait de sots raisonnemens. D. lit à présent le traité

de mon grand-père sur le mariage.

Au dessert J. de Vos proposa au grand-père de nous inviter dîner chez

lui le dimanche suivant le jour de la fête. Le grand-père fit beaucoup

de difficultés. L'oncle était excessivement généreux. Il proposa premiè-

rement d'avoir cette fête chez lui ensuite de la donner soit au sallon

de J. de Vos soit de G. de C. Enfin il proposa de donner une collation

chez le grand-père. On applaudit. D. se mêla au discours on lui dit

qu'il devait se taire puisque ce n'était pas de lui qu'il agissait. Ignace

le reprit pour la seconde fois sur un subterfuge qu'il fit. On dit

l'oncle inviter qui que vous voudrez quand même il y en aurait 25.

Il invita lui-même D. et on résolut d'inviter J. Kops.

Commerce

Les prix des grains sont montés considérablement

130 H. o.R.470 gd.

126.127 H. 450.455

120.125 H. Vries 402.425 gd.

124 H. Norder 401.402 gd.

114.117.120 H. Drent. R.308.316.323.325.

121 H.O.3. 348

On n'a presque jamais eu un exemple de pareils prix. Aussi la

plupart des vieux négocians n'ont-ils pas osé spéculer. Mon grand-

père assis devant son speculatie boek où les prix sont notés depuis

une quarantaine d'années se récrie sur la folie de ceux qui

doivent s'engager dans des achats où ils peuvent gagner 20 et...

perdre 200 florins d'or. Mais les tems sont changés. Cependant je crois

que si cela continuait le peuple ne souffrirait pas partout

patiemment un pareil renchérissement dans le prix du

pain.

Le soleil commence tant soit peu à faire sentir sa chaleur

bienfaisante mais la verdure ne [onl.] couvre aucunement

encore les arbres. Il ne paraît pas que les gelées ont eu

aucun effet, du moins de Colzad ne prend aucune faveur.

Orge

98.100 H. Vr. wint 164.170 gd.

Avoine[?]

89 H. Dikke 96 gd.

∙Blé noir

∙121 H. Am. 48 1/2 L.


pagina: 153

Littérature

Hulde aan G. Hesselink door R. Koopmans 1 v.

La première partie contient l'oraison funèbre dont on a

déjà parlé au long.

La seconde partie un discours tenu dans Felix où Hesselink est

considéré comme philosophe, physicien et ami des belles-

lettres.

Comme philosophe il suivit premièrement le système de Leibniz

mais en revint ensuite il n'adoptait point toutes les idées de

Kant quoiquil les mit à prix.

Comme physicien il répandit un jour pur sur diverses parties

de la Physique. Il aimait à être convaincu par des preuves. Il

s'éleva entr'autres contre le positif et le négatif dans le système

de l'électricité de Franklin, disait que c'était pour distinguer

(aanduiding) et non pour expliquer (verklaring) ainsi que

contre l'expérience de Boyle que les fluides pèsent dans

les fluides.

Quant aux belles-lettres. Il était grand amateur de la poésie

comme le prouve entr'autres son discours sur la prosodie. Poot

était un de ses poètes favoris.

Suivent trois vers qui ne me plaisent pas trop.

Un de M. Kleyn où je trouve trop d'enflure et d'expressions

forcées.

Un du Ministre Brouwer qui est dans la style de B. de Bosch ou

L. Pater.

Un de Yntema où il y a de jolies idées mais que je trouve

un peu prosaïque.

Jeudi 30. Avril 1811 [1812]

Il y a longtems que je n'ai été si agréablement frappé que je le fus

hier. J'étais chez De Ruiter qui je grondais de ne m'avoir pas envoyé

les livres que j'avais achetés quand tout à coup j'entends un Monsieur

qui prononce mon nom et qui m'invite à entrer dans sa bibliothèque.

J'ignorais ce que ce propos signifiait et je monte les escaliers.

Je croyais entrer sur un grenier quand tout à coup une port s'ouvrit

et j'entre dans une chambre fort bien meublée. Tout à coup les murs

de toutes parts disparaissent et je vois partout des armoires

rempliés de livres tous superbement reliés. J'entre dans une

seconde chambre. Nouvel étonnement. Je vois entr'autres des

armoires toutes plaines de voyages pittoresques, des ouvrages

à estampes. Une table entière couverte de portefeuilles. Des

dessins de Schouman de Cats négligemment épars, une édition

de Rousseau en 4o Wiland en 4o avec des lettres latines

tous reliés en maroquin partout les meilleurs ouvrages. Gibbon

Shakespear Spenser. J'étais stupéfait d'étonnenment et perdu

dans l'immensité de la collection. Des chef-d'oeuvres partout. C'était

la bibliothèque de M. Ameshof homme fort riche qui

m'accabla de civilités et m'invita à venir considérer plus

à mon aise ces nombreuses richesses.


pagina: 154

Vendredi 1 may 1812

Littérature

Young Works vol. 3

Encore un volume de Young qui ne m'a pas moins plu que les

volumes précédens.

The last day in three books

C'est un fort joli poème on reconnaît le poète des nuits. Les plus

beaux morceaux en sont à mon avis Le moment

de l'anéantissement de la terre, la prière à dieu, et les paroles

que le pêcheur damné adresse à l'auteur de l'univers voici quelques

vers qui m'ont frappés

The most magnificent and costly dome

Is but an upper chamber to a tomb

No spot on earth, but has supply'd a grave

And human skuls the spacious oceans pave

The wise

The planets drop their thougts are fix'd above

The centire shakes their heart disdains to move

An earth dissolving and a head n't thrown wide

A yawning gulphand fiends on ev'ry side

Serene this view, impatient of delay

And blesses the dawn of everlasting day

How greatness prostrate falls, there strength gives place

Here lazars[?] smile there beauty hides her face

On ne tarirait pas de citations voici la fin

Thus glad all heav'n and please that bounteous God

Who to light Uru to pleasures hung on high

You radiant orb, proud regent of the sky

That service done its beams shall fade away

And God shine forth in an eternal day

Triumph of Religion or love vanquish'd 2. books

Voilà un poème charmant sur la mort de la malheureuse J.

Gray et Guilfort. Des tableaux charmants. Un style plus doux

que celui de Young ne l'est ordinairement. La pureté, l'innocence

de Gray, sa piété sublime tout est mis dans le plus beau jour.

The love of fame in 7 satires

Si l'on en excepte celles de Boileau et d'Horace je ne connais pas de

plus jolies satires que celles-ci puisque le sel n'y tombe pas tant

sur des particularités inconnues ou des sujets de Politique mais

que l'auteur nous trace des portraits propres à charmer tous les

lecteurs. Ce sont proprement un assemblage de portraits quelquefois

d'epigrammes composé par un homme d'esprit. Les deux satires

on women m'ont surtout.

∙Deux lettres à Pope sur les auteurs de son tems ont aussi beau

coup d'agrémens et renferment de bons préceptes.

Mais les odes n'étaient aucunement le genre de l'auteur

et ne paraît même pas être celui de la langue anglaise et


pagina: 155

[onl.] pièce me paraît être la plus jolie

Vide Tome 13.17.18.19.20.21.22.23.24.25.26.27.28.

Addison

Je croyais lire un volume rempli tout entier des poésies de cet auteur.

Mais du moins les trois quarts sont des imitations d'Ovide qui ne

m'intéressent nullement. Celui-ci encense Guill. 3 comme Dryden

Charles 2 et Young Anne on doit pardonner ce défaut naturel

à tout poète.

Les plus beaux morceaux que j'y trouve sont

An account of the greatest English poets

Là se trouvent de fort jolis portraits de Chaucer, Spenser, Cowley

Waller Milton, Roscommon, Denham, Dryden, Congreve.

A Letter from Italy

C'est une fort jolie description d'Italie.

The Campaign

Ce poème contient de fort jolies idées. La bataille de Hochstat et tous

les événemens de cette campagne y sont décrites. C'est du moins

un meilleur poème que le historical poem de M. Dryden. Il dit

en parlant du bombardement de St. Malo.

Now does the sailor from the neighbouring main

Look after Gallic towns and forts in vain

No more his wanted marks he can descry

But sees a long immeasur'd ruin lie

Whilst, pointing to the naked coast he shows

His wondring mates where towns and steepl's rose

Where crowded Citizens he lately view'd

And singles out the place where once St. Malo stood

Les autres pieces sontTo Mr. Dryden To the King. Quelques pro-

logues et épilogues. Des trad. d'Horace et le 4 Livre des Georgiques.

Vide Tome 13 No. 29

Lundi 4 mai 1812

Le jour de hier mérite d'être décrit plus particulièrement.

L'église était remplie. Celui qui pendant cinquante ans avait

fait retentir cette enceinte des paroles de l'Évan-

gile monta en chaire.

Il prit pour texte Hand.26 v.22Hulpe dan van God

verkregen hebbende sta ik tot op dezen dag passage tiré du

discours de St. Paul à Festus. Il expliqua premièrement rapidement

l'occasion qui avait donné lieu à ce discours. Ensuite venant à

lui-même il parla des considérations qui l'avaient engagé

à célébrer ce jour. Il fit un court exposé de sa vie et effleura

tout sans rien omettre ou sans trop appuyer sur quelque

chose. Les circonstances politiques les médailles reçues

deux épouses perdues, tout fut traité avec la plus grande délicatesse.

On chanta deux couplets du cantique zoude aan den stroom des tijds.

∙Ayant recommandé par une superbe comparaison des

figures il s'adressa plus particulièrement à ces vieillards


pagina: 156

ainsi que lui héritiers d'une autre génération. Il leur

montra les obligations qu'ils avaient à remplir, les devoirs qui leur

étaient imposés envers Dieu et les hommes. Se tournant ensuite

vers les jeunes gens il leur conseilla d'honorer la vieillesse et d'user

envers elle de la même condescendance dont ils désireraient

jouir s'ils parvenaient à un âge aussi avancée. Puis après avoir

encore discuté les causes qui l'avaient engagé à continuer sa

fonction. Il répandit sur tous les classes d'auditeurs ses souhaits

en implorant pour eux la bénédiction du créateur. Ce fut surtout

l'adresse à tous les membres de la communauté qui me plut le

plus. Là il leur représenta les efforts qu'il avait toujours fait

pour leur plaire et les édifier qu'ils daignassent excuser le

vieillard qui n'avait que si peu de temps à vivre et supporter les

défauts suites de la vieillesse.

Après l'église nous allâmes chez le grand-père où

s'étaient assemblés beaucoup d'anciens amis. Tous étaient en-

chantés et ces bons vieillards parlèrent encore des temps

de leur jeunesse.

Le soir nous nous assemblâmes pour la collation. J. Kops et son épouse

ainsi que J. de Vries y étaient, on fut fort gai. À dix heures on alla

au sallon. La table était magnifiquement servie. Il y avait au milieu

une pièce quarrée garnie de 4 dessins faits par J. de Vos. De l'un côté

on voyait la reconnaissance sous la figure d'une femme

devant un autel au brille du feu. De l'autre côté

des génies soutenait un écriteau. [onl.] peignait le buste du

grand-père et enfin une belle peinture de la vieillesse.

Sur cette machine était posé un vase où brilait une flamme.

La collation était très brillante. D. fit venir quelques bouteilles

de vin de la fête dont il distribua amplement. Au commencement

du dessert où il avait de belles glaces on proposa des conditions et

l'on vint à l'ordre du jour. J. de Vos récita un vers qu'il dit être

très mauvais. Dylius suivit disant que les grands hommes ne

se laissent pas décourager par des chutes fréquentes. C'était

un des meilleurs vers qu'il ait fait. Après lui je vins et enfin

de Vries. Les quatre premières lignes étaient superbes mais le

on s'apercevait que le reste y avait été ajouté depuis. J. Kops

fit un compliment en prose et le grand-père répondit ce toutes

nos félicitations. L'oncle était excessivement gai. Je lus après

que le premier attendrissement fut passé mon vers de félicitation

à Dylius qui eut assez de succès. Kato chanta

les couplets à l'oncle. Ensuite la gaieté augmenta à chaque moment.

Dylius se permit des réflexions satyriques sur les dessins

on entonna à la ronde la chanson. Onze Willem oom is jarig.

J. Kops chanta diverses chansons de Walré, de Loosjes ainsi que

la conversation du paysan et de sa maîtresse dans le Donquichot

de Langendijk. J. de Vries récita un morceau d'Anacreon. On

finit par la ronde de Hoe zoet is 't daar de vriendschap woont

et après cela tous bien égayés par les vapeurs du vin

de la fête nous nous en retournâmes chez nous.


pagina: 157

Samedi 9 Mai 1812

Peu d'événement importans se sont passés dans le cours

de cette semaine. Le tems qui encore Jeudi était si froid

qu'on devait se promener dans une bonne redingotte a maintenant

changé au point qu'il fait un chaud presque insupportable.

[onl.] qui a déménagé vient à présent trois fois la

semaine chez moi me chasser de mon lit à

7 heures. Nous causons. Nous traduisons du latin du grec. Nous

avons eu controverse. Premièrement il voulut nier l'existence

de J.C. Mais plus pressé cependant il se jeta sur quelques

objections connues la discordance des Év., le sil de Jaepht., quelques

lois du Moise le baptême etc. Il y a dans Kotz. un passage

La misantropie est dans sa tête et non dans son coeur.

C. en est de même, de cet ami-là. Je lui lus ensuite un morceau

de Bilderdijk sur l'immortalité de l'âme il était charmé.

Papa m'a confié cette semaine ce que c'était passé entre lui

et monsieur P.P. C'était affreuse. C'était un ami intime et

il le vola. Dieu me préserve d'un pareil malheur.

Un décret foudrayant vient d'anéantir toute spéculation

en grains. J'en ferai mention, lorsque j'en saurai plus.

Les prix avaient tant soit peu baissé 129 H. Fr. VI.335

Littérature

Poot. Gedichten 3 vol.

J'ai parcouru ces poésies.

L'on doit pourtant convenir que Poot est un de nos meilleurs

poètes. On remarque à chaque page des tournures, des expres-

sions dont il a enrichi notre langue. On trouve chez lui

V.1. Bijbelgedichten.

Je crois que sont là les matières les plus difficiles à

traiter puisque ce sont des choses tellement rebattues de toutes

manières et que souvent le systématique y joue un si grand

rôle. Il y a des poètes qui ont mieux réussi dans ce genre

que Poot. Les meilleurs vers en ce genre sont

Uitgang van Gods zoon

's Heilants hemelvaert

Mozes' Kindscheit

Aan Godt (c'est un très beau vers

Pourquoi l'Héroide. Vaste [onl.] est rangé sous cette

nomenclature, c'est ce que je ne comprends pas.

Brieven

Ces lettres ne m'ont pas beaucoup plu. Les meilleurs sont

Reisbrief où il décrit sa vie d'une manière allégorique.

Algemeene brief où il raconte ce que lui arriva depuis sa naissance.

Velt en Zeezangen

Ces pastorales sont charmantes. Il y a des détails fort jolis

que Poot seul pouvait bien peindre. Les noms Allégoriques

de Duinman, Peiling etc. me déplaisent fort.


pagina: 158

Minnedichten

C'est là proprement la partie où Poot a excellé toutes ces

morceaux sont charmans. Aan Galaté. Wachten Goelijke

wangen Rozemonts Toverij De maan bij Endimion Vliegende

min Mor.Ch.

Et non moins. 'T bedrog der droomen et le vers superbe intitulé

De verliefde Venus commençant

Ja Triomf Kupido draeit

De diamante spil

Des werelts na zijn wil

C'est selon moi cette vingtaine où le génie de Poot brille le

plus. C'est dommage qu'il n'en ait pas fait plus encore.

Il se trouve aussi de fort jolies pièces dans ses Mengeldichten

Glorie der deught

Rijke armoede

Het nut der vrede

Snelheit en woede des tijds

Rechte weg

Akkerleven

Arme Rijkdom

Morgenzang

Op den watervloedt

Vrolijk leven

Winter

Bloemhof

Broekbergen

De eerdieven

Lantvermaek

Mei

Zomer

Zomeronweer

En schone dag

Nacht

Geboortedichten Lofdichten Bijschriften

ne m'ont pas singulièrement frappés.

Bruiloftdichten

On y trouve beaucoup plus d'élégance et de variété que l'on ne

trouve autrement dans de pareilles productions. Il y a des idées

charmantes.

Lijk en grafdichten

L'élégie sur sa mère m'a paru la plus jolie.

On n'a besoin que d'ouvrir Poot pour trouver une foule d'expressions

neuves et justes par ex. j'ouvre au hazard

Maan.

Zij meet het blauw met elpen schreen

En scheurt in koelen moedt, met haere zilvre horens

De donkerheit van een

Der starren eindeloos getal

Speelt met een flonkerenden val

En glooiende muzijk van kringen

Lucht

Daarin schrijft nu geen vogelvlugt

Haar schaterende wemelsporen

Het levend kristallijn bij 't schubbig vee verkoren

Glijt zacht langs rand en kil

Gij mest den os en 't lam in 't groen

Als hen de dagen hinder doen

In oogstmaend zwart van vliegende anglen


pagina: 159

Gij vult des visschers ruime fuik

Met spartlend stroomgeluk

Avond

Hierop volgt de avont ras die aen de westerkimmen

Zich met een tulbant van gelooke roozen hult

On en trouverait des milliers de pareils.

Vendredi 16 Mai 1812

Voilà toute une semaine que j'ai passé sans porter rien en

écrit, en effet soit paresse soit manque de sujet on oublierait

jusqu'aux meilleures choses.

Dimanche j'étais déjà avant sept heures en campagne

pour aller prendre un déjeuner chez Mr. Tissot. Il me rigola

fort bien, on a de chez lui une fort belle vue sur le Weterings-

poort.

On aurait cru que le décret de S.M. qui défend les spéculations

et qui donne diverses ordonnances sur les grains qui

généraient infiniment le commerce, aurait fait beaucoup

plus de sensation ici. Au contraire les prix n'en ont point

ressenti d'influence considérable. On dit que le Préfet a envoyé

à ce sujet ses remontrances à Paris. Cependant je n'ai aucune

confidence dans cette feinte sécurité puisqu'il y a expressément

dans le décret tous nos sujets.

J'ai été Mecredi passé au spectacle hollandais on donnaitde

vrouw na de waereld. C'est une fort bonne pièce. Mad. Kamphuizen

qui est une excellente actrice jouait fort bien le rôle de

la femme. Le sujet est d'un homme qui aime éperdument

sa femme entraînée dans le tourbillon du grand monde

désespérant de la ramener par la douceur la réduit

au désespoir par des malheurs qu'il accumule sur elle.

Elle perd son argent au jeu. Il la fait accroire qu'il est ruiné

qu'il doit des sommes considérables qu'elle a perdu son procès sur

lequel reposait toutes ses espérances que son père a été

englouti par la mer avec tous les trésors qu'il rapportait. En

fin elle est réduite à un tel excès de désespoir qu'elle est sur

le point de s'ôter la vie cependant tout se rétablit elle est rendue

à son mari à sa famille. Les autres acteurs jouaient plus

ou moins bien. Rombach et mad. Snoeck remplissaient

bien les rôles d'un libertin et d'une fausse dévote.

On joua après une pantomine fort jolie de Van Wal.

On y voyait entr'autres une Pantalonne. Il y avait

de fort jolies décorations et coups de théâtre p.e. un où

une assemblée de juges après que leurs perruques sont

volées au plancher est transformée en une compagnie de bêtes[?].


pagina: 160

Annales du Lundi

Peu de nouvelles intéressantes. D. a vu guillotiner un chien.

Il fit deux fois un récit extrêmement long sur la mort

d'une femme entretenue.

Mardi 19 Mai 1812

Je viens de passer quelques journées charmantes dans mon

séjour chéri de Rupelmonde. Vendredi le jour du départ il faisait

beau temps. La foule se pressait dans les barques qui partaient

pour tous les villages qu'arrose le Vecht. J'entrai enfin dans le

second Roef d'une barque où se trouvaient P. Warnars, Jut,

la fille du ministre Van Eyke et une monsieur avec son

épouse qui avait un petit enfant. Les caresses qu'on faisait à

cet enfant et le gentillesses qu'il 'exerçait avec le chapeau

de son père n'étaient interrompus que lorsqu'il mangeait ou que

sa mère lui donnait la mamelle. Sans cela c'étaient des personnes

très polies qui contribuèrent à perpétuer la conversation. À Abkou

nous 4 messieurs nous sortîmes de la barque courûmes à

travers champs et arrivâmes longtemps avant la barque à

Loenersloot. Enfin l'heure de la délivrance sonna et je me

trouvai à Rupelmonde où logeaient mon oncle Bosch

la famille de mon oncle de Clercq et ma cousine M. ten Cate.

Samedi fut un jour bien triste. De la pluie, du vent, de la froidure

enfin c'était tout ce qu'on pouvait désirer. La lecture des voyageurs

Suisses de Lantier que j'avais trouvé à Rupelmonde et que je dévorai

avec avidité, ainsi que des parties de billard avec mon Grand-père

et mes deux oncles et une vingtaine de vers pour mon

Annibal et une partie de Boston furent les consolations de ce

jour. Le lendemain un voile funèbre non moins triste couvrit

la face du soleil. Nous allâmes au Nieuwersluis où nous

trouvâmes le commandant de la forteresse jouant au jeu d'assaut

qu'il croyait savoir fort bien quoique mon oncle l'assurât qu'il n'en

savait pas trop. Ce commandant est un homme fort aimable

il n'avait pas un seul homme sous ses ordres. La partie la

plus importante de son poste consiste à composer des rapports

lorsqu'il passe quelques transports de prisonniers ou d'espagnols.

Nous avions vu encore le même jour de ces malheureux. Il se trouvait

pareillement à l'auberge M. Hartmann gouverneur des enfans

de Mr. van den Berg. Il nous dit qu'un certain peintre était occupé

à peindre une enseigne pour le cordonnier du nieuwersluis qui

représentait un cordonnier prenant la mesure d'une

paire de souliers aux pieds de la statue de minerve. On chercherait

à y ajouter des vers en autant de langues qu'il serait possible P.E.

en latin ces vers d'Ovide

Nec quisquam invita bene faciat vincula plantae

Pallade Tycho sit doctior ille licet

F. L'ouvrir qui fabrique une utile chaussure

Sans l'aveu de Pallas prendra mal sa mesure


pagina: 161

A. Schlecht wird der Schuster den Schuh zu schmeiden

Wird Pallas ihm nicht Hände Leiten

H. Geen schoen word na de kunst bereid

Zoo Pallas 's meester hand niet leid

Il avait encore la même inscription en Hébreu Grec et Italien.

Je promis de lui procurer l'anglais et mon oncle de Clercq l'espa-

gnol. Le même jour une promenade à breukelen eut lieu.

∙Le second jour de pentecôte il faisait un tems divin mais

diablement chaud. Nous revînmes fort fatigués d'une course

à Vreeland. L'après-dîné nous allâmes dans la campagne

charmante de Sterrenschans. Je revins en barque avec une

troupe de musiciens un paysan et sa femme qui ne pouvaient

point faire d'enfans enfin avec une troupe confuse.

J'ai voulu m'exercer ici composant une nouvelle description

de Rupelmonde. Dans le second vol. des journaux il y en a une

mais fort courte et défectueuse. D'ailleurs il y a si longtems

de là.

Le tems qui change tout change aussi nos humeurs.

Rupelmonde

Cette campagne est située près du Nieuwersluis et a une vue

magnifique sur le Vecht. Elle date déjà son existence d'une

époque assez reculée mais à sa fondation ce ne fut qu'un jardin

où on faisait de la corde (lijnbaanstuintje). La maison subit

pareillement divers changemens améliorations. La manière

dont mon grand-père fut porté à l'achat de cette campagne

est assez curieuse. Passant dans les environs ils apprirent

que cette campagne était à vendre ils voulurent la voir. Le

jardin était à cette époque d'une roideur insupportable. Mais

la vue qu'on a de deux côtés dans la grande chambre (koepelkamer)

les frappa tellement que ceci les détermina à acheter

la campagne. Aussitôt il fallut arranger la campagne

d'une manière élégante. Les vergers furent transformés

en jardins à l'anglaise les berceaux détruits une grande

alleé coupeé en partie un ruisseau creusé des bosquets furent

plantés et bientôt la campagne eut un air infiniment

plus gai. Le chemin d'Utrecht divise la campagne

en deux parties nommées vulgairement le voorstuk et

l'overstuk. Attachons-nous premièrement à la première partie.

Le palais est une des maisons de plaisance les plus avantageusement

situées qu'on trouve sur le Vecht. La vue du Koepelkamer

est superbe de l'un côté on découvre une foule de campagnes

charmantes et de l'autre le Nieuwersluis avec ses toits

rustiques. Quant à la maison elle est irrégulièrement

bâtie puisque la dernière partie a été ajoutée depuis. La

maison est surmontée d'une tour d'où on a une vue

charmante sur les environs. Les sites de ce voorstuk n'ont rien

de bien remarquable le sentier qui suit le cours du Vecht


pagina: 162

est sans contredit le plus joli. On trouve cependant encore divers

bâtimens dans cette enceinte. On y voit le fameux Tuinkamer

bâtiment carré dont le plus grand avantage est d'avoir une

bonne perspective sur le chemin et sur de vastes prairies ou

l'on voit le coucher du soleil. C'est une espèce de prison d'état pour

les enfans et pour ceux qui n'aiment point au milieu de l'été

les vapeurs du thé joints à la fumée de tabac et à un air

excessivement chaud. On y voit une écurie capable d'entretenir

beaucoup plus de chevaux que le seigneur de la campagne

n'en a[?] une espèce de grange qui sert de repaire à tous les chiffons

les vieux morceaux de bois pourris, une chambre à billard

avec un billard d'une grandeur énorme, un bâtiment fort vaste

pour contenir une barque dont la pesanteur a bien souvent fait

couler mes soeurs et enfin sans parler d'un petit cabinet

pavé en mosaïque reste du mauvais goût de nos ancêtres, l'habi-

tation du dertumné[?] de cette contrée qui après avoir perdu sa

vieille femme a épousé une moderne Pomène qui bientôt a

donné le jour à une petite Dryade charmante. Près delà

est la demeure du terrible cerbère qui défend l'entrée de

ce nouveau jardin des hespérides.

Entrés dans l'overstuk on remarque d'abord un grand défaut

savoir qu'on trouve une belle allée de châtaigniers belle

à la vérité mais par laquelle il faut toujours aller et revenir

au risque d'être consumé par l'ardeur du soleil dans un potager

remplis des légumes les plus nourrissans et des fruits les

plus délicieux. L'allée contenait jadis un pareil nombre de

beaux platanes mais un cruel hyver les a vu tous périr. Tel

est le sort des hommes et des arbres. À la fin de cette allée on

trouve un banc fort grand qui a reçu le nom de familie-

banc. Jadis encore les bancs étaient infiniment plus

nombreux et on y avait au moins une vingtaine. Un petit

pont qui vous mène de l'autre côté d'un vivier vous conduit

à un enclos décoré du nom pompeux de Ménagerie tandis

qu'on devait tout au plus l'honorer de celui de basse cour. Car

malgré un joli pavillon construit pour donner de la

nourriture aux timides colombes et une alleé de sapins

on ne trouve guère que quelques canards quelques pigeons et

des poules. J'y ai connu plusieurs paons. Les premiers se

pavanaient d'une manière fort brillante mais ce talent

décroissait de paon en paon. Cependant j'étais toujours grand

amateur de leurs précieuses dépouilles. Au sortir de cette

ménagerie on entre dans la partie nommé par excellence

le bois. Deux sentiers vous mènent en suivant les

replis tortueux du vivier nommée le ruisseau. Le plus grand

défaut du terrain est son peu de largeur puisque on peut

voir en même tems les bornes de la campagne à l'est

et à l'ouest et c'est une chose que Delille défend absolument

dans ses préceptes sur les jardins. Le ruisseau se


pagina: 163

perd un instant dans un large bassin d'eau. Jadis

nommé le bassin des carpes de la multitude des poissons

de cette espèce qui vivaient dans ces parages et dont la

gueule avide disputait avec avidité les morceaux de pain

que notre bonté leur jetait un hiver rigoureux les a détruit.

Au milieu de cette nappe d'eau s'élève une petite île où

croissent quelques beaux arbres mais il n'y a que les

oiseaux du ciel qui puissent l'approcher. Enfin à la fin

de toute la promenade l'on découvre la tente chinoise d'où

l'on a une vue superbe. Cependant la tente elle-même ne me

plaît pas trop. Pourquoi un ornement aussi bizarre. Il est

fort difficile dans la chaleur de se reposer dans son enceinte

tapisseé d'un papier où sont peint en dépit de toutes les

règles de la perspective une foule de chinois enfin qui ressemble

beaucoup à une serre chaude. Le dessous de la tente est une

grotte humide où l'on trouve un réduit pour satisfaire

aux besoins de la nature et dessous la pente douce qui conduit

au faîte de cet édifice il y a un réduit fort malpropre où les

ronces et les épines croissent à plaisir et qui fut jadis le

séjour de dindons.

M. Étant promené un jours vers la tente j'y trouvai les vers suivans

écrits avec du crayon sur la balustrade

Heureux si le reste de ma vie

Pouvait se passer en ces lieux

O que mon sort serait digne d'envie

Je le comparerais même à celui des dieux

Je répliquai par les vers abominables qui suivent

Je suis avec vous du même avis

Que ces beaux lieux nous ont ravis

Mais votre aimable compagnie

Surpasse encore cette prairie

Ayant un nouvel vers emphatique nous trouvâmes l'année

suivante le couplet suivant

Ces beaux vers furent écrits quand vous étiez aimée

Vous ne l'êtes plus à la[?] chère infortunée

Toute cette belle amitié n'était que du néant.

C'étaient des vers Mme Cochard on ne sut jamais à quels

propos elle les avait mis là. Papa répliqua

Je vois trop dans ces vers que la mélancolie

Empoisonné hélas les beaux jours de ta vie

Et l'amitié. Madame est un présent des cieux

Il faut s'en rendre digne pour pouvoir vivre heureux

Elle fut fort mortifiée de cette réponse. Enfin j'y écrivis

les vers qui suivent d'une manière si illisible que

je crois que personne ne sera jamais tenté de les lire

Le voici donc

Jadis si l'on en croit les traditions antiques


pagina: 164

La Grèce fourmillait de rochers poétiques

Sur le sommet du Pinde un poète élevé

Dans son génie étroit n'était plus captive

Mais le feu des neuf soeurs inspirait son délyre

Il charmait les humains par les sons de son lyre

Ce prodige éclatant par les grecs célébré

Semble aux rives du Vecht s'être renouvellé

Car miracle étonnant, une simple prairie

D'un saint enthousiasme a dicté la furie

Elle a dicté des vers célébrant l'amitié

D'autres disant ce lieu n'a jamais subsisté

Du fratras inspiré par la mélancolie

Et du bon sens enfin vainqueur de la folie

O mont prodigue nous de nouvelles douceurs

Que le Parnasse cède à tes adorateurs

Il se trouve un lieu charmant près de la tente nommé l'église.

Il y a de charmant châtaigniers c'est là que l'onde qui baigne

ces champs, finit ou commence son cours car il ne fait

ni l'un ni l'autre.

Papa se promenant un jour vit sur un des bancs le vers suivant

de Mr. Cochard

Assisé sur ce banc avec ma chère marie

J'éprouve mille plaisirs mille sentimens divers

Ah pourquoi cette enfant me doit-elle être ravie

Pour la chercher je courrerais l'univers.

Il avait Boileau à la main dont il copia aussitôt les lignes

suivantes

Le vers le mieux rempli la plus noble pensée

Ne peut plaire à l'esprit quand l'oreille est blessé

Les amusements de Rupelmonde sont

La promenade en voiture. Elle diminue de plus en plus. Maarsen

est maintenant le terme de toutes les courses.

Les promenades à pied. Il y en a charmantes quoique le chemin

revienne toujours au même. Nous parlerons ensuite des environs.

La promenade. C'est ainsi que j'appelle l'action de parcourir

les allées du Rupelmonde.

La promenade en bateau. C'est un exercice très amusant

et qui est ordinairement réservé pour l'après-dîné.

La pêche. Mon plaisir pour cette branche a beaucoup diminué

depuis que je n'ai rien pu attraper dans ce malheureux

Vecht.

Le billard. Je le trouve le plus beau des jeux de la campagne

excepté celui de la crosse que je désirerais beaucoup connaître.

La lecture. Dans le mauvais tems cela s'entend ou le

matin. Car autrement ce serait un péché.

Le volant. C'est un bon amusement dans les jours pluvieux.

Le dîner qui est toujours excellent.

Un drilplank n'est bon qu'a sous moudre les fesses.

Le boston c'est l'exercice du soir puisque les possesseurs de

Rupelmonde désapprouvent toute promenade après le coucher

du soleil et sont grand ennemis de Delille dans ce point-là.


pagina: 165

Annales du Lundi

Rédigés par G. d. C.

Di. commença par dire qu'il avait vu la maison des fous

et avait eu beaucoup de conversations avec la reine qui

s'était parfaitement mocquée de lui puisque Vollenhoven

était fort à son aise à Paris et qu'il y avait beaucoup à faire

- mais que lui Dylius avait trop de probité pour pouvoir

y faire des avancemens rapides, que les juristes étaient seuls

en ce cas - on parla beaucoup de la lecture de Test de

la cousine Kops. Dyl. après avoir confessé son ignorance

dans la peinture et le dessin qui lui avait été prouvé

si décisivement par Ignace lui même eut beaucoup de

réflexions sans nombre sur le tableau de de Bré qui furent

refutées victorieusement par J. de Vos qui lui dit que

plusieurs personnes avaient appris avec indignation qu'il

avait pu voir guillotiner de sang froid un pauvre chien.

Oui reprit Dylius je le pus car j'ai une aversion décidée

contre les chiens mais quant à un agneau ce serait

autre chose. L'assemblée ne put s'empêcher de rire de

la prédilection qu'il accordait au timide agneau.

J. de V. raconta ensuite de quelle manière il avait fait

la connaissance avec D. le bien qu'il avait entendu

dire de ses études etc. (D. sans rougir car cela lui est

impossible s'est couvert de sa serviette pendant ce discours

Littérature

Waller Poems 1 vol

Il y a de ces auteurs jolis dans toutes les langues qu'on lit et

relit toujours avec plaisir. De ce nombre est Waller. Non que

chez lui il n'y aurait Rien à retrancher. Nous en sommes

bien loin. Nous avons déjà vu plusieurs poètes anglais flatteurs.

Celui-ci ne l'est pas moins. Il commence pas les louanges de

Charles 2. C'est surtout à la reine qu'il chante sous le nom

de Gloriana qu'il prodigue son encens

Mighty queen

In whom th'extremis of beauty and power move

The queen of Brittain and the queen of love

Aussi les vers adressés à elle doivent être comptés parmi les

plus jolis de la collection.

Mais bientôt après il loue Cromwel dans un panégyrique superbe

ou il le peint comme le prince le plus grand le plus clément

le plus vertueux qui eut jamais existé oui même dit-il

You grieve

You can not make the dead again to live

Et nonobstant tout cela il a l'impudence de faire encore des

vers sur l'arrivée de Charles 2. Si comme l'on dit il se repentait

sur la fin de sa vie de ses chansons amoureuses il aurait

plutôt du se repentir de sa flatterie.


pagina: 166

Ses vers sont rimés. Ses poésies amoureuses sont les plus

jolies.

The battle of the summer's land in 3 cantos contenant

un combat contre les insulaires est un fort joli petit poème.

Parmi les vers qu'il adresse à ses amis sur leurs ouvrages il

y en a de fort jolis.

Des poésies religieuses savoir Of divine love 6 cantos of the

fear of God 2 C. of Divine Poesy 2 C. ne respirent point le feu

des ouvrages de sa jeunesse.

Les épigrammes sont en trop petit nombre pour pouvoir

en juger.

J. Delille La Conversation 1 v.

C'est un malheur. Hélas trop commun que souvent les

derniers ouvrages d'un auteur sont bien loin d'égaler les premiers.

Tel est le cas de ce poème. Ce n'est point l'auteur de l'imagination

des trois règnes, des jardins. Je crois qu'une des raisons du peu

de plaisir que fait ce poème est la coupe des vers car si l'on a

accusé l'alexandrin de monotonie que dire de cet ouvrage-ci

où l'auteur a employé une mesure infiniment plus lâche

et plus monotone. C'est un recueil de portraits parmi lesquels

il y en a d'assez bien tracé c'est l'essai d'un homme qui a

beaucoup fréquenté la société mais ce n'est pas un ouvrage

digne de Delille.

Un seconde lecture me fait rétracter en grande partie

ce jugement.

Bilderdijk Winterbloemen 2e deel

Encore des vers du patriarche de notre Parnasse.

Le vers De Schilderkunst m'avait premièrement fort déplu

mais à la seconde lecture il m'a fait plus de plaisir.

L'imitation du genre de Helmers par Bilderdijk me déplaît.

On est ennuyé d'entendre toujours faire des rodomontades

de cet idéal dans les arts. Ce sont encore toujours des vers

dignes de Bilderdijk.

Onmenselijkheid est un vers furieux. Il finit

Neen zet uw voet op gloende koolen

Vertrouw op de adder onder 't gras

Betrouw de toegevroren plasch

Omhels den woudosch en zijn holen

Maar vriendschap menschlijkheid op aard

De Godheid riep ze hemelwaart

Dans la consolation à Brugmans il dit en parlant de la mort

de ses propres enfans

Neen o mijn Gade gij noch ik

Verduurden sints een oogenblik

of 't was door tranen onderscheiden

Door tranen die geen ooglid sprengt

Maar daar zich 't leven in verplengt

Die niet dan radelozen schreidden


pagina: 167

Bede. Jolie imitation d'une ode d'Horace.

De Scheldbewoner. C'est une fort belle ode au sujet de l'espoir

de la paix.

Lotbetreuring c'est encore des plaintes en beaux vers.

Treurzang

Wintervreugd De drie lessen et plusieurs autres sont de

fort jolies pièces.

De drie vijanden est une fort belle romance allégorique

imitée de l'Indien.

Afscheid ce sont encore des plaintes sans fin.

Nero aan de nakomelingschap. C'est un fort beaux vers

mais il établit une singulière hypothèse c.à.d. il faut regarder

Neron comme un parfait honête homme qui n'a été entraîné

à tous ses crimes que par son aversion contre la méchanceté

des Romains et le mépris d'eux.

Mardi 26. Mai 1812.

Jamais nous ne goûtons de parfaite allégresse

Nos plus heureux succès sont mělés de tristesse

Toujours quelque souci en ces événemens

Trouble la pureté de nos contentemens

En voici bien la preuve. J'avais été à la campagne chez Bruin

où comme l'on verra plus loin je m'étais parfaitement bien

amusé. J'étais gai et dispos lorsqu à la bourse je vois C. Hartsen.

Je vais à sa rencontre en lui disant. Quel hasard vous amène

ici, il me répond en parlant en même temps de P. Bel. J'ai deux

mots à vous dire. Croyant qu'il s'agissait d'une invitation ou

de quelque chose de pareil j'attends qu'il s'adresse à moi et me

dit Savez-vous quelque chose de M. Tissot. Car il avait manqué

deux leçons chez nous, Je lui dis. Est-ce qu'il serait malade.

Pis que cela me répond il. Je m'écrie Mon Dieu est

ce qu'il est mort et bientôt je reçois la triste confirmation de

cette affreuse nouvelle. J'étais terriblement frappé. Je m'adresse

à mon Papa en ce moment occupé et je lui mords dans

l'oreille M. Tissot est mort. Taisez-vous me dit-il et voyant

mon trouble il me prend aussitôt le bras et m'en mène

tandis que je versais des torrens de larmes et faisais la plus

sotte figure du monde. Nous courâmes avec une vélocité

extraordinaire. Mon Papa pleurait presqu'autant que moi.

Mon oncle de Vos qui nous vit passer fut tout à fait

pétrifié et même deux français se dirent entr'eux. Comme

ce jeune homme pleure. Bientôt nous vînmes verser la

désolation dans le sein de notre famille et ce dîner qui

par la présence de C. et G. Walré devait être réjouissant

ne fut signalé que par la douleur.

Aussitôt après-dîner je fus à la maison du défunt et

là j'appris les détails de l'accident malheureux qui l'a

précipité au tombeau et qu'il a raconté lui-même au hôte chez

qui il était logé.


pagina: 168

Il sortait chez C. Hartsen où il avait fait une partie

de jassen. Il faisait assez sombre cette soir. C'était onze heures.

Comme il avait la vue fort basse Hartsen proposa de le

faire conduire par un crocheteur. Mais il refusa disant

qu'il se confiait sur son bâton. En passant le pont du Leidsche-

gracht sur le Keizersgracht j'oublie mon guide dit-il et je

tombe dans le canal. Je me tins assez longtems au dessus

de l'eau et criai de toutes mes forces. Mais comme il n'y

avait personne je me dus laisser enfin tomber au fond où je

me souviens d'avoir gratté dans la boue. Je me sentis enfin

tirer hors de l'eau mais au moment que j'en sortis, je

perdis connaissance. La police s'empara aussitôt de lui. Au

premier cabaret on le refusa au second on dut enfoncer la porte.

Là on lui administra la cure ordinaire et il fut conduit dans

un traîneau à sa maison où il arriva comme un mort.

On le mit dans son lit. Il ouvrit les yeux et paraissait

être content de ce voir chez lui. Les personnes de cette maison

le vullèrent[?] et l'obligèrent à prendre la médecine ce qu'il

faisait avec beaucoup de répugnance. Il vécut de cette manière

le vendredi entier en paraissant souffrir des douleurs

aiguës et ne prononçant que des mots entrecoupés. Il eut

la visité de deux médecins et reçut une saignée qui n'eut

aucun effet. Il voulait absolument beaucoup boire et surtout

du vin dont on ne lui donnait que fort peu delayé dans de

l'eau. Il prononça encore une fois le nom de ses enfans.

Le samedi matin il paraissait se porter infiniment mieux

de manière que l'hôte lui ayant dit M. Tissot j'espère que vous

en reviendrez encore il répondit oui je l'espère avec l'aide de

Dieu. Peu après le médecin étant venu il dit aux personnes

de la maison Mes amis si cet homme là a encore quelques

dispositions à faire il doit se dépêcher car il n'a plus longtems

à vivre. Ces gens concluant d'après l'apparence ne pouvaient

pas comprendre ceci. Cependant la femme courut chez sa belle

soeur. Mad. Petit femme bigote avare et rusée qui jusque

là avait paru vivement partager sont sort mais qui dévoila

son véritable caractère disant que ce n'étaient

pas ses affaires et qu'elle ne voulait pas s'en mêler. La femme

revenue auprès de Tissot lui fit boire de la tisanne qui paraissait

adoucir la douleur qu'il souffrait à la poitrine. Émue par

les paroles du médecin elle s'avisa de lancer un mot

par rapport à ses pratiques mais il lui dit aussitôt Avez-

vous besoin d'argent sur quoi elle répondit non monsieur.

Le mari descendit un moment pour payer un des hommes

qui avaient donné du secours l'avant-hier. Le petit de Tissot accourt

en ce moment et lui dit que son père est devenu froid tout

à coup. Il remonte et lui frotte les tempes d'une liqueur

spiritueuse mais c'était envain. Obiit.


pagina: 169

Il s'appelait Louis George François Joseph Tissot mais il

ne se servait que du nom George. Son père était professeur de

l'école de Lausanne. Il était de la famille du fameux

Tissot le médecin. Il avait plusieurs frères et avait une

aptitude inconcevable pour apprendre dans toutes les branches

excepté dans la métaphysique et les sciences exactes. Il

avait un goût décidé pour tous les arts la musique le dessin etc.

Mais son père n'avait point de tems pour s'occuper de l'éducation

de ses enfans qu'il négligeait entièrement. C'était un homme

de bien qui travaillait beaucoup gratis pour des gens pauvres.

Aussi était il généralement adoré et sa mort causa-t-elle

une désolation générale. Il voulut forcer Tissot à devenir

ministre mais celui-ci n'en avait nulle envie et avait beaucoup

de plaisir à devenir médecin. Un ami de son père lui promit

des lettres de recommandation pour la fameuse académie

de médecine et chirurgie à Montpellier. Mais un malheureux

différent survenu entre lui et son père et cet ami le prive

de cet avantage et il reste à Lausanne. Il est nommé précepteur

d'une des écoles latines mais la résolution ayant été prise d'abolir

deux de ces écoles le sort tomba sur la sienne. Dans ce tems

de ses études il avait fait divers voyages à pied notamment

un à Florence un en Suisse et un à Paris en 1789 où il fut

forcé de servir quelques semaines dans la garde nationale

lors du retour du roi de Versailles. Il avait un cousin à

Triconomale qui écrivit à sa famille de lui envoyer

un de ses cousins dont il ferait la fortune. Il partit pour la

Hollande. Là on lui annonça que s'il voulait partir pour

les Indes il devait s'engager comme soldat pour la forme.

Il demanda un certificat qui lui assurerait sa délivrance

le terme du voyage échu. On le lui refusa. Enfin il était

résolu d'acquiescer à ces conditions quand dans la maison

des indes il s'apperçut qu'on voulait lui faire violence et

saisissant un encrier énorme il menaca tous ceux

qui s'opposaient à sa retraite. Peu après il fit connaisance

d'un capitaine de navire des Indes qui moyennant une

rétribution de deux cents florins promit de l'emmener

comme secrétaire. Il alla à son bord au Tessel mais au

moment de partir une tempête violente détacha le vaisseaux

de ses ancres et le bâtiment souffrit de tels dommages

que son voyage fut retardé. Le capitaine présenta alors

à Tissot un ami qui voulait entrer dans le même arrange-

ment. Mais au moment de conclure le marché

celui-ci déclara n'avoir point d'ordre pour relâcher à Tricono-

male. Que faire alors il se plaisait assez en Hollande et

son amour-propre aurait trop souffert de revenir en suisse

sans aucun succès après avoir fait à tous ses amis et

connaissances les adieux d'un homme qui part pour les

Indes. Il fut consécutivement instituteur chez M. Jolles

Graafland, Bruyn et Hartsen. Enfin il épousa une fille.


pagina: 170

Catholique qui l'aimait beaucoup. Il avait tantôt beau-

coup et tantôt peu à faire. Il perdit une petite fille charmante.

Il avait employé le fruit de ses épargnes dans des papiers

sur l'état et lorsqu'ils furent tiercés il éprouva une diminution

considérable dans sa petite fortuné pour remédier à cet

inconvénient il résolut de faire établir à sa femme une

petite école et loua à cet effet dans le Leidsche straat

une maison de six cent florins et acheta plusieurs meubles.

Mais son école n'avait point de succès et dans l'espèce de

plus d'une année personne ne vint. Enfin elle commençait

à prendre il y avait déjà quelques enfans lorsque sa

femme tombe malade et meurt. Il fut dans le plus

grand embarras. Il se voit voler par une frippone de servante. Il

dut payer son louage vendre à bas prix ses meubles nouvellement

achetés et il se retira dans une maison au coin du Weterings-

poort. Là il espérait jouer d'un calme philosophique. Il

s'était formé des idées charmantes voulait faire un voyage

a vus ses parens[?] en Gueldre commencer une traduction ou plutôt imitation

d'Apulee. Jeudi passé il m'accompagnait. Nous parlâmes

de diverses choses des Juifs etc. Enfin il me dit vous allez

chez M. Bosscha. Adieu Guillaume. C'était un adieu

éternel.

C'était un homme extrêmement laid noir et couvert de

boutons. Il avait la vue extrêmement basse. Il avait

beaucoup lu et beaucoup vu il pouvait soutenir une

conversation sur toutes sortes de sujets était toujours gai

et avait une mémoire prodigieuse. Il avait la plus grande

douceur envers les petites enfans comme aussi envers

les siens qu'il aimait passionnément. Il était ennemi déclaré

de tout ce que ressemblait au pédantisme et savait le

tourner en ridicule d'une manière fort satyrique. Il

avait une imagination extrêmement féconde qui lui

faisait embrasser des plans ou des systèmes dont il

ne comprenait pas les conséquences. Amant passioné

de la nature il ne pouvait comprendre comment on pouvait

méconnaître le créateur. Égaré dans sa jeunesse par les

écrits d'un Volney d'un Dupuis, il doutait de la vérité

de la bible mais il en admirait la morale. Il était strict

observateur de la morale et abhorrait le vice. Enfin c'était

un homme à qui j'étais sincèrement attaché et dont

la mort me cause bien de regrets.

Jeudi 28 Mai 1812

Enfin après tant d'interruptions reprenons le fil de

mes expéditions de la semaine passée.

Vendredi matin accompagné de J. B. nous nous abon-

donnâmes gaiement à la merci des voiles à plutôt

à la ligne du chasseur sur le navet côtoyant les bords

fertiles de l'Amstel dans une compagnie qui ne signifiait pas


pagina: 171

trop excepté pourtant un Mr. de Witt jeune homme fort

aimable, nous arrivâmes au misérable Voetangel où nous

étant munis d'une ration de pain nous nous laissâmes

traîner jusqu'au fameux villages de Baambrug où nous entrâmes

la campagne. Patientée dans un tems abominable. Cette campagne

a une vue sur le chemin et sur le charmant village. La

maison n'a rien de bien remarquable c'est un bâtiment composé

de différentes chambres ainsi cela ne vaut pas la peine de

s'y arrêter. Quant à la campagne elle est fort petite mais

assez jolie il y a un verger un jardin anglais un bosquet un

réservoir de poissons dorés un petit fossé large de quatre pieds

qui doit représenter un ruisseau pour qu'on ait le plaisir d'y

mettre des ponts etc. etc. Parmi les curiosités de la campagne

on doit compter une misérable coupole délabrée qui donne

sur le fosse un réduit abominablement noir et triste

consistant dans une cabane de branches entrelacées que

le habile jeune homme W. a fabriqué de ses propres mains

et qu'il nomme hermitage quoique je croye qu'on trouvera

difficilement un hermite pour un pareil réduit. Enfin à la

fin de la campagne il y a un morceau carré de prairie

coupé par des sentiers où nul arbrisseau ne pare les

fureurs de la canicule et qui doit être parcouru. Cependant

raillerie à part la campagne est assez jolie on a tiré un

fort bon partie de la petitesse du terrain . Feu M. Bruin était

grand amateur du jardinage. Cependant on ne pouvait pas

dire un amateur du jardinage.

Demi bourgeois demi manant.

Car c'était un grand seigneur puisqu'il était Wethouder de la

ville d'Amsterdam. Il parcourait ses vastes domaines la

serpe à la main.

Nous avions formé le projet d'aller Samedi à Schraveland.

J'en avait le coeur joyé mais malheureusement j'entendais

les vents gronder en mugissant. Cependant à 6 heures je me

levai du mal édredon que j'abhorre et j'étais devant le lit de mon

ami. Mais je pouvais lui crier

Lève-toi cher objet d'horreur et de tendresse.

Nous ne fûmes pas longtems à nous résoudre. La positive

l'emporta et bientôt nous voilà en campagne dans la

prairie qui avoisine la campagne au milieu des vents et

de la bise lui la pipe à la bouche moi tout par la belle

casquette dont j'étais coiffe et la canne à la main.

Nous foulâmes l'herbe fleurie jusqu'à que nous arrivâmes

sur le vecht. À peine arrivés le nocher vient à notre

rencontre. Ms. dit-il j'espère que vous n'aurez pas peur.

Je n'ai qu'un frêle esquif pour vous conduire et bientôt

nous vîmes en effet une machine si petite qu'elle pouvait

tout au plus contenir deux hommes. Je pesais les avantages et

les dangers du passage lorsqu'un terrible cerbère fit.


pagina: 172

entendre des cris menaçans. À cette vue terrible je dis à

mon ami Affrontez cette bête je vais affronter les orages. Heu-

reusement j'arrivai de l'autre côté et pendant que je faisais

un rêve philosophique sur le parti que je prendrais en cas que

mon ami fit naufrage il était déjà dans mes bras.

Après avoir payé le tribut ordinaire nous continuâmes notre

chemin par une petite allée fort jolie nommée le Muggen-

laantje. J'ignore parfaitement la dérivation de ce mot bizarre.

Enfin nous longeâmes Korthoef. C'est une suite de maisons on doit

passer vers chacune d'elles par un petit vert pont. Ici le vent

soufflait avec encore plus d'intensité et je craignis ma casquette que

ce maudit vent ôtait de ma tête à tous les diables. Enfin nous

arrivâmes dans l'auberge de 's Graveland où l'on sortait à

peine des bras de Morphée. Après avoir avalé dans cette triste

maison un mauvais verre de lait et d'eau de vie que nous dûmes

payer au poids de l'or nous nous acheminâmes vers la campagne

de Boekenstein de M. Alewijn en parcourant une grande partie de

's Graveland. Cet village est situé de deux cotés d'une rivière. De

beaux arbres l'ombragent et trois campagnes en rendent le séjour

recherché. La campagne de M. Alewijn est grande de 70 arpens on

y remarque la variété la plus étonnante de là vous voyez un bassin

superbe entouré de beaux hêtres et presque impénétrable à l'ardeur

du soleil, là vous voyez des champs de blé au milieu de la campagne

là une superbe prairie élevé au milieu des forêts tandis que d'un

autre part un sapin pleureur frappe l'oeil par sa majesté et inspire

une douce mélancolie. Après avoir fait le tour de ce jour en chanteur[?]

nous nous promenâmes sous les beaux arbres de 's Graveland

chacun muni d'un morceau de pain pour assouvir une faim dévorante.

Nous poursuivîmes tranquilement notre chemin et passant

par le leeuwenlaan où l'on voit à sa gauche la belle

campagne de M. Meulmann. Nous arrivâmes enfin a l'humble toit

qui cachait les beautés et les grâces c'est à dire chez Mad. Roochusse.

Reçus cordialement nous jouîmes du repos après tant de fatigues

J.B. dut[?] lire deux fois sont triste vers sur la noce d'argent de son oncle.

On me pria de dire celui que j'avais fait à la partie de comédie mais

un génie malfaisant me l'ôta de la mémoire dans ce fatal moment

car je l'avais retrouvé en sortant de la porte. Nous traversâmes cette

campagne si l'on peut donner ce nom à une allée entourée d'un

potager. Cependant nous trouvâmes cette retraite charmante.

Les pauvres humaines veulent être flattés. Enfin nous prîmes

congé de cette campagne délicieuse après nous être fortifiés.

Ensuite le coeur gros nous passâmes le Klapbrug et marchâmes

toujours droit en avant jusqu'à ce que nous rencontrâmes enfin

la tour d'Ankeveen petit village qui a assez bonne apparence.

Mais de là nous eûmes une traversée abominable jusqu'à den berg.

Figurez vous un sentier sabloneux environné des deux

côtés par de lacs et s'étendant à perte de vue. Je croyais


pagina: 173

y succomber. Nous atteignâmes enfin Den berg, village fort

joliment situé. L'église est sur une montagne. Une branche

du Vecht l'arrose. Enfin après un quart d'heure de marche nous

fûmes encore arrêtés par le vecht et une beauté mistique nous conduisit

à l`autre bord. Elle eut la charité de nous avertir que l'istme

qui joignait la prairie que nous devions passer au [onl.]

était coupée qu'ainsi il faudrait sauter. Cette nouvelle nous

[onl.] de pareux[?] cependant nous passâmes par les domaines

d'un agriculteur et nous finîmes notre course en traversant

une vaste étendue d'herbe.

Après-dîner nous fîmes une excursion dans la campagne de

M. Ketwich. Ce n'était pas la déesse du goût qui avait présidé

lors de sa fondation. Ce monsieur qui était très riche dépensait

des sommes énormes à bâtir pour employer les ouvriers. Ceci

a donné naissance à ses belles écuries et à un temple carré

avec des colonnes peintes et décorés des neuf muses qu'on dit

avoir coûté des milliers de florins. Il y a aussi une maison

avec un souterrain. Mais sans goût. Le nouveau possesseur

adorait les allées droites et l'amélioration qu'il avait faite

faisait invoquer le ciel pour qu'il n'améliorât plus rien.

Le lendemain matin nous allâmes à Vreeland village charmant

dont on fera une mention plus ample dans la descr. des environs

de Rupelmonde. Nous y allâmes par Loenersloot. Le long d'un chemin

fabriqué il y a quelques années et qui n'est pas désagréable en

cas qu'il ne fait pas trop chaud. Nous retournâmes par la campagne

de M. van Keulen. Elle est extrêmement vaste mais il n'y a

pas du (du moins dans ce voorstuk) assez de variété et les arbres sont

encore tout à fait nains. Nous vîmes les dehors de l'hermitage

peint avec beaucoup de goût et orné par des inscriptions

latines et françaises.

Après-dîner je vis la campagne de M. Bassé qui est très jolie. Il

y a toutes les variétés possibles un bosquet une île une superbe

rangée de sapins. Toute la famille de ma cousine de Clercq

vint chez nous. Il y avait une jeune demoiselle Frise qui

montait sur les échasses avec une agilité surprenante.

Nous parcourûmes pas à pas la campagne. Je pensais à

Gresset.

On ne vous fera pas grâce d'une laitue.

En voilà vraiment assez.

Vendredi 29 Mai

Enfin après avoir pris haleine après cette énorme description

retournons aux autres particularités de cette semaine-ci.

∙Premièrement parlons encore de Tissot.

∙Il y a chez quelques gens d'Amsterdam une pente singulière

à voir partout du crime. P.E. on a eu l'infamie de raconter

que Tissot s'était noyé lui-même. Quelle atrocité. Et on a

fait la dessus les contes les plus étranges. En attendant le

médecin et l'apothicaire se disputent à qui aura la


pagina: 174

médaille pour lui avoir sauvé la vie.

Une chose que j'entendais dire et qui est vraie c'est que

lorsqu'un malheureux est tiré de l'eau chacun le

saisit et l'empoigne et ne démord pas pour avoir la récompense

promise peu lui importe que le patient fait déchiré en

lambeaux. Et voilà des hommes civilisés.

Les enfans furent chez nous leur aspect était touchant.

Encore dans l'âge de l'innocence ils ne se doutaient de rien.

Papa fit chez Me. Petit qui lui parut beaucoup moins

dure[?] qu'il n'avait été informé. Elle fit de très bonnes promesses.

Mais que ne peut-elle pas s'il est vrai que ce fut une femme

hypocrite.

Ce M. Martinet qui connaissait très bien la

famille de Tissot assura que cette femme tirée

par lui du sein de la misère s'était conduite d'une manière

scandaleuse non seulement avait reçue dans ses bras d'autres

messieurs mais le laissait courir sans argent et n'avait

aucun soin du ménage. Si cela est vrai j'en plains d'avantage

le pauvre Tissot et je l'admire de n'avoir jamais proféré une

plainte. Il était toujours gai. Quels que puissent avoir été

ses sentiments sa morale était pure. Il était doué par la

nature d'une imagination souvent déréglée mais son

coeur était bon. Il était honête jusqu'au fond de l'âme

mais sauvage à la première vue. C'était de ces hommes

qu'il fallait connaître pour apprécier. Souvent un seul

objet occupait entièrement ses idées. Je l'ai vu épris des

Géorgiques de Virgile devant pour ainsi dire Apulée dans le plus

grand enthousiasme pour Rousseau. Deux exemples

pourront prouver sa mémoire prodigieuse. Lorsqu'il

m'apprit le latin il y avait une quinzaine données qu'il

n'avait fait aucune étude en cette langue et cependant

très peu de phrases l'embarassaient et je n'ai presque

jamais rencontré un mot qu'il ne sut pas. Depuis ses

leçons du collège où il avait étudié le grec il n'avait presque

jamais jeté les yeux dans un livre de cette langue et

cependant il ne me manque presque pas un mot lorsque

je lui fis réciter les verbes. Il n'avait pas la moindre rouille

de pédantisme ou d'affection. Il savait parfaitement le

Français la Géographie L'histoire lisait avec le plus grand

plaisir des livres hollandais connaissait l'Italien

le latin et entendait assez l'Allemand et l'Anglais.

Il avait même commencé à faire des études en Espagnol

et même à son âge il aurait pu faire encore des progrès

étonnans surtout puisque il était tout entier appliqué


pagina: 175

à ce qu'il faisait. Il avait toujours eu le plus grand

penchant pour tous les arts mécaniques. Il jouait de quelques

instrumens et surtout du corde de chasse mais la

difficulté de lire la musique à cause de sa vue si basse

l'empêchait de faire des progrès. Il avait beaucoup de

génie pour le dessin et j'ai vu un fort joli petit dessin qu'il

avait fait. Il n'était pas fort versé dans les mathématiques

mais en savait pourtant les élémens. Mais quant à la

Physique il y était très avancé et même il avait composé

un ouvrage sur la physique dont on lui avait volé

une partie de manière qu'il ne conservait que quelques

fragmens mais c'était un ouvrage fort bien écrit qui

n'était ni trop long ni trop court. Il aimait beaucoup l'histoire

disant qu'il n'y avait point de livre d'histoire où l'on ne

pût trouver quelque chose d'intéressant. Il aimait

singulièrement Tacite ainsi que le style de Quinte Curce.

Quant à la poésie c'était surtout les descriptions de

la nature telles que les Géorgiques de Virgile les élégies

de Tibulle les ouvrages de Delille etc. Il avait quelque

prévention contre les tragédies disant qu'elles étaient

trop exagérés mais quant aux comédies il les aimait

beaucoup et nous rîmes bien en lisant ensemble les

Aulularia et Menechmes de Plaute. Il aimait les Holland[ais]

quoiqu'il y eut beaucoup de chose en eux qu'il ne pouvait

souffrir. Il était retiré et on devait souvent lui extorquer

les choses. Avec moi cependant il devenait plus franc

de tems en tems et je crois que notre union se serait

raffermie encore mais le ciel l'a voulu autrement.

Dans les premiers tems que je le connus il était

enthousiasmé pour N. mais dans la suite il le détestait.

Voilà encore deux pages qui pour ainsi dire sont

coulées de ma plume. Si jamais je pouvais oublier cet

homme cher je n'ai qu'à relire ce que j'ai écrit cette

semaine et tout me rentrera dans l'idée. Je lui dois aussi

le talent inappréciable de m'être formé un style

français ce que peu de personnes ont et j'espère que

les mémoires continueront les excercises en français

interrompus par sa mort.

Je me souviens ici d'un de ses étranges paradoxes

c'était le mépris qu'il avait pour les femmes. Il disait

qu'elles devaient être soumises aux hommes et tâcher seulement

à les amuser et à leur plaire. Parmi les exemples qu'il

citait était surtout celui qu'il avait vu dans deux

ours à la ménagerie de Berne.


pagina: 176

Je me souviens ici de la bêtise du ministre de Baambrug.

Il avait soutenu qu'il était impossible que le St. Esprit

fut descendre du ciel et voici pourquoi. Il ne s'est écoulé

que quelques semaines depuis l'ascension et la pentecôte.

[onl.] une boule de canon tiré de l'étoile la plus proche de Sirius

p.e. aurait besoin de je ne sais combien d'années pour arriver

à nous. Et le St. Esprit qui devait arriver du ciel a une bien plus

grande distance que Sirius ne pouvait pas aller plus vite

qu'un boulet de canon.

Belle conclusion et digne de l'exorde.

Quelles pitoyables idées que cela.

Revenons à d'autres sujets p.e. au marché. Sans cette mal-

heureuse affaire nous serions assez calmes du moins l'on

n'entend pas parler dans ce moment de conscription ou

de garde nationale. Enfin pour aller court Son excell.

le préfet a mis un maximum et nul négoce ne peut

être fait sans un permis exprès de Son exc. Quelle

sotte chose rien de plus propre à gêner le commerce. Hormis

cela les négocians des autres départemens seraient

bien fous de nous envoyer des grains pour y perdre

tandis que sans ce maximum, non seulement une

quantité suffisante de grains pour remplir notre

déficit de 2000 L. aurait reflué sur notre marché mais même

nous aurions pu approvisionner d'autres départemens.

Nous avons expliqué que tout cela au long dans un

placet dédie à Mr. le préfet qui me paraît cependant

trop long mais que pourrait-il faire même avec les

meilleurs intentions du monde. En attendant tout est

dans une stagnation complète. On a vendu un peu de

seigle mais pas un last de froment. Je ne comprends

pas à quoi tout cela doit aboutir. Les voilà Messieurs

les courtiers toujours empressés à courir après leurs

escalins occupés à regarder gravement le bout de leur nez

et à se promener au soleil 120 H. N. R. 295 gd.

Mon pauvre Papa est bien malheureux dans tous les

achats qu il a fait comme aussi avec le Colzad qui

baisse avec une rapidité violente on peut acheter

le plus beau Colzad pour 490 g. L. L'huile vaut 49 fl.

Orge sans négoce.

Avoine 88 H. f. 88 gd. on ne présume pas que cet article

aura un maximum puisque il n'a pas surpassé beaucoup

sa valeur ordinaire.

Tout promet une récolte abondante.


pagina: 177

On a ici beaucoup parlé de la décision de notre jury sur

l'affaire de ce macquereau qui avait tué sa maîtresse. On

a généralement désapprouvé le jury qui a déclaré le

meurtre fait sans préméditation sur une distinction frivole.

Aussi le président avait-il dit à l'accusé qu'il ne devait sa

vu qu'à une pitié mal placée des jures ce que plusieurs ont

pris entres mauvaise part.

Annales du Lundi chez l'oncle

Il faisait dans la chambre un chaud épouvantable à cause

que mon oncle de Vos avait fait allumer du feu. On parla

premièrement beaucoup de la mort de Tissot et de Lublink

sur la décision du jury et sur différentes choses. C. Walré y

était à table ce furent les sottises qu'elle fit avec M. D. les

baisers que lui donna qui étaient l'objet de l'attention

publique. Dyl. était devenue membre de la société de sciences

de Harlem. Nous avions résolu de ne pas lui en parler avant

le dessert quand nous le felicitâmes chacun avec un vers

mon oncle de Vos et moi.

À[?] part car ceci ne convient pas aux annales les vieux

papa avaient fait la remarque que [- onl.] s'était conduite

d'une manière un peu trop libre en effet je ne trouve pas

qu'ils avait tort. La décence est pourtant l'ornement des filles

p.e. une chose seulement elle se couchait sur les genoux

de mon oncle de Clercq disant qu'elle trouvait cela fort

agréable. C'était un peu trop fort.

Littérature

Lantier Les voyageurs en Suisse 3 v. 8o

Un Roman qui n'est pas un roman un voyage qui n'est

pas un voyage.

M. Bortaut épris d'une roturière veut marier sa fille promis

à Delmont au frère de cette intrigante Lamant et le Blanchi

et ils ont rien de mieux à faire que de faire en atten-

dant un voyage en Suisse. Bortaut inexorable épouse sa

belle Philippine enfin cependant à son lit de mort on lui

dessille les yeux et les fugitifs deviennent heureux. Voilà

l'intrigue du Roman.

C'est un livre instructif et amusant non seulement on y trouve la description d'une

grande partie de la Suisse et surtout du Valais mais

on y trouve des details interessans concernant plusieurs

hommes célèbres qui ont habité la Suisse tels que Voltaire

et Ferney. Rousseau et son île Lavater Gibbon Haller

Tissot etc. On y a la description de plusieurs lieux renommés

même un extrait de l'histoire Suisse des détails sur

Genève, l'escalade etc. C'est un livre fort bien écrit.


pagina: 178

Quant aux sentimens religieux de l'auteur je ne

suis pas de son avis car il suppose que le déisme peut

compléter la félicité humaine. Même il va souvent

trop loin. Car quoique mon opinion est que le meurtre

de Servet par Calvin est une action qui ne peut être

défendue, cependant je suis loin encore de juger que si

Luther et Calvin étaient nés de nos jours on les aurait

du les mettre aux petites maisons.

Hoffham Theorie der Ned. Poezy 1 v.

C'est un ouvrage écrit avec beaucoup d'esprit. C'est en gran-

de partie une satire contre ces faiseurs de vers dans le

dernier siècle qui croyaient qu'on était le plus grand

poète du monde lorsqu'on rimait bien et que les vers

étaient bien polis et rabotés enfin qui croyaient qu'il

avait plus de mérite poétique

à composer la traduction de Feitama que l'original de

Fénelon. Ce qu'il y a de plus joli c'est que Hoffham appuye

tout ce qu'il dit par des vers tirés de nos meilleurs poètes. C'est

un ouvrage à relire.

De nuptiis Thetis et Pélède trad. p. Guinguené

J'ai lu et j'espère relire encore souvent cet ouvrage enchan-

teur. Tout y est joli. Ariane les Parques le tout. J'avais

commencé à traduire ce poème auprès de M. Tissot. L'objection

que l'épisode d'Ariane est trop long ne me paraît avoir

aucun fondement. Si un morceau est beau qu'importe

qu'il sont long surtout dans un genre de poème aussi

irrégulier que l'est celui-ci. Je trouve la traduction

par M. Guinguené fort jolie.

Jeudi 4 Juin 1812

Déjà Samedi passé à 7 heures je me promenai vers la barque et

j'arrivai fort tôt à mon cher Rupelmonde. Bientôt je m'apperçus

qu'on était troublé par de fâcheuses nouvelles dont la plus

triste était celle qui concernait la formation du nouveau chemin

qui aurait pour suite qu'on éléverait une digue plus haute de

71/2 pieds que le niveau du Vecht. Cette digue entr'autres inconvénient

empêcherait toute la vue depuis le Tuinkamer si chéri

des dames. En outre la chemin devant être élargi. Fosses ponts,

barrières beaux arbres tout ce qui se rencontre dans

sa nouvelle enceinte doit être coupé ou abattu. Enfin pour

former cette digue on prend les matériaux à droite et à

gauche sans égard aux plaintes du possesseur.


pagina: 179

Nous passâmes à Rupelmonde des journées fort agréables

surtout la matinée du Mardi. Après que le soleil qui

s'était dérobé le matin entier à nos yeux eut enfin percé

le voile épais qui le couvrait nous nous embarquâmes dans

un frêle esquif muni des provisions nécessaires. Quatre

vigilans rameurs C. Tencate, M. d. C. la servante et moi

revêtis d'une culotte de matelot nous nous embarquâmes

sur la plage liquide est entrâmes dans le canal qui mène

à Ter Aa village que nous laissâmes à notre droite. Tout

allait au gré de nos souhaits, l'onde blanchissait sous

nos rames. Nous passions quelquefois sous des ponts si bas

que nous devions tous nous coucher ventre à terre pour

passer en sûreté. Après avoir traversé une eau pittoresque nous

vîmes enfin quelques arbres touffus. Là nous jetâmes l'ancre

et sous ce frais ombrage nous consumâmes nos provisions

consistant en un pain du beurre de la viande une bouteille

de vin et une cruche à eau. Renforcés par ce repas

nous reprîmes gaiment notre chemin. Nous mîmes cependant

encore une fois à terre près du lieu nommé Ruell à cause

d'une ruine ou plutôt un amas de pierre qui y subsiste encore.

On y voit encore les barres de fer d'une fenêtre. Près de là est

une verte colline où se trouvait une épine superbe en fleurs.

Après nous être abandonnés aux délices de ce lieu nous

retournâmes à bord et traversâmes une rivière charmante

où tantôt de beaux arbres, des vues pittoresques ou un

forme charmante s'offrait à nos yeux. Enfin nous arrivâmes

à Breukelen. Ce fut avec le pic que nous dûmes passer ce

village et pour comble de malheur nous dûmes souffrir

les avarices d'un homme qui était propriétaire d'une

chaîne étendue au milieu du fossé. Après être revenus

dans le vecht un moment de désordre mais tout se rétablit

par les efforts réunis des rameurs et nous retournâmes

triomphans dans le port.

Lundi nous avions fait une visite à la campagne de Boomwijk

qui avait été vendue. Les meubles étaient fort peu de chose

et j'avais cru la campagne plus belle. Ce qu'il y a de

plus beau ce sont quatre superbes tilleules qui

sans doute ont vu déjà des siècles. Le jardinier raconta que

plusieurs vieillards passant par ce village s'étaient informées

si ces arbres existaient encore et qu'une tradition rapportait

qu'un général Espagnol avait jadis établi sa

tente sous l'ombrage.


pagina: 180

En outre les plaisirs ordinaires de Rupelmonde. Une promenade

à Breukelen, une autre à Vreeland, de petits tours en bateau. Le

jeu du billard celui de l'oie les échasses la promenade à Rupelmon-

de et sterrenschans la lecture le dîner le souper une machine

à sauter et le soir la partie du Boston.

Les trois règnes de la nature p. Delille 2 v.

Je dois avouer que j'ai relu cet ouvrage avec plaisir. Il faut convenir

qu'il y a de l'aridité quelquefois, souvent trop d'antithèses des

tournures deplaisantes de la lâcheté de l'imitation mais ceci est trop compensé

par la description de toutes les merveilles de la nature dans de

beaux vers. En général je préférais le 2 vol. au premier. L'epi-

sode d'Elvire. Les hymens des plantes. Quelques tableaux et

le règne animal me semblent ce qu'il y a de plus joli.

Hier au marché il n'y a avait presque rien à faire. Les négocians

convoqués chez le maire furent grondés au nom du préfet de ce

qu'ils ne vendaient pas d'assez bonnes qualités. On fit bonne mine

∙O lâcheté o tyrannie!

127 H. Nor. Ah. 365 gd.

120 N. Ro. 270 gd.

122 H. O. Br. 297

Lundi 8 Juin 1812

Encore Rupelmonde. Une promenade Charmante à Maarsse

avec P. Ten Cate.

On est informé pourquoi on ne vendait point les meilleurs

qualités de grains du Maxim - Réponse parce qu'on n'en

demandait point - Eh bien c'est une preuve que les prix

sont encore trop hauts et il faudra que Mr. le préfet basse

le maximum.

Voilà comment on gouverne.

129 H. Rhin pour le maximum revenant a 378 g.

120 H. Rogge 260 gd.

82 H. Haver 68

Coolzaad Gron. 44 L. Oly f 44

Tout est encore calme l'on n'entend parler de rien. Je pense

souvent à la fable du torrent et de la rivière du bon

la fontaine.

On n'a point eu d'annales du Lundi la semaine passée

puisque ni mon papa ni moi n'ont été en ville. J. de Vos n'y

assistait non plus mais ce soir nous verrons.


pagina: 181

Littérature

Akenside. Poems

Voilà encore un fort joli poète Anglais. Son poèmethe pleasu-

res of imagination quoiqu'il sort par-ci par-là un peu

difficile à entendre renferme de très beaux morceaux. Le

premier chant renferme la définition métaphysique des

plaisirs de l'imagination. Il décrit le plaisir que nous

fait le beau le sublime etc. Dans le 2 et 3 livre l'auteur

représente la connection de la philosophie et de l'imagina-

tion les plaisirs de esprit le degré de plaisir que nous

procurent toutes les passions l'état de l'homme décrit par

une allégorie. Ensuite la peinture du ridicule de l'imitation

etc. Parmi les odes il y en a à la vérité de charmantes

ou il y a beaucoup de goût et dont plupart roulent sur des

sujets forts intéressant. Il y en a une on leaving Holland.

mais ce n'est qu'une apologie de l'angleterre. Les plus jolis

sont Mor. ch. T. [onl.] no 47.48.49.50.51.52

On the winter solstice

Suspicion

Hymn to cheerfulness.

on the use of Poetry

To curio

On lyric poetry

To the earl of Huntingdon

The remonstrance of shakespeare

To sleep

To the country gentleman

Il y a de jolis vers pour servir d'inscriptions surtout un

pour la statue de Chaucer.

Mardi 9 Juni 1812

Annales du Lundi

De grands débats eurent lieu à cette séance. Après

qu'on eut raconté les difficultés de l'oncle de Vos à transporter

son vin et de M. Koster pour un certificat de séjour D. entra

tout parfumé de l'eau de mille fleurs par ce que disait-il

il avait travaillé. Il s'opposa à ce qu'on irait le dimanche

chez Kemper parce que disait-il un homme de bonne compagnie

ne voyage pas le dimanche. Ensuite il raconta la consternation

qui avait régné chez les deux Juives maîtresses de l'amiral

de Winter à la nouvelle de sa mort. Il tenait l'une pour tous

les jours et l'autre pour le dimanche. Il raconta ensuite

tous les détails de la mort du chirurgien Albesing avec

qui disait-il il aurait voulu vivre et mourir. De Vos ensuite l'at-

taqua de ce qu'ayant été chez lui comme médecin il lui

avait donné une emplâtre qui n'avait aucun effet

qu'il l'avait quitté en disant qu'il fallait tout

abandonner tout à la nature. Que cependant ses douleurs


pagina: 182

continuaient et qu'il avait reçu un remède pour les

guérir dans 24 heures. Dylius dit que s'il ne suivait pas

les préceptes il tomberait dans les maladies les plus

horribles. Il se plaignait ensuite que le diplôme de la société

de Harlem n'était point du tout brillant ni bien conditionné.

W. de V. alla chercher le sien qui était tout autre et que

J. de V. lut en se plaignant des nombreuses fautes d'ortographie

qui s'y trouvaient. On lut ensuite plusieurs pièces relatives et

trois vieilles gazettes. D. disait que le vieux et nouveau style

différaient de 30 jours et il dit que l'ère julienne avait

pris son origine de Julien l'apostat. Il parla ensuite d'une

sermon de Klinkenberg qu'il avait entendu il y avait entr'autres

une réfutation de Voltaire qu'il raconta mais dans ce récit

il fixa le nombre des chrétiens à 5 et ensuite à 15 millions

Klinkenberg avait aussi parlé d'un règne de nulle ans mais

il n'y avait compris goutte il pria le grand-papa de lui

donner des explications là-dessus mais celui-ci ne donna

que des réponses évasives. Il alla chercher le Nouv. Test. en

grec ce qui ne produisait pas beaucoup d'effet. Il se plaignait

souvent à M. Koster de ce qu'il devait souffrir. À table il reçut

de vives réprimandes à cause du mot Gastheer qu'il employait.

Il raconta que le M. Suchet après la prise de Valence ayant

demandé son congé à cause d'une fistule l'empereur fit venir

M. Dubois et lui dit Ik heb daar een brief van Suchet gekregen.

Enfin il devait partir pour l'espagne. Celui-ci qui n'avait

nulle envie de ce voyage recommanda son gendre. L'empereur

dit c'est bon et aussitôt tous deux durent partir mais il leur

donna 100 000 fr. avec les fraix de voyage. D. déraisonna sur les

conciles il disait que le concile de Trente avait eu lieu dans

le 3ème siècle que l'hist eccl. était la plus belle des histoires

tandis que J. de Vos soutenait le contraire. Il se récria sur

les beautés de Venema et déprécia Mosheim suivant les

sentimens de Klinkenberg. Il croyait que la division de

la bible en vers avait été faite dans le 2e siècle tandis que

mon grand-père assura que cette division avait été faite

par l'empereur Stephanus dans des promenades à cheval.

La controverse recommença sur le mal de dos. Ma tante de Vos

fatigué du mystère qui mettait son mari à cacher le

secret du nouveau remède le découvrit c'était une friction

avec du sel ammoniac. D. dit que si quelqu'un de la famille

ayant le mal au dos était guéri par ce remède dans

deux fois vingt-quatre heures qu'alors il s'engageait à

payer deux tasses de glace. J. de V. raconta ce qu'il croyait

être son mal. D. dit que dans tous les systèmes qui avait

été imaginés depuis Hippocrate jusqu'en 1812 on n'avait

jamais soutenu une pareille absurdité.


pagina: 183

Une anecdote assez curieuse puisqu'elle marque du moins

quelque trait de courage dans nos tems est la suivante.

La moitié d'un cimetière près de Diemen serait consacré

pour les catholiques qui se préparaient à y faire une

procession depuis Diemen. Le pasteur Cramer et d'autres curés

y assistaient revêtus de leurs habits pontificaux et se préparaient

à marcher, accompagnés du M. le préfect du Zuiderzee, du

maire d'Amsterdam etc. Les cierges tout était près

quand tout à coup le maire de Diemen s'avance et dit Messieurs

les instructions et mon devoir comme Maire me défendent

de souffrir des processions sur les chemins publics et malgré

tout ce que ces messieurs dirent il leur disait qu'ils

pouvaient partir mais qu'il employerait tous les moyens

possibles pour les en empêcher. Ces messieurs durent épuller[?]

leurs beaux accoutremens et s'habiller dans une grange [onder regel toegevoegd: le préfect n'y fut pas]

situé dans l'enceinte du cimetière.

Littérature

Loosjes. Ebba Niels

Une femme qui a perdu son amant et le trouve après

30 ans changé en bronze est un sujet bien drôle pour une

tragédie. Il n'y a point d'intérêt pour des amours passés

il y a si longtems. Le rôle d'Ebba Niels renferme quelques

morceaux écrits avec verve. Les trois autres rôles servent

de remplissages. On ne sait pas trop comment ce jeune homme

en bronze a été lancé hors de la terre.

Mardi

Il faut avouer que la semaine passée a été bien triste.

Deux pauvres enfans malades à Rupelmonde. Papa Maman

la grandmère tout était au désespoir.

Jeudi 18 Juin 1812

Oui il faut convenir que cet état était déchirant ma

pauvre maman assisse près du lit de son fils ne voyait

pour ainsi dire que lui dans [onl.] elle avalait toutes

ses paroles ses soupirs ses plaintes. Ajoutez encore à cela

que cet enfant était toujours doux comme un ange

avait les égards les plus enchanteurs ne se plaignait

point et c'est alors qu'on peut comprendre quelle douleur

c'eût été de perdre un enfant pareil. D'un autre coté

la pauvre Marie ayant la fièvre était dans une

autre chambre et ne souffrait pas moins. Mon pauvre père

ne versait pas moins de larmes sur le sort de ces pauvres

enfans. Enfin Rupelmonde dans d'autres tems le

séjour du plaisir était devenu celui de la plus

morne tristesse. Depuis le matin jusque au soir on

n'entendait parler que des maladies ce qu'ils disaient,

ce qu'ils voulaient, ce que disait le médecin qui venait


pagina: 184

trois fois par jour. Dimanche M. Rauenhof vint et il

fut reçu comme un ange venu du ciel. Maman était trans-

porté de joie. Grâce au ciel ils sont maintenant beaucoup

mieux.

Lundi passé l'exécution eut lieu des trois condamnés Mad.

Brummelkamp Verkerk et la servante. La guillotine était

érigée sur le Nieuwmarkt. Le monde affluait sur ce Nieuwmarkt

pour voir un si beau spectacle. Les fenêtres étaient partout

bordées de dames et c'étaient surtout les femmes qui affluaient

parmi la populace. L'exécution fut heureusement

achevée. La servante était à moitié évanouie Verkerk

recommanda son âme à Dieu et à Jésus Christ et Mad.

Brummelkamp ne dit mot. Un coup et la vie d'un homme

n'existe plus.

Annales du Lundi

∙Dylius had de executie gezien doch zeide er de gantsche

dag melancolicq van te zijn. Ik moest midden onder het

jassen en het geschreeuw der aanhoorders eene allegorie

op de heer Dighen uit le journal de l'empire voorlezen.

De heer Dylius was met docter Munting bekend geraakt

en verhaalde eenige staaltjens van zijn buikspreken.

Hij nam Gerrit de Vos als aankomend dokter onder zijne

protectie.

Littérature

Vellejus Paterculus

C'est une histoire Romaine en deux volumes J. il y règne une

grande lacune. La première partie ne commence qu'avec

les Graches et va jusqu'au règne de Tibère. Le style est succinct

et quelquefois beau et entremêlé d'observations judicieuses.

L'auteur trace ça et là de fort beaux portraits en quelques

lignes. Ce que j'y trouve le plus répréhensible c'est sa

flatterie envers tous les Césars et surtout envers ce

maussade Tibère qu'il ne considère que comme le

plus parfait des hommes. La description des Campagnes

de Tibère est assez étendue. Enfin c'est un auteur qui

mérite bien d'être lu. La mort de Cicéron la défaite

d'Antoine et plusieurs autres morceaux sont écrits

avec verve. Il a dédié cet ouvrage à M. Vinicius à

qui il adresse souvent la parole. L'auteur lui-même

a été tribun militaire ainsi que son frère et il

a été témoin oculaire de tout ce qu'il raconte des

expéditions faites sous Auguste et sous Tibère. Il

avait suivi l'armée dans différentes parties du

monde.


pagina: 185

Gray and Lyttelton Poems 1 v.

Gray

Voilà encore un étranger dont j'ai été charmé de faire

la connaissance. Ses vers dans ce volume sont en petit nombre

mais méritent bien d'être lues on trouve premièrement

une jolie Ode on the spring, puis on the death of a cat

si joliment imitée par Bilderdijk.

On Eton collège c'est aussi une jolie pièce en parlant des

écoliers.

To each his suffrings: all are man

Condemned alike to groan

The tender for anothers pain

The unfeeling for his own

Yet ah, why should they know their fate

Since sorrow never comes too late

And happiness to swiftly flies

Thought would destroy their paradise

No more while ignorance is bliss

T'is folly to be wise

On reconnaît déjà dans ces lignes la douce mélancolie

d'un poète anglais sensibles. J'aime mieux de pareils vers

que les flatteries de Dryden ou de Waller.

Ode on adversity jolie pièce

The progress of poetry. A pindaric ode

Ode for music

[accolade achter de vorige twee regels] Quoi qu'il y ait de

belles strophes cependant la seule idée d'une ode pindarique

dans une langue qui a si peu d'harmonie que la langue

anglaise fait pitié.

The fatal sisters [accolade] traduites des anciens patois. Il

The descent of Odin [accolade] y a beaucoup d'énergie et elles

The triumph of Owen [accolade] mériteraient de passer sur la

Death of Abel

Lyre du traducteur de Fingal

Elegy on a church yard. Quoique ce petit poème ne contienne

pas cent cinquante vers on peut le compter à mon avis parmi

une des productions qui font honneur à la littérature quoique

les Français veulent le déprécier en faveur de leur

M. Fontanes avec son jour des morts que je ne connais cependant

pas et dont je ne puis juger.

Trois jolies épigraphes. Celle sur Mist. - s. Clarke commence

ainsi

Lo where this silent marble weeps

A friend a wife a mother sleeps

A heart within whose sacred cell

The peaceful virtues loved to dwell

Lyttelton

Sans qu'il ait les talents de Gray on peut voir que ce

Littelton a été un homme d'un goût élégant formé

par la lecture des anciens et qui avait de fort bonnes

dispositions pour la poésie. En un mot c'est un poète

fort estimable.


pagina: 186

Son plus grand ouvrage est The progress of Love en quatre

eclogues appellées Uncertainty Hope Jealousy et Possession.

Il y a de jolis morceaux mais je trouve que la marche

des quatre éclogues est beaucoup trop uniforme.

Ce qui m'a plu beaucoup ce sont quatre épîtres dont

deux sont écrites l'une de Rome l'autre de Paris et donnent

une fort jolie description de l'Angleterre et de la France. Les

deux autres roulent sur des sujets philosophiques

voici ensuite ce qui m'a plu le plus.

Advice to a lady contient de très bonnes maximes pour la

conduite d'une femme.

Song written in 1732

Part of the El. of Tibul (Divitias alius sibi fulvo congerat auro)

∙To a lady with a new watch

To the memory of the same lady. Cette élégie est un peu

longue mais contient de belles idées.

To Mr. Glover on his Leonidas. C'est une belle apostrophe aux

Anglais.

Cato's speech to Labienius

Bilderdijk Nieuwe Mengelingen. Ynt. 1806 2 v.

C'est une chose singulière qu'il y a si peu de poètes qui ont

pu tirer des vers énergiques de sujets religieux. Le decretum

horrible plusieurs morceaux de Racine le fils plusieurs

de nos cantiques sont vraiment une exception. P.E. voici

le grand Bilderdijk si grand comme poète épique érotique

tragique didactique philosophique

qui donne ici des vers religieux qui ne

signifient pas trop.

De ongodisten. Ceci commence bien mais bientôt ce

n'est qu'un sermon en vers. Ce n'est pas ainsi que Bilderdijk

chante la peinture. C'est comme si c'était de Feitama de

De Haas ou d'un auteur pareil.

De christen in 't lijden tout de même

Levenslust

Aan Europa voilà l'auteur rentré dans son domaine

une peinture exagérée de nos vices, c'est une superbe imitation

d'Horace.

Gerustheid in God. C'est un bon vers mais qui n'a rien de sublime.

Echtheil

Aan mijne gade met een rooze gegroeid op 't graf van mijn zoontje

Ce sont deux morceaux charmans.

Zielzucht celui-ci est assez poétique mais il ne contient

que des jérémiades.

Berusting. Joli vers.

Lisons les plus jolis de ce qui suit sont

De heiland

Tranen

Morgen

Juliaan

Pligt

Vol. 4

Sans doute Bilderdijk brille dans plusieurs genres mais

il n'y en a aucun où il ne laisse tant après lui non


pagina: 187

seulement tous nos poètes mais aussi ceux des étrangers

que dans la Romance. Il y en a ici de superbes. P.E. Assenede

qui roule sur l'hist. de Joseph. C'est une des plus belles Romances

que j'ai lu dans ma vie.

Lucretia. Het slot van Damiate. Achilles in Scyros sont plutôt des contes sérieux

comme Eschenburg les nomme et[?] ils ne sont pas moins beaux.

∙De Marokkane est une jolie romance en dialogue contenant

la conversion d'une Mahomédaine.

Yrwin et Vreedenburg ne m'a pas fait tant de plaisir.

Robbert de Vries

Eleonoor

[achter de 2 vorige regels een accolade en] dans le genre burlesque.

Lofzang aan Apollo

,,, Diana.

[achter de 2 vorige regels een accolade en] imitée de Callimaque.

Deux belles odes surDichtkunst et Geweten

Messias imité de Pope.

Aan een roosjen on y trouve exprimé l'idée que l'abeille

produit l'accouplement dans les roses.

'S Levensbeker

De drie wenschen. Petit vers qui contient une vérité immuable.

De visschers

Ouderdom

[achter de 2 vorige regels een accolade en] des jolis vers le dernier est une allégorie.

Holland en Engeland

Aan een engelsch meisje

De nachtmeer en de dekbedden

De duitsche kachels

[achter de vorige vier regels een accolade en]ne contiennent que des malédicti-

ions contre les Allemands.

Puis de jolies pièces fugitives

Aan Barine. De eed der meisjens. Beginsel De filosoofen

∙Garth Poems 1 v.

Ces poèmes ne m'ont pas singulièrement plu. Le Dispensary

est un poème en 6 chants qui traite de la dispute survenue

entre les médecins et les apothicaires par ce rapport l'érection

d'une boutique d'apothicaire pour les pauvres. Quoique l'auteur

assure dans sa préface n'avoir copié que quatre vers du lutrin

à pendant il en a pris les idées entr'autres. p.e. l'épisode de la mollesse

l'idée d'une furie allant trouver un médecin.

Quand la discorde enfer toute noire de crimes

Sortant des cordeliers pour aller aux minimes

Ensuite d'une furie ou je ne sais que qui prend la forme d'un

fameux apothicaire comme la discorde celle de Sidrac.

Puis le combat où ils se jètent avec des pillules des drogues

et des vases de pharmacie ainsi que chez Boileau avec des

livres. Les détails de ce combat sont assez comiques il y a

de belles idées mais cependant le poète Anglais est bien inférieur

au français. La conclusion du premier est meilleures

c'est une joli idée de représenter les médecins en enfer livrés

à la brutalité de ceux de leurs pratiques qu'ils ont

dépêchés vers l'autre monde.


pagina: 188

Claremont. Ce doit être je crois un pendant au Coopers

Hill et Windsor forest mais ce n'est qu'une description

des Druides et un conte de la mort d'un certain

amant dont la maîtresse insensible fut changée en Écho

et enfin l'apologie de Guill 3 et Georges 1.

Il n'y a ensuite d'original que quelques envois et prologues

et puis une traduction de plusieurs fables d'Ovides que je

n'ai point lues car si l'on voulait lire toutes les traductions

des anciens dans les langues modernes on ne finirait jamais.

Vendredi 19 Juin 1812

Par les achats d'une certaine quantité de grains pour compte

du gouvernement les prix sont montés extraordinairement

120 H. Nord T. 364. 116 H. Vr. 300 gd.

114 H. N. Rogge 456. 120 H. 180 gd.

∙Mais aujourd'hui il y avait une stagnation complète

on dit que le maximum des grains sera ôté.

J'ai été ce matin au jury. Il s'agissait d'un pauvre diable

qui dans désirant d'avoir de quoi vêtir ses frères avait dérobé

pendant la nuit quelque linge et vêtemens. Il en avait caché

une grande partie mais avait confessé tout de suite et

déclaré où il avait caché les effets. Son père avait assisté

mais n'était pas à bord en ce moment. Le père fut absous et

le jeune homme condamné à deux années de détention.

Voici les formalités et le cours du jury.

On prend date du nom et de l'age des accusés

Les jurés font leur serment

Le président déclare de quoi il s'agit

On lit l'acte par lequel la cour de la haye a transféré le

jugement à la cour de première instance

On lit l'acte d'accusation

Le proc. imp. produit ses preuves

Les témoins sont amenés

Ceux-ci après avoir fait leur serment sont interrogés

Les accusés sont interrogés s'ils ont quelque réflexion

sur la déposition du témoin.

Les accusés sont interrogés et doivent raconter leurs

motifs et ce qu'ils ont fait.

L'avocat de l'accusé plaide en sa défense

On prononce les questions aux jurés qui rentrent

pour délibérer.

Les jurés reviennent et leur président dit la réponse des

jurés.

Le proc. impérial déclare la punition qu'il voudrait qu'on

infligeât au coupable.

L'avocat fait tout son possible pour produire des arguments

propres à mitiger cette punition.

La cour délibère et donne la sentence.


pagina: 189

Mecredi 24 Juin 1812

Nous fûmes plus gais à Rupelmonde à cause du

bon tour qu'a pris la maladie des enfans. Nous fîmes Diman-

che une promenade à Marsen. La pluie nous assaillit et

nous fûmes bien aisé de pouvoir retourner dans un fourgeon

de louage que nous rencontrâmes.

Vita

Depuis longtems j'avais formé l'idée d'écrire en abrège ce

qui m'arriva de plus remarquable depuis ma naissance

jusqu'à l'époque du commencement de ces mémoires.

∙Je naquis le 15 Janvier 1795 ce que fit dire que j'étais né a l'au-

rore de la liberté puisque ce fut justement alors l'époque

de l'arrivée des Français. L'hyver était fort rigoureux et

j'étais si faible que l'on ne me donnait que fort peu de tems

à vivre. La première époque dont j'aie souvenance fut

mon troisième anniversaire. Ma première institutrice fut

une certaine Mad. Dinger qui m'enseigna les élémens de

la lecture et je fis de rapides progrès dans cet art de manière

qu'à cinq ans je lisais couramment non seulement des

livres inprimés mais aussi l'écriture. À cette époque on me

mit à l'école chez une certaine Mad. Anzio et je montrai

premièrement fort peu de dispositions à cet effet et moitié

par menace, moitié par promesses on dut pour ainsi dire

m'entraîner à l'école. C'était un misérable institut où j'apprenais

quatre ou cinq mots de Français par jour. Je passais le reste

du tems à lire dans des livres que j'amenais. Le fatal perroquet

de cet école restera encore longtems dans ma mémoire. Enfin

je fus ôté de cette école et je reçus les leçons de M. van Wijk,

homme que j'ai toujours beaucoup estimé. Il savait beaucoup et

enseignait d'une manière fort agréable. Je me souviendrai

toujours de la manière dont il m'enseignait la géographie

qui était tout à fait jolie. Ce fut chez lui que je puisai le

premier désir de m'instruire tandis que les progrès que je

faisais chez M. Waller dans l'écriture étaient beaucoup

moindres. Je [onl.] maintenant réduire sous une époque générale

tout ce qui m'arriva chez M. Byrde. J'arrangerai ceci plutôt

par Anecdotes que pour en faire une histoire suivie.

M. Byrde était un homme de trente à quarante ans colère

et pédant quoique néanmoins il ne possédât quelques qualités

propres à le faire chérir. Il ne pouvait souffrir la moindre

contradiction. Il me prit tout de suite en amitié. Et je

ne me souviens d'avoir été brouillé avec lui que deux

fois. Il avait des victimes journelles et sa règle

terrible faisait une justice violente.


pagina: 190

Le cours des études était fort agréable. p.e. à la première

classe.

Lundi Le matin une demi-heure pour apprendre les leçons qui

étaient à la première classe. Une leçon de Restant une de led.

compl. une des Lec. de Phys. de Cotte. Pour le Mardi Jeudi

et Vendredi. Lundi on apprenait une fable de la fontaine.

Mecredi de l'abrégé des sciences. Samedi de Mythologique.

Puis une heure de lecture. Les princ. ouvrages étaient Abr. de

l'hist. un par Formey. Petit abr. de L'hist. un Disc. sur l'hist.

Table de l'hist. Lec. de Phys. Une fort belle grammaire Lycée

de la jeunesse. Mecredi et Samedi on lisait en holl. Wage.

vad. gesch. verkort. Kleine kat. der natuur.

Ebert. Knigge werk. Jungst kennis der hem. ligch. etc. Puis

après un petit intervalle suivait la lec. de géograph. Quelques

garçons lisaient la disc. des pays dans des cah. géogr. Les autres

suivaient sur la carte. M. Byrde après nous avoir interrogé

lisait quelques détails sur ces pays et nous nous servions

alors de superbes atlas qu'il avait. Lundi il nous dictait un

thème en français puis deux pages d'écriture les leçons

étaient récitées. Mardi nous faisions un extrait en franc.

Jeudi en holl. Vendredi des parties du discours. Nous dînions

ensuite et avions une demi-heure de recréation. Après-dîné on

faisait encore une écriture corrigé et mis au net. Vendredi

on faisait un thème en hollandais et le reste du tems

était consacré à l'aritmétique.

En effet en cas que je dusse jamais former une école je

suivrais plusieurs des institutions de M. Byrde parmi

lesquelles il y en avait beaucoup des excellentes.

∙Le reste à l'occasion sous le titre V.

Mecredi 1 Juillet 1812

Puisque je n'ai rien mandé depuis Mecredi il y a une semaine

il faut reprendre les choses de là. Jeudi matin mon oncle Van

Heukelom me fait dire de me rendre chez lui avec la plus

grande célérité possible. Je m'habille à la hâte et me rends chez

lui. Il me dit qu'il lui serait impossible de venir le jour suivant

à Rupelmonde et qu'il désirerait beaucoup que Papa en

fut informé avant son départ de Rupelmonde qui aurait

lieu le même jour à midi. Que faire. Je dis à la fin que

je n'avais rien de mieux à faire que d'entrer en campagne

et de chercher à rencontrer mon père. Ce fut aussitôt fait que dit.

Je rentre chez nous m'empare d'un gros bâton et comme

le fils du Vicar of Wakefield je me mets en chemin. J'avais

le coeur gai 1 à cause du beau tems 2 à cause de la singularité

de l'entreprise. Tout allait bien. Déjà j'étais passé d'un air

triomphant devant de Horn. Il me demanda où j'allais; à

Rupelmonde répondis-je en m'éloignant aussitôt fièrement


pagina: 191

et à grand pas. Cependant à peine sorti de la ville une

douce pluie commence. Que faire retourner sans achever

une entreprise une fois formée me répugnait et d'autre

part me faire percer par la pluie sur ce misérable chemin

d'Abcou c'était encore pis. Je m'adresse dans deux

auberges mais point de paraplui. Déjà le beau tems renaissait

et je continuai mon chemin sans penser plus à la pluie.

Venu près du Schulpbrug et réfléchissant enfin je me

procure chez le père de ce pêcheur, bon vieillard un vieux

paraplui dévalisé. Je laisse mon bâton en gage et je

vais toujours en avant en doublant le pas de sorte que

j'arrivai au pont de Duivendregt après une heure et cinq

minutes de marche. Mais alors tout l'horison semblait

se déchaîner contre moi. Un vent terrible amenait de

torrens de pluie et à peine mon pauvre paraplui pouvait-

il résister aux efforts réunis de ces deux puissances. Ces

circonstances m'ennuyaient quand tout à coup j'entends

le roulement d'une voiture. Me voilà sauvé dis-je en

moi-même je verrai peut-être des coeurs généreux. Une

berline fermée passe devant moi. Plus d'espoir. Mais tout à

coup une seconde voiture suit où il n'y avait personne.

Je la laisse passer mais réfléchissant sur mon étourderie

je cours après elle pour deux zeshalv. Le marché se

conclut et j'entrai dans cette voiture qui me roula jusqu'à

Abkou et me transporta à sec au milieu d'une bourasque

violente. À Abkou je descends paye mon conducteur et

je me remets en promenade à la douce chaleur du soleil

qui avait percé les nuages. Après avoir remercié les offres

obligeantes d'un paysan qui voulait m'emmener sur

son chariot je rencontrai une voiture où il n'y avait qu'un

monsieur. Après qu'elle eut passé je crus avoir reconnu

mon papa et je courus après elle. Le monsieur et le

conducteur me fixèrent avec surprise mais voyant ma

méprise je retournai sur mes pas. Près de Loenersloot

je rencontrai enfin mon papa avec sa famille qui ne

pouvait en croire ses yeux et était tout ébahi de me

voir arriver là, le paraplui à la main. J'entrai en

voiture et lui fis part de la commission dont j'étais chargé

mais je ne pus lui persuader de rebrousser chemin. Enfin

ne voulant pas avoir le dépit d'avoir fait

tant de chemin pour retourner dans une voiture

fermée où déjà l'oxygène avait de la peine à circuler,

je continuais le chemin vers Rupelmonde après avoir


pagina: 192

pris quelques rafraîchissemens. J'eus encore une belle

peur en rencontrant près de Loenen trois gendarmes car

malheureusement je n'avais pas de passeport sur moi.

Après avoir échappé à ce danger j'arrivais à Rupelmonde

où l'on fut tout à fait étonné de me voir. J'y passai un

après-dîné et une soirée fort agréables. Le lendemain

il pleuvait à verse et je fus aisé d'avoir atteint la barque.

Malheureusement les trois roefs étaient loués et je dus

prendre place dans la barque qui était fort sombre

puisqu'on l'avait fermée de l'un coté à cause de la pluie.

Il y avait une bien triste compagnie. Je pris le voyage

de Risbeck que je ne quittai plus. Des gens qui se plaignaient

de la cherté du tabac, qui félicitaient les dames sur ce

qu'elles avaient toujours quelque chose à faire, quelques

histoires d'avantures en bateau, la manière dont quelques

gens se noyent, des complaintes sur le mauvais tems,

des femmes qui tricotaient, des juifs qui dormaient enfin

ce qu'il y a ordinairement dans une barque. L'autre jour

allant à Rupelmonde p. barque j'y rencontrai M. Warin

je m'entretins fort au large avec lui sur la noblesse

sur l'origine de plusieurs châteaux dans les environs du Vecht

sur les maisons de Ruuel, Nyenhorst, Oudaan, dont il me

raconta beaucoup de particularités. Nous parlâmes des

révolutions de ce pays-ci. Samedi je fus encore au Blaauwhoofd

c'est pourtant une superbe promenade. Dimanche j'entendis

M. van der Ploeg sur Job xx. De mensch uit eene vrouwe

geboren is Kort van dagen en zat van onrusten. Une consta-

tion germanique trop d'emphase trop de métaphores des

passages qui sonnent bien mais qui ne disent rien de grands

mots.

Annales du Lundi

De oude heer de Vos was volgens zijne gewoonte vrij druk. Pro-

fessor Tewater was bij hem geweest. Zij hadden over alderhande

zaken gekeuveld. Een brief van invitatie door Kemper

wegens de volgende week wierd voorgelezen. D. de Vos

weigerde. Oom manqueerde. Papa en Mama manqueerden

en dus wierd bij de presenten geconcludeerd van uit te stellen

en J. de Vos gechargeerd uit naam van 't gezelschap dezen

brief te beantwoorden. D. verklaarde dat hij niet

wilde gaan zo De. de Vos niet ging. Men zeide dat hij

geen wil had. Hij antwoorde dan den gantschen dag

trist te zullen zijn. Men zeide weest dan trist.

De roggebroodsbakkers moeten hunne brooden merken.

Toen kwam G. en J. Walré instuiven. De eerste verhaalde

hoe hij met Klaas mabé een dag en twee nachten op

de schoener de Cachelot had moeten blijven zonder

er af te kunnen komen en las een vaersje hierop

toepasselijk voor.


pagina: 193

Men ging over het maleisch spreken 't geen tot aan

den avond duurde. bv.

Kassi karossi kakki.

Geef een stoeltje voor de beenen.

Kassi api.

Geef vuur.

Kassi anjer.

Geef water.

Kassi angor.

Geef wijn.

Touto pakkian.

Ik ga mij uitkleeden.

En zoo voorts. Hij verhaalde veel van de levenswijze in Batavia

en sprak ook japansch. Hij schreef Doctor in 't maleisch

een conversatie van eenen doctor met eenen zieken

op. Aan tafel sneed hij een vaers over het ter zee

varen op en verhaalde zijn wedervaren op het kweekschool.

Dyl. werd vrij wat wijs gemaakt: bv. dat de linie een

brug van water was waarover het schip heen moet zeilen

wegens het doopen etc.

Hij zeide zijn maleische conversatie aan Whilet te zullen

laten zien dat die het wel kennen zoude. Die is in de

West geweest. O dat komt er niet op aan het is toch beide

in verre landen.

Hij wist niet wat of verder was Batavia of de Kaap.

On raconte avec certitude qu'il ne manque que l'approbation

de l'empereur pour déclarer que ces sept départemens-ci ne

sont pas soumis au maximum. Ceci fait monter les grains.

Les meilleures qualités ne se vendent pas puisqu'on espère

recouvrer bientôt la liberté des prix.

120 H. Gron. 360 g. 122 H. Nord. max. 378 à 382.

Rogge 120 H. 170 à 172 gd.

Gerst 99 H. v.n. 146 gd.

Haver 70 H. 60 gd.

Coolzaad Vries 47 L. Oly f 47

Vendredi 3 Juillet 1812

Je crois n'avoir jamais eu un été aussi froid que celui-ci.

Il fait un tems à mettre une bonne redingotte.

Littérature

Les déjeuners de mon cher oncle p. Ducray Duminil. 2 v.

C'est comme presque toujours dans les ouvrages de cet auteur

un assemblage de contes qui ne sont pas propres aux enfants

pour qui ils sont faits. Les meurtres, les empoisonnemens y

jouent toujours un grand rôle. Il y a des caractères affreux.

Cependant la lecture en est assez attachante. L'idée de l'auteur

en disant qu'une huitaine de pareils contes suffisait à l'édu-

cation de ces neveux donne une grande opinion de la

perfection des jeunes gens en ce genre. Les livres de l'auteur que

j'ai lus hormis ceux-ci sont

Les journées au village 8 v.


pagina: 194

Les soirées de la chaumière 8 v.

Emilio 4 v.

Petit Jacques et Georgette 4 v.

Les deux premiers ouvrages m'ont beaucoup plus. Il y a de très

jolies choses comme dans le 1 la châtelaine voilée, le plaidoyer des

jeunes gens etc. dans le 2 La chapelle de St. Leonard. L'homme

invisible. Emilie est moins joli je crois en avoir déjà parlé. Petit

Jaques et Georgette est le moindre de tout c'est un triste ouvrage.

Il y entre un certain Bonnet qui lit des chapitres entiers

d'un ouvrage qu'il a fait sur l'antichrist.

Leven van Juffrouw Brummelkamp door M. Broes

C'est intéressant de connaître la vie de fameux criminels

qui offrent quelques aventures comme de Cartouche de Schinderhan-

nes etc. mais dans ce livre-ci on trouve une histoire que tout le

monde connaissait et qui n'intéresse pas trop. Voici le sommaire

de l'histoire tant p. Broes que par des rapports avérés.

Hester avait reçu une bonne éducation de parens religieux.

Elle se maria à 17 ans à Brummelkamp. Ils établirent une

boutique de tabac sur le breestraat et tout allait fort bien

lorsque le mari s'adonna à la boisson. La femme pour tenir

en bon ordre les affaires qui dépérissaient et lui proposa de

prendre son frère dans la boutique et de lui enseigner le

commerce. Mais celui-ci lorsqu'il en fut instruit établit une

boutique dans le voisinage et presque toute les pratiques de

Brummelkamp passèrent chez lui. Les deux époux passèrent

à Hilversum où ils établirent un petit commerce qui alla

bien quelque tems mais bientôt le mari retomba dans son

ancien défaut. Ils passèrent encore quelques années dans une

ville de Gueldre et vinrent enfin à Wijk te duurstede où ils

avaient à recueillir une petite succession. Là ils s'établirent.

Le mari s'enivra à son ordinaire et la femme pour lui rendre

la pareille coucha premièrement avec un Monsieur... et puis avec

Verkerk pour qui elle avait un attachement réel. Un vieux

couple M. et M. Beerenburg demeuraient chez eux et avaient

eu l'imprudence de leur céder tous leurs biens pourvu qu'ils

les entretinssent jusqu'à leur mort. Pour hâter ce moment

fortuné Mad. B. et la servante dépêchèrent cette vieille femme

Beerenburg avec de l'arsenic. Cela réussit si bien qu'on prit

bientôt la résolution conjointement avec M. Verkerk de traiter

le cher époux de la même manière. La première potion ne

suffit pas pour le faire crever ainsi malgré ses souffrances sa chère

épouse lui en donna une seconde et enfin il en mourut sur ces

entrefaites. Le père de Mad. mourut aussi d'arsenic. Le public

en accusa sa chère fille mais M. Broes jeta des scoupçons sur la

servante.

Enfin pourtant les scoupçons de la mag. se réveillèrent en voyant

ces trois morts consécutives. On arrêta les coupables et le crime se découvrit.

M. Broes entre ensuite dans de très grands détails sur les idées

religieuses de cette femme. Mais cependant je ne crois pas qu'il

faille trop s'y fier car faire deux meurtres à tête réfléchie


pagina: 195

sans nécessité sans passion de présenter à un mari

souffrant les plus horribles douleurs une nouvelle portion

d'arsenic c'est là le comble de la dépravité humaine.

Lorsqu'elle vint ici les ministres orthodoxes d'Amersfoort l'avaient

montée à un tel point que se fiant sur la satisfaction continuelle

de J.C. elle ne craignait rien dans l'éternité. Ce n'est pas

là le but de l'évangile de donner à un meurtrier la confiance

d'un honnête homme.

Beautés et tableaux pittoresques de la nature p. L. A. Martin

Ce ne sont que des fragmens à la suite d'une nouvelle intitulée

Raymond et que je n'ai point lue. L'auteur a aussi écrit les lettres

à Sophie sur la physique ouvrage dont je n'ai jamais pu achever

la lecture. Ces fragmens contiennent de fort belles remarques

sur la nature, des observations curieux, un grand respect pour

l'auteur de la nature, des preuves de l'existence du Dieu et de

l'immortalité. Les fragmens sont

Du mirage Mer lumineuse coquillages etc.

Des insectes

Des fleurs (Hymens des plantes. Influence des

végétaux sur la terre)

Des animaux (Loi de la nature de la tendresse mater-

nelle armes[?] de défense des animaux)

Des singes (ne ressemblent pas aux hommes sont inférieurs

aux chiens et ainsi ce n'est pas les organes de l'homme

qui lui donnent le génie.

∙Moeurs des singes

Hume History of England 12 v.

Je n'ai lu dans longtems un ouvrage qui m'a fait tant de

plaisir. Ce que me plait surtout dans Hume c'est son impartialité

tant à l'égard des troubles de sa patrie qu'envers les peuples

étrangers. Il rend la plus grande justice à plusieurs de nos

grands hommes comme à Tromp De Ruiter De Wit. Il faut aussi

convenir que l'histoire d'Angleterre est fort intéressante.

Il y a des époques qui sont intéressantes à lire comme

p.e. Le règne d'Edouard 3, de Henri 5, la guerre des deux Roses,

le règne de Henri 8, de Elisabeth, de Charles 1. Il ne fait pas un

triste narre mais vous présente tout sur des points de

vue intéressans. Voici le contenu des volumes

V. 1 dép. les Bretons jusq. William the conqueror.

V. 2 William Rufus, Henry 1, Stephen Henry 2 Richard John Henry 3.

V. 3 Edward 1.2.3.Richard 2.

" 4 Henry 4.5.6, Edward 4.5, Richard 3, Henry 7.

" 5 Henry 8

" 6 Edward 6, Mary Part of Elizabeth

" 7 Elizabeth

" 8 James 1. Part of Charles 1

" 9 Charles 1

" 10 End of Ch. 1. Commonwealth

" 11 Charles 2

" 12 End of Ch. 2, James 2. till the revolution in 1688


pagina: 196

Lundi le 6 Juillet 1812

Nous avons passé une semaine bien tranquille. Mietje reste

toujours indisposée et Maman et Eetje à la campagne. Ils

reviennent cependant aujourd'hui ce que me fait beaucoup

de plaisir. Samedi je fus avec Kato à Welna campagne fameuse

en 1652 maintenant érigée en auberge. Le jardin a très joli

et c'est une jolie promenade depuis la ville. Hier

il fallut chercher d'autres promenades encore et je me

promenai le long des Buitensingels où il y avait une foule

comme celle du Botermarkt pendant la foire. On ne voyait

de tous côtés que des servantes. Toutes les auberges situées

sur le chemin en étaient remplies. Ah je regrette souvent

Hogermeer.

Auguste avait parlé à un de ses amis engagés fautivement

dans la conscription et qui avait été à Boulogne et à Toulon.

Il se plaignait fort de la mauvaise nourriture. Exerçant un

jour hors de Toulon il reçurent l'ordre de retourner instam-

ment dans la ville pour appaiser une sédition qui s'était

élevé dans leur absence. Ils virent bientôt une troupe de

paysans et gens armés de bâtons et de couteaux qui

volaient partout du pain. On fut obligé de tirer sur eux

une trentaine furent pris et exécutés le jour suivant. C'est

ce qu'on ne met pas dans la feuille politique mais bien

que les Anglais crient la paix ou du sang ce que je crois bien moins.

∙Une commission a été choisie pour régler le culte conjointement

avec M. Alphonse M. Te Water, Stuart et Mollerus en sont

membres. Koopmans y vient aussi je ne sais pas pourquoi

mais je sais bien que c'est à cause de lui que j'ai été mis

en réquisition par mon grand-père pour copier un article

énorme de l'encyclopédie appellé Anabaptistes qui était

de plus de 16 colonnes en 4o.

Koopmans a été nommé Professeur mais on ne sait pas encore

s'il acceptera.

Peut-être notre petite église sera changée en cour d'assise.

Le prince ayant appris que beaucoup de mennonites

visitaient les églises Wallones, Remonstrantes et autres deman-

da à cet effet à Kops Apostasient-ils donc le Mennonisme.

∙Après un tems triste et pluvieux qui a duré quelques

semaines de suite il paraît enfin que le tems s'éclairera.

Dumoins hier et aujourd'hui il est tant soit peu mieux.

∙Mon grand-père de vos est entièrement rétabli de son

fièvre.

Mais il est tems de céder la place à quelques malheureux

auteurs qui désireraient tant d'avoir encore le

plaisir de dire quelques mots.


pagina: 197

Littérature

Cats Ext.

Depuis longtems je me l'étais reproché comme une honte que

puisque je faisais quelque prétension d'aimer la littérature

hollandaise je n'avais encore jamais jeté les yeux dans les

écrits de ce patriarche. Sept fort volumes m'avaient toujours effrayé.

Mais me dis-je à moi-même l'on a pas besoin de les lire d'un

bout à l'autre. On peut voyager et glaner. Lorsqu'un on voyage dans

un pays on va droit à la capitale sans s'arrêter à tous les

petits villages et bourgs. Voici le fruit de mon voyage

∙1. viennent les sinne et minne beelden l'amour de

ces tems là quoiqu'ils soyent maintenant tellement hors

de mode, qu'on ne sait presque plus ce que c'est. Il y en a de jolies

quoiqu'il soit impossible d'en lire plusieurs de suite. Mais à qu'il

y a de plus singulier et en même tems approprié à l'esprit

de cet âge c'est que de la même allégorie dont on donne

une explication galante pour en tempérer l'effet on ajoute

tout de suite une explication spirituelle quelquefois

tirée par les cheveux. Cats dit ou Lisez tout ou ne lisez rien

mais comment peut on lire des

vers amoureux et des vers pieux entremêlés les uns aux

autres.

Zelfstrijd

Pour en définir la nature il y a ici p.e. trois histoires dans la-

quelle ce zelfstrijd est employé.

1. Un zelfstrijd en vers d'un jeune homme qui est en barque avec

deux demoiselles. La barque est menacée de naufrage si l'on

ne jète l'une d'elles en mer. Or l'une l'aime beaucoup sans qu'il l'aime

et celle qu'il aime en aime un autre. Donc il ne sait choisir.

2. de cette femme qui un gouverneur en Zeland força dans le tems

du duc de Bourgogne à coucher avec lui pour sauver son mari.

3. de Scipio rendant la jeune Espagnole.

Il y a de jolies idées maisle zelfstrijd du 1. qui se met dans de

tels dangers à réciter des pages entières divers est un peu

invraisemblable.

Mais toutes celles-ci ne signifient rien du tout en comparai-

son de celui de Josef représenté dans un discours entre Josef

et mad. Selima. Ce dialogue n'a pas moins que 3000 vers la

longueur de deux tragédies. Aussi raisonnent-ils comme deux

docteurs et je doute fort que dans notre tems une mad. Selima

ou un jeune Josef ayent le courage de dévorer tous ces argumens.

J. dit après une apostrophe véhémente de la belle

Nadien het u belieft met afgerichte streken

Als voor het dertel vleesch tot mijnen geest te spreken

So laet mij weder toe behoudens u ontsag

Dat ik, als in den geest u antwoord geven mag.

∙S. lui répond avec raison

Neen Joseph dit geval en is maer tijdt verloren


pagina: 198

La peinture qu'elle lui fait ce que lui arrivera s'il la

méprise est une chose affreuse. Il y a des traits de génie dans

les morceaux que j'ai eu la patience de lire mais c'est fort

prosaïque.

Enfin quelle différence avec l'Assenede de Bilderdijk.

L'histoire connue de Vasti qui refusa de joindre le roi et de

se faire voir des grands de Perse est connue. Elle est racontée ici

et les sept princes forment un conseil à ce sujet.

∙Charsena prend la défence des femmes en général et cite

l'histoire de Gyges.

Menuchon a attaqué les femmes et cite Semeramis.

Après ces plaidoyers qui sont énormément longs Menuchon

triomphe la princesse est condamnée et une sentence de

la cour adjuge la supériorité aux hommes.

Puis l'histoire d'Athenais avec la pomme racontée assez brièvement

Galatea

C'est une pastorale mais jolie. Il y règne une naïveté charmante

aussi l'ai je lu avec le plus grand plaisir d'un bout à

l'autre ainsi que quelques chansons et vers pastoreux qui

suivent et qui ont des drôles de titres.

De maegt in de borst getroffen

De vrijster geraakt in haar maegdekransjen

De vrijster met de pijl in 't oir

De jongeling met de pijl in 't oog

Puis il y a des élégies d'Agar, de Dina, de Thamar, de Abirag,

de la fille d'Jephta de Susanne de la fille de Marc Aurèle tuée

par une aiguille et plusieurs différens vers parmi lesquels

en vis

Matroosen etc. copié par De Vries.

His. de Mlles de St. Janvier 1 v.

Ces deux jeunes filles étaient filles de M. de st. Janvier, négociant

aisé à St. Dominique. Les noirs se rendent maîtres du Cap. français.

M. est massacré. La femme et les enfans se réunissent à une

famille qui demeure dans le même logis. Ils se cachent

dans un grenier mais sont trahis par une servante. La

mère est massacrée et en mourant recommande ses enfans à

un général qui les emmène chez lui sous prétexte de les

y tuer mais il les sauve et les cache. Ils y restent cachés

et après beaucoup de dangers osent enfin se montrer. Dessalin

apprenant que des blancs ont échappé s'avance furieux

vers la ville. La femme chez qui ils étaient n'ose pas les retenir

et les met à la porte. Mais le chef est assassiné en chemin.

Le général Christophe, la veuve de Dessalines s'intéressent à eux

on les fait transporter en Amérique sous la conduite d'une

femme qu'on croit honnête mais qui est une intrigante

et qui après leur arrivé à New York par un artifice les

rend ses esclaves et les accable de mauvais traitemens.

Par le secours de quelques personnes officieuses elles

réclament en justice et gagnent leur cause et enfin

après tant de danger elles arrivent en France et

se voient sauvées.


pagina: 199

Cras ad Bosschuum 1 v.

Cras voulait dire quelque chose à la louange de De Bosch.

Ceci l'engage à publier une lettre qu'il lui avait écrite

il y avait deux ans. C'est pour la plupart des complimens

à Bosch sur son érudition sa vertu et mille autres bonnes

qualités. La lettre est autrement bien écrite.

À la fin on trouve un joli vers de Nieuwland sur De Bosch.

Atala 1 v.

J'avais lu l'itinéraire de Chateaubriand et ses martyrs et

j'avais tant lu de cette Attale que j'étais fort curieux de lire

cet ouvrage. Voici premier l'histoire.

Chactas le Natche raconte à René l'européen ses avantures.

Après une bataille perdue il se retira dans une ville espagnole

où un certain Lopez fut son bienfaiteur. Il le quitta pour

rejoindre ses compatriotes mais fait prisonnier par les ennemis

il est condamné au feu. Cette cérémonie devait se faire mais

Atala, la fille du chef devient amoureux de lui le

délivre et ils se sauvent ensemble et traversent de vastes

déserts. Attala qui est chrétienne est cependant toujours

mélancolique et refuse de se rendre à ses désirs. Un jour il

survient un orage terrible et vaincue par l'effroi il est un

moment de triompher de la résistance d'Attala lorsque le

père Aubry vieux solitaire vient à eux et les reçoit dans sa grotte.

Le lendemain il va avec Chactas visiter une colonie d'Indiens

chrétiens. À leur retour ils trouvent Atala mourante. Elle

raconte que sa mère avait fait pour elle le voeu

de la virginité qu'elle était la fille de l'espagnol Lopez

qui elle avait toujours résisté à sa passion mais que le

jour passé, se voyant au moment de succomber elle avait

pris un poison. Chactas est inconsolable. Le missionaire

administre l'hostie sacrée à Atala elle se meurt et est

enterré par le père Aubry (nom du solitaire) et Chactas.

L'auteur dit avoir appris cette histoire des Indiens. Peu

après il rencontre une famille Indienne descendante de ce

Natche qui lui raconte que toute cette colonie a été ravagée

et le père Aubry Chactas et René massacrés.

Voilà pour le roman. Je ne puis nier que je n'aie lu

la dernière partie avec du plaisir. Elle est vraiment pathé-

tique surtout la mort et l'enterrement, mais le style

est insupportablement outré. Que p.e. un indien dise il

y aura des neiges, à la bonne heure mais qu'il n'aille

pas me citer et à tort et à travers de ces belles phrases. Je

vais en citer quelques-unes, car il s'en trouve par centaines

∙"Atala était dans mon coeur, comme le souvenir de la

"couche de mes pères.

"comme un faon semble perdre aux fleurs de lianes roses qu'il

"saisit de sa langue délicate d'une l'escarpement de la

"montagne ainsi je demeurai suspendu aux lèvres de

"ma bien aimée.

"Dois-je donc pleurer tout mon coeur.


pagina: 200

"la rosée du soir séchait en tombant sur ma peau brûlée

"je désirais que cette divinité se fut anéantie pourvu que

"serrée dans tes bras j'eusse coulé d'abyme en abyme avec les

"débris de Dieu et du monde.

"Si en abordant les rivages de l'Europe votre oreille eut été

"frappé de ce long cri de douleur qui s'élève de cette vieille

"terre.

"Ce cercueil lit nuptial que vous vous étes choisi ne sera

"point trompé par votre céleste époux et ses embrassemens

"ne finiront jamais.

"Philippe était son nom parmi les anges et les hommes le

"nomment Lopez.

"Les vierges sont des fleurs mystérieuses qu'on trouve dans

"les lieux solitaires.

Mardi 7 Janvier 1812

Annales du Lundi

De vergadering was gisteren ten huize van W. de Vos.

De vertellingen van 't ongeluk te Naarden, van de groen-

man Potzie die M. Bosch gekust had waarbij aangemerkt

wierd dat zij er nog nooit zulk eene declaratie gekregen had. D.

pronkte zeer op de brief van Cras aan de Bosch, hij zeide dat geleerden

alleen zulke geschenken ontvingen. J. de Vos beweerde deszelfs

inhoud te kennen. Hij hield het tegendeel staande het had

hem bijna een kom ijs gekost. De professors te Leyden

zijn [onl.] verminderd. Aan tafel maalde D. zeer veel van perzikken

van Bergera die nooit hoog opgroeiden en aan de boom op tafel gebragt. Hij

wilde zoo'n perzik hebben. Men zeijde dat juffr. Wilet niet met

die perzikken te doen wilde hebben. Eindelijk ging men

over tot den order van den dag. W. de Vos verhaalde kortelijk aan

de leden die absent geweest waren hetgeen op vorige vergadering

besloten was geweest, de brief van Kemper en het antwoord van

hem. Ieder ging vervolgens aan 't proponeeren. Deze wilde

overmorgen deze toekomende zondag deze op een maandag die

op een woensdag gaan. De President had veel moeite om de

gemoederen tot bedaren te brengen. D. wilde in zijn koets gaan

dees in een schuit, dees in een roef etc. Deze had zwarigheden

tegen den eenen die tegen den anderen dag. In 't eind besloot de

president in omvraag te brengen of Woensdag over agt dagen

goedgekeurd zou worden en of men ingevolge van dien aan

Kemper schrijven zoude. Dit voorstel wierd aangenomen, sommige

leden waaronder M. de Vos zich egter nog eenige restricties

voorbehoudende. Dylius zeide. Le medicin propose, les malades

disposent. J. de Vos kreeg de commissie om te schrijven en

P. de Clercq om zich wegens de schuit te informeeren. Men besloot

den volgenden maandag te confereeren hoe men gaan zoude

en de vergadering wierd gescheiden.


pagina: 201

Je veux insérer ici le récit d'un témoin oculaire de la

catastrophe de Naarden. Celui-ci se trouvant dans cette ville

avait voulu faire une visite à un officier de ses amis. Il

le trouva dans une prairie où il surveillait quelques ouvriers

qui étaient occupés, selon les uns à faire une nouvelle espèce de

mèches, selon d'autres à faire des bombes. Mais enfin

c'était fort dangereux aussi l'avait-on établie en plain champ.

Une douzaine de personnes étaient occupés à travailler entr'autres

celui qui avait fait le dernier feu d'artifice d'Amsterdam

un conscrit qui dénonçait beaucoup de génie et le fils de l'officier.

L'ami s'en retournant l'officier lui dit qu'il le reconduirait

un bout de chemin. Chemin faisant ils entendent un

coup terrible. Ils retournent sur leurs pas et y voient un

spectacle affreux. Le chaudron qui contenait de la poudre

du vitriole du salpêtre et encore d'autres matières était

volé en éclats de manière qu'on n'en trouvait pas la moindre

trace. Ceux qui y assistaient étaient renversés à terre griève-

ment blessés et tout en feu. Trois en sont déjà morts parmi

lesquels l'homme qui avait fait le feu d'artifice et le conscrit.

Littérature

Temple lettres 2 v.

J'ai lu avec beaucoup de plaisir le premier volume entièrement

et le second en partie. Ces lettres pour la plupart écrites chez M. Arlingh

au Garde des seaux à J. Trevor à J. de Wit à J. Temple au duc

d'ormond[?] etc. sont en général bien écrites et donnent beaucoup

d'éclairissemens sur l'histoire de ces tems- là. Les faits les plus

intéressans de ce volume sont la négociation de Temple avec l'évêque

de Munster, toutes les circonstances de la triple alliance et

la manière donc on força la France et l'espagne à faire la paix

à Aix.

Le second volume est beaucoup moins intéressant puisque il

roule principalement sur les différens avec la Hollande à l'égard

de l'affaire de Surinam et d'une dispute avec la compagnie

des Indes ainsi que la chicane concernant le payement des

troupes suédoises par l'Espagne.

Mecredi 8 Juillet 1812

Je n'ai rien entendu hier qui mérite d'être cité. On attend encore

toujours l'annihilation du maximum. On compte que de 1700.

C'est de froment qui étaient ici à l'époque des décrets il y a

déjà 700. C'est achetés par le gouvernement.

On croit que la guerre avec la Russie est positivement déclarée.

Il y a maintenant une diligence à l'eau c'est à dire une barque

tirée par deux chevaux.

Jeudi 9 juillet 1812

Littérature


pagina: 202

Florus

∙C'est bon abréviateur. Mais son style est souvent un

peu trop recherché. On trouve dans cet ouvrage une narration

fort succincte de toutes les guerres étrangères et civiles des Romains.

Mardi 14 juillet

Je fus occupé tout le samedi à mon cher Hannibal.

Dimanche nous fûmes le matin chez Stuart qui prêchait

sur l'hist. de la pécheresse aux pieds de Jesus. C'était un

beau sermon.

L'après-dîné nous fûmes à Nabij Buiten où il y avait

une soi-disant fête champêtre. Il y avait beaucoup de

monde. Un pavillon chinois où l'on fit ensuite de la musique.

Il y avait aussi une illumination et un bal. Malgré le

froid cuisant, des centaines de personnes se croisaient

dans le jardin. Il y avait des gens de toutes classes et

ceux qui avaient le moins à dépenser faisaient le plus

de bagage. L'entrée était cependant D. f 1,-.

∙Annales du lundi

Eerst verscheidene vertellingen. D. kwam laat en had

allerhand kwakzalveragtige galanteries, hij wilde

niet rooken. Aan tafel verhaalde hij dat hij op een der

glazen van 't lat. school gelezen had J. de Vos windbuil.

J. de Vos zogt dit op allerhande manieren te

verdraaien doch 't reusseerde niet D. triompheerde. Een

lat. vers van Bosscha, op den keizer wierd naar gevonden

en van van Ommeren. Er wierd veel gepraat over het

feest van woensdag. Oom geeft twee koetsen. D. gaat

met grootp. De Vos en niet met Juffr. Koster, 't geen hij

zoo volstrekt wilde.

Mardi 21 Juillet

Mecredi passé nous fûmes tous chez Kemper. Déjà à 8

heures du matin la caravane se mit en mouvement dans un

carosse et une voiture ouverte. On descendit à Harlem au

faucon noir et après quelque restauration nous

nous promenâmes dans le Hout, guidés par Ignace qui

n'approuvait aucun des plans de promenade que nous

proposions et nous fit courir à travers des chemins non frayés.

Eindenhout étant entré dans nos voitures nous

fîmes le chemin au Geleerde Man avec une rapidité terrible

et nous arrivâmes presque au Galop chez Kemper. Mais on

ne nous attendait pas encore. Mad. était à la toilette et

Mr. à la promenade. On nous conduit à la coupole et

bientôt l'hôte et sa famille accoururent. Nous eûmes

le plaisir de voir arriver la cavalcade composée de


pagina: 203

Mr. Dylius, ma tante de Clercq et mon grand-père. Nous allâmes

nous promener en famille sur Bijweg, campagne assez jolie.

D. prenait beaucoup de libertés avec Cato. Ensuite nous allâmes

faire un tour sur les hauteurs vis à vis de Mr. van Lennep.

Loy[?] désapprouvait cette promenade. Après que nous eûmes

fait un fort joli tour nous le vîmes sur les dunes où ils s'étaient

égaré. Nous atteignîmes enfin ce tombeau de Rousseau.

L'urne] avait été abattue à coupes de haches par des

mauvais sujets et jeté à l'eau. Dans ce lieu délicieux nous

nous couchâmes sur le gazon et nous nous acheminâmes

vers le séjour du professeur nommé thuis ter rust. Nous nous

mîmes à table. Le dîner fut fort gai et fort bruant. D. perdit

de la glace d'une manière malheureuse en disant qu'il

gageait qu'on ne pouvait pas lui dire la dérivation du

mot Motto on lui dit que cela venait du mot français mot,

avec la termination Italienne to. Il raconta une histoire

fort longue de Berend de Kiekendief où il assura entr'autres

que wo bist du hergekommen était le langue de

l'overijssel et que Delden est aux portes de Deventer. Au dessert

on eut deux vers, un de M. Dylius qui était sans rime ni

raison quoique l'oncle en approuvait fort les idées et le

prisa d'une manière qui nous piqua. J'avais aussi un

vers. Après-dîner on vola à Dylius son vers mais

après qu'on l'eut restitué il le donna à mon oncle de

Vos avec ces mots Puiser-y le poison. De nouvelles disputes

éclatèrent lors du départ. La voiture fut prise d'assaut.

D. et moi nous y entrâmes de force et il y avait 5 personnes

et dans les autres 3. Enfin nous arrivâmes en bonne

santé à Amsterdam.

Au reste j'ai peu à noter. Lundi et Vendredi furent des jours

fort tranquiles pendant lesquels je m'occupai à finir quelque

lectures et quelques petites affaires et à penser à mon

voyage d'Almelo qui à ce que j'appris à ma grande douleur

a été différé jusqu'à samedi. Tout est encore incertain.

Dimanche je fus au sermon de mon grand-père sur les

mots de St. Paul en partant pour Jérusalem. La première

partie remplie de citations était fort obscure.

Annales du Lundi

La réunion était fort brillante. Elle eut lieu dans

le beau sallon M. Koster son fils et Cato. Kemper et son

épouse y étaient. Kemper n'avait pas eu de tems


pagina: 204

pour faire des vers mais remplit des bouts-rimés difficiles.

On fut fort gai mais point d'histoires dyliennes. Il était

trop occupé à baiser. Nous vîmes arriver la glace qui fut

reçue avec de grandes applaudissemens. Après cela je lus une

Romance intitulée Apollon et Dylius, un critique en vers de mon oncle

de Vos au sujet du vers de Dylius, les Bouts-rimés de Kemper

et enfin mon vers par laquelle je rendais à J. de Vos le

verre où était écrit De Vos windbuil. Ceci fut extrêmement

applaudi. Je dus répéter mon vers et nous sortîmes tous

dans une espèce d'ivresse de contentement.

22

Littérature

Swift works

Il y a différens genres de poésie comme dans toute autre art. Il

y a des ouvrages de poésie qui plairont toujours chez toutes les

nations et dans tous les âges. Tels sont en Français L'Henriade,

Racine Boileau Delille etc. en latin Les Géorgiques L'Énéide,

Les odes d'horace etc., en Allem.: Hagedorn Gleim Burger etc. en

Hollandais le Gijsbregt de Vondel, Les poésies de Bilderdijk, de Feith. etc.

et en Anglais l'Essay on man Young Denham etc. Parmi ce nombre

ne sont point celle de Swift. Il n'y a point de vol hardi point

d'élégance mais il y a une nervosité et des tableaux Satyriques

fort jolis quoique je n'ai pu saisir toutes les allusions. Ce

sont toutes des pièces détachées. Les plus jolies sont:

Baucis and Philemon

Description of a city shower

,,of a morning

Horace imitated

In a lady's stable look

Phyllis or the progress of love

To Stella

Journal of a modern lady

On dreams

The author upon himself

Furniture of a woman's mind

Lady's dressing room

Beautiful nymph going to bed

Place of the damned

Stephen[?] and Cloe

on poetry

Progress of marriage

Millevoye Charlemagne

C'est un fort joli poème. L'expédition de Charlemagne en Lombardie.

Sa prise de Pavie. En général Charlemagne ne fait pas trop

dans ce poème quoiqu'il se montre toujours digne de

son rang et sa renommées Les héros sont après lui Isambert.


pagina: 205

Samedi 25 Juillet 1812

Nous partîmes avec la barque d'Utrecht et après de bien tendres adieux

la ligne fut attachée et nous entamâmes le chemin dans

le 2 roef entourés des provisions. Tout alla fort bien nous

consumâmes les bienfaits de nos amis et nous longeâmes

ces côtes si connues. À Nieuwersluis prîmes congé de

ma tante De Clercq et de sa familles et nous reprîmes

gaiement notre chemin. À peine fûmes nous dépassés Maarsen

que je sentis mon coeur palpiter de joie et je pensai me voilà

en voyage. On arrive à Utrecht premièrement au Roode Brug

où commencent les faux bourgs. Là le cheval est détalé et

c'est un homme qui tire le bateau. Une grande quantité de

monde remplissait les faux bourgs. Nous débarquâmes à la

fin dans un lieu où l'on monte à la rue par un escalier

en pierre. Nous entrâmes par le Weerdepoort et traversâmes une

infinité de rues et arrivâmes enfin à la maison de M. Gobius.

Pour y venir on doit passer sous les murailles ce qu'est

fort curieux. La maison de M. Gobius à laquelle est jointe

une raffinerie renferme plusieurs bâtimens entourés d'un

fort beau jardin et séparée du reste de la ville par un

pont-levis. Ainsi c'était comme une forteresse séparée. Le vieux

Gobius voulut à toute force trouver le nom de De Cl. dans la généalogie

des Van Heiningen mais le bon homme n'y put réussir.

Cependant nous voulûmes voir quelque chose de la foire et

nous nous acheminâmes vers Vreeburg une fort grande

place entourée de belles maisons et auberges. Nous entrâmes

chez l'éléphant qui en effet méritait cet honneur. Il

faisait le métier de charpentier, il buvait une bouteille de vin

en un mot mille tours. Il y avait à côté une espèce de

ménagerie mais hormis un jeune lion et un loup bâtard

il n'y avait rien de fort remarquables. Enfin nous retournâmes

à l'auberge De Arend, située hors de la ville près du

Witte Vrouwenpoort où nous fîmes un fort bon repas

et couchâmes fort mal à cause de la populace d'Utrecht

qui, comme c'était un jour de foire fit un bruit violent.

C'étaient des chants pareils au coassement d'une grenouille

qui nous tinrent réveillés toute la nuit. À l'aube du

jour 4 heures du matin nous étions déjà en campagne

et passâmes sous les arches du Dom vieux monument

Gothique et j'eus beaucoup de peine lorsque je lus tout

près à voire qu'il fut trois fois plus grand que le

Westertoren. Nous vînmes aussi sur le Neu, autre grande

place on voit dans les rues encore beaucoup de

maisons antiques. Il y a des grandes pompes au milieu de la ville.


pagina: 206

Je vis aussi le palais qui n'est que d'un étage mais d'une

fort jolie apparence en dehors. Il y a beaucoup de maisons

peintes.

Dimanche 26 Juillet 1812

Nous montâmes dans la diligence voiture fort commode et

traversâmes premièrement le Bilt chemin qui n'est pas fort

ravissant jusqu'à ce que nous arrivâmes enfin sur cette

chaussée admirable qui va jusq'à Apeldoorn. Nous passâmes

la campagne de M. de Smet et eûmes des deux côtés les

vues les plus ravissantes sur le seigle et le blé noir qui

était en fleurs. Nous vîmes du côté droit une petite éminence

nommée le Tafelberg où jadis il y eut une poterie. Le chemin

monte par une pente douce et lorsqu'on est enfin arrivé

au sommet l'on voit la ville de Amersfoort fort joliment

située dans un vallon. Nous entrâmes Amersfoort ville

ancienne avec de rues plus larges que jolies. Ainsi ne

passâmes nous pas par les plus jolis endroits de la ville.

Nous vîmes de beaux jardins. Descendus à l'auberge Le Doelen

j'y remarquai l'écurie formée d'une ancienne église et

qui conserve encore la même forme. Lorsqu'on pénètre plus

loin on arrive aux remparts où l'on à une vue charmante.

Sortis de la ville nous traversâmes un fort joli chemin

bordé par des plantations de tabac et de blé noir jusqu'au

joli village Hoeflaken où nous vîmes tous les habitans

qui revenaient de l'église. Après cela nous entrâmes

dans une bruyère immense seulement interrompue par

le joli village de Voorthuizen et une maison de paysan où

la diligence s'arrêta et où il y avait une puits d'une

vaste profondeur. Dans ce moment on ne voit rien que

une bruyère plus ou moins sablonneuse qui s'étend

à perte de vue et ne fait rien de couvrir à l'oeil curieux.

Dans cette solitude immense l'on demande si l'on

parcourt les landes de Bordeaux ou les déserts de

l'afrique car on ne voit aucune trace d'habitation

ni de civilisation et l'on se doute fort d'être dans

une partie de ce pays si vanté pas sa population

et la fertilité de son sol. Enfin l'oeil se repose avec

plaisir sur le bois de Souren reste des immenses forets

qui couvraient jadis cette partie du globe. Ce ne sont

pas les allées allignées du Hout, tout respire ici

la nature. Les arbres sont plantés confusément et

en désordre: on y trouve divers animaux et même

j'y vis prendre un héron. Une des productions est


pagina: 207

une espèce de groseille sauvage [onl.] et fort petite

nommée Everbeeren que les enfans des paysans receuillent

pour les vendre aux passagers. Après un bout de

bruyère on entre dans la seconde partie de la forêt

plus majestueuse encore puisque les arbres y sont des

deux côtés. Au sortir de cette forêt on a une perspecti-

ve fort étendue et l'on voit dans l'éloignement l'auberge

du Loo bâtie il y a peu d'années et qui se montre dans

le lointain comme un nouveau palais, deux églises

bâties par ordre du Roi et qu'on était maintenant

occupé à démolir. On remarque dans le lointain les

arbres du Loo et plus près le parc immense

qui servit aux plaisirs du prince d'Orange et en-

suite à ceux du roi. On entre dans une jolie allée dans

laquelle se montre d'une manière pittoresque la

tour d'Apeldoorn. On voit ensuite une allée qui mène

en droite ligné au palais du Loo. Comme c'est à Apeldoorn

que la chaussée finit, nous y descendîmes de

voiture et nous allâmes un fort joli sentier qui menait

tantôt par des bosquets agréables tantôt par

des champs couverts de grains. On y avait les vues

les plus jolies. Nous passâmes par le joli village de

Twello, mais dont les habitans étaient si sots

qu'ils refusèrent de nous dire le chemin de Deventer

croyant que nous nous moquions d'eux et qu'ils

rentrèrent bien vite dans leur maisons. Nous trouvâmes

cependant le chemin arrivâmes sur le Dijk d'où l'on

a une fort belle vue et arrivâmes enfin au plantage

de Deventer nommé le Worp et formé par des allées

de fort beaux arbres où l'on voyait devant soi Deventer

et le pont de bateau de l'IJssel qui forme une

vue ravissante que je n'oublierai jamais. Nous entrâmes

dans Deventer et allâmes à l'auberge nommé

les armes d'Overijssel où tout est monté sur le grand

ton. Cette auberge a un balcon d'où l'on jouit d'une

vue ravissante sur l'IJssel. Le soir nous nous promenâmes

encore sur les remparts dont une partie est ombragée

de beaux arbres et d'où l'on voit l'IJssel se perdre

dans le lointain. Il y a dans quelques lieux

des Murailles fort épaisses, les portes sont des espèces

de forteresses. La ville est fort antique et la structure

des maisons est fort ancienne. Il y a quelques jolies


pagina: 208

maisons mais elle ne produisent point d'effet à cause

des tristes réduits qu'on voit à côté d'elles. Surtout quelques

maisons sont si délabrées qu'elles paraissent presque

tomber en ruines. Dans une de ces rues il y a une maison

de fort peu d'apparence où demeure l'homme le plus

renommé dans la fabrique de ces gâteaux de Deventer.

Il a gagné tant d'argent avec ce négoce qu'il a acheté

une campagne. En tems de paix on envoyait jusqu'aux Indes

de ces gâteaux qu'on envelopait tout chaud de fer blanc.

La seule place publique que l'on y voie excepté celle

où est l'église et où l'on voit vis à vis la mairie est

ici[?] le Brink où il y a une espèce de poids. C'est le bâtiment

le plus gothique de ce gendre que je connaisse. L'avenue

est formée par un large escalier de pierre. On voit

à [onl.] des grands pots de métal dont la tradition

rapporte qu'ils ont servis à cuire jadis des hérétiques.

Je vis attaché à une des portes un ostéophage

provenant certainement de quelque monstre malin

mais j'ignore l'origine de ce morceau. Plusieurs maisons

sont entièrement peintes surtout en rouge ce que paraît

être la couleur chérie des Deventeriens. Le soir nous

soupâmes à table d'hôte avec des allemands qui avaient

beaucoup de prétentions et je fis bien aisé de me coucher

après une nuit si orageuse et un jour si fatiguant.

Lundi 27 Juillet 1812

Nous étions déjà bientôt en campagne occupé à parcourir

encore Deventer où nous ne vîmes rien que nous attacha

beaucoup. Nous montâmes sur la tour de l'église, bâtiment

que je crois beaucoup postérieur à celle d'Utrecht et

autres. Nous montâmes toujours en rond pendant plus

de 230 marches. Au sommet on avait une fort jolie vue

sur Deventer et ses environs. On nous montra ensuite des

cloches extrêmement grandes qui avaient une résonance

énorme ainsi que l'horloge qui sonnait dans ce moment

nous fit entendre un tintammare horrible. Nous

vîmes l'église qui était fort nette mais n'offrait rien

de bien remarquable et qui offrait de nouvelles traces

d'une bâtisse moderne. Il y a une autre

église avec une petite tour mais que nous ne

vîmes pas de près. Nous vîmes en sortant le Schipbeek,

petit ruisseau. Près de Deventer il y a la prairie

de la ville où chacun peut librement

mener ces troupeaux. Elle en était couverte. Le

chemin de Almelo à Deventer n'est pas fort amusant.


pagina: 209

Près de chaque petit village il y a unEs qui est le lieu

où les paysans sèment leurs grains qui consistent pour

la plupart en seigle et blé noir. On voit dans quelques

endroits un peu d'avoine et de pommes de terre. Le Broek

est une espèce de bruyère dont on tire encore quelque

avantage comme pâturage soit pour les vaches soit

pour les oies qui composent ici une grande partie du

profit des paysans et que l'on voit brouter

en fort grandes troupes. Il y a quelque fois des

plages d'une bruyère fort étendue et qui ne sert presque

à rien. De tems en tems on voit quelques campagnes

mais dont le nombre est fort petit. Dans ces bruyères

on va souvent à travers champs sans suivre les ornières.

Il y a beaucoup de partis marécageuses où même

couvertes d'eau qui sont impraticables dans toute

autre saison que l'été. Dans un lieu nommé à ce que

je crois Bathmermühle on voit une petite chaumière

enfumée renommés par les stoetes (espèce de pain énorme

qu'on y fait. Ce sont des morceaux terribles qu'on mange

tout chaud. Holten est un petit village irrégulier

qui ressemble un peu à Hilversum. L'église est une des plus jolis

que j'en ai vu dans aucun village. Près de ce Holten

est un chemin entièrement composé d'une terre

propre à faire des tourbes. Ce chemin s'est quelquefois

entièrement enflammée, on n'exploite point ces tourbes

dans aucun ordre mais chaque paysan vient

en tirer autant de tourbes qu'il lui en faut pour l'hyver

de sorte que ce chemin est tout à fait criblé de petits

lacs. Le terrain est si mobile que lorsqu'on en passe en voiture

sur le chemin, on voit des deux côtés l'eau dans les fossés

et même dans les autres petits lacs plus éloignés éprouve

un mouvement considérable. On arrive ensuite à Rijssen

ce village le plus misérable que je connaisse. Les maisons

y sont presque toutes construites de la même manière savoir

de deux parties. Un lieu nommé de Welle où la famille

est pêle-mêle avec les instrumens du labourage, les animaux

et tout, enfin qui offre le plus triste désordre qu'on puisse

s'imaginer. Après cela est une petite cuisine. Les Almeloiens

fiers de leur village qu'on nomme le bouquet de la Overijssel

appellent ce Rijssen par dérision les faux bourgs d'Almelo.

Plus loin on passe le Regge près d'une auberge où les

étrangers seuls doivent payer un droit de passage qui y est


pagina: 210

établi. On passe le Grimberg jolie campagne et on

arrive par un Broek à Almelo. Là tout d'un coup la scène

change ce ne sont plus les tristes maisons de Rijssen mais c'est

une fort jolie petite ville avec des maisons fort

nettes et des environs charmans. Nous fûmes fort bien reçus

et encore le même soir nous vîmes la réunion de toute

la famille qui venait complimenter les nouveaux-venus.

∙J'ai oublié de mander 1o que près d'Apeldoorn il y a une

prairie que M. Kinsbergen a fait construire à ses propres

frais pour faciliter dans ces contrées la culture du bétail

2 qu'en allant à Almelo nous dûmes passer une rivière en

voiture.

Mardi 28 Juillet 1812

Ma chambre est charmante elle donne premièrement sur

le petit jardin de mon hôte aimable et ensuite sur le

Hagen, une fort jolie allée où aboutissent toutes les

maisons de ce côté à de la ville. On vit ici comme à la campagne.

Chaque habitant aisé à un petit cabinet Tunhusken à quelque

distance de la ville près d'un paysan pour y passer

la matinée ou y prendre le thé et puis un hofken où

il cueille lui-même ses légumes et qui ne sont qu'à un

saut de leurs maisons. Les environs sont charmans et

beaucoup plus jolis que je ne le croyais. Tantôt on marche

le long de petits sentiers au milieu des blés qu'on

fauche maintenant (steegen) tantôt on passe des

maisons de paysans ombragées d'arbres touffus et tantôt

l'on se promène dans les bois qui avoisinent ce charme et

en droit tel que le Rodenhof OlberingBosch et plusieurs

autres. Près du château on a une fort jolie promenade

et une allée qui s'étend à perte de vue et qu'on nomme

le Dik. C'est la promenade favorite des habitans.

Après-diné nous fîmes une promenade vers le Storck

campagne du grand-père Koster. Le chemin mène premièrement

encore à travers le Broek et ensuite à travers une immense

étendue de sable non cultivée qui s'étend de plus

en plus d'année en année. Les seuls animaux que l'on

voit ici sont des oies et des chiens énormes qui vous

effrayent à chaque demeure de paysan. Le hof lui-

même ne signifiait pas trop. Ce que m'y frappa le plus

fut un énorme cerisier tout plein de cerises

délicieuses. Il y avait aussi des blanke kersen espèce

inconnue à Amsterdam et qui n'est pas à mépriser

l'Acantia kers est la plus renommée de toutes.


pagina: 211

Revenu à la maison j'y mangeai des cerises douces ce

qui est le fruit le plus délicieux qu'on puisse s'imaginer.

Une des choses les plus désagréables dans les promenades

qu'on fait ici est la puanteur du lin que les paysans

font pourrir dans les fossés pour le rendre ensuite plus

propre à être pelé. Ils le jettent dans l'eau et mettent

ensuite du garon par dessus pour le faire enfoncer.

C'est ce qu'ils nommentVlas in de rötte.

Mecredi 29 Juillet 1812

Je me rendis à Vriessenvenne. Tienne le village le plus singulier

qu'on puisse s'imaginer. La première partie du chemin

est fort jolie mais pour la seconde encore des prairies. Le village

s'étend de plus d'une heure depuis le commencement jusqu'à

la fin comme Loosdregt et autres. Mais on ne

voit pas ici la netteté hollandaise. Chaque maison de

paysan est séparée de ses voisins par des fossés et une

grande partie de terrain dans la même direction derrière

la maison y appartient. La plus grande partie des maisons

sont fort vilaines mais souvent pittoresques à quelques-

unes il n'y a pas de cheminée et la fumée sort par dessus

la porte tandis que des nombreux cochons et chiens l'entourent.

La tour de l'église n'a aucune proportion avec elle. Cependant

on y voit quelques maisons fort jolies, il y a eu des marchands

en linge qui marchaient jusqu'à petersbourg et ont acquis

une fortune considérable. Partout il y a des arbres: ce

que présente de fort jolis tableaux il y a des moulins

possédés en commun par quelques familles qui sont conduites

par des chevaux. En retournant je me plongeai les pieds

dans un marais et je dus m'en retourner à pied nus.

Nous dînâmes et soupâmes chez le grand-père Coster et fîmes de nouvelles

promenades car on peut en faire ici de toutes manières.

Les habitans aiment fort les repas car voici l'ordre du jour.

L'on se lève à 7 heures déjeune à 8 prend souvent du café à midi,

dîne à 11 heures prend ensuite du thé souvent un goûte

nommé Vesper à 6 heures et l'on soupe à 9. On y dîne

fort bien. Le plus grand régal consiste dans des poules

qu'on apprête d'une manière délicieuses. Le veau n'y vaut

rien.

Jeudi 30 Juillet 1812

Nous allâmes se matin à unhofken de mes chers hôtes

situé près d'un paysan nommé Bovendam. En voyage

nous vîmes des sites charmans le long d'une branche

de l'Aar que traversent les vaisseaux en allant de


pagina: 212

Zwol jusqu'ici. La petite coupole a une jolie vue et des

environs sauvages qui ne sont pas sans agrément. Les

paysans qui en sont les gardiens étaient assis dans une

étable énorme et mangeaient pour leur déjeuner une espèce

de bouillie au lieu de café. Nous nous amusâmes fort bien

dans cet endroit y déjeunâmes et retournâmes fort contens

de notre excursion. Je ne dois pas manquer de faire mention

de la jolie traversée que nous fîmes de l'Aa premièrement

nous sautâmes dans l'eau et la traversâmes de cette manière

et là secondement sur un morceau de Bois nommé Vondel

et qui n'a pas deux pouces d'épaisseur.

J'ai oublié de dire que nous vîmes à Vriesseveen une procession

de femmes dans des chariots qui conduisaient eux-mêmes

les chevaux et allaient travailler aux champs.

Nous soupâmes ce soir chez Mr. Van Lennep. Voici les

personnes qui y étaient. Le Grand-Papa et la Grand-maman toutes

deux bonnes personnes quoique la dernière aît de la bigotterie

et des préjugés. Elle favorise aussi beaucoup les enfans de l'autre

M. Koster et cette famille-ci leur témoigne bien des égards mais

puis on les plante au haut de la table sans beaucoup

s'embarasser d'eux. Puis l'oncle Henri c'est un fort bon

homme aussi généreux et moins emporté que l'oncle de Vos.

M. van Lennep et son épouse toutes deux des personnes fort

aimables ainsi que M. Coster et son épouse. Puis Mad. Thiele que

sa passion pour avoir un mari officier a déjà deux fois rendue

veuve. Enfin Mad. V. Lennep Coster avec sa petite fille qu'on dit

être singulièrement pédante. Le ministre Van Lennep qui est

très considéré ici et enfin M. Hollerman frère d'un grand fabriquant

à Zutphen pour le compte duquel il voyage. Cet homme a

parcouru presque toute l'Europe. Voici ce que j'ai pu trouver

de remarquable. Les messieurs et les Dames s'assemblèrent

à part et à souper on se réunit. En attendant l'on présente

des oublis fort minces dont il faut toujours prendre une

paire ou du gâteau de Deventer. La coutume est que les épouses

soient toujours à table l'un à côté de l'autre. L'on se souhaite

encore bon appétit à la fin de la prière et l'on établit

des conditions. Le boeuf est fort délicat ici mais le veau

ne vaut pas la peine qu'on le mange. La coutume de présenter

à chacun un demi poulet est généralement établie. L'on

verse du vin à outrance et l'on ne boit pas presque point de

bière. L'eau est bonne. Une singulière coutume dans

ce pays c'est que la nouvelle mariée donne à l'époux un

habit de matin. On resta ce jour là à table jusqu'à

minuit et demi.


pagina: 213

Vendredi 31 Juillet 1812

Le matin je fus avec van Lennep chez deux marchands en

grains. Le premier qui était le plus riche était assis fort simple-

ment dans sa cuisine et quoiqu'il eût gagné si considérablement

de l'argent il n'avait rien changé à sa maison ni à ses manières.

L'autre faisait beaucoup plus de redondance. À midi nous

fûmes boire du chocolat chez le ministre Van Lennep. Il s'y

trouvait plusieurs personnes de la veille et aussi sa mère. Il

a encore un troisième frère qui a beaucoup d'esprit et fait

de joli vers mais dont la conduite est fort déréglée. La bibliothèque

du ministre n'est ni fort grande ni fort bien conditionnée et

je m'en étais fait une plus grande idée. Il jouit aussi d'une

jolie vue sur le Hagen. Après-dîné nous nous rendîmes à Stork

sur un chariot ouverte c'est le nom qu'on donne ici à une voiture

de paysans. À Stork nous pillâmes derechef le cerisier. Il n'y a

là qu'une fort petit pavillon. Mais cependant vingt quatre

personnes peuvent s'y asseoir à une table formée en cercle.

Mais alors la chaleur doit y être insupportable. Le reste

de la promenade se compose de viviers, entouré d'allées droites.

La cause en est que ces espèces de jardins sont faits en

grande partie pour la pêche dans ces viviers. Nous nous

retournâmes par le Weleveld où il y a un château maintenant

démoli et où l'on a les vues les plus jolies. En revenant

on passa une jolie petite église catholique au milieu de la bruyère

et l'on passe devant une maison où il y a un inscription des

plus comiques. le plus souvent dans ces chemins-ci qui

sont couverts de sable les chevaux ne vont qu'en pas et

ceci fait que souvent on peut se rendre dans un lieu

aussi vite à pied qu'en voiture.

Samedi 1 Août 1812

Nous sortîmes de fort bon matin. La première partie du

chemin conduisit premièrement à travers de la grande

bruyère et de l'énorme mer de sable qu'on trouve

ici dans les environs. Quelquefois elle est joliment interrompue

par quelques bouquets d'arbres qui entourent des habitations

de paysan. Enfin on arrive à ce bois du comte de Twikkel. C'est

ici que la scène change et l'on passe par des allées superbes

où il y a des arbres et surtout des chênes énormes tels que

l'on n'en voit point dans ces environs-ci. Le château est

à moitié modernisé. On rapproche à travers ce bois de Delden

on voit à sa gauche des maisons de paysan construites par

les ordres du comte où tout était arrangé à la manière

frisonne. On y remarquait des maisons plus nettes des

étables de bois pour les moutons. C'est aussi ici que l'on

fait du fromage ce que ne se pratique point ailleurs ici.

Delden est un des plus jolis lieux ici cependant.


pagina: 214

on ne peut pas le comparer à Almelo. Il y a il est vrai

de fort jolies maisons ici surtout celle de M. Kramer situé

hors du village mais en général il y avait aussi des maisons

fort mal bâties. On était occupé selon

les ordres du préfet à ôter le tas de fumier de devant quelques

maisons. Il y avait une foule d'auberges. Celle où nous

entrâmes était tapissée d'une foule d'estampes et je reconnus

avec plaisir le portrait de Grotius. L'église de Delden ne se

se fait pas appercevoir dans le lointain. La tour est petite

et fort basse. Nous rendâmes visite au percepteur d'Osy qui

nous avions vu à la diligence mais il avait à expédier des

paysans qui étaient si lents à payer. Ils entraient et

lorsqu'on leur disaient que le tems du payement était passée

ils s'en retournaient fort tranquillement en disant eh bien

nous attendrons. Oui diable disait Osy attendez seulement

mais premièrement vous payerez les fraix et ils s'en retournent

de sang froid... Enfin nous retournâmes passâmes encore

une partie du bois de Twikkel et vîmes une fort joli

bassin ombragé de beaux arbres. Je vis aussi une charrue

à laquelle on avait attelé des boeufs. Après que nous

fûmes sortis du bois nous entrâmes encore dans une vaste

bruyère. Il y a encore une différence ici entre bruyère (hei)

et à qu'on nomme broek. Ce dernier terrain est plus bas

et ordinairement couvert d'eau. On trouve dans une pareille

bruyère de distance en distance des lieux où la couleur

de l'herbe est plus claire où le terrain est marécageux

et où l'on peut s'enfoncer aisément. Je vis ici des chevaux occupés

à fouler de la tourbe. À mesure qu'on s'approche de Borne

la vue en est fort jolie car la tour se présente pittoresque-

ment au milieu des champs de grains et de petits bosquets.

Borne est le village le plus irrégulier que j'ai jamais vu.

Les maisons sont moins laides que dans plusieurs autres

villages mais elle sont semées pèle-et-mêle dans le

plus grand désordre de manière que ce village présente

une espèce de Labyrinthe. Le chemin de là par

le Weeleveld est fort joli. Beaucoup d'habitants étaient occupés

aux travaux champêtres. On voit aussi par-ci, par-là

des champs couverts de lin. La dernière moitié du

voyage fut le même chemin que l'on passe pour aller au

Stork. En buvant un verre de Malaga chez J. Coster je vis

passer un convoi funèbre parmi lequel les femmes suivaient

aussi rangées en paires tout comme les hommes. Le après-dîné je

fus chez van Lennep qui me montra beaucoup de curiosités

commerciales et plusieurs monoyes russes. Nous allâmes

nous promener le soir vers le Riet, jolie promenade

où se trouve une colline. Une preuve de la sécurité des


pagina: 215

habitans, c'est que nous entrâmes dans une maison

de paysans où toutes les portes étaient ouvertes et où il

n'y avait qu'un petit chien pour la garder.

Dimanche 2 Août 1812

Nous fûmes le matin à l'église. Celle-ci est fort jolie. La chaire

fort élégante est décorée par des colonnes. Les diacres

sont assis de l'un côté et les anciens de l'autre côté de l'église.

Il y a un président diacre et trois autres qui cependant paraissent

sans chapeaux pointus ou habits noirs. Le ministre lit un

sermon sur (Joan Ep. 1.v. 12-14) qui ne me plut pas singulièrement

quoique ce fut un bon sermon. La paroissiens ûont enchantés

de lui car ils n'aiment pas les peintures morales. Le service est

comme le nôtre on s'y sert des psaumes et des cantiques d'Horli.

Ce qui me frappa le plus fut de voir une femme d'un certain

âge qu'on dit avoir de l'esprit et qui même a fait de vers mais

dont l'habillement consiste dans une coiffure abominable

avec un chapeau et une redingotte d'homme coutume qu'elle

ne voudrait pas quitter pour tout l'argent du monde. La famille

fut ici à dîner et resta l'après-dîner lorsqu'on fit encore

une petite promenade sur le Dick. Le souper il y eut un énorme

pâté nommé Zuster qui doit toujours être divisé en autant

de portions qu'il y a des personnes. Chacun emmène ce qu'il

ne peut manger.

Lundi 3 Août 1812

Déjà à 5 heures nous montâmes en voiture pour faire un

petit voyage dans les environs. Le chemin à Ootmersum mène

premièrement par le Krommen Dick où se trouvent les de-

meures des blanchisseurs. Le chemin mène par des hameaux

dont le plus joli est albergent. C'est ici que l'on voit

parfaitement les modèles de dessins de van Drielst. Ces

huttes rustiques ces maisons délabrées offrent un

aspect bien plus pittoresques que les petits palais de

nos paysans hollandais. À mesure que l'on s'approche

d'Ootmersum le chemin devient plus joli, les terres

labourées plus nombreuses et le chemin plus montueux.

Nous descendîmes de voiture à quelque distance d'Ootmersum

et grimpâmes sur une hauteur d'où l'on pouvait découvrir

le château de Bentheim et Steinfurt. On voyait à ses pieds

Ootmersum qu'on n'avait point remarqué jusqu'alors.

Je remarquai distinctivement dans cette montagne deux

couches différentes, une de sable pur et l'autre d'un

terrain rempli de pierres qu'on trouve ici en

plusieurs endroits. Ootmersum fut je crois jadis une

ville fortifiée. Lors du voyage du Roi les réformés dont

le nombre était fort petit ont cédé la grande église et

le roi leur en a fait bâtir une petite très

nette. Ootmersum est une petite ville n'est pas joli.


pagina: 216

Il a trois portes et est entouré d'un fort petit fossé et d'un

sentier qu'on nomme le Buitensingel et dont l'on voit le [onl.]

des maisons fort irrégulièrement bâtis. Nous nous promenâmes

dans la belle bois qui l'environne où il y a des chênes superbes.

Le château va être démoli il était fort vaste et avait une

chapelle gothique mais tout y présentait l'image de la

destruction et Arion sur un dolphin n'offrait plus que la

faible trace d'une fontaine dont la construction doit être

facile dans ce lieu montueux. Le chemin d'ici à Noordhorn

est fort joli. Nous passâmes le Dinkel qui sert de frontière entre

le département des bouches de l'IJssel et celui de la Lippe.

Ensuite nous passâmes une branche du Vecht. L'avenue de

Noordhoorn est fort jolie. Une petite cascade causée par un

moulin d'eau offre avec quelques habitations et arbres

qui l'entourent un grouppe charmant. Cette ville est

composé en grande partie d'une seule rue. On y a gagné beaucoup

avec la contrabande. Plusieurs habitans bâtissent de

nouvelles maisons. Il y en avait une fort jolie surmontée

des statues de Mars Minerve et Mercure. Cependant il

s'y trouve aussi des maisons dignes de Rijssen et en général

il y règne un certain désordre qui fait voir qu'on est

dans un pays étranger. On voit déjà ici les affiches en

allemand, quoique les habitants parlent très bien le Hollandais.

Dans toute la ville on n'avait pu faire du pain frais

puis qu'il n'y avait point de levain. L'église est située hors

des portes de la ville. D'ici on arrive bientôt au monastère

de Fientswegen vaste bâtiment quarré jadis habité par

quarante moines et où il n'y avait pas plus de quatre

maintenant qui vendent tout jusqu'aux cheminées. Nous

entrâmes personnes ne se présenta et nous parcourûmes

seuls tout les cellules où il n'y avait plus rien que les

tableaux et autres objets de dévotion et les énormes galeries

bordées de vitres dont quelques princes firent présent au

couvert et sur lesquels ils ont fait peindre pompeusement

leurs armes et leurs titres. L'église était magnifiquement

décoré. On y voyait les cierges l'eau bénite les chaises

de confession les habits de cérémonie et un grand nombre

de tableaux et des sculptures en pierre dont une

représentant N. S. portant son crucifix était fort jolie.

Le monastère était dédié à St. Augustin dont la statue

était devant la porte. Un tableau représentait ce St.

aux pieds du sauveur. À ce convent était annexé un

jardin assez grand mais sans élégance à la fin duquel

on avait une vue sur le vecht. Les avenues qui mènent

au couvent sont des belles allés d'arbres. Enfin

après avoir encore traversé des landes on arrive à

Nienhuis: sans s'en appercevoir puisque nous croyions


pagina: 217

être encore dans les fauxbourgs lorsque nous étions

déjà entrés dans la ville puisque il n'y avait qu'une porte.

Je n'ai jamais vu de ville si triste et si maussade. Il

y a un tribunal et l'on voit les malfaiteurs dans une

maison grillée et au dessus de la porte. Cette ville était

bien plus laide que Noordhoorn. C'est ici que l'on voyait

partout les Delle et par-ci par-là les tas de fumier

devant les maisons. Nous nous informâmes envain si

l'on connaissait ici le nom de Dylius. Le chemin d'ici à Ulsen

est superbe et l'on voit des deux côtés les grains dont

quelques arpens était déjà en gerbes qui offraient des

vues superbes à cause des hauteurs qui s'élevaient des

deux côtés. À Ulsen nous descendîmes de voiture et nous

grimpâmes sur une hauteur d'où l'on jouissait du spectacle

le plus ravissant. On voyait à ses pieds une contrée fertile

où les fleurs blanches du blé noir s'entremêlaient aux

épis dorés du seigle ou aux tiges vertes du lin. D'un autre

côté on voyait le grand village d'Ulsen et la vue s'étendait

immensément loin de tous côtés. Ulsen est un grand village.

Les habitans jouissent d'une fortune aisée et sont renommés

au loin par leur honnêtteté. Il y a beaucoup de catholiques.

On traverse ensuite encore une vaste bruière et arrive

à Geesteren fort grand hameau (boerschap) où l'on a de

fort jolies vues et où les maisons sont pittoresquement

enfoncés dans des groupe d'arbres. Alors Phébus nous abandonnait

et à 10 heures nous rentrâmes à Almelo. I. H. Coster nous

avait accompagné.

Mardi 4 août 1812

Ce jour-là il plut continuellement depuis le matin

au soir. Nous fûmes à dîner chez I. Coster où hormis

la compagnie déjà citée il y avait les deux soeurs Bet et Mina.

Je vis ses dessins qui étaient fort jolis vers le soir notre

plaisir fut troublé par la convulsion qu'eut sa petite

fille. Le trouble et la convulsion régnaient partout et

on se sépara sans souper.

Mercredi 5 Août 1812

Rien de bien extraordinaire. Le soir nous allâmes

encore cueillir des cerises à Stork lieu déjà

souvent cité. Le matin j'entendis un plaidoyer au

sujet de la possession de la seigneurie d'Almelo.

Jeudi 6 Août 1812

Le matin nous fîmes encore une promenade charmante

dans les environs on va toujours des chemins inconnus

jusqu'ailleurs et l'on voit partout des tableaux

pittoresques.

L'après-dîner nous allâmes à un lieu nommé Le

Krommen Dick. Là nous visitâmes


pagina: 218

une blanchisserie et nous remontâmes beau en

bateau. Nous montâmes sur une petite colline d'où

on avait une fort jolie vue tant sur les blanchisseries

qui étaient fort étendues que sur une campagne

voisine de Mr. Schimmelpennink. Le chemin qui menait

là conduisait à travers les champs de blé. Les grains

que j'ai vus sont principalement le seigle et le blé noir,

un peu d'orge et d'Avoine et beaucoup de lin. C'est des boutons

de cette plante que vient ce qu'on nomme Graine de lin.

Ces boutons sont séparés du lin après qu'il a été pourri.

Cette graine qu'on cultive ici ne vaut pas beaucoup

car on ne la laisse jamais ici mûrir puisqu'on ne

sème que pour le profit de la plante. On sème en même

tems que le lin des carottes et quand le lin

est fauché ces carottes paraissent. Quand le seigle

est fauché on voit croître une espèce d'herbe nommé Spurrie

et lorsqu'elle est parvenue à une certaine hauteur on

y fait paître les vaches. On fait alors de leur lait une

espèce de beurre qu'on nomme Spurrieboter. Souvent après que

le seigle a été fauché les paysans sèment encore sur

les mêmes terrains des navets. Puis je vis encore un

peu de graine de choux pour la provision des paysans,

de la graine de canari et de la graine de moutarde qui

à l'égard de la fleur ressemble un peu à la graine de

choux. Le blé noir fleurit deux fois. On en envoie peu

dans d'autres provinces. On fait ici différentes sortes de

pain. Celui qu'on nommé Stoett fait de farine

de seigle épurée et sans les pelures on en

fait des pains énormes.

On cultive ici presque tous les légumes qu'on a à

Amsterdam les sèves sont plus grandes. Le choux-fleurs

seul doit être acheté.

Le boeuf est excellent mais le veau ne signifie pas trop.

Sur la fin de l'année chaque famille

tue un boeuf dont on mange presque toute l'année.

On s'invite réciproquement pour manger les grands

morceaux. Dans l'hiver c'est aussi la saison pour

manger le porc les perdrix les lièvres les canards

et les chapons. J'ai mangé une espèce de coqs fort

petits qu'on nomme crabbedine.

On boit presque toujours de l'eau et du vin. La bière

n'est pas du tout recherchée et aussi ne la fait on

jamais émousser.

Les maisons de paysan qui sont à l'ordinaire fort

délabrées sont fort vastes. À l'un côté on a une

espèce de trou en terre dans lequel on fait du feu


pagina: 219

pour faire bouillir la marmite. Autour de ce feu

presque toute la famille est rangée. Plus loin est

l'étable aux vaches. Les paysans

déjeunaient jadis avec du café mais maintenant

ils prennent de la bouillie de lait de beurre karnemelkse-

pap.

Les voitures dont on se sert ici sont fort légères et

pareils un halvekap avec un voorkap de bois. On

peut fermer de tous côtés avec de petits rideaux. Deux

chevaux tirent cette voiture si loin qu'on le veut.

Lorsque la compagnie est plus nombreuses on se sert

de ce qu'on nomme une voiture ouverte. Ce n'est qu'une

voiture de paysan.

On ne fait pas de fromage ici on met le foin dans

des granges au lieu de l'entasser comme en hollande on

le vend ici par charriot tandis que là on le vend

p. 100 Livres.

Lorsqu'on parle ici des fabriques il ne faut

pas se figurer des vastes établissemens où les ouvriers

se réunissent. Chaque fabriqueur a des tisserands qui

travaillent pour lui il leur fournit le fil ou le coton

et c'est à leur maisons qu'ils travaillent et ils apportent

ensuite ce qu'ils ont fait et reçoivent une paye

fort modique. Vers la fin de l'année chaque fabriqueur

va avec des tisserands à Ootmarsum pour le marché du

fil. C'est là que chaque paysan apporte sa provision.

Les fabriqueurs emportent avec eux un grand

sac dans lequel ils jètent tout le fil à mesure

qu'ils l'achètent, on paye toujours argent comptant.

Almelo a acquis beaucoup plus de considération depuis

quelque tems. Elle fut toujours nommée Stede mais

Oldenzaal était effectivement la capitale de ce quartier.

Mais par la session du tribunal dans cette ville elle

est en quelque sorte devenue la capitale au grand

dépit des Enschedeens et Oldensaaliens. Ces derniers

après avoir fait une collecte avait envoyé une

députation à la Haye avec cet argent pour faire

décider la choix en leur faveur. Il toujours règne

une certaine émulation entre ceux d'Enschedé et

d'Almelo. Les premiers ont des moeurs beaucoup plus

libres et vont tous les jours à la société (societeit), mais

ceux d'Almelo n'y vont qu'une fois par semaine

le samedi. On projette maintenant d'ériger un

nouveau bâtiment. Ceux d'Almelo sont en général

fort religieux tant les mennonites que les protestans.

Il y a beaucoup de juifs ici qui ont une synagoge.

Les écoles des paysans ici dans les environs sont

des petites tours quarrées situées sous les arbres.


pagina: 220

Il y a une ici école où l'on apprend les langues

savantes et aussi les langues modernes sous un

Rector.

Pour en revenir à notre promenade nous nous en

retournâmes par un joli chemin nous nous rendâmes

au Dick car outre la longue allée que nous avons

déjà mentionné ce Dick est entouré par de fort jolis

chemins. Il y avait une colline dont la beauté était

diminuée par les arbres qu'on y avait abattus. De fort

jolis sentiers conduisent à travers les bosquets.

Quant aux bateaux je dois encore remarquer qu'on

les conduit ici avec de longs bâtons comme dans

les canaux d'Amsterdam et pas avec des rames à

cause du peu de profondeur et de la largeur des petits

fossés ou rivières qu'on traverse.

C'était ici une coutume jadis dont on n'osait déroger

d'instituer des conditions à table pour chaque classe de

personnes et chaque rang et malheur à ceux qui

oubliaient de donner à quelqu'un son rang accoutumé.

Mais cette mode commence à passer.

La vie est beaucoup moins chère ici qu'à Amsterdam.

Pour f 2000 on peut très bien vivre. Aussi les petites

dépenses sont-elles moindres. Mais les habitans calculent

les habitans calculent que les légumes qu'ils

cultivent eux-mêmes coûtent plus que comme

on les achète à Amsterdam. Étant dans l'auberge à

Vriesseveen nous eûmes 7 verres de lait, 3 bièrres

3 morceaux de pain de seigle et 3 biscuits pour un

Zesthalf. Ce n'est pas [onl.] dispendieux pour avoir ci une

voiture on en est quitte pour quelques centaines de

florins. Les habitans ont des campagnes mais qui

ne leur coûtent rien car ce ne sont que des petits pavillons

bâtis près de la maison d'un paysan qui en a la surveillance

et où il ne se trouve qu'une table des tasses et

quelques méchantes chaises.

Quant aux médecins on n'a pas trop d'estime pour eux

et on aime assez à se traiter soi-même il n'y pas

beaucoup de malades. Je vis encore l'autre jour un

paysan ramassant des cerises et qui avait

encore fort bonne mine. Cependant il comptait déjà 82 ans

et ce n'était rien de fort extraordinaire. On donne pour

chaque visite d'un médecin 6 sous et d'un chirurgien

3 sous.

Une autre coutume nationale ici c'est qu'à table

après la prière chaque cavalier donne un baiser à

la dame qui est à ses côtés.

De grande crimes tels que le vol le meurtre etc. se

commettent fort rarement ici.


pagina: 221

enc. des pommes de terre.

Vendredi 6 Août 1812

Ce matin nous fîmes une très jolie promenade au

Vissschers Dijk. Elle était fort variée. Après-dîner nous allâmes

dans une voiture ouverte sous la direction du paysan

Theof. Premièrement nous traversâmes le chemin qui

mène à Beverdam et ensuite une partie de la bruyère

jusqu'à Wyrden. Ce village est souvent comparé avec Rijssen.

Cependant j'y trouve les maisons plus jolies, plus vitrées

et plus ressemblantes enfin aux chaumières hollandaises.

Après ce village nous eûmes encore de très jolies vues

sur de beaux champs de blé et nous arrivâmes au

Hekrel. Là se trouvent plusieurs maisons de paysans.

En passant nous vîmes une hauteur qu'on me dit être

un de ces fameux Hunnebedden si connus en Drenthe.

Nous vîmes aussi dans le lointain des contrées composées

de terre de tourbe qu'on à brûlées et sur lesquelles

on a ensuite semé avec succès du blé noir. Je remarquai

que l'avoine fauchée et rassemblée dans de petits tas

nommé knoppen tandis que le seigle est entassé en

grandes gerbes. Une autre chose remarquable du Hekrel

c'est le nombre infini de pierres de toute espèce qu'on y

trouve et qu'on suppose être les restes d'une ancienne

révolution du globe. Près de la maison du paysan il

y avait un puits immensément profond. Ces paysans

ici, contre l'ordinaire ont des très grands troupeaux

de moutons. Autour de ce Hekrel il y a quelques allées

d'arbres et deux beaux hêtres qui se font remarquer à

une grande distance mais en outre c'est situé entièrement

au milieu de la Bruyère. Nous nous retrouvâmes par

Vriesseveen, village dont j'ai donné la description plus

haut. Nous y vîmes des chariots tirés par des boeufs et

même un moulin où un cheval et un boeuf tiraient

ensemble. L'église de Vriesseveen est très jolie

et construite en 1801 mais on n'eut pas alors l'argent

pour refaire une tour mesquine et grossièrement faite

de bois qui dépare l'église. Les habitans de Vriesseveen c'est

à dire les communs car il y a plusieurs personnes très

riches diffèrent non seulement de leurs voisins

par la langue mais aussi par les moeurs. Ils sont

amateurs passionnés du genièvre et en boivent à

outrance. Aussi les voit-on presque toujours ivres.

Revenus chez nous nous entendîmes dans l'église

musique funèbre et l'enterrement de Mad.

Bruins. Il y avait beaucoup de monde mais

la cérémonie ne fît aucun effet du tout.


pagina: 222

Samedi 7 Août 1812

Nous allâmes hier en bateau premièrement à Hidschel

où nous communiâmes notre pêche dans les viviers

droits qui entouraient cette petit domaine de Mr. v. Lennep

mais nous ne prîmes que des petits poissons. Nous continuâmes

notre route vers Beverdam. Le chemin est assez joli. On voit

la campagne de Beeklust en passant. Arrivés à Beverdam

nous continuâmes notre pêche qui ne fut guerre plus productive

et nous passâmes ce jour là fort gais et retournâmes vers le

soir.

Une singulière coutume était établie ici il y aune vingtaine

d'années. C'étaient les repas funéraires. À peine quelqu'un était-

il mort que toute la famille était invitée. Les dames prenaient

tout de suite place à une table sur laquelle était sept grandes

cafetières à trois robinets. Les messieurs mangeaient des pains

énormes avec du fromage mais sans beurre. On faisait ensuite

un dîner où tout était présenté avec la plus grande profusion

et dont le aanspreker avait la direction. La plus proches

parens assis au haut de la table ne s'occupaient aucunement

du reste de la compagnie qui ne s'attachait qu'à bien manger

et boire. On versait du vin blanc en abondance.

Dimanche Août 1812. Lundi. Mardi.

Le matin nous fûmes à l'église où nous entendîmes le

ministre Rustburg de Hengelo qui prêcha très bien quoiqu'il

eût un accent désagréable et une élocution difficile.

Nous dînâmes chez le grand papa. Les jours

suivans furent employés à des visites et à des promenades

dans les environs et à une partie à Strokke.

Jeudi 13 Vendredi 14 Samedi 15 Dimanche 16 Juillet

1812

Déjà longtems on avait médité le plan du voyage à

Bentheim et Steinford enfin il fut mis à exécution. À 5

heures du matin nous sortîmes pleins de courage de

la ville d'Almelo où tout était encore plongé dans

les bras de Morphée. Nous étions trois Van Lennep Gerard

et moi. Nous passâmes premièrement une partie du

chemin qui mène à Storck mais bientôt tournant

à gauche nous vîmes le délicieux Weleveld nous passâmes

par des champs de blé où croissait le Huttentot espèce

de graine dont on fait aussi de l'huile. Nous atteignîmes

enfin le lac de Saasveld plage d'eau assez étendue


pagina: 223

et poisonneuse. Nous vîmes dans le lointain l'ancien

château de Saasveld célèbre par son antiquité et l'épaisseur

de ses murailles. Enfin après avoir côtoyé le lac

nous arrivâmes sur un chemin ouvert qui menait

tout droit à Oldenzaal dont on peut distinguer déjà la

tour à une distance de deux heures et ceci fait croire

qu'on est plus près de la tour qu'on n'est en effet.

Nous arrivâmes à Oldenzaal. Cette ville est petite comme

celle d'Ootmersum a pareillement des portes misérables

mais il s'y trouve pourtant plus de jolies maisons.

Elle compte parmi ses habitans des gens fort riches.

Après nous avoir restauré à une auberge qui ne

valait pas trop nous allâmes voir l'église cathédrale.

Cet énorme bâtiment gothique surprend la vue. Premièrement

c'était en avant la révolution, les réformés à qui la desservait,

mais comme elle était beaucoup trop grande pour le

petit nombre de cette secte qu'il y avait ici, ils l'ont cédé

aux catholiques lors du voyage du roi. Cette église est

très vaste et était à présent très bien décorée à la

manière catholique. Il y avait trois grands autels dont

un de marbre. C'est peut-être la plus belle église catholique

qu'il y a dans les 7 provinces. L'église réformée est bâtie

avec beaucoup de goût et est charmante. Au reste il

n'y a pas plus de chose remarquables dans cette ville

à moins qu'on ne veuille ranger dans ce nombre une

énorme pierre (keisteen placée au milieu du marché

creuse en haut et dont on raconte qu'elle a

servi pour des baptêmes. En sortant à Oldenzaal nous

traversâmes un très beau bois et passâmes le Dinkel

sur le pont près du quel notre compagnon de

voyage avait failli se noyer l'année passée. Nous

entrâmes dans le Poppen la plus misérable auberge

que j'aie vu de ma vie et dans laquelle l'oncle de

Vos fut si mal régalé. Après cela on va un chemin

souvent fort joli jusqu'à Gilhuys. Ce village

assez grand est divisé en deux parties. Nous nous

arrêtâmes sur une colline près du

moulin de Gilhuys et de là on avait la vue

la plus superbe et la plus étendue. D'un côté on

voyait le village lui-même, d'un autre côté de vastes


pagina: 224

champs de blé dont une partie était déjà liée en

gerbes. Là on voyait le château de Bentheim là dans le

lointain des bois, enfin c'était une vue ravissante.

Près de Gilhuys nous parvîmes aux carrières de pierres

de taille, connues sous le nom de Bentheimer steen.

Tout ce sol est du rocher et on a déjà creusé jusqu'à

une très grande profondeur. Descendus dans un de

ces gouffres de pierre nous ne voyions rien autour

de nous que des pierres et les sommets de quelques arbres

de manière qu'on n'aurait pas cru se trouver alors dans

les campagnes de la Hollande mais dans de vastes déserts.

Cette pierre est plus fine dans quelques endroits que

dans d'autres. Nous y vîmes travailler des gens. Ils font

premièrement une ouverture sous le morceau de

pierre qu'ils veulent arracher. Là ils posent leur coin

qu'ils frappent avec des lourds marteaux de pierre avec

des manches consistant en un petit bâton fort élastique.

Je n'ai jamais vu une vue aussi singulière. Après

être remonté les rochers nous arrivâmes par un chemin

fort joli et fort diversifié à Bentheim dont je m'étais

formé une idée plus brillante. Cette ville n'est pas plus

jolie que plusieurs villages d'Overijssel mais située d'une

manière fort singulière. Premièrement lorsqu'on entre

dans la ville il faut faire une grande montée et

l'on arrive aux pieds du château. De là on voit

les maisons situées à quatre hauteurs différentes

de manière que le toit d'une maison correspond souvent

au rez-de-chaussée de l'autre. Toutes les maisons sont

posées sans fondemens sur la pierre car toute cette

ville n'est située que sur un rocher. C'est sur la partie

la plus élevée de ce rocher que le château a été bâti. C'est un

bâtiment dont les tours élevées et les énormes

murailles annoncent d'abord l'antiquité. Mais

on voit tout de suite qu'il a été renouvellé plusieurs

fois et ce n'est que le côté gauche occidental qu'on

pourrait regarder comme le plus ancien et dont

on veut faire remonter l'origine jusqu'à Drusus.

On y voit aussi une inscription latine mais effacée

et dont on ne peut lire que quelques mots. C'est aussi

là que l'on voit cette énorme compilation de

rochers et cette vaste quartier de pierre qu'on nomme

(het duivels oorkussen). Nous entrâmes dans la cour

du château sous l'égide d'un vieux soldat

prussien en uniforme rouge. Nous vîmes d'abord les


pagina: 225

ravages suites du siège que les français ont fait

essuyer à cette place. Quelques ailes étaient tombées

en lambeaux et notre guide nous disait avec ostentation:

da war die fürstliche Küche da das Concert tandis

que nous n'y vîmes rien que des morceaux de ruine. Une

partie du château est restée intacte mais comme

il n'y avait rien de remarquable à voir nous n'y en-

trâmes pas. Une des tours n'avait pareillement rien

souffert. L'autre tour ravagée par le feu des ennemis

avait été maintenant couvert d'un toit ressemblant

à celui du Panorama d'Amsterdam pour empêcher

sa destruction totale. Il nous fit entrer dans une

cave jadis le séjour des prisonniers d'où s'exhalait un

miasme infect. C'était là dit-il que les officiers se

retiraient lors du siège. Il nous fit voir ensuite un

puits énormément profond car il fallait un très

long espace de tems pour faire remonter l'eau puisée.

Après cela nous montâmes sur la tour d'où nous

avions une vue superbe sur Bentheim et ses environs

à cause de l'élévation du rocher sur lequel le château

est situé. Enfin ce château présente en effet une

vue imposante et est digne de l'admiration des voyageurs.

Sur la pente du rocher de l'autre côté se trouve un

joli bosquet. On voit pareillement sur le roc un vivier.

Nous allâmes ensuite nous promener dans le bois. J'en

ai vu de plus jolis. Il y a de beaux arbres mais la

plupart n'étaient pas fort élevés. Ajoutez à cela la

difficulté d'y marcher car le terrain avait été amolli

par les pluies et l'on s'y enfonçait à chaque moment.

Nous vîmes la source d'eau minérale qui se trouve

au milieu du bois. Déjà à quelque distance on sent

une odeur insupportable qui ressemble à celles d'oeufs

pourries. La source dont le goût est détestable est entourée

d'un petit bâtiment en pierre couvert d'inscriptions

latines qui attestent l'effet miraculeux de cette eau

surtout contre le scorbut. Il y a aussi encore dans ce

bois une pyramide mais je n'ai pu remarquer

en honneur de quoi elle fut érigée. Voilà les principales

particularités de Bentheim. Après cela nous rentrâmes

dans l'auberge appellée le cheval blanc où nous

eûmes un souper et un coucher excellens.

Le lendemain nous recommençâmes de bonne heure

notre course et marchâmes vers Olme. Premièrement

nous eûmes un chemin où l'on avait des

vues fort jolies sur la ville de Bentheim. Ensuite


pagina: 226

on descend et on arrive par un chemin ouvert à Ohne.

La position d'Ohne est assez jolie mais la ville elle-

même est très laide et on y voit des maisons détestables.

Lorsqu'on a passé les environs cultivés on entre dans

une énorme bruyère où l'on ne voit que quelques

troupeaux de moutons et une maison de paysan où

l'on nous indiqua le chemin que nous devions suivre

pour nous rendre à la saline de Rheine. On trouve

en chemin un petit bois charmant. Nous nous arrêtâmes

dans une auberge où tout respirait la malpropreté.

Enfin nous atteignîmes la saline. On nous fit voir

premièrement la fabrique elle-même on y voyait leur

salée mise dans des cuves énormes qu'on chauffait jusqu'à

ce qu'enfin toutes les parties aqueuses fussent évaporées

et qu'il ne restait plus rien que le sel crystallisé. On

a ici quatre espèces de sel. C'est avec les charbons de

pierre d'Ebenbukner qu'on allume les grands feux

qui doivent toujours être entretenus. Le sel doit être

trois ou quatre jours dans ces cuves avant d'être crystallisé.

On voit le sel se condenser sur la surface de l'eau et

enfin devenu plus pesant à enfoncer au fond. Toutes

ces cuves sont de fer. Déjà on nous conduisit à une énorme

bâtiment long de 1100 pieds. Là l'eau premièrement

conduite au pied de ce bâtiment est pompée en haut et

là elle retombe en filtrant entre du bois (takkenboschen).

Dans cette chute les parties d'eau douce s'évaporent et

on répète cette opération jusqu'à ce que cette eau soit

enfin assez purifiée pour être mise dans les cuves. De là

nous allâmes au puits d'où on pompe cette eau et qui

est très profond. Deux hommes qu'on fait descendre au

fond du puits y sont continuellement occupés à travailler

pour débarasser le cours de l'eau salée. Ils n' y

restent jamais plus que quelques heures. On leur

fait parvenir de air frais par un énorme soufflet.

Le soufflet ainsi que toutes les pompes sont mises

en mouvement par une roue énorme. L'eau qui met

cette roue en mouvement est un petit canal fort

calme mais là on le réserve et il se précipite

avec une force violente et fait tourner la roue.

Après avoir visité ceci qui est vraiment intéressant

nous côtoyâmes le petit canal et arrivâmes bientôt

à Rheine. Cette ville est arrosée par l'Eems, rivière

qui a beaucoup de courant: on a construit une espèce

de digue au milieu de la rivière mais lorsque l'eau


pagina: 227

est haute elle la dépasse ce qui forme une chute de

quelques pieds. Cette même eau fait tourner alors

des deux côtés de la rivière un moulin d'eau.

Cette vue en effet était charmante et me frappa

beaucoup. On trouve ici aussi des rochers mais d'une

tout autre pierre qui tient plus de l'ardoise. Après

avoir suffisament admiré ce spectacle nous

entrâmes dans Rheine petite ville assez jolie en

comparaison des autres que nous avions vues. Nous

nous arrêtâmes dans une auberge fort joliment décoré

d'où l'on regardait une espèce de place et une maison

de ville le plus misérable réduit qu'on puisse voir.

Après nous y être rafraîchis et avoir bu une bouteille

d'un vin qu'on nomme ici vin du rhin et qui est très

bon pour calmer la soif nous continuâmes notre

marche. Le chemin d'ici à Nijkerk est ravissant on

va sur des hauteurs d'où l'on a une vue superbe

sur des champs magnifiques. Une des singularités que

je remarquai ici et qui me fit reconnaître que j'étais

dans un pays étranger furent les crucifix que je rencontrai

partout sur le chemin aussi qu'une petite chapelle

de pierre où l'on pouvait entrer pour prier. Il y avait

une autel et une statue de la vierge. Nijkerk quoique

ce ne soit qu'un village renferme pourtant de plus

jolies maisons que la plupart de ces petites villes.

Elle est principalement habitée par des marchands

en toile et linge. Après être entré dans une maison

dont la puanteur nous fit sortir. Nous entrâmes dans

une auberge où tout était fort à notre gré. Nous

dûmes cependant traverser une bruyère fort vaste

jusqu'à Steinfort. On avait cependant de tems en tems

de fort jolies vues sur une montagne cultivée, située

près de Steinfort. Enfin nous vîmes cette ville devant

nous dans une vallée. La première difficulté qui s'y

présenta fut le choix d'une auberge pour la nuit.

Nous étions déjà entrés dans l'éléphant mais une

apparence de malpropreté nous en fit sortir et

un mauvais génie nous inspira l'idée d'entrer dans le

Soleil. La vue depuis l'auberge était rien moins

qu'agréable ainsi malgré nos fatigues nous résolûmes

d'aller encore nous promener au [onl.] qui nous

frappa extrêmement par la beauté des sites. Surtout

la majestueuse nappe d'eau qui entoure les charmantes

îles de cette campagne nous ravit.


pagina: 228

Nous eûmes un mauvais souper rendu encore plus

désagréable par la compagnie de quelques français et allemands[?]

et nous couchâmes dans une chambre où la crasse était

jusques sur les murailles. Ce fut surtout le lendemain

que l'extrême malpropreté de ce lieu nous frappa et

nous fûmes bien aisés d'en être sorti. Nous entrâmes

dans le [onl.] dont nous fîmes le tour sous la conduite

d'un [onl.] de son excellence. Tout était fort bien

entretenu excepté les fontaines. Nous vîmes premièrement

deux bâtimens entièrement bâtis dans un goût chinois

ensuite la salle du concert qui est décorée avec beaucoup

de goût. L'église ornée d'une inscription tirée de Feith.

La chaire est soutenue par un ange. Après cela nous

fîmes le tour des îles dans une petite barque et

nous traversâmes cette nappe charmante d'eau. Il avait

une île on se trouvait une petite maison avec tout

l'attirail d'un pêcheur un rocher sur lequel se trouve

un vaisseau d'où jaillissait jadis une cascade enfin

des choses charmantes. Outre cela le bois rempli de

beaux arbres était partout arrangé avec goût et

on avait des vues superbes. Sur la fin on voit une roue encore

dont le diamètre est de 104 pieds elle servait jadis pour

faire monter l'eau jusque dans une tour qui occasionnait

une fontaine superbe. On voyait aussi un part de chaînes

comme il y en a en Suisse. Une grotte charmante

dans le milieu de laquelle était un bassin d'eau.

C'était un lieu charmant pour s'y retirer dans

la chaleur de l'été. Après avoir examiné à loisir

les beautés de ce lieu enchanteur nous nous arrêtâmes

à une auberge située au milieu du bois où nous

eûmes un déjeuner délicieux. Après cela nous retournâmes

vers la ville construite assez régulièrement. Le château

n'a pas beaucoup d'apparence et je ne crois qu'il

compte une haute antiquité. Après cela nous vîmes

le museum du comte et je n'ai jamais vu rien de

si misérable. Il y avait de tout et il n'y avait rien.

Des collections de misérables tableaux de médailles,

de coquilles et de diverses singularités, mais rien

qui eût aucune valeur. Les coquilles étaient encore

ce qu'il y avait de plus beau. Et il y avait [onl.] chambres

remples du haut en bas. Ajoutez à cela qu'il s'y trouvait

des cochonneries en grand nombre et que tout était

bien mal conservé. C'était un petite garçon qui nous

étalaient avec beaucoup de pédanterie ces prétendus

trésor.


pagina: 229

C'était ce jour-là la fête de St. Napoléon. Nous voyions

de tous côtés les femmes se rendre à l'église avec leurs

bonnets brodés, leurs manches larges et leurs deux

jupes rouges dont celle de dessus était élégamment

relevée. Après deux heures de marche nous atteignîmes

Metelen petite ville assez jolie. Nous entrâmes dans

une auberge nommée l'aigle. Ce n'était que de chez des paysans

mais tout y respirait la propriété hollandaise et je n'oublie

jamais le bon accueil que nous y reçûmes. Après cela

nous eûmes à traverser dans une chaleur ardente un

chemin de trois grandes heures depuis ici jusqu'à Gronau.

C'était une vaste bruyère quelquefois interrompue par

des maisons de paysans cachés entre des arbres touffus.

On voyait toujours dans le lointain quelques arbres

mais lorsqu'on les avait atteints on voyait devant soi une

nouvelle lande. Je remarquai ici beaucoup de bouleaux

et même des bouleaux pleureurs. La seule plante qui

croisse dans ces bruyères est la baie dont on fait

le genièvre. À moitié chemin nous nous reposâmes

dans une chaumière de paysan. Tout y respirait le

contentement et l'aisance. La famille à dîner autour

de la table mangeait une soupe au lait avec des légumes.

Il y avait une jeune paysanne assez jolie en corset vert

et jupe rouge. Ce costume ne lui allait pas si mal.

Nous ne fîmes que traverser Gronau à cause de l'impa-

tience que nous avions à atteindre enfin un lieu de repos.

Nous le trouvâmes au Glanerbrug. Le pont n'est qu'un

passage sur un fossé qu'on pourrait presque franchir

d'un saut. L'auberge de deux étages est un joli bâtiment

et le verre à la main nous y prîmes congé du département

de la Lippe. Ensuite nous allâmes vers Enschede à travers

de la plus vaste des bruyères que j'aie vu jusqu'ici. Enschede

est en effet une petite ville très jolie mais il n'y a point

d'environs du tout et les habitans ne peuvent

faire un pas hors de la ville sans être au milieu d'une

lande aride. Enschede s'est beaucoup accru depuis quelques

années aussi y a-t-il de maisons situées hors

des portes comme la jolie maison de Mr. Flok à qui

je rendis visite. Une des portes a été construite il y a

peu d'années et a coûté beaucoup d'argent. Ce sont

deux colonnes de pierres rondes et on y lit l'inscription

orgueilleuse S.P.Q.E. Enschede m'a beaucoup plu. Il

y a de très belles maisons entr'autres celle de M.

Blijdenstein qui ne déparerait pas la plus jolie

partie du Keizers où Heeregracht. Enschede est


pagina: 230

beaucoup plus bâtie dans le dessein d'en faire une

ville qu'Almelo. Le soir nous entrâmes dans le sociteit.

C'est un bâtiment que les Enschedeens ont fait construire

à leur fraix et qui est bâti avec beaucoup de goût

et fait un fort joli effet quoiqu'il ne soit que d'un étage.

Il y a deux chambres fort grandes et bien meublées

l'une pour jouer au billard l'autre pour faire des

parties ou lire des papiers publics. Les habitans s'y rendent

toutes les soirs et leurs épouses ont leurs cercles à part

ce qui détruit tout commerce amiable entre les deux

sexes. C'est aussi la cause que ceux d'Enschede sont

encore bien moins avancés dans la civilisation que ceux

d'Almelo et même leur accent est beaucoup plus grossier

et plus plat. Ce soir tout Enschede était en combustion

pour une misérable illumination de la maison de

ville et les rues étaient pleines de bruit. Le lendemain

après avoir fort bien soupés et dormis dans le Roskam

nous atteignîmes Hengelo après deux heures de marche.

C'est un joli village. La rue est fort large et présente

un aspect agréable. L'église réformée est située hors du

village. Après cela laissant Borne à notre droite

nous retournâmes dans des contrées plus connues

et revîmes enfin les amis à Almelo où nous arrivâmes

avant le dîner.

Nous nous étions amusés supérieurement bien dans

ce petit voyage et chacun après qu'on eut calculé tous

les frais avait dépensé f 7.10.

Lundi 17 Août 1812

Ce fut un jour de repos. J'écrivais mon journal et je

fis le soir deux promenades charmantes. Je fus chez

Mr. Hofkens. C'est un vieux métromane mais pourtant

homme d'esprit. Il me cita des vers à tort et à travers

j'en fis autant ce qui donnait un conflit fort

comique. Il citait surtout Voltaire et le roi de Prusse.

Mecredi 19 Août 1812.

Depuis longtems j'avais nourri le désir de voir le berceau

de la bonne Geertrude de Goor que j'avais tant de fois entendu

citer et que je m'étais toujours figuré comme un lieu

très remarquable. On remplit mes désirs et à 7 heures

nous montâmes en voiture et traversâmes encore le hei

ou broek espérant de pouvoir aller le chemin dicté.

Mais il était beaucoup trop rempli d'eau

et nous dûmes prendre celui d'hyver qui était beaucoup


pagina: 231

plus long. Nous continuâmes toujours notre chemin

quoique nous nous fussions apperçus que notre cocher n'y

entendait pas grand chose quand tout à coup un paysan

à qui nous demandâmes de nous indiquer le chemin nous

dit que nous n'étions pas sur celui de Goor et nous

remit sur le bon chemin. On ne voyait partout aucune

habitation. Enfin nous arrivâmes à une misérable

cabane. Les dames qui avaient soif demandèrent du lait

mais la vue du verre qui peut-être n'avait pas été rincé

dans quelques mois les dégoûta bientôt. Nous traversâmes

enfin quelques bosquets ce qui nous consola un peu de

la longueur du chemin et à force d'interroger les paysans

nous vîmes enfin Goor dont nous traversâmes la moitié.

Quoiqu'on en puisse dire je n'ai pas trouvé Goor si laid

que Rijssen où d'autres villages. Il y a des maisons assez

jolies mais il faut aussi confesser qu'il y en a d'autres

qui tombent entièrement en ruines et où il n'y a

plus ni portes ni fenêtres. Le village consiste dans une

rue extrêmement longue. On voyait bien que ce

village ne recevait pas souvent des visites d'étrangers

car tous les gens ouvraient leurs portes pour nous regarder

et nous saluèrent profondément. Mais c'était au Renkum

que nous voulions être et nous tournâmes à gauche

et passâmes à travers de fort belles allées d'arbres. Le

cocher n'était pas orienté dans ces lieux là et nous

croyions ne jamais arriver au but de notre voyage

quand nous vîmes enfin le Molleken. C'était le nom

d'une petite auberge de paysans fort agréablement située

près d'un petit moulin à eau. Nous descendîmes de voiture

et marchâmes droit vers le Nienhuis pour voir du moins

quelque chose. C'est la campagne du comte Schimmelpenninck.

Nous y errâmes quelque tems car le garçon

paysan qui devait nous servir de guide nous

abandonna tout à coup. Je ne puis pas dire que dans

la partie de la campagne où nous nous promenâmes

il y eût rien bien frappant. Une très grande

avenue d'arbres mène au château bâtiment

moderne qui ne présente rien de fort brillant. À 6

heures nous étions arrivés à 7 heures nous remontâmes

en voiture et nous nous retournâmes par le

Werdam aussi un château noble comme il y en a ici

plusieurs qui servent à embellir les environs de

Goor. Ce ne fut qu'à onze heures et demie que nous vîmes


pagina: 232

mettre fin à l'inquiétude de nos amis d'Almelo.

Jeudi 29 Août.

Je veux donner une description de la partie que nous

eûmes à fin qu'on puisse juger de là quelques coutumes d'Almelo.

C'était au Meulerie campagne de Mr. J. Coster que nous

fûmes invités. L'on sait assez par les descriptions précédentes

ce qu'on entend d'ici par une campagne. Celle-ci est composée

d'un grand nombre de viviers entourés de sentiers droits.

Après que nous eûmes satisfait aux besoins de la

nature on se mit à pêcher c'est à dire l'on met de l'un

côté du vivier une toile en l'eau et l'on tire jusqu'à ce

que l'on soit arrivé à l'autre côté. Là on tire à soi

et l'on recueille les poissons. Ceux qu'on veut pêcher sont

des brochets qu'on a premièrement jeté dedans. Notre

pêche fut très modique quoiqu'on pêcha jusqu'à quatre

ou cinq fois. Cette besogne fait les messieurs lavent

et coupent eux-mêmes le poisson et même chez quelques-

uns ce sont eux qui le cuisent. Ensuite l'on se met

à table et mange ce poisson ou un morceau de schenkel (jambe).

L'après-dîner nous fûmes fort gais.

J'ai oublié de parler du mecredi avant notre voyage nous

fûmes au Stork tout le jour. Mr. L. Koster y était avec

ses deux filles. Julie est fort aimable. Nous

mangeâmes des cerises à tort et à travers et nous dînâmes

pressés dans cette coupole dont j'ai parlé plus haut.

Je veux à présent rassembler encore quelques remarques

générales sur Almelo.

Quoi qu'on puisse dire, je n'ai point vu depuis mon départ

de lieu où je demeurerais plus volontiers qu'ici. Cette petite

ville a des maisons dignes d'une ville et des environs dignes

d'un village. Elle consiste principalement dans un longue

rue à l'entrée de laquelle se trouvent quelques

maisons vieilles et laides mais qui à mesure que l'on

s'avance devient plus large et plus belle. Plusieurs

maisons ne sont que d'une étage et ont des façades de bois

ce qui ne produit pas un fort joli effet. Les plus hautes

sont de deux étages, telle est celle de mon hôte une

des plus jolies maisons d'Almelo. Toutes les maisons ont

derrière elles un jardin plus ou moins grand. P.E.

M.J. Koster en a un qui est fort grand et qui renferme

beaucoup d'arbres fruitiers. Outre cette grande rue

qui est très longue il y a encore beaucoup de rues

de traverse tels que le Plas le Doelen le Schalderooi,

Charles Roi et puis un assemblage de quelques

maisons fort laides où l'on trouve des juifs des

filoux et des catins.


pagina: 233

Tout les jardins des maisons situées de l'un des côtés de la grande rue

aboutissent à une fort jolie allée nommé le Hagen. Ils en

sont séparés par une petite rivière qu'ils traversent tous

par des pont-levis. Ceux de l'autre côté de la ville ont

depuis leurs jardins des vues assez jolies sur des blan-

chisseries.

L'église est un joli bâtiment ainsi que la tour. En outre

il y a une maison de ville. C'est un bâtiment qui ne

signifie pas trop. Un des côtés est approprié pour une

prison et on a bouché grossièrement les fenêtres avec des planches.

Sur le chemin du Diek il y a un bâtiment qui a déjà

servi d'hôpital et de salle de spectacle.

Almelo compte environ 2300 à 2400 âmes.

On bâtira incessamment un bâtiment pour les sessions du

tribunal.

Lundi 24 Août 1812

Hier je fus ici dans l'église reformée. Le ministre Lulofs prêchait

dans une manière tout à fait populaire quoique non dépourvue

de bon sens. Comme après le sermon plusieurs gens se retiraient

il dit 'Ik heb zoo lang niet gepreekt menschen of gij kunt

nog wel eenige minuten in de kerk blijven.' Personne n'osa

sortir.

L'église est un joli bâtiment. Elle est bâtie en croix (kruiskerk)

sans aucune colonne. Il y a un mausolée des comtes de Rechteren.

Avant la révolution de 1795 ces comtes de Regteren avaient

ici des privilèges excessifs. Ils avaient autorité souveraine

et le droit de vie et de mort. Ils étaient seigneurs

comme l'on disait, de l'eau et du vent ce que veut dire que

personne n'osait moudre ou pêcher sans leur permission.

Ils avaient aussi seuls droit de chasse ce qui faisait que

les lièvres se multipliaient d'une telle manière qu'on

les voyait souvent dans les rues d'Almelo. Et si quelque

pauvre paysan tuait quelqu'un de ces animaux qui

ravageaient ses terres il était fouetté ou marqué.

En 1795 tous ces privilèges ont été abolis. Cependant ces

seigneurs de Rechteren possèdent encore ici de grand

biens de terre où se trouvent des paysans

fort aisés puisque la ferme qui est établie depuis beaucoup

d'années est beaucoup plus basse que celles d'autres

fermiers. Il y a beaucoup plus de maisons à Almelo qui

leur doivent un hommage p.e. l'une trois sous et demi

l'autre un cent d'oeufs etc. Le testament de la derrière comtesse portait

que l'aîné de ses fils posséderait la seigneurie d'Almelo

et de Vrieseveen pourvu qu'il cédât à ce cadet le somme

de 100.000 et qu'en cas qu'il refusait de payer cette somme il

pourrait céder cette seigneurie au cadet qui lui donnerait

les f 100.000. L'aîné ne veut point le céder, ni peut se procurer

l'argent et le cadet veut qu'il se décide et donne

ou l'argent ou la seigneurie. Ces comtes avaient


pagina: 234

aussi le droit pour que

lorsque un habitant d'Almelo achetait une maison

d'un autre il devait toujours offrir premièrement

l'achat au comte qui, lorsqu'il y trouvait son profit pouvait

le retenir pour la même somme.

Hier nous fîmes un fort joli tour premièrement à

Seldam (hameau) et de là à Delden. Le premier chemin

est joli et quoiqu'on y passe aussi par la bruyère on arrive

souvent à des bosquets ou à des fermes cachées agréablement

dans la verdure et dont plusieurs ont une situation charmante.

Nous passâmes un canal qui mène à Delden et que le

comte de Twikkel a fait creuser à ses propres fraix.

Je vis aussi près de là dans un lieu nommé Bornerbroek

une jolie église catholique bâtie après la révolution

où les catholiques de tous les villages voisins se réunissent.

Seldam est un hameau où il y avait plusieurs paysans

qui demeurent les uns auprès des autres d'une manière

fort pittoresque entourés de l'un côté de leurs champs

de blé, de l'autre de leur prairie et de leurs bosquets.

Ces paysans autour d'Almelo sont pour la plupart

de fort bonnes gens mais fort ignorans. De là il n'y a qu'une

demi heure à Delden dont j'ai déjà parlé plus haut. Nous

nous arrêtâmes dans le Posthuis chez van Heek où est

la meilleure auberge. C'est par Delden que passe la

grande route pour l'Allemagne. C'est aussi par ici

que passa le Roi lors de son évasion et plusieurs personnes

ici le virent et le reconnurent. Parmi les nombreuses

épitaphes qu'on trouve dans cette auberge sur les vitres

je trouvai celle ci de M. Bongaard qui fit retenu ici

par la maladie de son épouse.

Gij die door tegenspoed hier opgehouden word

Gaat in het Twikkelsch bosch ligt vind gij tijd te kort

Le château Twikkel n'a pas beaucoup d'apparence

quoique ce soit un bon bâtiment mais on me dit

qu'il y avait des salles superbes. Le comte qui possède

de grands biens et une très belle maison à la Haye

est de la famille des Wassenaar Obdam. Son père fut

pendant plusieurs années ambassadeur des états à Vienne.

Il compte parmi ses aïeux ce Wassenaar qui sauta

en l'air en 1666 dans la bataille entre les Anglais et

les Hollandais. L'entrée du parc par l'orangerie est

assez mesquine mais ensuite on a de très belles vues

sur l'eau qui arrose le château et depuis une espèce

de montagne qui s'y élève. Ce parc n'est pas touffu

comme nos campagnes et construit plus à la manière

anglaise. Le père de ce comte avait beaucoup de

plaisir à embellir ces jardins mais celui-ci

permet que tout soit négligé et ne donne des

soins qu'à ses fleurs. Ce que faisaient une très


pagina: 235

joli effet c'étaient une soixantaine de daims qui

surtout lorsqu'on les chassait, traversait ces jardins

d'un bout à l'autre avec la plus grande vélocité. Après

avoir donné un coup d'oeil rapide aux fleurs nous nous

avançâmes dans le bois. Les années précédentes un

jardinier avait tenu ici une espèce d'auberge où l'on

venait pour y boire du vin ou du thé. Mais le comte

l'ayant chassé tout était pour ainsi dire rentré dans

le chaos. La petite maison où il avait demeuré la [onl.]

que tout était désert et avait déjà souffert des

ravages du tems. Les eaux coulantes étaient devenus

croupissantes les sentiers était couverts de ronces

et d'herbes enfin tout était ravage. Cependant il

y avait dans ce bois des aspects majestueux et des

arbres énormes. À propos d'arbres. Nous vîmes en chemin

les débris d'un hêtre terriblement grand. Il avait été

vendu pour f 70. Un homme avait été occupé 200 jours

à le couper et ses dépouilles avaient fournis 600 charges

de cheval. Après avoir ainsi parcouru les particularités

de Delden nous rentrâmes en voiture et voyageâmes

avec grand plaisir puisque la lune qui

était dans son plein répandait sur la campagne une

lumière charmante.

Combien l'oeil fatiguée des pompes du soleil

aime à voir de la nuit la modeste courrière etc.

Une chose singulière ici à Almelo c'est comme

dans les grandes villes on connaît les villages ou

hameaux situés en dehors. Il y a ici une quantité de

fermes qui passent de père en fils qui sont connues par

le nom de leur possesseurs qui servent aux promeneurs

pour diriger leur course et qui ne sont inconnus à

personne. Tels sont p.e. Joosteman Schuitteman Alberink

Beverdam, Bruggink 's graven lambert et plusieurs

autres. Quand le fermier n'a pas de descendants males

le mari de la fille aînée reçoit la ferme et prend le

nom de son épouse.

Ce matin revenant de Beverdam je vis une singulière

manière de pêcher. Un garçon se promène dans une

rivière dont l'eau lui vient jusqu'aux genoux. Il a

en main une corbeille pyramidale ouverte par dessous

il la fiche sur terre et voit s'il y a quelque poisson

qui soit enfermé dedans. S'il en prend il

les enfile avec une aiguille à une corde qu'il traîne

après soi. C'est cette petite rivière qui coule près de

Beverdam dont on se sert pour transporter les marchan-

dises à Zwol souvent dans l'été elle est desséchée.

Le roi lors de son voyage en Overijssel avait


pagina: 236

promis de faire creuser un canal droit d'ici à Zwol. [onl.]

Dans les maisons des paysans on voit tout [onl.] jusqu'aux

plus petits enfans. Je vis aujourd'hui plusieurs femmes [onl.]

à briser le lin c'est ce qu'on nomme braaken.

Je veux dire encore un mot sur la société à Almelo. La

grandeur énorme des familles empêche qu'on ait quelque

liaison intime avec des étrangers. L'été chacun va son

chemin et on ne converse qu'avec ses plus proches parens

mais dans l'hyver les parens éloignés se rapprochent. Rien

n'est plus ordinaire que des soupers de famille de 25 à

30 personnes. Souvent on sert presque toute la semaine.

Le retour fréquent de ces soupers, la rencontre des mêmes personnes

des mêmes mets introduit une uniformité désagréable.

Ajoutez à cela que comme il y a peu de circulation de

nouvelles, peu de littérature et qu'on joue peu, les

mêmes sujets de conversation reviennent souvent et

inspirent souvent du dégoût

pour ces parties. On parle de politique qu'on n'entend pas

on se plaint des mauvais tems on dispute quelquefois

sur la religion et chacun parle de ses légumes de

ses chapons etc. Exceptés de ces réunions ordinaires de

famille il y a des parties extraordinaires. P.E. dans le

mois de novembre chacun achète un boeuf

et un porc et c'est un de ces morceaux du boeuf qui

donne occasion au Brasmaal qui fait alors le tour

de toute la famille. Après quelque tems vient le

Pekelmaal et enfin plusieurs parties de l'animal donnent

occasion à des repas pareils. Ànoël on ne mange que

du brochet et des pommes de terre. En hyver l'on fait

beaucoup de parties en patins, exercise qu'on aime

ici à la folie.

En général on a ici beaucoup plus de goût pour la

lecture qu'à Enschede où se trouvent pourtant quelques

personnes qui sortent de la règle générale. Il y a ici

trois sociétés de lecture. On paraît en général

aimer beaucoup les voyages. L'hyver il y a un concert,

mais on doutait s'il serait renouvellé cette année.

Quant aux moeurs je crois (et je suis fort mauvais

juge en ce point qu'elles sont ici assez pures non que

plusieurs des jeunes gens soient beaucoup meilleurs

que les nôtres mais là où la tentation manque souvent la

vice manque aussi. La conversation entre les jeunes

gens des sexes n'est pas très fréquente aussi manque

tel toujours dans les petites villes d'un nombre convenable

de garçons et de filles. La population d'Almelo a beaucoup

augmenté à cause de tous ceux qui dépendent

du tribunal et de tous les rats de cave gendarmes

et autres. Les Almeloiens sont scrupuleux

à leur société avec eux.


pagina: 237

Mecredi 26 Août 1812

Nous fîmes hier avec Mons. G. J. Coster le même tour au Heksel

dont j'ai déjà parlé. Une singularité c'est l'attelage des

paysans de Vriesseveen car ils ont des petits chariots fort

étroits tirés par un cheval mais qui n'est qu'attelé qu'avec des

cordes. Ainsi lorsque p.e. ils doivent faire place à une autre

voiture le paysan est obligé de sortir de son chariot

pour diriger son cheval ou son boeuf.

Nous prîmes le thé au Heksel dans un fort joli Hofhuisken

de M. Hofkens. Il est placé au milieu d'un groupe d'arbres

et a une vue fort gaie.

Une chose qui font pour leur profit les paysans qui

ont des bosquets c'est d'entasser leur bois et de le brûler

en charbons.

Hier il était marché de grains. Ces marchés ont lieu deux

fois dans la semaine, le mardi et le jeudi. C'est une jolie

vue de voir arriver de tout côté les paysans avec leurs

chariots chargés de blé souvent toute la rue d'Almelo

est occupée par ces chariots. La première heure il n'y a

que les bourgeois qui osent acheter, mais après que midi

a sonné ce sont les négocians. Ils n'apportent que du

seigle ou du blé noir.

Dimanche 30 Août 1812

Ce [onl.] matin nous fîmes une promenade au château de Saasveld

que j'avais apperçu dans le lointain lors de ma promenade

à Oldenzaal. C'est le même chemin que celui de cette dernière

ville. Mais lorsqu'on vient au lac de Saasveld on

tourne à gauche et on arrive au château par une

très belle allée. Là on voit quelques maisons de paysans

et une église catholique enfin on passe par une porte

et on arrive dans la cour du château. Le bâtiment

surmonté de tourelles ne présente point l'aspect imposant

de quelques autres vieux châteaux. On entre par la grande

porte dans une vaste salle où peut-être jadis les braves

chevaliers d'Overijssel le verre à la main avaient fait

retenter leurs chants. On voyait à présent partout

le froment et les tourbes du curé. Les murs étaient

épais mais non d'une manière extraordinaire. De l'un

côté demeure un paysan de l'autre côté nous montâmes

des escaliers et nous vîmes plusieurs dont

le plancher était ébranlé et menaçait de s'enfoncer.

Nous ne voulûmes pas monter plus haut. Nous entrâmes

ensuite dans les vastes souterrains où l'on pouvait

très facilement s'égarer. Une méchante dame habita

il y a une quarantaine d'années ce château et

pour les moindres fautes elle faisait enfermer des domesti-

ques dans ce souterrain que le soleil n'éclaire que d'une

pale lueur, qui entre par des petits trous qui représentent

des fenêtres. Il y avait une puits mais il faisait si

sombre que nous eûmes de la peine à le trouver.


pagina: 238

Mardi 1 septembre 1812

Je fus Dimanche après-dîner au Stork avec M. Coster.

Nous allâmes de là à Delden par un fort joli chemin longeant

le canal de Twikkel mentionné plus haut et qui

a coûté cent mille florins. On le voit depuis le chemin comme

dans un gouffre. Nous passâmes par le Nibbel ferme

appartenante au grand-père et entouré d'un

joli bosquet. De là on va à Delden par un chemin

charmant tantôt par une allée de sapins tantôt

par une allée qui ressemble beaucoup à celle du

Haarlemmerhout nommée le Manège.

Enfin je pars aujourd'hui d'Almelo et je ne partirai

pas sans regrette d'un lieu où j'ai goûté tant de plaisir

où j'ai connu tant de personnes qui ont fait leur

possible pour augmenter mes jouissances. Adieu

ville charmante j'espère encore retourner dans votre

sein.

Je joindrai ici la liste de toutes les personnes que j'ai

connus à Almelo.

Le grand-père Coster et son épouse

H. Coster et son épouse. Cato. Gerard et Jean

Van Lennep et son épouse

J.H. Coster et son épouse

J. Coster du plus et son épouse Bet et Mina

G. Coster et son épouse Manes et Cato

Le vieux Hofkens

L'oncle Henri

G.J. Coster et son épouse

N. Coster et son épouse

L. Coster et son épouse ses deux filles Julie et Betsi

L. Hofkens et son épouse. Henri et Herman

M. Dul M. Vonk M. Clignet M. Quyre[?] M. Westendorp

Mad. Van Lennep Mad. Thiele Mad. v. Lennep Coster

Herman Coster et son épouse

Le Rector Erler et son épouse

G. Bruins Ten Brake Bruggenkate

H. Coster et son épouse

Voici les derniers lignes que j'écrirai dans Almelo.

La foire est venue. Quelques boutiques ont été dressées

et toute la rue est couverte d'une innombrable

quantité de paysans et de paysannes à grands chapeaux.

Tout nos amis donnent à dîner à ces paysans

et aux marchands de vriesseveen qui mangent

comme quatre.

J'ai fait ce matin mes adieux à nos amis d'Almelo

maintenant je salue la ville hospitalière à qui

j'ai consacré quelques pages.

Adieu Almelo.


pagina: 239

Mecredi 2 septembre

Enfin nous partîmes d'Almelo et ce fut avec des

sentimens de douleur et de regrets. J'avais eu tant de

plaisir dans cet endroit charmant. Nous vînmes premier

à Rijssen et ensuite à Holten où il faisait un froid

insupportable. De là nous allâmes tout droit à travers

un des broeks au (huis te Dort). Cette campagne est très

joliment située. On y voit un châtaigner superbe.

Une eau l'arrosait. Là nous descendîmes de voiture

et entrâmes dans un joli bois appartenant à cette

campagne. De là on va par de jolies allées ombragées

souvent de peupliers jusqu'à Zutphen. L'avenue de

Zutphen est fort jolie. On voit le Berckel avec son pont

et de l'autre côté une ruine, la poste, une église

et une partie du rempart ce qui présentait le

plus joli effet. Zutphen est une très jolie petite ville.

Les maisons sont infiniment plus gaies que

celles de Deventer et les rues beaucoup plus larges

et plus aérées. J'y vis premièrement les remparts qui

sont fort jolis et où l'on a de très belle vue. Il y a deux

remparts, un en dedans et un en dehors. J'y vis

la coupole d'où Martinet avait regardé le paysage

dessiné devant son 1. volume d'hist. naturelle. Je vis

la grande église vaste bâtiment. On m'y montra

premièrement un boulet attaché à l'une colonne ainsi

que le carreau de vitre par lequel il était passé. Il était

entré dans l'église dans le siège pendant le service et s'il

avait rasé le nez du prédicateur. Puis j'y vis un énorme

baptistère 1514 qu'il faut ouvrir avec un levier, surmonté d'une

infinité de figures en cuivre mais qui étaient été

tellement transposées qu'on ne pouvait plus reconnaître

quel sujet ils avaient représentés. Puis on entre dans

une espèce de bibliothèque où tous les livres sont

attachés avec des chaînes et où il se trouve plusieurs

manuscrits. On rencontre ici une espèce de patte

gravée dans la pierre dont on raconte qu'elle est celle du

diable qui fit une visite ici lors de l'inauguration

de l'église par les catholiques. On voit aussi une béguine

qu'on dit avoir trouvé vivant sur l'église. On y voit

aussi une statue de la vierge à qui les catholiques

attribuent encore aujourd'hui un pouvoir miraculeux

et puis la chaise où le président s'était assis lorsqu'on

avait tenu cour féodale ici il y a quarante sous un

chêne situé près de l'église qui maintenant était

mort et avait été remplacé par un jeune

successeur. Nous continuâmes notre promenade sur

les remparts tantôt arrosé par l'IJssel et tantôt

par le Berckel et même j'y vis le confluent des


pagina: 240

deux rivières. Là l'eau du Berkel se distingue même après

la réunion par sa noirceur. On vient ensuite sur le

contrefort aussi une espèce de rempart ombragé de

fort beaux tilleuls et ensuite dans un petit bosquet très

agréable. Nous vîmes le Drogenaps toren magasin de poudre.

Le ducdalfsgat mine par laquelle les espagnols s'emparèrent

de la ville. On voit la ruine d'une porte autour de laquelle on se combattit

et qui est criblée de balles de fusil. Puis des arcades

sur la Berkel qui produisent un effet supérieurement

joli. Dans l'intérieur de la ville la Berkel fait tourner

plusieurs moulins d'eau. Toutes ces particularités rendent

Zutphen fort curieux pour les étrangers. Sur le

grand marché on voit un poids surmonté d'une tour.

Nous eûmes un fort bon logis au Hollandsche tuin.

Le lendemain nous montâmes fort tôt dans la diligence

passâmes par une belle allée et là nous vîmes le

lever majestueux du soleil. La première partie du chemin

d'ici à Appeldoorn est fort joli jusqu'au village de Voorst.

On va souvent par de fort belles allées. Le gouvernement

de Zutphen paraît être très actif, car non seulement

je vis des promenades qui avaient été

construites et étaient fort bien entretenue aux dépens

de la ville mais ils avaient des fabriques de diverses

étoffes entr'autres de tapis grossières auxquels ils

employaient tous les mendians qui se présentaient

dans la ville. Ainsi n'en voyait-on aucun. D'Apeldoorn

nous nous rendîmes à Utrecht par le chemin déjà

décrit plus haut et qui me ravit tout autant

que la première fois. Les environs de Voorthuizen sont

fort jolis. À Amersfoort nous vîmes un vaste bâtiment

érigé il y a une vingtaine d'années pour servir d'école

de marine et dont on ne tirait plus aucun service.

La tour d'Amersfoort est très grande.

∙Arrivés à Utrecht nous nous transportâmes à la porte

où partent les barques. Enfin après un peu de promenade

nous vîmes arriver le moment où la barque de

nuit partait. C'est une bien triste manière de

voyager et hormis la plus grande nécessité je ne

désire jamais de la répéter. Enfin après quelques

heures nous arrivâmes à Rupelmonde. Là nous débarquâmes,

y couchâmes et allâmes le jour suivant à

Amsterdam où nous étions vivement attendus

par l'impatience de nos amis et parens et pour moi

je n'oublierai jamais le plaisir dont j'ai joui

dans ces six dernières semaines.


pagina: 241

Littérature

Voss. Luise

C'est avec beaucoup de plaisir que j'ai lu ce charmant ouvrage

que je ne connaissais que de réputation. C'est une idylle

dans un genre moderne des tableaux simples sans intrigue.

L'ouvrage est divisé en trois parties. Der Geburtsfest, Der

Besuch und die Brautabent. Quoique je ne sois pas

grand amateur des hexamètres je conviens que cet ouvrage

est fort joli et que je préfère de pareilles idylles à ces éternelles

répétitions de deux bergers qui se disputent le prix de

ces damon de ces phyllis personnages feintes qu'on s'est plus

à copier les uns des autres. Toutes les petites circonstances

sont peintes ici d'une manière charmante.

Reinbeck reize 2 v.

∙L'auteur a décoré son ouvrage du titre modeste de Vlugtige

Aanmerkingen. Telles sont presque toujours les remarques

d'un homme qui voyage p. extra post. C'est toujours des détails

sur les postes, sur les postillons etc. Cependant cet ouvrage-

ci contient de fort bonnes remarques. Moscou est la seule

ville sur laquelle il s'étend et il dit à ce sujet des choses fort

judicieuses intéressantes. Il part de St. Petersburg, de là à Moscou et

de là à Varsovie.

Dupaty Lettres sur l'Italie 3 v.

∙C'est un ouvrage que j'avais beaucoup entendu vanter et

d'un autre côté j'avais entendu que l'auteur n'avait jamais été

en Italie. J'ai jugé premièrement cette dernière assertion

impossible mais à la lecture j'ai été convaincue de

la possibilité. Je conviens que le style est superbe mais

il faut aussi convenir qu'il sent le travail qu'on voit

que l'auteur s'est efforcé de tourner sa pensée en antithèse

et en épigramme et qu'on reconnaît plus l'écrivain

qui veut plaire que l'observateur et le voyageur. Ses

lettres ne parlent que des grandes villes et de quelques

environs comme Avignon Gênes Florence Lucques Rome

Naples et je trouve que ses lettres ne sont pas propres

pour donner pour ainsi dire une idée juste de l'italie.

Voici p.e. quelques phrases pour prouver mon assertion.

∙Le gouvernement est tel dans ce royaume qu'il n'y est

souvent qu'un désordre de plus.

Le roi à force de parler ne se fait plus entendre et n'exécute

plus rien à force de commander.

L'autorité ne laisse guère finir un procès car qui

peut tout ne veut jamais rien.

Rien ne se fait de tout ce qui ne peut se faire sans un

certain degré de tension dans la [onl.] comme il y a des

voix qui n'arrivent point à l'octave.

La probité paraît aux Napolitain une duperie d'esprit la

franchise une vivacité de tempérament l'esprit

est de tâcher de tromper l'habilité de réussir les vertus


pagina: 242

sont des impuissances, les vices naissent du climat.

Le corrège travaillait de coeur. Il ne composait pas il

exprimait. Peindre pour lui était aimer.

Il est des sujets qu'il ne faut presque pas penser pour les

bien rendre il faut les rêver.

Ces médailles sont comme des petits points dans le tems

sur lesquels ma mémoire se repose.

Chacun de ces tableaux n'est qu'une pensée comme chaque

ode d'Anacréon n'est qu'un sentiment.

De pareilles phrases fourmillent.

Legouvé. Mérite des femmes.

∙Charmant ouvrage qui éternise les femmes françaises du

18 siècle.

Levensbeschrijving van Ned. Mannen en vrouwen 1ste Deel

Cet ouvrage a souvent le défaut de toutes les Biographies

c'est ou d'être trop chargés de détails prolixes ou de ne

contenir que des généralités que personne n'ignore. Ces vies-

ci sont de différentes mains et aussi l'une est-elle beaucoup

mieux écrite que l'autre.

Celles de Calvin et Luther ne m'ont pas fort plues celle

d'Erasme est mieux écrites.

Celles qui m'ont les plus intéressés sont de David Joris

de Brouwer de Vondel qui renferme plusieurs particularités

et de Beronicius et de Johanna Koerten et de Crabeth.

Les mieux écrites sont celles de Heemskerk Piet hein Cats

Brakel et Kenau Hasselaar.

On trouve encore celle de J. Steen A.M. Schuurman Groote

Pier Van Dijk Menno Simons Laurens Coster Rembrand

Dathenus Jan van Leiden Arminius, Paus Adriaan

Lescaille Rubbens J.S. de Rijk.

Mardi 8 septembre 1812

Me voilà de retour enfin dans le sein de notre famille

gai et content. Le journal a été lu. Tout ce qui se

rapporta à Almelo a été raconté et tout est comme

au tems jadis. Voilà la vie de l'homme. Heureux celui

qui peut avec le plus de calme s'approcher de ce moment

terrible où commence l'éternité.

L'éternité quel mot consolant et terrible.

Non il faut avouer que sans une éternité consolante

notre vie serait misérable. Mais que penser des mystères

de la religion comment enfoncer là où nous cessons

de comprendre. Je crois en Dieu en Jésus christ mais

comment se former une idée de ce dernier. Là notre

entendement s'arrête. Je suis curieux de savoir ce

que les catécumènes en ont dit. Je gage que

plusieurs n'auront pas compris ce qu'ils ont posé.


pagina: 243

Je dois avouer que c'est avec beaucoup de plaisir que

j'ai repris mes occupations accoutumées. Le grec me

plaît de plus en plus à mesure que j'y fais des progrès.

J'aime beaucoup le commerce. Je voudrais pourtant

reprendre les mathématiques et la Physique. Je dois

aussi lire sur la religion. L'histoire Eclésiastique me

plaît beaucoup. Je lis aussi Quinte curce en latin.

Encore une description de décrétie. Enfin le tour viendra

à nous. Songeons que

Les traits les plus cruels de l'aveugle fortune etc.

∙Il s'est passé très peu d'intéressant pendant mon absence.

Kolff que j'avais toujours regardé comme un fou est

maintenant devenu tout à fait un débauché il

se promène publiquement avec des catins. Le misérable

il s'en fait gloire.

Il est foire je ne m'en suis encore guères apperçu. Voici

justement donc l'anniversaire de l'époque à laquelle

j'ai commencé ces mémoires.

Je choisirai un autre jour pour détailler tout ce qu'il

y a de remarquable à cette foire-ci.

Annales du lundi

D. ne vint que tard. Il avait dîné avec Logger chez Ippos.

On voulut lui faire cadeau d'une prétendue

pierre de gravelle mais il reconnut la ruse à table.

Il fit là premièrement le détail de la fête des

chirurgiens et raconta d'un d'eux qui avait cousu les

boyaux d'un de ses patiens. Il fit ensuite le détail

du dîné d'Ippos. Il fit une longue description de

la manière dont Brugmans suppose que les poissons

nagent. Il parla de Bordes et se récria qu'on ne

connaissait point ses ouvrages. On lui demanda

s'il connaissait ceux de Bartjes. L'oncle de Vos se fâcha

et dit qu'on devait le laisser parler et ensuite il

continua pendant si longtems qu'il y manqua

peu que nous fussions tout à fait endormis.

Mardi 15 Septembre 1812

Annales du Lundi

On complimenta D. sur la mort de Paradijs. Il dit qu'un

Brabançon ignorant prendrait sa place. Il se récria sur

Hippocrate et gagea premièrement qu'il était né

2000 et ensuite 200 ans avant J.C. C'était à 68. Il fit

subir un examen médicinal et chirurgical à W. de

Vos qui s'en tira très bien. Il dit que l'art du médecin

consistait principalement à savoir si le malade

mourrait ou non. Il déploya beaucoup d'érudition dans

l'histoire d'Hippocrate, etc[?]. À table il parla du ministre


pagina: 244

qui avait fait son sermon après un ministère de

50 ans sans en rien dire à ses amis ou parens. On regarda

ceci comme une insulte faite au grand-père. Il dit ensuite

que Binnevest parlait le Hollandais plus purement que

Siegenbeek. Il dit que Binnevest avait travaillé à la traduction

des pseaumes connue sous le nom de Laus deo. D. raconta

que les Espagnols étaient à Madrid et que Smolensk

était assiégé par les Russes.

Mardi 15 Septembre 1812

Voilà deux Annales du Lundi qui se suivent et l'intervale

n'est marqué par rien d'intéressant et n'occupe pas une

ligne d'écriture je vais remplir cette lacune.

Les loix sont souvent injustes. En voici une preuve. Un paysan

de Nordhollande forcé de servir dans la garde nationale avait

été porté par la misère et le besoin à voler une chemise

d'un de ses camarades qu'il mit au lombard pour 10 sous. Bientôt

navré de remords, il écrit à ses parens de lui envoyer de l'argent.

En ayant reçu il retire la chemise la rend à son camarade

et lui avoue sa faute dont il demande pardon. Ce

misérable le dénonce et le pauvre homme, malgré la

compassion qu'on avait de lui fut condamné

quelques années à des travaux forcés (galères). Haec est justitia.

∙La police continue toujours à épier les Amsterdammois

avec des yeux d'Argus quoique j'entendis dire hier à deux

hommes qui passaient. On ne sait pas encore ici ce que

c'est que la police. Mr. Stuart avait entendu dire que

les Anglais avaient fait une descente à Bayonne. Il

avait raconté cette nouvelle à d'autres. Voilà que le

ministre est mandé à la police et on le tance voilément

d'avoir raconté une pareille nouvelle.

Il est avéré que les Espagnols (Ins.) et les Anglais réunis sont

entrés à Madrid et qu'avant l'arrivée de ces derniers on

avait fait un terrible massacre des Français. Mais nous

n'en savons rien et malheur à celui qui regarde

la feuille politique comme son oracle.

Quant à la ville point de nouvelles. Une nouvelle

Conscription vient d'être décrétée. Personne n'en parle.

La foire est prolongée jusqu'à la fin du

mois.

Pour dire encore deux mots de politique. Il faut avouer

que maintenant tous les ressorts sont forcés et qu'en cas

que les français récussent un échec en Russie on verrait

beau jeu. Il n'est pas encore décidé quel train les

affaires prendront là. Car ce diable d'homme ne

pourra pas toujours vaincre. En tout cas abandonnons

à la providence le soin de nos destinées et

disons avec Le Franc de Pompignan.

Dieu sait ce qu'il nous faut beaucoup mieux que

nous-mêmes.


pagina: 245

voy. plus en avant

∙Ogier le Danois, Didier, Ulda et son valeureux époux et

surtout la tendre Ophélie. La fée Morgane répand un joli merveilleux.

Le poème est écrit dans le même mètre que l'enfant

prodigue de campenon mais je crois que le style de ce dernier

est plus brillant et plus poétique.

La Cretelles vol. 5

Ce volume m'a autant plu que les premiers. Il contient l'état

des moeurs et sciences à la fin du règne de Louis 15 et le prélude

de la révolution. Plut au dieu que nous eussions une pareille

histoire de ce qui est arrivé ici depuis 1712-1812.

Mémoires de Temple

Ces mem. sont beaucoup plus intéressans que les lettres par

ce qu'ils ont beaucoup de suite et qu'ils apprennent tout à

qui soit passé tant dans ces campagnes de 1673-1678 que dans

les négociations de Nimègue et qu'ils donnent une juste

idée des pointilleries et veulleris auxquelles ces assemblées

sont soumises. Ce livre est fort bien écrit et contient même

quelquefois des anecdotes et des particularités sur des

discours avec le prince d'Orange, le Roi d'Angleterre etc.

Mecredi 16 Septembre 1812

J'ai parlé assez de politique hier. Je ne puis pourtant pas

omettre que hier on répandait la nouvelle que les Français

avaient remporté une victoire décisive étaient maîtres de

Moscou et qu'on parlait de paix. Les oblig. Russes étaient

montées de 37 à 44 %.

J'ai été la fin de la semaine passée à Kennemeroord où j'ai

déjà passé plusieurs jours dont le souvenir ne s'effacera jamais

de ma mémoire. À Halfweg divers changemens avaient

eu lieu. On était déjà fort avancée à la grande tour qu'on

avait commencé de bâtir. De toutes parts s'élevaient des

batteries. L'istme était changé en un pont tournant.

Et même à quelque distance on voyait partout des

barrières des sentinelles des ponts-levis. Pauvres Anglais

gardez-vous de nous approcher.

Je me suis étendu au large sur Rupelmonde, il serait injuste

de ne pas dire deux mots de Kennemeroord.

Cette campagne est située sur le Heerenweg. Elle

est charmante. Derrière la maison on trouve trois

énormes tilleuls qui ombragent un gazon souvent

le théatre des nos Jeux puis un petit ruisseau surmonté

d'un pont qui coule entre des Dunes fort hautes

et d'où l'on a des vues délicieuses. Enfin à la fin de la

campagne consite en une coupole située sur une


pagina: 246

dune très haute où l'on monte par une pente douce et

d'où l'on a une vue charmante sur les blanchisseries

situées plus loin. Ajoutez encore à cela un joli bosquet

et vous aurez la description d'une campagne très jolie et

que je préférerais à celle de Rupelmonde quoique cette

dernière soit beaucoup plus grande. La vue depuis

la maison n'est pas très jolie. Cette campagne fut jadis

une auberge. M. van Keulen a fait défricher les dunes

et en a formé une jolie campagne. J'espère avoir encore

occasion un autre jour de parler de ses environs.

Dimanche nous fîmes une promenade à Overveen. Le chemin

mène par l'allée de Hodson jusqu'à l'aardenhout dont on

traverse une partie. On passe devant Oosterduin campagne

de M. Hasselgreen qui a une vue très jolie et devant

le superbe Elswoud et l'on arrive par plusieurs jolies allées

à une espèce de petit lac nommé le Brouwerskolkje.

C'est un endroit charmant. De l'un côté des hautes dunes

de l'autre des gazons des troupeaux des bosquets c'est

ravissant. Nous montâmes ensuite sur les dunes

d'où l'on a une superbe vue d'un côté sur Harlem et

ses environs de l'autre côté sur la mer. Overveen est

un joli village. Le clocher consiste en une tour de bois.

Le Zeilweg est un chemin ouvert. Les jolis buitensingels

de Harlem sont ombragés de beaux arbres.

Nous nous arrêtâmes ensuite dans les auberges du hout

et retournâmes par une partie de ce joli bois.

Adieu à la campagne revenons en à la foire. Celle-ci

est du moins plus animée que la précédente et même

tous les lieux publics de récréation sont toujours

remplis d'une quantité prodigieuse de monde. Mais en

vérité soit dit entre nous la foire signifie bien peu.

Au Westermarkt on va pour voir et être vu et sur une

centaine de visages laids ou ordinaires on est bien

aisé de rencontrer un joli minois.

Ensuite vient le Botermarkt. Je veux citer en un mot

ce qu'il y a de remarquable.

Le cirque ambulant de voltège. Je compte y aller ainsi

j'en donnerai alors la description.

Le jeu des chevaux de Kingsbergen.

Deux nouveaux Hercules. J'ai vu l'un d'eux à Harlem et

en effet c'était assez remarquable.

Un homme sans bras qui fait tout avec les pieds. C'est un autre

que celui que j'ai vu il y a deux années. Celui fait encore beaucoup

de nouveaux tours p.e. Il a encore un petit bout du

bras auquel on lui attache une fleurette et alors

il peut faire les armes avec la plus grande habilité.

∙Un homme qui va dans une petite voiture qu'il fait

aller lui-même en tournant une roue pendant

qu'il est assis dedans.


pagina: 247

L'Éléphant et la ménagerie (V. Voyart Utrecht).

Une particularité cependant de cette éléphante est la

suivante. Mon oncle de clercq y étant dit à la vue de

tous les tours qu'il faisait que c'était la coutume

qui les lui apprenait mais dit-il p.e. j'ai en poche un

pacquet de riz qu'il vienne l'y prendre. Le maître

dit aussitôt Ba Ba prenez de la poche gauche de ce

monsieur un pacquet de riz et il le fit en effet avec

sa trompe. Une autre fois il avait entouré mon oncle

de sa trompe celui-ci dit au maître. Il me serre et le

maître s'adressait aussitôt à son industrieux élève

lui dit Ba Ba serrez donc pas tant monsieur.

Aussitôt l'éléphant retira doucement sa trompe.

Les deux éléphans du Loo avaient été conduits ici sous

la direction du capitaine van Braam. Celui-ci les voyant

au Loo quelques années ces animaux le

reconnurent tout de suite.

La fille Merveilleuse chez Beni. J'y fus. L'artiste fait

entrer dans une colonne une jeune fille. Il fait jeter des dés

à des spectateurs et aussitôt la fille qui est invisible

dit le nombre des yeux. Elle dit aussi la carte qu'on tire le

proverbe qu'on tire parmi une trentaine. Deux

têtes de bois font les mêmes tour. C'est en effet surprenant.

À mon avis c'est dans ce qu'il dit que consistent les signes

qu'il donne à ses aides et à la petite fille. Mais quand on

voit le peu de variation qu'il met dans ses réponses on

admire le génie de l'inventeur.

Nous fûmes aux pantagoniens petite espèce de marionnettes

assez gentilles qui jouaient Don Juan. Les intermèdes pendant

lesquels se font les métamorphoses est ce qu'il y a de

plus joli. P.E. une femme arrive sur le théâtre et jette

un de ses bras qui se change en un petit enfant. L'autre bras

subit le même sort. La femme se change en

ballon et les enfans après avoir dansé quelque tems

autour du bateau sautent dedans et le ballon

monte pendant un adagio. Il vient un procureur et

de son corps sautent une douzaine de procureurs qui

dansent avec lui. C'est assez drôle et les mouvemens

des marionnettes sont fort naturels.

Un certain drôle ayant vu (problablement chez Bienvenu)

des fontaines qui sautent autour de chandelles sans

les éteindre, qui soulèvent un oeuf etc. ont conçu l'idée

d'en faire un jeu où l'on voit ces fontaines d'eau de

différentes couleurs dans un grand bac rempli de

roseaux. Ce feu se nomme L'eau et le feu.

Puis on voit des jeux de fantasmagorie et quelques

personnages corpulens.


pagina: 248

J'ai entendu encore plusieurs particularités concernant

l'éléphant. On dit qu'il a été vendu à l'empereur pour

120.000 francs. Il a une intelligence extrême. Ses maîtres

possèdent plusieurs chevaux et des cavaliers montés dessus

traversent toute la ville et y portent leurs affiches.

Ils tiennent des étendards où l'éléphant est peint.

Il faut avouer que l'ordre dans le quel les jeux sont

rangés maintenant est infiniment meilleur que

dans les années précédentes.

Jeudi

Hier j'ai vu le tableau de M. van Bré représentant le

départ des jeunes Athéniens et Athéniennes qui doivent

servir de repas au terrible Minotaure. Ce tableau est

superbe. Les figures sont de grandeur naturelle. Dans

le groupe principal Egée tire le dernier billet fatal.

Tous les yeux sont fixés sur lui. De l'un côté de l'autel une

jeune fille choisie par le sort fatal revient à elle peu à peu. Même on

voit son sein se gonfler sous l'étoffe légère. Une autre témoigne une[?] joie

ouverte en voyant qu'elle a échappé. Un grouppe d'enfans

charmans entoure l'autel. Une jeune fille

tombe évanouie sur les marches de l'autel. La pâleur de

la mort couvre son visage charmant. Son père la tient

dans ses bras et sa mère échevelée accourt avec transport

un jeune homme dans l'accès du désespoir est étendu à terre.

Sa soeur ou sa mère le tient dans ses bras et les yeux

humides de larmes regarde d'un oeil suppliant Thésée

qui seul peut les sauver. Thésée lui-même le regard fier

d'une statue colossale, se voit entouré par deux jeunes

vierges l'une lui jète un regard suppliant. L'autre fond

en larmes mais est encouragé par son père qui

lui montre quel sera son défenseur puis encore divers

groupes trois secrétairs qui assis à une table écrivent

les noms dictés par le sort. Un énorme buste de mercure

qui dénonce encore l'enfance de la sculpture. Deux

hommes du parti des Pallantides opposés à Egée qui

voient avec indifférence et avec une joie maligne

les malheurs de la patrie. Dans le lointain on voit

un temple sur une montagne avec une foule de gens

qui y montent pour supplier les Dieux.

In toto. Ce tableau m'a fort frappé et ce serait avec

beaucoup de plaisir que je le verrais une seconde fois.

Tout est noble et beau. Il est toujours facile de faire

des remarques sur des compositions pareilles. Une des

remarques les plus importantes qu'on a faites a été

la froideur de Thésée mais il l'excuse par différentes

raisons. 1. par ce qu'il ne voulait point détacher sur

Thésée l'intérêt du grouppe principal. 2. par ce que

Thésée doit cacher son projet pour son père qui

n'y consentait pas. 3. par ce qu'il vit un jour Napoléon

méditant un grand projet dans la même situation.


pagina: 249

Jeudi 17 Septembre 1812

Ce matin a été fort désagréable. Mess. Hope ont signifié

qu'ils n'avaient pas de fonds pour payer ni les capitaux,

ni les intérêts. Les russes lors de cette fausse nouvelle qu'on

avait fait circuler étaient montés de 37 à 44 1/2 et sont

maintenant à 32 1/2.

Mardi 22 Septembre 1812

Jeudi passé je fus au cirque olympique quoique je sois d'idée

que le véritable cirque d'olympie ait eu quelque chose

de plus imposant. L'on entre dans une grande tente ronde

avec des bancs autour qui montent en Amphithéâtre.

Premièrement les cavaliers entrèrent et firent diverses

évolutions. On fit beaucoup de tours à cheval qui furent

répétés jusqu'à l'infini. On eut divers entremets comiques

on sauta. Il y eut un cheval qui apporta qui contrefit

le mort. Enfin il vint un petit cerf fort joli. Il dut

sauter se tenir tranquile pendant qu'on tirait des

pistolets à son oreille et qu'on faisait sauter autour

de lui un feu d'artifice. C'est ce qu'il y avait de plus

joli. On avait vu souvent de pareils tours et c'est une

chose pour voir une fois.

Je fus à Outover où je m'amusai fort bien dans la

compagnie de plusieurs de mes amis. C'est une petite campagne

assez jolie située sur le vecht à Loenen. Nous fûmes à la

ruine du Huis ter haar. Elle est encore assez considérable

mais déchoit d'année en année. Le chemin qui y mène

depuis Breukelen est à travers des prairies ou le long

d'un petit hameau nommé Kortrijk. C'est dans la grande

salle de ce Huis ter Haar que Janus Dousa s'est marié.

Cette maison doit avoir eu beaucoup de puissance dans

l'ancien tems. On peut encore y entrer. Il y a aussi

encore une chapelle debout. Le lendemain nos fûmes

à 's Graveland par Vreeland et Kortehoef. J'en ai déjà fait

mention plus haut. Nous nous promenâmes sur les

Dunes qui sont situées derrière ou pour mieux dire

quelques petites élévations de sable. Nous retournâmes premièrement

par une petite partie de 's Graveland et passâmes la campagne

de Trompenburg dont la maison a la forme d'un vaisseau.

Puis le long d'un canal jusqu'au Loosdregt assez connu

les tristes Turfschuuren et le triste Bloklaan.

À cause de la construction d'un nouveau chemin on en va

un autre à Loenen prem. le Diemer Meer, Diemerbrug Le Gasep l'un

côté du Gein. Le Velterslaan un chemin à Vreeland

le chemin de là à Loenen. Ce chemin offre sans

contredit des vues beaucoup plus jolies que l'autre.

Près du Gasep surtout on a une très jolie vue

sur cette grande plage d'eau.


pagina: 250

On est occupé de vive force à faire le chemin près du

Nieuwersluis ce qui produit de grands désagrémens. Le chemin

devant la campagne mon grand-père doit être haussé de quelques pieds et

non seulement on prend à cet effet la terre de mon grand-père

mais même on s'en sert pour hausser la partie du chemin

qui passe par le Nieuwersluis. Tout ceci produit un grand désert.

On craint de s'enforcer si l'on doit passer à pied par ce

chemin. Là le chemin a été conduit au milieu d'une

campagne. Là on abattu des arbres etc. etc. etc.

Le lundi n'a offert rien de remarquable.

Grains

Le froment reste presque à la même hauteur

mais baisse un peu de tems en tems 128: 876 gd.

Le seigle 122 H. 237 g. Hier il monta 10 gl. par les achats de

quelques Schiedammois.

Orge 95 H. v.n. 128 gd.

Le Colzad est beaucoup monté quoique la récolte a été prodigeu-

se et qu'on juge en avoir une provision suffisante pour deux

années et que la quantité d'huile emmagasinée à Zaandam

est très considérable tandis qu'il y a peu de commissions

sur cet article. Cependant on est si accoutumé à en voir

les prix plus hauts qu'on veut à toute force y faire des

spéculations. Premièrement lors du tems pluvieux on

a dit qu'un certain insecte (aardvlo) avait détruit les

tiges qui venaient de pousser et que le tems pour semer

de nouveau était passé. Mais pourtant ces bruits ne se

confirmant pas on continue de spéculer. En général les

capitalistes dégoûtés des pertes continuelles qu'on fait

dans les papiers ne savent employer leur argent avec profit

et sont tombés avec furie sur le Colzad. On se l'arrache.

Le même esprit de spéculation règne dans les autres

provinces. À Groningue on avait apporté dans deux marchés

consécutifs 1000 Last chaque fois ce que n'était point

arrivé de mémoire d'homme. Toutes ces spéculations ont

fait monter les prix du meilleur colzad depuis 48 jusqu'à

54 et peut-être ils monteront encore bien d'avantage.

Mardi 29 Septembre 1812

J'ai encore été à Oudover. Nous fûmes très volages, Une promena-

de à Vreeland. Un tour en bateau à Nieuwersluis. Une

nouvelle expédition en bateau dans les environs de

Loosdregt et plusieurs combats telles furent nos principales

occupations. Je m'amusai fort bien.

Annales du Lundi

Kemper y était. Il força D. à répondre s'il accepterait le

professorat oui ou non. Il dit que l'histoire du Brabançon était

controuvée. Il dit que Bijnkershoek avait été professeur

on eut un vers pour féliciter les exécuteurs. D. se défendit


pagina: 251

fort mal sur un gulden et mei et Muntinghe

promit une nouvelle fête blâma les collègues de Binnevest.

L'homme qui a inventé la voiture qui va sans chevaux

a été remplacé par un autre sur le drilveld qui

faisait monter d'autres personnes dans sa voiture. Mon cousin

G. de Clercq voulant faire de tours avec cette machine

se renversa entièrement.

J'ai compté diviser ces mémoires dans les articles suivans

1. Politique

2. Nouvelles de ville

3. Nouvelles domestiques

4. Annales du Lundi

5. Vie

6. Caractères

7. Annales du marché

8. Description d'Amsterdam

9. Littérature

10. Desc. des env. de Rup. 11. Études 12. Mélanges anecdotiques

7. Les prix montent encore continuellement et même le

froment a pris faveur. 130 H. 395 gd.

Mardi 6 octobre

1 Rien d'important dans les affaires domestiques mais

en fait de nouvelles politiques la semaine passée

a été signalée par la nouvelle de la prise de Moscou.

Les commissaires de police ont annoncé cette

conquête accompagnés d'un brillant cortège et au

bruit des instrumens. Quelles seront les conséquences

d'une pareille conquête. Il serait difficile de le juger et

il faut laisser faire au temps.

2. La semaine passée un spectacle nouveau a amusé

nos citoyens, c'est à dire l'éléphant a fait ses exercises

en plein air. Il a jeté des boulles, est monté et descendu

de sa voiture a témoigné l'aversion qu'il avait pour le

porc, a montré le plaisir que lui faisait la musique

a caressé sa maîtresse etc. etc.

Quelques danseurs sous le nom de la famille Kobler

ont joué ici différents ballets. Ils se font remarquer

par la beauté de leurs danses et par l'extrême souplesse

de l'un d'eux, qui tourne dans l'air ainsi qu'une

toupie.

3. À Rupelmonde où je fus tout était en combustion

à cause du chemin qui était construit à force de bras.

À peine le chemin était-il en état d'être traversé. Des

gens allaient et venaient continuellement. On devait

traverser le vecht en barque pour aller à la ville


pagina: 252

Enfin tout ceci est bien désagréable pour tous

ceux qui ont des campagnes de ce côté là.

Je fus à Demmerick et Vinkeveen. Ces villages sont situés

au delà de Terra.

Les maisons en sont dispensées comme dans plusieurs

autres villages de ces contrées-là. À la fin de Demmerick

commence Vinkeveen. Ces villages sont assez considérables.

La distance de là à Rupelmonde est 1 1/2 à 1 3/4.

Mélanges.

Il y eut l'autre jour un français au théâtre qui aimait

beaucoup à réciter. Il savait par coeur 14000 vers et entr'autres

l'Athalie. Quoiqu'il ne sût pas un mot d'hollandais, il avait

été ravi de la manière dont Madm. Wattier Ziesenis avait

rempli le rôle de Sémiramis.

Un de mes amis a été logé chez M. Messchert Vollenhoven.

C'est un homme qui est devenue poète à la fin de ses jours

et qui a traduit une partie d'ovide et le livre de Job. Il a

pareillement fait la traduction d'un autre prophète

juif, mais il n'ose la publier. En conséquence il l'a copié pour

chacun de ses 6 enfans et est occupé de ce travail

du matin jusqu'au soir presque sans interruption. Mon

ami le vit travailler à une de ses copies et il était

déjà à la page 132 encore en fo.

M. Bilderdijk dut l'autre jour comparaître à l'institut. Il

s'en excusa. On s'informa la raison son habit d'Institut

était au lombard. Pourquoi toujours ces disparates dans

des grands hommes. Il dit qu'il mourrait s'il devait compter

un sac de florins.

À maarssen il arriva une aventure assez singulière. Un

pauvre juif qui débitait des billets de loterie avait un fils

qui tombait dans la conscription. Quelques jours avant son

départ il avait envoyé son fils à Utrecht avec un billet

qu'il avait gardé puisqu'il n'avait pu le débiter. Il apprend

qu'un pris est tombé sur ce billet, vole à Utrecht où il en

tira 20000 put assurer à ses parens un état honnête

et payer un remplaçant.

À propos de loterie tout parle maintenant, de la loterie française

où l'on peut mettre de très petites sommes partout on

voit des maisons destinées pour recueillir les offrandes

de ceux qui sacrifient à la déesse de la loterie. On voit

des tableaux allégoriques dont plusieurs sont l'ouvrage

du célèbre Bianchi des cornes d'abondance etc. etc. etc.

on peut dire avec sosie.

Le seigneur Jupiter sait dorer la pillule.


pagina: 253

Marché

'T kan verkeeren zegt Bredero.

∙Rien de plus difficile à juger et rien dans lequel on soit

plus trompé par les apparences ou circonstances momentanées

que le commerce surtout de ces articles où il entre quelque

spéculation. La semaine passée le Colzad sans raison

pressante a fait une chute de quelques livres et maintenant

tout remonte. Les grains malgré la quantité qu'on

a encore à attendre montent toujours.

T. 126. 127. 1280 M. 382. 385. 388c. 130 H. N.B. 372. 375 gd.

R 120. 122 N. O.V. 262. 267 gd. 121 H.O.Tr. Vl.276 gd.

H. 87 H.87 gd.

Cz. Gr. 48 Lvs. Vr.51 à 52 Lvs, Alt: 53 1/2 Lvs. R.O. 52

Annales du Lundi

D. vroeg aan Ign. of hij een zekere plaat kon. Vraag liever

antwoorde deze wat ik niet ken. D. maakte Satyrike

aanmerkingen op J.d.V. Daarop zei Ign. D. Gij maakt U

gehaat. D. verklaarde dat hij nooit beter sliep als dat

hij eene kom ijs verloren had, voorts dat geen geluid

hem meer hinderde als 't uitgooien van zijnen kamerpot

door Jan in het zoo enorm sekreet. K. verhaalde hoe hij

J. Kops zoekend in de Raapenburgerstraat bij een

smous was geweest en hoe H. Nahuis eenen zekeren

Steenkamer door het uitspreken van zijne naam

aan 't weenen gemaakt had. Men sprak van een Apotheek

en D. zeide dat of 12000 te veel zoude weezen voor de

apotheek van zijnen broeder. Hij is verkogt antwoordde

hem J. de Vos en g.d.C. Veel wierd over en weeder gesproken.

D. wierd benaauwd en bood een kom ijs rouwkoop.

Doch men bewees in 't eind dat er geen wezentlijke

verkoop plaats had gehad. D. liet zijne verschrikkelijke

stem horen in een aria uit de

Mariage secret. Hij had zijne gulzigheid getoond door

appelen te vragen terwijl zijn bord vol met salade

en vleesch lag. Hij had een der vorige weken tegen

't gezelschap aan staande gehouden, dat de kippen

nieren hebben.

Littérature

Je n'ai encore rien noté de ce genre-ci après mon

retour d'Almelo ainsi il en devient temps.

Blumauer Gedichten

Une versification élégante et des idées originales

voilà sans doute des mérites et c'en est un bien plus

grand dans la poésie légère [onl.] des redondances


pagina: 254

ou des lieux communs traités par plusieurs autres

poètes. Et quoi qu'ici les vers soient souvent plus

burlesques que poétiques ces petits volumes et

surtout le premier offrent les traces d'être l'ouvrage

d'un poète sensible et Agréable. L'auteur était

Autrichien.

Ein[?] Glaubensbekenntniss eines nach Wahrheit ringenden

ne me plaît pas parce que je trouve qu'un chrétien peut

très bien concilier la raison avec la foi.

Die Donaufahrt dans un genre assez élevé est très jolie.

Otahiti est un joli vers contre ceux qui font continuelement

l'apologie de l'homme de la nature.

Comme vers burlesque j'ai fort goûté An den Tierde[?], an

den Mond, an den Morgen, An den [onl.], an

den Teufel.

Le 2 volume ne m'a pas tant plu quoiqu'il y ait de

jolis morceaux anacréontiques et de jolies petite

pièces comme la plainte eines Landmädchens et la

louange de divers animaux surtout celle du coq qui

est fort caustique ainsi que l'ode. An dem Laibstufe.

Comme ça aucun poète ne pouvait se passer de flatter

les monarques on a ici encore de louanges en grand

nombre de Pies 6 et Joseph 2.

Outre ceux-ci v.T. 2. 4. 8. 9. 10. 11. 12.

Oeuvres de Piron Tome 2.

Piron était bien loin d'être un grand poète. Cependant sa

Métromanie qui fait partie de ce volume est un ouvrage

charmant. Le rôle de Dames de Francalen[?] sont très bien

peintes et l'intrigue est assez attachante et surtout

on y trouve de très beaux vers. C'est un ouvrage qu'on

relit toujours avec plaisir.

Ses petits poésies contenues dans ce volume ne méritent

presque pas la peine qu'on les lise. Une ode sur la paresse

et surtout: une romance. Tout est bien comme il est

quoique trop indécente et jolie. Cette dernière est la

représentation de tous les maux qui s'en suivraient

si pour prévenir les infidélités, notre petite machine

pouvait être démontée et confiée à l'objet chéri.

La plupart des épigrammes sont contre Voltaire, Laharpe

et Maupertus et des personnalités ne plaisent

jamais longtems.

Les chansons signifient bien peu.

V.T. 14. No 13. 14. 15.

De Lannoy. Dichtwerken 1v.

Nagelaten dichtwerken 1v.


pagina: 255

Sans doute les reproches d'user de pièces d'occasion est[?]

de lieux communs n'est pas applicable aux

ouvrages de cette femme illustre quoique de tems en tems le

goût de son siècle perce.

Il y a de jolies Lettres surtout celle où elle défend les

femmes auteurs.

Le gastmaal est une satire fort gaie.

Les odes sont La reconaisance. L'éloge des défenseurs de

Leyde. L'influence de la poésie sur la religion et l'amour

de la patrie. Il y a de très belles strophes dans ces odes.

La seconde me plaît le moins. Cependant le nom d'ode

ne peut pas s'appliquer à de pareils morceaux qui sont

souvent si énormément longs.

Puis on trouve des monologues d'Auguste près du tombeau

de César, de Regulus, de Curies assez jolis quoiqu'un peu

longs. Des imitations de Jupiter et des sujets d'occasion.

Les oeuvres posthumes me plaisent moins. Cato à César

et la belle ode sur la bataille de doggersbank

sont les plus jolies pièces.

Schermer gedichten 1 Deel

On reconnaît dans ce poète beaucoup de génie une

lecture profonde des anciens et surtout une

grande richesse d'expression.

Meleager et Atalante la partie de ce recueil qui me

frappa le plus renferme un plan sage et des vers

superbes.

Les Heldendichten sans doute qui contiennent le récit

des opérations de chaque campagne de la succession

d'Espagne devaient offrir une grande monotonie

mais ce disciple d'Antonides sait embellir jusqu'à

d'arides détails.

Quant aux pastorales elles renferment de bons vers

mais je n'ai pas eu la patience de les lire.

Le Haarlemmer Hout et le Spaarne contiennent peu

de bons [onl.] mais ce n'est qu'une apologie ampoulée

où l'on a voulu traîner les métaphores à force

ouverte.

Les Mengeldichten ne sont pas fort intéressans.

Mardi 11 Octobre 1812

Polit.

Rien de nouveau la funeste catastrophe de Moscou

a rempli chacun d'horreur et à juste titre. Voilà les

fruits de la guerre.


pagina: 256

∙Nouvelles de ville

Le premier tirage de la loterie a eu lieu. Je veux en

donner la description que je tiens d'un témoin oculaire.

Le lieu de la scène était le théâtre Allemand dans l'Amstel-

straat. On avait fait une grande chambre du théâtre et des

parterres. Devant le théâtre était une estrade où se rendirent

Mr. le Préfet, Mr. le Maire, le sous-procureur. Sur le théâtre était

une grande table et sur laquelle il se trouvait nonante étuis de

bois parfaitement égaux. Il y avait aussi deux

roues avec des manivelles et des clapets. Les personnes qui

avaient des billets se trouvaient aux loges et le peuple

là où fut le parterre et en haut de la salle. Quand le

préfet fut arrivé la musique commença. À un certain signal

le contrôleur se lève et lit un décret sur l'établissement

de la loterie dans les 7 nouveaux départemens. Après cela

on jeta les étuis dans des balances pour montre qu'ils

avaient le même poids et après on les mit tous dans une

des roue. Vint ensuite un autre garçon qui en tira les

étuis et les donna au substitut-procureur qui les présenta

au préfet. Celui-ci prit une feuille de papier où était écrit

un numéro et le mit dans l'étui après qu'un homme

qui était debout derrière lui eut crié le numéro en

hollandais et français avec une voix de stentor. On en fit

ainsi des 90 numéro.

Le préfet donnait l'étui au Maire qui

le fermait et puis le contrôleur voyait s'il était bien fermé.

À chaque dixaine les numéros qui étaient mis dans

l'autre roue étaient bien secoués. Après cela un autre garçon

habillé lestement et ayant un long gant à l'un de

ses bras vient et est bandé. Après que la roue a été

tournée on ouvre l'un des clapets et un étui est tiré

on le donne au contrôleur celui-ci au maire qui l'ouvre à

moitié. Le préfet l'ouvre entièrement et lit le numéro

qui est répété par l'homme à la grosse voix et au même

moment on voit paraître le numéro au bout de la

salle et en dehors et après que cinq ont été tirés la

cérémonie qui ne dure pas plus qu'une heure est finie.

Il n'est pas incompréhensibles que cette loterie quoiqu'elle

soit en effet très désavantageuse attire tant le peuple

on voit le gain et non les pertes. J'entendais dire en

passant près d'un bureau de loterie. Il vient de

sortir une pauvre femme qui a emporté trente

six florins.


pagina: 257

Nouv. Dom.

Je fis chez mon oncle Rahusen un très beau tour en

voiture. Nous allâmes premièrement le Kleverlaan d'où

l'on a de fort jolies vues sur les dunes. Le chemin de là

par Bloemendaal à Velsen est fort beau. Tantôt on va à

côté des hautes dunes tantôt dans de belles allées

enfin partout à travers d'un chemin ravissant. Le chemin

de Velsen à de wijk que nous allâmes à pied est superbe.

Partout on voit une infinité de chemins où l'on peut

se promener et de très belles campagnes avec des allées

superbes comme celle p.e. de Mad. Hoeuft. De Wijk est une

rue très belle et large et le village auquel je

pourrais le mieux comparer Almelo. En passant nous

vîmes la ruine du château de Brederode qui était

bien diminuée de puisque je la vis la dernière fois.

Marché

Point de changement considérable. On répandit une bruit

que l'exportation des grains du Braband par terre mais

rien ne s'est encore constaté. Les prix ont un peu baissé

127.128 H. O. Marks. 378.380 gl. 129 H. N. Gr. 353 gl.

Le Colzad est dans la même situation Oostv. 50 à 50 1/2

Annales du Lundi

On raconta diverses choses. À table D. ne savait pas ce que

c'était qu'endosser une lettre de change. Il dit qu'il gageait

toujours impair. On se récria sur l'imprudence de ce mot.

Il répondit Je ne gagnerai plus de cette manière dans

vingt ans. P.d.C. dit qu'il lui démontrerait qu'il avait

perdu la boutique d'Apothicaire. J.d.V. dit à D. Je

parie un double sous qu'il ne l'ose pas. D. lutta longtems

mais enfin il tomba dans le piège Eh bien dit J.d.V. Pair

ou Impair. Impair. Vous avez manqué à votre

parole et outre cela vous payez un double sous. Au

dessert on vit arriver de la glace et on loua beaucoup

la générosité magnifique du bon médecin. Il raconta

qu'ayant ordonné à un Allemand qui avait vomi du

sang de prendre de l'eau de groseilles celui-ci avait

pris de l'eau de cologne.

D. avait raconté la semaine passée de M. Hugenholz qu'il

avait fait empailler un chien qu'il aimait excessivement

qu'il le baisait tous les matins et s'était brouillé

avec son meilleur ami pour avoir manqué de le

condoler à la mort de son chien. J.d.V. lui ayant

demandé quelque chose. Il dit J'aime mieux ne pas répondre que répondre mal.


pagina: 258

Littérature

Mosheim kerkelijke Geschiedenis 10 vol.

∙C'est un ouvrage qui mérite d'être lu tant par l'impor-

tance du sujet que par la manière dont il est traité.

Le style est pur clair et correct sans s'élever au sublime.

Les remarques sont judicieuses et impartiales. On pourrait

appeler une grande partie de cette histoire Histoire des

folies et égaremens de l'esprit humain.

Vertot. Révolutions de Portugal 1v.

Ouvrage excellent qui présente dans un cadre élégant

et un tableau rapide une révolution peu connue. Je

connais peu de morceaux en ce genre qui m'ont tant

plus. Je le lis pour la seconde fois et je le relirai

toujours avec un grand plaisir.

Racine le fils. La religion

∙La raison dans mes vers conduit l'homme à la foi.

∙C'est le début et le sujet du poème.

J'ai lu une anecdote dans un ouvrage compilé par Kotzebue

dans lequel il était dit que la religion était un tissu de discours

froids et sensés mais où il n'y avait aucune verve que

le vomisseur de comédies me permette de révoquer

en doute son jugement. Car quoique il y ait des momens

où l'auteur se perd dans une prose rimée, cependant

il y a souvent des morceaux que M. Kotzebue avec toutes

ses comédies ne pourrait jamais égaler. Tels sont l'existence

de Dieu Les oiseaux Siècle d'Auguste et plusieurs autres.

La phrase de Voltaire me paraît plus juste.

Le bon versificateur Racine fils du grand poète racine

Une foule de belles pensées y abondent

p.e.

Je pense la pensée éclatante lumière

Ne peut sortir du sein de l'épaisse matière

J'entrevois ma grandeur.

Cependant les nuits de Young surtout The infidel reclaimed

sont plus poétiques plus convainquantes, j'en conviens.

Mais aussi quelle différence entre un Catholique français

et un chrétien et penseur Anglais.

Souvent aussi on reconnaît l'auteur catholique comme

dans l'apostrophe aux hérétiques et dans le tableau du

jour du jugement où il représente tous les grands

hommes de l'antiquité un Titus, un Socrate condamnés

à des peines éternelles!!!


pagina: 259

Milton Poems 1 et 2

Paradise lost

Ubi plura nitent in carmine, non ego paucis

offendar maculis.

Voilà mon avis sur ce poème. J'en ai lu quelques parties

avec enthousiasme d'autres avec intérêt, d'autres avec

indifférence d'autres enfin avec de plaisir. Il y a sans doute

de choses superbes parmi lesquelles la description du

paradis, le ménage des premiers hommes, la séduction

la conduite après la chute, le caractère de satan la première

partie du 1 chant etc. etc. etc. car il y aurait trop d'ouvrage

à énumérer toutes les beautés. Mais d'un autre côté

je n'aime point ces descriptions de Dieu du ciel du Messie

ces idées Théologiques mises en vers puisque au lieu

d'agrandir l'idée de la divinité elles ne font que la

rétrécir. J'en conviens qu'il était difficile de priver un

pareil poème de tels accessoires mais c'est la partie

qui me plut le moins. Et au reste combien de choses

n'y a-t-il pas à admirer de jolis tableaux de belles

idées de superbes comparaisons. C'est l'ouvrage d'un grand

homme. Il y a des choses énergiques. Des pensées gigantesques

au dessus de l'imagination. Il serait ridicule de nier qu'il

s'y trouve beaucoup d'idées reprouvées par le goût tels

que cette histoire du péché et de la mort, cette salle où pour entrer

les diables doivent devenir plus petits; ces diables qui

disputent sur le péché originel, ces anges qui se jètent

avec tout ce qu'ils rencontrent ces blessures qui se ferment

tout de suite ce pont depuis l'enfer à la terre et

beaucoup d'autres choses mais ces tâches ne nuisent

point à la beauté de l'ouvrage. Le style de la Henriade

est plus beau plus soutenu que celui du Paradise

lost et cependant l'auteur de ce dernier ouvrage avait

sûrement la tête plus poétique son imagination

errait dans d'autres contrées et même sa langue si

propre pour les idées énergiques lui a été d'un

grand secours. L'obstination de Satan et son monologue

ont une espèce de sublime qui se rencontre peu. Quoique

il contienne de belles idées le récit prophétique de

l'Archange m'a plu le moins puisque je trouvais

qu'il était impossible à Adam de

comprendre tout ceci et surtout la rédemption.


pagina: 260

Mardi 20 octobre 1812

Peu d'événemens de quelque importance, peu de rencontres

ont eu lieu dans la semaine passée. Chez mon grand-père

s'est passé une aventure assez remarquable.

Il est appellé en bas à cause d'un homme qui veut lui

parler. Cet homme mal habillé fondant en larmes témoigne

être dans des transes et dit à mon gr.père vous pouvez me

sauver la vie. Il le fait entrer dans l'antichambre et l'homme

lui raconte en sanglottant l'histoire suivante. Il était

fils d'un certain van Ooi qui avait une fabrique de

porcelaine à une lieue de Bentheim. Son père était absent

lorsqu'en may 1811 un officier fut logé chez eux. Celui-ci

s'informa chez la mère s'il pouvait s'occuper chez elle

la place de son mari. Il est refusé. Dans la nuit il

force la porte de sa chambre et veut de force coucher avec elle.

À ce bruit ses deux fils accourent. L'officier se met en

posture perce aussitôt l'aîné. Le second c'était notre

homme prend une chaise et la jète à la tête de l'officier

et le tue. Il est arrêté conduit devant la cour d'assises à

Munster et condamné à 24 ans de fer. Dans la prison il

reçoit une visite de son oncle qui était pasteur des

mennonites à Leipzig et qui le conseille de s'évader et d'aller

à Amsterdam où il devait s'adresser chez un pasteur Mennonite

pour partir de là à Altona où il avait une

tante. Il était parvenu à s'échapper et demandait que

mon gr.p. écrivit à Leipzig mais sur son refus il demanda

de l'argent pour satisfaire un voiturier qui voulait

le prendre avec lui à Altona comme valet. Les craintes qu'il

faisait paraître tout inspira à mon gr.p. l'idée de le

secourir et il lui donne f 20. L'homme après cela demande

et reçoit encore une chemise et une badine. Il part

avec les plus vives protestations de reconnaissance et

voulait tomber aux genoux de mon gr.p. La servante

avait observé qu'il avait sanglotté encore dans l'absence

de mon grand-père. Il parlait un patois Benthemien.

Après-dîner il revient encore disant qu'il le

voiturier était parti mais qu'il pouvait

partir avec un vaisseau que cependant le capitaine

exigeait plus d'argent. Mon gr.p. qui en attendant

avait fait ces réflexions lui dit qu'il ne pouvait lui

donner plus. L'autre dit qu'il reviendrait le

lendemain avec le batelier il n'est pas revenu. À l'église

on a vu ce jour là un pareil homme qui demandait

où demeurait le plus ancien des ministres mennonites.

Quid est veritas et si tout est mensonge quel

comble d'hypocrisie.


pagina: 261

Bruilofts vaerzen qui sont tournés d'une manière

qu'on ne retrouve chez aucun auteur de son age puis

un vers sur l'honneur sur Leyden et un adresse à

Mr. le Francq.

Mercredi 4 Novembre 1812

Depuis l'époque de mes derniers annotations jusqu'à

Samedi Dernier, il s'est passé peu de choses qui fussent digne

d'être racontées.

Une conspiration avait éclaté à Paris. Le soin paternel

du gouvernement en fit avertir les négocians à la

bourse par deux commissaires de police pour qu'ils

ne fussent pas alarmés.

Ma grand mère était très malade.

Venons en à la petite excursions que j'ai faite.

À commencer de Samedi 31 Octobre.

Je partis Samedi matin avec la barque pour Harlem et

je traversai à Halfweg le chemin boueux qui menait à côté

des nouvelles curiosités qu'on a établis ici comme la nouvelle

tour les ponts-levis les batteries etc. Le soir nous allâmes

à[?] Leerzaam vermaak où nous vîmes représenter Natuur et

Pligt of de zoon regter over zijn vader et de oude Toneelspeler.

La première pièce est de Pelletier Volmeranges. En voici le

sujet.

Un général que nous nommerons Roger a réparé par ses

vertus les fautes de sa jeunesse. Il a vu traîner en prison

son père qui avait guarandé les dettes de son fils avec une

orpheline que son père avait élevé et qu'il aimait. Il a promis

dans un moment de séduction d'épouser la fille de Madm.

Volmanges. Celle-ci de son côté s'est appropriée les biens

de son mari qui appartenaient à une fille du premier

lit en la faisant exposer. On apprend qu'un traître qui

voulait livrer l'[onl.] aux Anglais a été arrêté. C'est le père

du général et il est élu son juge. Le père est condamné. Le

fils le fait évader et se met à sa place. Rosalie reconnue

par sa maraine est sauvée de sa fureur par le gouverneur.

Le père est rattrapé le fils trouvé en prison. On hésite

à exécuter la sentence. Mais l'innocence du père

est reconnue. Le général se marie avec Rosalie et tout le

monde est heureux.

Edmond le père

Walré d'une manière énergique et attendrissant.

le fils

Van der Vlugt De belles positions beaucoup

de feu c'est un très bon acteur.

Mad. de Volmanges

Mad. Kops elle joua ce rôle assez bien

mais sa laideur son costume et ses cris

nuisaient à son jeu. Elle a un air

assez commun.


pagina: 262

Rosalie

fut très bien rempli par Mlle. Gerling mais cette

personne n'intéresse pas beaucoup car le

principal intérêt se porte sur le père et le fils

∙Le gouverneur

Loosjes le remplit avec dignité mais sa

posture lui nuit dans les rôles sérieux

Le cipier P.

Mabe cet acteur n'avance pas beaucoup

Un valet

Le [onl.]

W.van der Vlugt

W. Walré

c'étaient des rôles de quelques lignes

Le vieux comédien est une fort jolie pièce de Picard. M. Walré

W. van der Vlugt et Loosjes y remplirent les premiers rôles.

M. Gerling fit d'une soubrette de théâtre qui ne signifiait

rien un rôle charmant.

∙Je soupai ce soir à Leerzaam Vermaak. C'est une société

très agréable et très joviale.

Dimanche au soir je fus à l'église mennonite où l'on baptisait.

L'église est bâtie d'une manière beaucoup plus jolie

que le n'est la nôtre à Amsterdam mais les galléries sont

fort petites. Elle est construite en ovale. D. de Vries parle

avec un peu trop d'emphase et veut trop embellir ses

sermons.

Je passai la plus grande partie du Lundi dans la bibli-

othèque de Mr. Walré. Il me lut plusieurs de ses vers

dont quelques-uns me plurent fort et nous épluchâmes

les défauts de mon Hannibal.

Hier je partis pour Leyde dans la barque de 6 heures. Je

sortis du Zeilpoort au milieu d'une obscurité profonde

et j'entrai dans la petite case faiblement illuminée

par une chandelle de nuit. Le chemin à Leide n'est

rien moins que divertissant. Nous en passâmes la plus

belle partie dans l'obscurité. À moitié chemin on

trouve une contrée aride et une auberge fort vaste

et d'une bien triste apparence. Après avoir passé dans

cette barque quatre heures mortelles nous arrivâmes

au Mare Poort et entrâmes dans une canal qui n'est

pas fort brillant. J'y débarquai et voyageai tout droit

au Pieters kerk, bâtiment fort vaste dans le goût de l'église

neuve à Amsterdam. Il y avait une foule de gens et

de dames. La chaire était couverte de velours rouge avec

des franges d'or. On avait fait pour le prince un trône

de soie bleu de ciel où se trouvait un siège pour lui.

Après que j'y eus erré quelque tems j'entendis une

concert de plusieurs instrumens détonna une musique

guerrière et on vit arriver le prince de Plaisance bigarré

de diverses couleurs chargé d'or et d'argent dont le virage

de chaîne ressemblait à celui d'un squelette. Il était

accompagné de M. Strassart du S. Préfet du Maire,

du sous-Maire et de quelques généraux. Après qu'il

eut pris place sur le siège que lui était destiné


pagina: 263

une autre porte s'ouvrit et l'on vit entrer

1. les bedauds, portant des sceptres d'argent surmontés

d'un aigle

2. le recteur et les doyens de l'université

3. Les professeurs en théologie avec des toges noires

bordées de Bleu et des togues le prof. Tewater avec sa

grande perruque faisait parmi eux une figure

singulière

4. ceux en droit avec des toges rouges

∙5. ceux en médecines avec des toges d'écarlate

6. ceux en belles lettres parmi lesquels Siegenbeek,

Van der Palm etc. avec des toges couleur d'orange

7. Les députations d'Amsterdam, d'Utrecht dans des

toges ordinaires, une députation de l'institut

8. Les étudians en noir avec des claques au nombres

de 200 à 300

9. Les valets du jardin botanique de Leyde

On commença par un petit discours de Mr. Brugmans

contenant un exposé de l'objet de la cérémonie. C'était en

Français. Personne y comprit goutte. Kemper lut ensuite les

ordonnances concernant l'académie et un programme sur les

opérations et travaux. Enfin M. Brugmans monta en chaire

et fit un discours en latin de plus d'une heure. Le bruit

qu'on faisait dans l'église empêcha qu'on en entendit

beaucoup. Il donna entr'autres une histoire abrégé de

la littérature et des académies.

Après qu'il eut fini la musique recommença et le prince

sortit avec son cortège. Je vis encore deux fois passer

le cortège des professeurs.

Je fus aussi encore sur le Breestraat. C'est en effet la

plus belle rue que je connaisse surtout près de la maison

de ville elle est majestueuse. Il y avait une grande affluence

de monde.

Leyde est en effet une très belle ville. On y voit encore

d'autres églises De Hooglandsche De Marekerk et

plusieurs belles rues mais le Breestraat

surpasse tout.

La police paraissait fort mauvaise. Les soldats y exer-

çaient une espèce de jurisdiction violente.

Le Heeregragt sur lequel demeure Mr. van Goeuns

est fort joli mais il y règne un silence terrible.

∙Tous les ponts sont de bois et beaucoup

sont des pont-levis doubles comme on en voit ici

plusieurs du côté du port.

Je retournai le soir avec le prof. van Lennep. C'est un

homme d'une conversation fort agréable.

Il y aurait ce soir la illumination et une sérénade

que les étudians font aux portes des professeurs.


pagina: 264

Mélanges

Mr. Walré me montra une édition du Speculum Salvationis

imprimée par Koster. C'était fort curieux il me prouva par

plusieurs raisons incontestables que ce ne pouvait avoir

été fait que par des lettres mobiles.

Il me montra aussi des anciennes éditions d'auteurs

allemands comme d'un certain Pertrarcha qui donne

des remèdes des conseils et des consolations pour tout

les cas qui peuvent arriver de l'homme depuis sa naissance

jusqu'à la mort, puis une très ancienne traduction de

Ciceron, un livre pieux imprimé à Cambrai en 1515. Une très

belle édition des Pastorales de Longin. Une superbe édition

anglaise de Virgile. Il possède les ouvrages de presque tous

les auteurs dramatiques en Français et en Hollandais. Je

vis aussi chez lui une ancienne édition italienne

d'Amadis de Gaule et un poème moral d'un très ancien

poète sicilien. Un ouvrage superbe sur les costumes grecs

sont requises dans les rôles des pièces des meilleurs auteurs

dramatiques français. Des caricatures par Leonard d'Avince,

de fort belles copies de médailles antiques. Des gravures

sur l'histoire d'Angleterre.

M. Koning qui publiera un ouvrage intéressant sur l'im-

primerie possède entre autres curiosités. Un album contenant

l'écriture d'une grande quantité de grands hommes avec

des vignettes emblématiques sur le caractère de

chacun d'eux.

M. van der Willigen doit posséder une belle collection de

nos anciens poètes.

M. Walré me lut aussi plusieurs de ses vers entr'autres ses

harangues à l'assemblée des chevaliers démocritains.

Un vers en hexamètres à Bilderdijk. Un vers à Arntzenius,

des idées sur une tempêté traduites de l'Anglais.

Un tableau de la résurrection de Lazare. etc. etc.

Le génie et l'érudition de cet homme sont étonnantes.

Annales du Marché

Lundi

Le seigle et le froment ont haussé considérablement par

le peu qui arrive.

127. 128 H. Marks à 410 gd.

120. 122 à Inl. Rogge. 300 gd. et hier 304 gd.

98 H. Vr. W. 186 gd.

100 H. Oude 173 gd.

Le colzad est aussi monté tant soit peu.

Voilà l'histoire de mon voyage de quelques jours

dans lequel je me suis fort bien amusé.


pagina: 265

J'ai vu le cabinet de M. van Varik. Il est très beau

dans toutes les parties de la Physique surtout dans ce

qui se rapporte au microscope pour lequel il a des objets

superbes. Au reste il n'est pas libre de la pédanterie d'un

maître d'école.

Études

J'en suis à expliquer et traduire Homère ce que m'enchante.

Église

Je fus chez M. Koopmans.

Texte Maleachi 1 v. 15. Een zoon eert zijn vader en

een knecht vreest zijn heer. Ben ik dan een vader waar

is mijne eere. Ben ik een heer, waar is mijn vreze.

Ces mots se rapportent aux vices des Israélites dans le tems

de ce prophète qui servaient sur les autels de [onl.] non

saines ce qui était défendu par la loi. Ils fraudaient

les revenus des prêtres. Il nous dit que quoique nous ne

fussions point tellement pervertis que cependant nous

négligeons trop Dieu et son culte. Il traite

1. ce que signifiaient ces mots

2. La peinture d'un homme vraiment religieux dans toutes les actions

3. Si nous étions pareils à ce modèle -Non et

Les moyens d'y parvenir. S. ord.

Mélanges

Un jeune homme qui ici s'était mal conduit et qui avait

une délicatesse sybaritienne écrit maintenant de Russie

où il sert dans l'armée qu'il avait bivouaqué plusieurs

semaines de suites et jouissait d'une santé parfaite.

Annales du Lundi

D. apporta deux poules qu'il anatomisa ce que causa beaucoup

d'admiration. Il montra tout le manège occupa toute la

soirée. À table rien d'intéressant.

Annales du marché

À cause des commissions sur le Genièvre à Schied.

les prix sont encore montés de quelques florins.

122 H. N. Inl. R. 271 gd.

Le Froment 124 Vr. 355 gd.

Colzad sans changemens Oostv. 49. 50 51 52 Li.

Orge 99 H. Vr. W. 175 gd.

Avoine 84 H. 86 gl. 74 H. voor 66 gd.

blé noir 118 H. Br. 41 L.

Littérature


pagina: 266

Curtius

Comme on exagère beaucoup je crois que l'on exagère

le peu de foi qu'on devait à cet historien. Car comme dit

la Harpe il écrivait la vie d'un homme extraordinaire.

Je crois p.e. que dans les descriptions des batailles etc.

il a donné un essort trop libre à son imagination.

C'est un auteur agréable à lire.

Milton. vol. 3

Paradise regained

J'avais regardé comme impossible malgré tout ce qu'on

racontait que l'auteur du Paradise lost eût fait un

mauvais ouvrage et cependant rien n'est plus vrai. C'est

en quatre chants un triste dialogue entre le sauveur

et le diable qui n'est aucunement comparable à l'autre

épopée de l'auteur.

Comus est une espèce de pièce allégorique sur la chasteté.

Les autres poésies signifient très peu de chose.

Koolaart

Puis que depuis quelque tems on fait tant de bruit de ces

poésies, j'avais été prévenu contre elles mais mon attente

a été trompée car j'ai été enchanté de ces poésies. Presque

toutes traitent des sujets intéressans et bien maniés. Il

n'y a aucun vers qu'on ne voudrait relire plusieurs fois.

Tous les vers sur les anniversaires du duc de Hesse

sont fort beaux, de schouwburg der verwoesting en Uitnodiging

aan mijne gespelen sont ce qu'on peut trouver de plus joli

dans le style sublime et léger. Elle faisait aussi très

bien des vers latins.

Mardi 27 Octobre 1812

Plusieurs nouvelles politiques mais qui ne méritent pas

qu'on y ajoute aucune foi. Celui-ci raconte que les

Français sont battus celui-là que l'Empereur revient

à Paris puisque le sénat a refusé de souscrire à une

nouvelle conscription et une levée de 60 millions.

Tous bruits vagues et indéterminés dans lesquels on ne

peut avoir aucune confiance.

Nouvelle de ville

La conscription continue. Mais on ne s'en apperçoit que

par les conscrits ou les remplaçans ivres qui font

un tapage affreux dans les rues. Quelques juifs avaient

essayé d'inoculer la galle mais cela a été

découvert et en suite de cela on a écrit à toutes


pagina: 267

les communautés de s'informer chez tous les pauvres

qu'ils alimentaient s'ils avaient la gale ou non.

Les commis de la régie tourmentent d'une manière

terrible les marchands de vin pour les forcer à

devenir détailleurs. Cela occasionne des procès et des

disputes sans nombre. Mr. Duterrage avait même écrit

à Paris que si ces vexations occasionnaient des émeutes

il n'en était pas résponsable.

La loterie continue encore à être un sujet général

de conversation. L'un raconte des faits encore plus

extraordinaires que l'autre de numéros choisis justes

des ambes ou des ternes qu'on a manqué. Mais tout

le monde convient que c'est une loterie fort défavorable

et tout le monde joue. Voilà les hommes et surtout

les femmes qui en général aiment beaucoup plus

les jeux de hazard veulent absolument en profiter.

Mélanges anecdotiques

M. Kist, l'auteur de l'anneau de Gyges. C'était un jour

dans une société on parla de littérature et entr'autres

de ses ouvrages. Oh monsieur dit une dame à Mr. Kist. Je

donnerais vingt ducates pour en connaître l'auteur.

Un régiment prussien ayant montré beaucoup de

bravoure l'empereur lui fit cadeau d'une aigle. Cet régiment

fut battu une autre fois. Celui qui portait l'aigle dans

la fuite trouvant ce poids trop pesant le mit en poche

et jeta le bâton. Le régiment s'était rallié les officiers

lui firent de vifs reproches de sa lâcheté et entr'autres

de ce qu'ils avaient permis que cet aigle le gage précieux

de la bienveillance de S.M. fut enlevé. O! reprit alors le

porte enseigne der Lustück[?] den habe ich im Tasche

Annales du Lundi

D. fit voir des

estampes anatomiques de Cuvier, Il dit que Béarn et

Berne était le même. À table il raconta une histoire

très invraisemblable de quelqu'un qui avait dit qu'il

toucherait le sein de la reine. Il déclara que la faculté

d'Amsterdam employait le double de tems pour en dépêcher

quelqu'un que celle de Leyde. J.d.V. crut que les femmes seules

avaient la Plica polonica et que c'était une maladie

de cerveau. D. ne sut pas ce que c'était que peremptoir

on lui dit que cela venait de pèremère, il ignorait


pagina: 268

disait-il, comment Van Huysen arrangeait ces

groupes de fleurs et de fruits pour les copier puisque

autrement ils devaient perdre bientôt le centre de gravité.

Il nous promit de l'anchois et avait envoyé un ananas

superbe.

Annales du marché

Le froment. Les mêmes prix environ 127. 128. V. 384. 386 gd.

Le seigle est monté de quelques florins par les commissions

de genièvre 122 H. 280 gd.

Orge est montée considérablement 103 H. N. Vr. W. 190 gd. prix

exorbitant.

Avoine est aussi montée.

Le Colzad les mêmes prix. Zeeuws 52. Cromh. 52 1/2.

Littérature

[volgende drie regels achter vorige drie regels met accolade]

Richter. Desc. de Moskou 1 v. Trois brochures assez
Voy. à la Val sainte 1 v. intéressantes surtout
Notice sur Horace Walpole les deux premières

J'en fait des extraits.

Marmontel les Incas. 1er v.

Le premier volume m'a supérieurement bien plu. La desc.

de la chute de l'empire du Mexique. La peinture des Indiens

réfugiés dans un coin du Panama qui trouvent Las Casas.

Molina qui veut sauver le Pérou le tableau de l'île de

Juan Fernandes les amours des deux sauvages le calme

au milieu de l'océan sont tous des morceaux

superbes. Je désire connaître le second volume.

Swift Travels of Gulliver

À travers le coloris ridicule on découvre beaucoup

de bon sens dans cet ouvrage p.e. la description qu'il fait

au roi du Brobignacques de la constitution d'Angleterre

les récits de nos guerres etc.[?] au bon Houynhums l'île

des mathématiciens l'académie des faiseurs de projets

les hommes immortels et l'île du sorcier.

De Kruif gedichten

C'est un bon poète mais non un homme de génie. Beaucoup

de ses vers ne peuvent s'appliquer maintenant. Il paraît

pourtant que ce fut un homme exempt des préjugés

poétiques d'alors lorsqu'on ne faisait que traduire

comme le prouve son morceau intitulé Eigenvinding.

Ses meilleurs poèmes sont sans contredit ses


pagina: 269

Littérature

Lessing Trauerspielen

1. Sara Sampson

Miss Sara a été enlevée de chez son père par un certain

Mellefort. Celui-ci fut premièrement attaché à une

femme prostituée nommé Marwood. Elle veut rentrer dans

ses anciens droits mais Mellefort la fait enfin consentir

à se retirer. Cependant elle veut voir sa rivale. Elle la voit

se trouble et feint une indisposition. Elle revient achever sa

visite et dans l'absence de Mellefort elle empoisonne

Sara qui meurt pendant un acte entier. Son père qui a tout

pardonné revient enfin et trouve sa fille mourante. Mellefort

se perce sur le corps de son amante.

Lessing écrit bien mais cependant je n'aime pas de pareilles

tragédies. Les crimes même dans un rang plus haut ont

toujours un certain air de grandeur et conspirent une

forte horreur mais tous ces empoisonnemens dans des

conditions les plus basses n'inspirent que de dégoût.

2. Philotas

Ce jeune prince est fait prisonnier par un roi ennemi

de son père. Il apprend que le fils de ce prince est également

fait prisonnier et pour laisser à son père tout l'avantage

d'une pareille capture, il se tue.

Je ne puis trouver beaucoup d'héroïsme dans cette action.

3. Emilia Galotti

La belle Emilie est fiancée au comte Appiane. Le prince

l'a vu et l'aime. Pour remplir ses désirs le chambellan

a posté des assassins, le comte est assasiné et elle enlevée

dans ce palais du prince. Le père l'y voit et nouvelle

virginie elle préfère la mort à l'infamie et est tuée. C'est

sans doute le meilleur des trois drames. Il y a des beaux

caractères mais celui de ce père à la fin est incom-

préhensible.

Manlius

Manlius médite une conspiration. Malgré les avis de

Rutile il en fait confidence à son ami Servilius qui

a contracté un mariage clandestin avec Valérie fille

du consul. Dans un moment de faiblesse il confie ses

projets à son épouse. Elle découvre la conjuration

aux sénateurs. Servilius se repent il saute avec

Malius du sommet de la roche Tarpéjenne. Valérie se

perce.

C'est une belle pièce et de beaux vers. Le caractère

de Manlius est mâle. Mais il n'y a pas assez d'action

dans la pièce et je trouve qu'il règne trop de

langueur dans les derniers sites.


pagina: 270

Regnard

Les Menechmes

Imitées de Plaute mais adoptées aux moeurs fran-

çaises. C'est une pièce très comique par les quiproquos

qui s'y rencontrent.

Le légataire universel

Cette pièce roule en grande partie sur un valet qui

premièrement par des déguisemens fait desgrader deux

héritiers et ensuite fait dresser un testament en

contrefaisant un oncle qu'on croit mort. Il règne

beaucoup de gaîté dans cette pièce.

La critique du Légataire. Une petite pièce pour remplir

la durée du spectacle mais qui n'égale pas la critique

de l'école des femmes.

Shakespear. Death of Cesar

Dans le goût de toutes les pièces de Shakespear on

y voit même la défaite et la mort de cassius et Brutus.

Cependant il s'y trouve des morceaux excellens

entr'autres Le discours de Brutus et d'Antoine la dispute

de Cassius et Brutus etc.

Wetsteen het gelukkig ongeval Bl. eind. Tr.

Une espèce de drame héroïque des imbroglios des

reconnaissances des enfans supposés. Walré me fit lire

cette pièce comme un exemple de ces pièces qui contient

beaucoup de peine et qui sont oubliées aussitôt

que faites.

De Venetiaansche drielingen

Une intrigue Italienne des quiproquos occasion-

nés par trois frères qui se ressemblent parfaitement.

[onl.] Volksmärchen Vol. 1er

Des histoires d'enchantemens du tems chevaleresque

qui sont assez amusans à lire le premier volume

contient: La foret enchantée la belle Ruhilde,

le miroir merveilleux et les écuyers de Roland.

Arnaud. Délassemens de l'homme sensible

Il y en a une foule de volumes mais je n'en ai lu que

quelques pièces. Il y a des peintures beaucoup trop horribles

et d'autres trop sentimentales. En général tout y

est exagéré. Il y règne aussi trop de monotonie. Cependant


pagina: 271

de tems en tems on trouve des contes attachans etc.

des anecdotes historiques assez intéressantes,

Henneboo gedichten 1 vol.

Cet homme peut être regardé parmi les poètes comme

Jan Steen parmi les peintres quoique dans un

grade moins élevé on peut appliquer à sa vie le

proverbe hollandais. Twaalf ambachten, dertien

ongelukken.

L'élégie sur la mort d'un pinson serin chien et cheval

ne m'a pas singulièrement plue.

L'éloge du genièvre renferme des idées fort ingénieuses.

Il finit par ces vers:

In 't kort geen ambacht of hanteering

Geen kunst geen koopmanschap geen neering

Ter zee of land in 't groot of klein

Of voert Jenever in zijn trein

Le premier vers de noce consistant dans un playdoyer

devant la cour de Cypris en toutes formes est très

joli.

Le reste consistant en dédicaces la partie

d'une pièce de théâtre etc. ne signifie pas beaucoup.

Kuypers Dichtoefeningen

Un poète misérable qui se croit poète pastoral qui

vomit des injures contre les Anglais qui donne

une grande quantité de vers où il maudit les

ballons enfin qui pour son honneur n'aurait pas

du arracher ses vers au sommeil du portefeuille

Mercredi 11 Novembre 1812

Voilà une semaine que je suis retourné de Harlem

et rien ne s'est encore passé de remarquable. On n'entend

point de nouvelles politiques tout est calme excepté

ceux qui ont des papiers sur la Russie et comment

ceux-là feront reste encore à deviner.

On avait répandu un faux bruit que la trésaurie d'Amster-

dam payerait ses dettes. Il paraît qu'elle est dans un

état désastreux. S.M. lui a donné l'octroi et par ce

moyen toutes les contributions des ventes etc. que la

ville percevait toujours qu'on a même offertes et

qui seules formaient un revenu de 80 à f 100.000 ont été

annullées puisque le préfet disait que l'octroi remplaçait

tout. On a envain présenté des requêtes et lorsque

de quelque manière on est en fonds chez le

préfet s'en empare sous quelque prétexte.


pagina: 272

Dimanche chez Koopmans. Un texte d'Jasie[?] appliqué

d'une manière singulière sur les circonstances présentes

avec des applications et des raisonnemens assez lieux

communs.

L'uniformité qui règne ici a été en quelque manière

interrompue par la fête qui a eu lieu à l'occasion que

la société Doctrina et Amicitia avait subsisté 25 ans.

M. Rawenhoff qui faisait un discours a très sagement

passé entièrement l'objet de la fête et a parlé de la femme

regardé sous les trois aspects de beautté, vertu, et sagesse.

On a eu une collation de la musique un bal enfin

tout ce qu'on pouvait désirer.

Point de jour de famille à cause de cette fête.

Annales du Marché

Tous ces vaisseaux qui avaient été retenus par les vents

dans les ports de la frise et la Groningue sont abordé

en grands nombre apportant 5 à 600 Last de froment. Ceci

a occasionné d'abord une grande stagnation dans la

montée extraordinaire de nos prix. 127 H. à [onl.] gd. c'étaient

les prix. Hier par une espèce de surprise on a vendu 6 last

127 H. à 395[?]. Aujourd'hui on voulait placer tout ce

froment qui était arrivé à la fois pour 127 H. 380 gd.

Nous avons refusé. On a encore vendu 130. 131 H. 210 gd.

On veut faire baisser le seigle dont il est arrivé

environ 100 lest.

Le Colzad est monté tant soit peu Vries 58 L. Oostv. 55. Ro. f 56

Les autres grains sont baissés.

Littérature

Rhulières Anarchie de Pologne 4 v.

C'est un ouvrage de mérite rempli de choses intéressantes

quoique peut-être et ça et là il y manque un peu d'exac-

titude et que l'auteur va souvent trop loin dans

ses dégressions comme dans celle sur les affaires

de la Russie et sur l'expédition en Grèce. C'est dommage

que l'ouvrage ne soit point achevé et que les derniers

chapitres ne soient que des précis.

On peut remarquer que l'auteur est porté contre les Russes

qu'il tâche à noircir.

Le style est en général fort beau.

∙Vide ext.


pagina: 273

Je continue encore mes fouilles parmi les acquisitions

que ma bibliothèque a faites pendant les dernières années.

Gay Poems 2 vol.

C'est un auteur charmant et je me repens aucunement

d'en avoir donné tant d'argent.

Rural sports est un très joli essai sur la campagne.

The fan joli poème. J'aime beaucoup l'endroit où chacun

des Dieux dit ce qu'il veut qui y soit peint. Il y règne

beaucoup d'imagination et on y trouve de très belles

imitations des anciens.

Pastorals. Je ne suis pas grand amateur de pastorales.

Ceux-ci qui sont une espèce de medium entre le sérieux

et le comique, renferment quelques jolis traits mais j'aime

encore mieux celles de Pope. Il y a aussi beaucoup de

vieux mots.

Trivia. Un poème charmant en trois chants sur la manière

de se promener à Londres rempli d'épisodes analogues.

Epistles

Ces lettres sont jolies. Il y en a une où comme Horace

il fait la description d'un voyage.

Tales

Quoiqu'un peu gais ils sont fort jolis surtout celui

intitulé a true story of an apparition.

Les Eclogues et Miscellanies ne m'ont pas fort plus non

plus qu'une comédie et une pièce qu'on nomme

tragedie pastorale.

Spex. Gedichten 2 vol.

C'est un auteur du tems de nos poètes monotones. Ce n'était

pas un homme sans génie mais sans goût. Deux

volumes pleins de vers d'occasion de noce de naissances

de morts. etc. etc. etc. On trouve quelques jolies épigrammes

et Bijschriften dans la manière de De Dekker.

Spandau. Gedichten

C'est un poète dont je fais grand cas surtout dans le

génie érotique et Anacréontique, Son Hogefeest der liefde

est vraiment un chef d'oeuvre. Son vers Waarom ik

vrouwen bezinge respire une naiveté charmante.

Trajanus est un peu prosaïque.

Le meilleur vers après ceux-là sont Bilderdijk, Dichtren

loon Huislijk geluk Vriendschap en liefde et

plusieurs petits vers.


pagina: 274

Mecredi 18 Novembre 1812

La nouvelle continue dans les bulletins de la retraite de

S.M. de Moscou a répandu ici le plus vif intérêt. Chacun

croit être bien informé des désastres de l'armée française. Celui-ci

dit que les Russes sont déjà à Wilna. Celui-là a lu le bulletin

du général Russe où il dit qu'à la vérité il a perdu 15000 hommes

à la bataille de la Moskwa, mais que les Français en avaient

perdu plus et qu'il avait dû se retirer puisque comme général

subalterne il ne pouvait pas risquer le tact en une fois. Les

prétextes dont les français se servent pour éluder les reproches

qu'on pourrait faire au sujet de l'abandon de Moscou sont

très faibles. On dit que le préfet a dit La campagne de l'empereur

n'a pas été heureuse. Il a déjà perdu deux cent mille hommes.

On dit que les Russes et les Suédois sont réunis, que l'empereur

n'a jamais possédé plus que la grande route de Wilna à Moscou,

que les cosaques lui font beaucoup de mal, que tout

n'est pas encore appaisé à Paris, que l'armée française

est accablée par les fatigues, que dans peu on entendra

des nouvelles plus importantes, qu'ils n'ont presque plus de

chevaux tandis que leurs ennemis sont montés sur des

chevaux tartares. Il y a même quelques-uns qui

vont jusqu'à dire que l'empereur lors de la retraite

de Moscou était déjà mort. Le tems enseignera tout...

Il paraît incontestable que l'émigration d'une foule de

personnes qui se vont établir à Campen en Gueldres a dimi-

nué le nombre de nos citoyens. Enfin n'est-ce pas le meilleur

parti car que faire ici plus longtems pour n'apprendre que des

nouvelles presque toujours désagréables sur quel bien

peut-on fonder quelque stabilité. Les maisons baissent de

prix en prix chaque jour. Les effets sur la Hollande sur la

ville la Suède la Russie tout est dans un état fort triste

et que pourrait dira-t-on la diminution des dépenses du

riche. Ce sont elles qui font fleurir le pauvre et l'artisan.

Tout se prépare ici à une diminution totale. On démolit

les maisons et bientôt Amsterdam ne sera plus qu'une

ombre de ce qu'elle a été et l'étranger surpris cherchera

peut-être un jour parmi des ruines à demi-inondées

où fut Amsterdam.

Une autre chose non moins triste c'est la démolition de

presque toutes les campagnes qui sont

mises en vente. Bientôt l'on ne verra là où s'élevaient

de superbes maisons de plaisance fruit des épargnes de

nos ancêtres et des jardins embellis par le goût de

leurs descendans que des prairies uniformes et des

tristes débris.


pagina: 275

En voilà déjà 4 dans le voisinage de mon grand-père qui

sont exposés à ce sort affreux. Bereveld et Wallenstein ont

déjà entièrement ou en partie subi ce sort. Vijverhof et [onl.]

doivent le subir. Une quantité d'autres campagnes ont été

abattues en divers lieux. Cette diminution diminue aussi

le débit par conséquence la prospérité des villages près

desquels elles sont situés et en conséquence l'adversité

d'un seul particulier diminue la prospérité d'une

quantité d'autres.

Dimanche M. Muller a fait un très beau sermon sur

Jésus en prière. Il a démontré les avantages de la solitude

la nature et la nécessité de la prière l'excellence du carac-

tère de Jésus dans un style fort beau et pur et une déclamation

assez agréable quoique monotone.

On a lu au jour de famille un certain discours que

M. Kemper a prononcé dans une certaine société et où il

démontre l'influence de l'esprit du jour sur l'étude des

sciences. Ce discours est trop lié pour en faire l'analyse.

Il y a des traits d'une hardiesse étonnante. C'est encore un

langage digne d'un hollandais.

Annales du Lundi

Quoiqu'il y eut beaucoup de vivacité dans les discours cependant

peu de traits peuvent en être conservés. D. mange chez Walen

du hareng sec. Il apporta du tabac de feuilles de châtaigner avec de l'huile de [onl.]

qui coûte 1 sou et est revendue pour 6 sous. D. ne pouvait comprendre

combien cela faisait p. cent. Le gr.p. parla fort au long

sur l'origine du mot Pontifex.

Annales du marché

L'arrivement de tant de vaisseaux chargé de Grains avait

fait baisser considérablement les prix on avait vendu 100 H.

Mark T. pour 375. Mais bientôt les prix ont repris faveur.

Vendredi 128 H. 393 Lundi 130 H. 406 gd. 123. 124 H. N. gr.

355. 360 gd.

Le seigle qui premièrement baissait est monté par ce que

plusieurs qui s'étaient engagés a en livrer n'avait point

reçu leurs parties 122 H. 300.

Garst 100 H.N.V.W. 192 gd.

Haver 88 H. fijne vr. 101 gd. 76 H. voer 75 gd.

Le Colzad est monté quelque peu par le froid que

nous avons eu quoique de mémoire d'homme les magasins

de Zaandam n'aient jamais été si pleins.


pagina: 276

Littérature

Jonker. Fransen Oorlog 1 v.

C'est un ouvrage très intéressant provenant des annotations

d'un prêtre qui pendant le siège et l'occupation de Rotter-

dam par Brederode. Cet ouvrage a été rédigé par un certain

van Alkemade. C'est une pièce très curieuse pour notre

histoire il serait à souhaiter que nous eussions des mémoires

pareils sur plusieurs autres événemens de notre histoire.

Stijl. Opkomst en bloei der Nederlanden 1 v.

C'est un ouvrage superbe. Un style éloquent de très beaux

portraits des réflexions judicieuses enfin le morceau le

plus philosophique que nous possédons sur notre histoire

C'est un ouvrage que je relirai toujours avec le plus grand

plaisir le vers qui le finit est très intéressant.

Michaux Printemps d'un proscrit 1 v.

C'est un ouvrage dont je m'étais formé une plus haute idée.

Il y a à la vérité quelques belles déscriptions surtout celle

de la fin d'une belle journée de printems mais beaucoup d'imi-

tations et des répétitions continuelles. C'est toujours le

printemps et toujours la proscription. C'est un ouvrage

où il y a des beaux vers mais qu'on ne relira pas.

De beer Poortugaal

[achter accolade achter vorige regel de twee volgende:]

Ledige uuren

Dichtpoogingen

C'est un poète qui renferme de très beaux morceaux. De onsterf-

lijkheid en contient quoique trop répétés. Puis bij de graven

Aan mijn meisje en Nemo ante mortem beatus.

Le second ouvrage renferme une espèce de poème didactique

De deugd où il y a de l'imagination de très beaux tableaux

et qui selon moi est le chef d'oeuvre de l'auteur.

Het geweten renferme de beaux morceaux mais est trop

long. Puis Aan mijn vaderland en lotverwisseling.

∙Ce qu'on peut reprocher justement à cet auteur c'est

des répétitions et le retour fréquent des mêmes images.

Dieu qui soigne le Chérubin et n'oublie pas le ver

De vorst die gelijk aan den slaaf is des diatribes contre

les rois et puis à tous momens kabblende beekjes

bloemen roozen en doornen et enfin une foule

de pareils lieux communs poétiques.


pagina: 277

Mardi 1 Décembre 1812

Diverses causes m'ont empêché d'écrire la semaine passée.

Ma grand-mère a été dangereusement malade et elle l'est encore.

Déjà revenant de la campagne elle avait attrapé un Rhuma-

tisme. Elle était déjà sur le point d'être rétablie lorsque une

nouvelle attaque la mit aux portes du tombeau. Elle était

dans un état terrible. Les médecins même l'abandonnaient on

aurait dit qu'elle n'avait plus que quelques momens à

vivre et on attendait à chaque instant la nouvelle de sa

mort. Cependant au milieu des tourmens qui assiégeaient

son corps son âme était tranquille et son esprit aussi serein

qu'il pouvait être. Ceci faisait de ce lit de souffrances véritablement

un lit de mort tel qu'il nous est représenté par les poètes et

les romanciers. Elle était là avec la sérénité d'un ange

attendant avec résignation le moment qui devait l'enlever

de ce séjour de douleurs. Elle ne voyait devant elle qu'une

éternité consolante, la récompense du juste. O Religion que

tu es belle dans de pareils momens lorsque le faible mortel

près d'être livré à une destruction totale en apparence

s'abandonnant à ton flambeau tombe sans frémir dans

le sein de son Dieu. O de quel appui est alors une

conscience pure qui ne reproche aucun crime et qui laisse

voir à l'esprit un [onl.] et heureux qu'on a fait. Ces scènes

douloureuses et touchantes se multipliaient à l'infini et

rendait tous les assistans navré de douleur. Tantôt c'était

mon grand-père qui lui répétait des versets qu'elle

aimait. Elle prenait congé de tous ses enfans. Je n'oublierai

jamais le moment où je fus introduit auprès d'elle. Elle

me pressa la main me tirant à elle et me baisant

avec effort elle me dit Soyez le soutien de votre père et j'espère

que nous nous reverrons dans une autre vie. Non jamais

le souvenir n'en sortira de ma pensée et cette seule pensée

me sera toujours un encouragement pour suivre le sentier

de la vertu et puisse le ciel débonnaire m'accorder la

faveur qui sur mon lit de mort je puisse être aussi calme

aussi confiante et aussi glorieux d'une vie sans blâme

dans laquelle j'ai répandu autant de bien que j'ai pu.

Cependant sa crise est devenue moins dangereuse et quoique

mortellement affaiblie nous avons cependant encore

l'espérance d'une guérison qui comblerait nos voeux.

Ma tante Rahusen et ma mère ne quittent point le

chambre de la malade et remplissent tous les devoirs

si doux de la piété filiale.


pagina: 278

La semaine passée on a distribué le baptême à plusieurs

de mes amis. M. Koopmans prêcha son sermon fut très bon

et sa harangue à ceux qui devaient être baptisés très

belle. Il faut pourtant convenir que c'est une cérémonie

très touchante et qu'elle doit servir efficacement à retenir

ceux qui en sont l'objet sur les sentiers de la vertu

et de la religion. Le Belijdenis-preek avait été fait par

M. van Gelder sans aucun goût ni onction.

Avant hier je fus chez M. Stuart qui prêcha Hebr. 4. v. 15 sur

les tentations sur la nature de celles que le sauveur dut

essuyer sur la nature des nôtres et sur la manière d'y résister.

La dernière partie surtout débitée avec son feu et son éloquence

naturelle était très belle.

Il y a eu un Allemand qui a ouvert un théâtre de

déclamation où l'on déclamait des pièces de vers Allemandes

à f 2 mais il n'a donné que deux représentations.

La troupe française donne assez de contentement ils

ont donné à plusieurs reprises le mariage secret.

J'entendis la semaine passée un discours de mon cousin Kops à

Felix.

Il commença par dire que parmi les hommes qui avaient

illustré notre patrie vers la fin du 17en siècle on pouvait

compter P. Francius connu par ses ouvrages en vers et en prose.

Qu'il avait entr'autres publié deux harangues de catilina avec

des annotations comme on devait les lire ou prononcer.

Qu'il ne savait pas qu'il existât en Hollandais un pareil

ouvrage mais qu'il voulait donner un essai dans ce genre.

Il analysa ensuite les morceaux suivant dans ce goût et

les lisait puis en observant toutes les remarques qu'il

avaient faites.

Engelberts. Le bonheur de deux époux Eelhart et Eusebia.

Stijl Douleur générale après la mort de Guillaume 1er.

Brandt Description d'un combat naval.

Heemskerk Une demoiselle conduite en mer par son galant.

Hooft Amour de Zanobie et Eleonore.

Cette société de Felix vient de perdre un membre

très utile dans la personne de Fokke Simonsz. C'était un homme

d'une vaste érudition d'un extérieur modeste et même assez

bête et d'une gaîté satirique mais qui était presque

entièrement perdue après qu'il avait été arrêté et confiné

quelques tems par les ordres de la police. Il a été magnifiquement

enterré par une société V.W. dont presque

tous les auteurs étaient membres. Ils ont jeté chacun

une [onl.] de terre sur son bière et Van Hulst a prononcé

un vers fait par Westerman.

On a publié une défense d'inhumer dans les tombeaux

après l'époque du 1. Janvier. Ces tombeaux valaient de


pagina: 279

l'argent étaient une possession on les mure sans en

donner du dédommagement. Quelle bonté.

Le nommé Pasman vient de subir sa sentence avec beaucoup

d'humiliation selon les uns de courage selon les autres et selon

d'autres enfin avec beaucoup de brutalité.

mais il

faisait un tel brouillard que presque personne n'en a pu

voir quelque chose.

Annales du Lundi

La chose principale qui a été agitée fut celle de Mad. v. Strick

qui avait été chez Dylius et l'avait voulu engager à soussigner

sur son Virgile. Il disait que mon oncle ne pourrait y résister.

Celui-ci dit qu'oui mais voulait parier ce que Dylius

refusait il dit qu'il ferait alors défendre sa

porte à Mad. van strick. Cette contention fut longue et des

deux côtés surtout de celui de J.d.V. on répéta toujours la

même chose.

Annales du marché

À cause de la saison il règne une très grande stagnation

dans le commerce du froment. 127 H. Mark est noté. 195 gl. mais

on ne peut vendre à ce prix. Le seigle est encore baissé

122 H. 388 gl. Colzad est baissé d'une L. Norder 68.

Littérature

Marmontel les Incas Vol. 2.

Ce vol.-ci n'est pas moins intéressant que le premier surtout

par l'épisode intéressant de Cora. On voit ensuite la descente

des Espagnols l'attaque de Tumbes la mort d'Amarile enfin

la perfidie des espagnols l'emprisonnement

d'Ataliba la mort d'Alonzo. Celle d'Ataliba et enfin

la sujétion entière du Perou.

Le style est très beau et la fable assez suivant l'histoire

mais Pizarre est peint sous un jour trop favorable et les

choses sont tournées pour l'excuser de divers crimes. Le

caractère d'Ataliba est aussi trop beau.

En général c'est un bel ouvrage c'est plutôt un roman

historique qu'un poème en prose. Il y a de très beaux

morceaux et différens autres épisodes tels que las Casas

nourri à son lit de mort du lait d'une Indienne Pirore

voyant à Séville l'exécution sanguinaire d'un

Autodafé.


pagina: 280

Shenstone works

C'est un fort joli poète avec beaucoup de sensibilité de goût

sans flatterie vers d'occasion.

Parmi ces Elegies il y en a de fort jolies sur les moeurs des

anciens bretons sur la vie agréable et paisible d'un campagnard

etc. mais dans quelques-unes les allusions sont trop forcées

et d'autres sont très difficiles à comprendre.

Odes songs renferment de jolies petites pièces

Levities or piece of humour signifient très peu de chose

Moral pieces sont très belles

The judgment of Hercules est un morceau excellent

The progress of taste signifie moins

Economy est un avis très bien écrit et très utile

The ruined abbey est un très beau coup d'oeil sur l'influence

de la superstition en Angleterre

Love and honour est une très belle histoire d'une Espagnole

amoureuse d'un anglais

The scoolmistress est un tableau charmant par sa

naïveté et sa vérité.

Pope Essai on Man

J'ai relu encore cet ouvrage. C'est un très beau style en général.

Il y a des pensées remarquables par leur hardiesse et

leur justesse. C'est un bel ouvrage.

Addison Cato

C'est une très belle tragédie. Il y règne beaucoup d'élévation

de sentimens de beaux vers et surtout le caractère de

Caton qui présente des situations très belles et attachantes.

Le caractère du Jeune Juba est aussi beau

son amour pour la fille de Caton y est bien placé

mais l'amour des deux Catons pour Lucia et le mariage [onl.]

à la fin de la pièce ne me paraissent qu'un remplissage.

Koppen über Homerus

Ce petit ouvrage quoique imprégné de l'esprit Germain renferme

de fort belles idées sur Homère sa vie ses Dieux ses carac-

tères quelques principes y sont fort bien exposés comme

l'origine des religions des Grecs de leurs Rois etc.

∙J'ai lu les notes qui se rapportent au 1er livre. Elles

sont en grande partie grammaticales mais contiennent

aussi beaucoup d'éclaircissemens historiques et

géographiques.


pagina: 281

Lundi 7 Décembre 1812

Rien de bien intéressant. On continue encore de tems en tems à

répandre de mauvaises nouvelles sur les affaires de l'Emp. Chacun

est en extase des Cosaques. Au reste les esprits des hommes sont

bien différends. J'ai parlé à des personnes à Harlem qui trouvaient

l'incendie de Moscou par les Russes un acte de grandeur.

Quant à l'état intérieur de la ville tout est tranquille. La police

se fait craindre le peuple obéit. Point de murmures rien. On reçoit

de tems en tems les nouvelles concernant ceux qui ont péri à

l'armée parmi lesquels le fils du prince de plaisance. Si l'on

doit en croire les Rapports la police étendrait ses soins jusqu'aux

particularités les plus minutieuses. On a défendu à un libraire

d'exposer une estampe où l'on voyait Louis 16 guillotiné. Un

perruquier avait devant sa boutique un buste qui ressemblait

fort à l'empereur il a dû le retirer. On dit que l'hist. de la [onl.]

Konijnenberg a pareillement été défendue.

Ainsi l'on évite tout ce qui pourrait causer quelque émotion

quelque réflexion et nous ne sommes pas dans ces tems dont

parle Tacite où il était permis de penser ce qu'on voulait et

de dire ce qu'on pensait.

Lange a fait deux discours à Felix sur un sujet bien

singulier c.à.d. sur les Syrènes. On a beaucoup admiré son

éloquence.

Avant hier c'était St. Nicolas. C'est bien la plus sotte fête qu'on

puisse s'imaginer. Une foule considérable de gens en besogne

les boutiques des vendeurs de friandises élégamment décorées

des surprises représentent tous les objets dont on se sert dans

la vie des fruits des fleurs ustensiles verges boîtes etc. etc. choses

qui coûtent une infinité d'argent et qui ne signifient ni

ne sont bonnes à rien. Puis une infinité de bonbons qui ne

sont pas moins chères des dames quelquefois de jolies filles

pour donner encore plus d'appât à la marchandise et même

chez quelques-uns des rafraîchissemens des liqueurs des

glaces etc. enfin tout ce que peut rassassier le gourmand

le plus décidé. Enfin voudrait-on croire que dans une ville

protestance civilisée comme Amsterdam on trouvât encore

assez de gens du peuple et même d'une classe

plus élevée qui font croire à leurs enfans que St. Nicolas prend[?]

des chaînes est assis sur un cheval blanc descend par la

cheminée qu'ils doivent lui adresser des prières etc. et mille

bêtises pareilles.

Hier c'était la grande fête de l'anniversaire du couronnement

de sa Majesté. Premièrement de pareilles fêtes attiraient

un intérêt général. Maintenant personne n'en parle.

Hier au matin il y a eu service en son honneur. Mais l'après


pagina: 282

on a prêché tout ordinairement sans s'inquiéter de rien

et on a bien fait. Mon grand-père a prêché sur une apparente

contradiction de St. Luc et de St. Paul et il a recommandé la

lecture fréquente des ste. écritures. C'était un fort bon sermon.

Le soir quelques illuminations qui ne signifiaient rien

comme à l'ordinaire.

Littérature

Robertson. History of America 3 v.

C'est un fort bel ouvrage. C'est dommage qu'il ne soit pas achevé

car cette partie-ci ne contient que l'histoire de l'Amérique

Espagnole. Robertson n'est un historien philosophe judicieux

il narre avec précision élégance il intéresse le lecteur mais

on n'y trouve ni l'éloquence des anciens ni le style et les

beaux tableaux de Hume ou ses anecdotes et petis traits

et encore moins ses portraits.

Rotgans. Willem de 3de. 4o

N'ayant jamais lu cet ouvrage j'avais cru que ce serait un

véritable poème épique mais ce n'est aussi pour ainsi dire

qu'une vie en vers et l'hist. de Guille 3. depuis sa naissance

jusqu'à la paix de Rijswijck. Ce que me rebute le plus dans

ses ouvrages c'est l'ordre historique qu'on suit et la monotonie

qui y règne par les continuelles descriptions qui se ressemblent

de sièges de batailles sur mer et sur terre etc. Et les batailles

des modernes qui se ressemblent beaucoup et où l'on ne

voit pas comme dans ceux des anciens des héros grecques

égal aux Dieux et supérieurs à tous les autres guerriers

n'offrent pas le coloris poétique des combats d'Homère ou

de Virgile.

Une grande difficulté parmi les poètes épiques a toujours été

le merveilleux, surtout chez les poètes modernes. Celui des

anciens était sans doute le plus fait pour la poésie mais

on vit naturellement l'incohérence de s'en servir dans des

sujets modernes. Le Tasse a pris la féerie à laquelle l'on

croyait encore dans son temps. D'autres à l'exemple

de Milton ont pris des anges et des démons. Voltaire a personifié

la discorde le fanatisme etc. Mais cet auteur-ci a conçu

l'idée bizarre de mêler tous ces merveilleux ensemble. Chez

lui on voit tantôt et le plus souvent tous les dieux du

pagatisme Mars Bellone Jupiter Éole Phebus Galatée Bacchus etc.

et tantôt des fleuves et même des états. La Tamise avec

ses nymphes. La vierge de la Hollande etc. tantôt la religion

qui s'adresse à Guillaume 1 et une foule d'êtres pareillement

métaphysiques et enfin le dieu des chrétiens Michael

et Satan avec tous leurs adhérents. C'est sans doute


pagina: 283

une grande faute dans le poème [onl.] encore que le merveilleux

de Chateaubriand.

Au reste que dire de ce poèmene. Sans doute il faut convenir

que la versification en est brillante qu'il y a de très beaux

vers et par-ci par-là de jolis tableaux. Mais en général

les morceaux se resemblent trop. Il y a trop de répétitions

1. dans les éternelles peintures de l'amour conjugal de

Guillaume et de son épouse 2. dans les traversées qu'il fait

par mer 3. dans les sièges et en général l'ordre historique

y est ponctuellement observé ce que devait être ainsi dans

un ouvrage contemporain. La description des batailles est

quelquefois fort animée et belle. L'ouvrage entier est divisé

en 8 livres. Le second où le chambellan Bentink raconte

les événemens de 1672 et tout ce que arriva à Guillaume

avant son mariage est sans doute le meilleur et contient

de fort beaux tableaux. Les imitations des auteurs latin

sont aussi quelquefois déplacées comme lors de l'expédition

de Louis 14 en Hollande il fait pleurer à l'habitant de

la Betuwe ses vignes et ses olives. Passe encore pour l'exalta-

tion de Guillaume 3 qui est quelquefois poussée trop loin

comme lorsque il nomme les ordres qui Guillaume

donne à ses officiers honiglekkernij. La description des exploits

en Irlande l'est aussi.

Résumons. C'est un ouvrage où l'amateur véritable de la

poésie pourra trouver plusieurs morceaux qui lui

plairont parmi beaucoup d'autres qui n'auront pas le

même sort mais ce ne sont pas de pareils poètes qu'on

peut donner librement en mains aux amateurs superficiels

aux gens du monde aux femmes. Tandis qu'on ne risquera rien

en leur donnant la Henriade les oeuvres de racine ou

d'autres ouvrages pareils et ceci contribue à diminuer mon

étonnement que nos anciens poètes ne soient pas plus

fréquentés par ceux qui n'ont pas une envie de recherche

et une patience à l'épreuve.

Loosjes laatste togt van de Ruiter

On pourrait aussi demander quelle espèce d'ouvrage est ceci.

Mais M. Loosjes lui-même dit ne pas savoir la classe. Aussi

quand un ouvrage est bon peu importe dans quelle classe

on puisse le ranger. L'ouvrage par lequel Loosjes s'est acquis

le plus de réputation est sans doute son inimitable Maurits

Lijnslager. Ceci est pour ainsi dire un Maurits Lijnslager

en vers. On y retrouve pareillement une mine inépuisable

de connaissances touchant notre histoire nos coutumes

la topographie de notre pays, etc. des rencontres fortuits

de grand homme. Le caractère du héros est

fort bien peint et la versification presque toujours


pagina: 284

s'élève dans plusieurs morceaux. Pour compléter il faut

ajouter qu'il s'y trouve de tems en tems de très beaux

tableaux. Cependant l'ouvrage ne plaît pas beaucoup. Il

n'y a point de merveilleux si l'on en excepte quelques

songes de De Ruiter ou de Haan mais en général les tableaux

se rapprochent trop de la condition ordinaire sont plutôt

des peintures d'après nature que des tableaux poétiques.

Il y a des morceaux qu'on lit avec intérêt mais en général

trop de prolixité trop de détails. La poésie ne doit

peindre que les grands traits. Une analyse détaillée de

l'ouvrage conformait mon jugement. C'est la Minerve de

Phidias et celle de son rival. Trop de détails intéressans

dans une histoire diminuent l'éclat du héros dans un poème.

Aussi souvent les conversations sont trop familières. Le

caractère du jeune de Witte qui accompagne de Ruiter

est très beau. L'esprit se sent souvent comme à la [onl.]

de la grandeur de nos ancêtres. Le caractère de de Haan

son songe etc. est digne de l'Épopée. La visite de Guill. 3

à de Ruiter est une belle idée. En général c'est un ouvrage

qui renferme toutes les beautés et les défauts communs

aux ouvrages de M. Loosjes. Le poète conduit son héros

jusqu'au moment où joint avec les autres vaisseaux de

l'escadre il se propose à partir pour le lieu de sa

destination.

Annales du Lundi

Dylius voulut à toute force avoir des morceaux grecs ou la

traduction des épithètes de la magistrature d'Amsterdam. Il

n'a pas eu le courage de renvoyer Mad. van Strick. Il dîne chez

Waller pour 14 sous où il reçoit un mauvais dîner avec Boers-

ma étudiait son oncle et tante et deux messieurs Gouverneur.

Il a raconté d'un voyageur qui au milieu de l'hiver

était enfermé avec sa voiture dans la neige sur le chemin

de St. Petersburg. J.d.V. a voulu gager que ce n'était

pas vrai. D. dit qu'une obligation sur la Russie de f 1000 vaut

à 33 pc. 68 fr. La grande réconciliation a eu lieu. [onl.]

a voulu avoir des portraits que D. avait acheté.

L'oncle s'est mêlé de cette négociation et a lui-même

dicté à D. un billet très soumis qu'il devait envoyer

à son superbe adversaire qui lui-même avait à son

tour été chassé de chez Meyer. On a parlé en allusion

de la fête et D. a dit qu'il parlerait lorsque le tems

en serait venu. Lui reprochent au nom de la fille de

M. Walré la négligence de ne lui avoir pas encore

donné des copies du vers de W. son père il a eu

l'infamie de dire Est-ce que cela signifiait donc

tant?


pagina: 285

Samedi 14 Décembre 1812

Encore des nouvelles vagues. L'on racontait que l'empereur était

ad patres et que Son Exc. le prince de Plaisance était parti

incognito pour Paris. Mais les soins paternelles de la police n'ont

pas voulu que les habitans de la bonne ville fussent dupés

par de pareils bruits. Le prince de Plaisance a fait hier

à cheval un tour dans la ville et un commissaire de

police a annoncé à la bourse au milieu d'une foule terrible

que l'empereur (les 20 je crois) était avancé jusqu'à Wilna.

Cependant quelque infidèle quelque mécréant a affiché

ce matin au Palais que le palais était à vendre par ce que

l'empereur était mort.

Hier au soir par une carte de permission je fus à Felix. C'était

un beau spectacle cette belle salle entièrement illuminée

et entièrement remplie surtout des dames, d'autres dames

encore dans les fenêtres ouvertes sur les corridors un orchestre

rempli tout cela était fort joli. On commença par une

symphonie qui me fit beaucoup de plaisir. Enfin après

beaucoup de musique Mr. Klein commença son vers. C'était

encore du beau genre l'idéal des arts et surtout l'influence

des femmes sur les arts. Ce vers était fort long et fut deux

deux fois interrompus par la musique. Les vers était beaux

mais c'étaient des lieux communs en grande quantité. Le

premier homme la création de la femme etc. et enfin

des grands mots en quantité kunst natuur idealen in

hoger kringen zweven. Il nous peignait la femme comme

l'idéal du beau vonkelende ogen golvende boezems des

regards inspirateurs etc. Je crois qu'il n'en finirait jamais

enfin l'on en vint aux exemples. La bonne Debutade puis

Aspasie Petrarque et Laura. Puis d'un saut il arriva à nos

femmes hollandaises in dat miskend gewest in die moerige aard.

Il y avait de tems en tems beaucoup de vers un peu libres en

fait de politique. Nous vîmes passer en revue Tesselschade

van Merken. Koolaart Lannoy Leskailje Schuurman Ruysch

Troost Merian Koerten Blok etc. etc. etc. Mais il fallait avoir tous

ces gens en tête. Puis nous eûmes une petite harangue aux

artistes vainqueurs. Enfin après encore beaucoup de

musique il distribua les prix en prose ce qu'il varia

avec beaucoup de goût. Il fit une louange de Felix

et enfin encore un petit vers lyrique qui disait aux femmes

que l'amour des arts n'éteignait pas celui pour les dames

et qui finissait avec Voor de liefde en voor de kunst.

On joua la finale et toutes les dames s'évadèrent pour

s'emparer de places où ils puissent à leur aise boire du

punch et du chocolat.

Hier en revenant de la bourse une affiche frappa nos

yeux qui annonçait un tableau de l'incendie de Moscou

nous y allâmes. Ce n'était pas mal peint mais cela ne

frappait pas beaucoup. On disait que cela avait été peint

d'après nature à la distance d'une demie lieue de Moscou.


pagina: 286

Annales du marché

Depuis quelque tems on n'a plus vu arriver des changemens

considérables. Les arrivemens ont été si fréquents qu'il y a

beaucoup de grains enmagasinés et peu d'ardeur pour

acheter. Ceci fait pour ainsi dire chavirer les prix.

127 H. 396 mais on ne peut vendre à ce prix

122 H. Rogge 283 gl.

Le Colzad balance aussi d'après qu'il gèle ou dégèle comme l'a

fait alternativement toute la semaine. Mais à présent il

gèle considérablement les grains ne sont pas favorables.

On a défendu l'exportation du département de la Lippe.

On a beaucoup commencé cette année à vendre op levering

tant le seigle que l'huile. Ce commerce a été si considérable ici

que souvent une cargaison en arrivant ici devait passer par

seize mains avant d'arriver au dernier ressort. Mais cependant

il s'en est ensuivi peu de disputes à cause que chacun

presque y a gagné. On ne sait pas encore pour sûr si un pareil

commerce est légitime sur les loix françaises ou non.

∙Les arrivemens de Hambourg ont été considérables. H. et D. Rahusen

surtout en ont reçu une quantité énorme. Beaucoup de

ces expéditions ont été conduite sur un certain Meyer qui

envoyait ici des vaisseaux qui souvent étaient d'une vingtaine

de consignataires différens. Ceci occasionnait naturellem.

beaucoup de confusion et de fraix. Dans peu il est arrivé

beaucoup de colzad de Oost Frise et des Deelen et beaucoup

de seigle de l'Overijssel. Ce qu'on nomme Bovenlandsche tarwe

vient pour la plupart du département de la Lippe qui

maintenant a été fermé.

Cours d'expérience chez Van Varik lec. 2

L'étendue, La divisibilité et l'impénétrabilité

Exp. divi. Divisions des couleurs dans l'eau

- des odeurs

Imp.

Les piston d'un perspomp

Imp. de l'air en enforçant un grand verre (Hol. glas) dans

l'eau fermé ou ouvert en haut

La même expérience avec une chandelle

L'air reste dans un vase et défend l'entrée de l'eau par

un entonnoir.

La manière d'expliquer de ce sieur n'est par surprenante il

tire ses lumières de Buys et des physiciens français Brisson

Sigaud.

Après il nous montra dans un microscope excellent qu'il

avait les bloedvaten d'une pouce et les (yeux (oogkassen d'une

chevrette qui en a 1500.

Lundi 16 Décembre 1812

∙Quelqu'un revenu de Paris où il avait passé quelques années

racontait que la corruption était au plus haut degré dans

cette grande ville comme c'est ordinairement le sort de toutes


pagina: 287

les capitales. N'en parlait-on de notre cause à Paris oui dit-

il vous vous êtes mal adressés, ce n'est pas la justice de la cause

mais le crédit de l'avocat qui fait décider les causes. Si l'avocat a

l'espérance de gagner un petit profit il invite les juges

à déjeuner et leur explique alors la cause et ceux-ci disent

ah il est juste qu'il gagne sa cause. C'est un bon garçon, il nous

traite bien.

Voici une anecdote assez récente. Une certaine cargaison considérable

pour le compte de Mr. Gevers à Rotterdam. La cargaison en est confisquée

puisque le vaisseau avait fait encore un voyage sur la même

licence. On parvient cependant d'une manière directe à mettre

sous les yeux une lettre où on lui disait qu'il était dans

l'erreur et que ce défaut devait seulement être imputé au vaisseau

et que la cargaison ne pouvait être incommodée pour cela. L'em-

pereur s'écrie: Comment m'aurait on encore dupé? Il somme

[onl.] le Ministre un tel entre. Il lui met la lettre devant

les yeux. Le ministre fait faire un nouveau rapport. La

cargaison est libre. Rara inter gurgite nantes.

Le même se plaignait fort de la société à Paris du peu d'amica-

lité qui y régnait et du peu de foi qu'on pouvait prêter aux

gens.

Hier à l'église chez J. Kops.Zalig zijn de reinen van harten want

zij zullen God zien. Bonnes remarques. Sermon édifiant.

Tout est gelé. Therm. 18 degrés et partout où l'on piste

les yeux on voit une quantité innombrable de patineurs.

Nabij Buiten Stadlander sont les rendez-vous et même

la jeune Beauté essaye son pas timide sur le mince crystal.

De tous côtés de la glace. Jusqu'aux moindres fossés tout

est rempli de patineurs. C'est le général sujet de la

conversation. Il y a deux bandes générales une de patineurs et

une de coureurs. On demande Avez vous vu celle-ci ou celle-là.

Ne patinez-vous pas. Ne l'osez-vous pas, ne le voulez-vous

pas. Les patineurs louent la bonne ou la mauvaise

qualité de la glace et voilà tout.

Littérature

Rotgans Gedichten

Un énorme in quarto ôterait presque le courage d'en entamer

la lecture cependant je l'ai entamée et j'ai parcouru

cet ouvrage avec beaucoup de plaisir.

Viennent premièrement cent à cent cinquante pages

remplies d'histoires traduites d'Ovide ou d'autres anciens

avec une morale quelquefois un peu forcée mais souvent exprimée

dans de beaux vers.

Parmi les Zegezangen quoique il y en ait quelques et surtout

les deux premières qui soient d'une longueur démesurée


pagina: 288

on y trouve de bons morceaux p.e. Mislukte koningsmoord

et op de verovering van Namen.

Son vers sur la campagne de Goudenstein en est assez joli

mais la Mythologie y entre un peu trop.

Sa description de la campagne de Heemstede est un

chef d'oeuvre en son genre de la manière dont Delille a

peint les jardins Anglais le peintre peint ici une

campagne ancienne avec ses fontaines son parc et cette

peinture assez étendue est fort belle.

Les Bruiloftsdichten quoiqu'ils pèchent par les défauts

inévitables de pareilles poésies, sont vraiment fort beaux

et variés.

Puis encore de Lijkdichten que je n'ai pas parcourus

avec beaucoup d'attention.

L'épître à M. Vollenhoven est très belle et poétique.

Suivent deux tragédies Eneas et Turnus et Scilla. Je

préférreais la dernière. La première cependant contient

de grandes beautés. Le caractère de Turnus et celui d'Amate

ont une touche vigoureuse. Mais malheureusement

l'intérêt se porte beaucoup plus sur lui que sur Enée.

Le dénouement de Scilla est fort beau. Le contraste d'un amour

légal et d'une passion effrénée dans Ismène et Scilla

est excellent. Le triomphe sur soi-même par Minos est

un fort beau trait. Le prince Tokus joue un rôle un

peu passif. Scilla a de beaux momens. Ajoutez à cela

un style superbe et une versification plus belle

et plus soignée qu'on l'entend jamais sur notre théâtre.

La dernière tragédie surtout transportée sur notre scène

plairait à tous les gens de goût.

Le Boerenkermis est presque le seul morceau de cette espèce

que nous ayons dans notre langue. Sans doute par le sujet

et le style il est inférieur au Latin mais d'un autre côté

il est impossible de lire cet ouvrage sans beaucoup de

plaisir. Il n'en y trouve que peu d'endroits réprouvés par

le bon goût tandis qu'on remarque partout le nature

et le style complètement bien imité. Sa représentation de

la comédie m'a plu le moins. Mais la description de la compagnie

qui va dîner chez un vieillard et de leur réception, celle

des champions qui doivent traverser l'anneau avec leurs

lances celle du malheureux paon qui doit être assommé

et du poète qui survient la conversation de l'auteur

avec une vielle femme et avec le Sous-baille. La représenta-

tion donnée par les rederijkers. Les petites remarques semées

ça et là me plaisent fort enfin je serais porté à donner au

poète une place très remarquable parmi les contemporains

comme un de nos meilleurs poètes épiques tragiques et

comiques.


pagina: 289

Mardi 15 Décembre 1812

Annales du Lundi

La première partie de la soirée fut assez pacifique. Enfin D. eut la

maladresse de casser une soucoupe on voulut lui faire entendre

qu'il devait de la glace en expiation. Il offrit deux bouteilles de

vin de la fête. Malgré tout ce qu'on dit il ne voulut pas avoir

deux comptes de rôtisseur dans une année. Il dit qu'il déménagerait

et nous promîmes de venir inaugurer sa nouvelle maison. On badine

de part et d'autre. L'oncle acheta effectivement de D. le profit

de cette année par f 5050 et l'accomodement du premier achat

fut annulé. Mais on recommença aussitôt à faire des chicanes.

Lundi 21 Décembre

Il ne s'est rien passé de bien important dans la semaine

dernière. Aujourd'hui un terrible bulletin raconte les pertes

énormes des Français.

Il se trouve en ce moment ici un certain Mr. Castega qui

sait parcourir milliers de vers. Il n'y a aucune pièce

de quelque mérite qu'il n'ait vu jouer et dans beaucoup

il a figuré lui-même comme acteur. Il récite supérieurement

bien il enseigne la déclamation à Langhorst il a appris

à Mad. Richard la manière de jouer le rôle d'Elmire dans

le Tartuffe. Il a été enchanté du jeu de mad. Wattier il

lui a fait ses complimens dans sa loge en y joignant

cependant quelques remarques.

Une chose qui a excité assez de sensation, c'est la mort

d'une mère et d'une fille dans les prisons de cette ville. On dit

que cela a été de dénument, de faim et de misère. Des rapports

en ont été dressés.

Il continue encore à faire assez froid. La misère est très

grande. Le maire a fait afficher de la chaire une nouvelle

souscription pour des billets de soupe économique.

Hier nous eûmes un fort bon sermon de M. van Goeuns

sur la guérison du valet du centenier à Capernaum.

Une voix sonore et claire quoiqu'un peu monotone un

exposé distinct et des réflexions justes.

Au second service M. van Gelder entrant

avec les deux Diacres qui devaient collecter vit en bas de

l'église deux femmes bourgeoises et sur la

Gallérie 3 à 4 autres personnes. Il fit chanter après quoi

comme le nombre des fidèles n'avait pas augmenté

il dit que cela ne lui valait pas la peine de prêcher


pagina: 290

que cependant comme ils étaient venus avec des bons sentimens

il prierait. Il fit en effet une prière après quoi il fit

chanter encore et tout le monde s'en alla. Une vieille femme

une de celles qui avaient été en bas de l'église dit en pleurant

en sortant à l'un des diacres que depuis tant d'années

qu'elle avait été membre de l'église elle n'avait jamais

été témoin d'une pareille scène.

Mon grand-père est devenue possesseur d'un ouvrage in-folio titulé

Barlaeus de gestis princi. Auriaci in Brasiliam. C'est un

ouvrage d'une très belle impression sur du beau papier

rempli de fort bonnes estampes et dans un style digne

de Tite Live. Cet ouvrage est fort peu connu. Ni Bosscha

ni Kemper ne le connaissaient. Wagenaar n'en connaissait

qu'une édition en 8o.

Il s'est aussi amusé pendant cet hyver dans les ouvrages de

Witsen. À la suite du Geschiedenis der zeevaart on trouve

plusieurs descriptions de batailles dans un style digne de Hooft et de Brandt.

Mon oncle de Vos a vu chez M. Koesveld un superbe cabinet

de tableaux une superbe collection de l'école Italienne

d'Avinci, Guido etc. et puis à l'école espagnole de Murillo et

d'autres maîtres dont il n'avait jamais vu quelque

chose.

Cour de Physique

Une lecture longue à 1 1/2 et fort ennuyeuse sur la combinai-

son des corps et la porosité.

1. Le mercure qui dans le vide entre par les pores dans le bois

2. Le mercure qui filtre par les pores du cuivre dans le vide

3. Le merc. qui entre dans les pores d'un oeuf

Annales du marché

Le prix restent à la même hauteur environ. Peu d'idée

pour acheter peu de disposition à vendre plus bas.

27 H. puik M. T. 395 gl.

Le seigle est monté

122 H. 295 gl.

Par les achats des fabriquants d'huile le colzad monte. Vries

2 Altenaas 61 Gren. 62 L.

Littérature

Cora d. Nomsz

J'étais curieux de lire cet ouvrage après la lecture

du plan de Cora par Walré et des considérations de ses

amis à ce sujet. Mais cette pièce-ci ne m'a pas beaucoup


pagina: 291

plue. Il n'y a que trois actes. Il s'en faut beaucoup qu'on

a su tirer toutes les beautés du sujet et cet ouvrage ne

remplit pas encore le désir de posséder une belle pièce sur

Cora.

De Tott. Mémoires v. 1. 2. 3

Le 1. vol. contient des descriptions des Turcs et de Constanti-

nople et le 2. son ambassade à la cour Ottomane. Les

deux derniers surtout sont très intéressans. On aime à voir

quelqu'un dans un pays étranger en action plutôt que

toujours des froides observations. Le 4. vol. contenant des

détails sur Smyrne, les pyr. n'a pas piqué ma curiosité.

Mercier portrait des rois de France 1. 2.

Un bon ouvrage historique qui présente beaucoup de faits

dans une analyse rapide.

Siegenbeek Museum 1.

C'est la suite d'un pareil ouvrage nommé Euterpe.

1. Discours sur Lambert ten cate: un des nos premiers grammairiens

qui étudia beaucoup l'analogie de notre langue avec

les langues Gothiques Celtiques etc. et qui donna de grandes

lumières sur la dérivation la flection des verbes. C'était un homme

probe, religieux, le protecteur et l'amateur des vers,

l'ami de Van Huysum et de Xavery par Tollius prof.

2. sur Laurent de Médicis. Le style de ce traité est beaucoup

meilleur et contient des détails fort intéressans sur ce

grand homme.

Puis les pièces suivantes que je n'ai pas lues.

Sur les choeurs de la Médée et d'Euripide par ten Brink sur Bossuet

comme orateur Nisus et Euryale trad. de Virgile p. Siegenbeek.

Van der Wilp Gedichten

Stichtelijke gedichten. Il y en a de fort beaux. La providence

considérée dans l'exemple de Jacob contient de très beaux

vers. Paulus à Athènes quoiqu'il soit un peu long

renfermée de bons morceaux. La trad. de l'hymne de Débore

et autres trad. de poésie hébraïque sont des bonnes pièces.

Le vers sur le massacre des enfans à Betlehem est aussi

fort beau.

Les Mengelwerken sont pour la plupart comme c'était

alors la mode des vers d'occasion mais celles-ci renferment

beaucoup d'esprit poétique une belle versification

et de très jolies idées entr'autres le vers sur la paix

d'Aix la chapelle et sur un cabinet de tableaux.


pagina: 292

Huidekoper Gedichten 1 v. 4o

Ces poésies attestent un auteur civilisé et instruit.

Maarsseveensche Tempe renferme de jolies idées.

Le kabinet der nederlandsche dichters est une fiction agréable.

Le reste du volume ne contient presque que des bruiloftsdichten.

Puis que je ne suis pas grand amateur de pareilles poésies

je ne les ai pas lues toute mais il faut convenir que

quant à celles que j'ai lues elles respirent une aisance

une facilité et une variété qui ne s'y trouve presque nulle

part et qu'en ce genre Huidekoper peut être placé à la

tête des poètes de son siècle.

Annales du Lundi

D. parle de Lacédémonien et dit qu'un roi de Lacédémone étant

dans une ville de ses états.

Il fit voir une médaille frappée à Berlin pour distribuer aux

pauvres qui faisaient vacciner leurs enfans on y voyait un

enfant vacciné une rose à la main. D. blâma l'ordonnance

et l'exécution de cette médaille.

D. a reçu d'Aroy une lettre remplie de complimens flattans.

Van Goeuns interrogé raconta que Logger était un homme

très aimable et galant envers les dames.

On avait aussi appris que M. Muntinge était un homme très

complaisant qui amusait volontiers une société. Comme

le pauvre dut souffrir.

Jeudi 24 Décembre

Enfin contre toute apparence le grand homme est arrivé à Paris

au moment où personne ne s'y attendait. Quelles en seront les

suites. Je l'ignore mais je crains fort qu'en tout cas il ne

veuille avoir de l'argent et des hommes et ce sont deux

points assez difficile à accorder.

Vendredi 25 Décembre 1812

Je fus à Felix où Mr. van Goeuns fit un discours sur Boèce.

Il fit premièrement un exposé de sa vie très bien écrit.

Ensuite quelques détails sur sa philosophie et ses ouvrages.

Il cita à cette occasion un morceau prosaïque de l'ouvrage

peut-être un peu trop long. Il en cita ensuite plusieurs

vers suivant les diverses traductions que nous en

avons dans divers âges de notre poésie. Il y en a deux

dans un patois flamande et hollandais qui datent

du 15me siècle et qui ne sont que des imitations

barbares.


pagina: 293

Dirk Volk. Coornhert en publia deux traductions avec

un intervalle de 39 ans. La dernière est infiniment supé-

rieure et il dit lui-même que ses deux traductions se

ressemblent comme un chat et un canard.

Gargon ministre à Middelburg en donna une autre traduction

en 1722. Il était vraiment poète témoin la partie poétique

de cet ouvrage sa belle traduction des psaumes et du cantique

des cantiques et son Walcherse Arcadia.

Enfin Bilderdijk en traduisit la partie poétique dans notre

temps.

Les trois traductions avaient chacune leur mérite et celle

de Gargon gagnait en exactitude ce que celle de Bilderdijk

gagnait en éloquence.

Boèce était un homme de distinction. Il fut deux fois consul

et se distingua par sa probité et ses talens. Il traduisit

en latin la plus grande partie des phil. grecs Platon

Aristote. Il était grand mathématicien et technique trad.

aussi Archimède en joignant à tous les auteurs qu'il tradui-

sait des notes et explications. Il fut accusé de n'être pas

Arien orthodoxe (d'avoir des correspondance défendues avec

l'empereur Justinien) d'avoir voulu sauver le sénat romain.

Il fut enfermé dans une tour dans le nord de l'Italie où

il resta enfermé deux ans pendant lesquels il écrivit ses

consolations et enfin il fut décapité par ordre de Théodorice.

Sa philosophie était un mélange de nouveau platonisme

de Christianisme et de Stoïcisme. Il écrivit aussi des

traités théologiques. Ses ouvrages forment 1 vol. in fo.

Sa prose renferme des barbarismes d'après le goût de son

siècle de la latinité. Il fut deux fois marié. Sa dernière

épouse fut telle de Symmachus qui fut aussi tué par

les ordres de Théodorice.

Son ouvrage à été traduit dans presque toutes les langues

vivantes et dans quelques-unes plusieurs fois.

Le roi Alfred la traduit en langue saxonne et la reine Elizabeth

en Anglais.

Littérature

Helmers De Hollandsche Natie

Un poème en 6 chants que j'ai lu avec beaucoup de

plaisir. Le 1. ch. conte la moralité le 2. l'héroïsme sur terre

3. l'héroïsme sur mer 4. la navigation 5. les sciences 6. les arts.

Il faut convenir que ce poème renferme de grandes beautés

mais en général on y retrouve les beautés et les défauts

ordinaires de ce poète. Quelquefois trop d'emphase trop

de déclamation c'est ce qu'on trouve surtout dans

les deux derniers chants.


pagina: 294

De tems en tems on trouve de très belles comparaisons

de beaux épisodes p.e. celui de Bijling quoique un peu

trop modernisé l'arrivée d'une flotte victorieuse la découverte

de la nouvelle hollande par Tasman l'épisode d'Adeka

on y trouve aussi encore des apparitions en foule. Le

génie des mers paraît aux hollandais au cap de bonne

espérance (imitations de Camoens) le génie apparaît à

Tasman dans la nouvelle hollande un génie apparaît

à Helmers pour l'engager à chanter les exploits sur

mer des Hollandais. Lorsqu'il fait mourir quelqu'un

il dit denkt aan zijn gade en sterft. Cette idée est répétée

très souvent. Cependant on peut dire que c'est un ouvrage

digne de la lecture de tout amateur de sa nation et

de la poésie.

Voit T. 15. No. 12. 13. 14. 15. 16.

Dorn Seiffen. Over de helden van Homerus

Un portrait assez éloquent de chaque héros de l'Iliade

d'après ce qui en est mentionné par Homère. Celles de

Nestor et Hector m'ont plu le plus. Je trouve que Diomède

n'a pas été si bien peint. C'est un ouvrage d'où celui qui

connaît Homère ne pourra pas tirer beaucoup d'idées neuves

et qui n'intéresse aucunement tous ceux qui ne

connaissent pas ce grand poète.

Les enfans. Contes 2 v.

Quoique ce soit proprement un ouvrage destiné aux enfans

je l'ai lu avec beaucoup de plaisir. Ce n'est pas le style

des conseils à ma fille mais c'est un très bon ouvrage.

La plupart des contes sont fort intéressans et respirent

la plus saine morale mais comme dans tous les ouvrages

français nulle part des motifs de religion. Une des plus jolies

est l'histoire d'un Louis d'or avec toutes ses suites.

Barron. Hist. of England v. 7. 8. 9. 10

J'ai lu cet ouvrage pour compléter mes connaissances de

l'histoire d'Angleterre. Mais lire cet histoire après Hume

c'est comme si l'on prend de la bièrre fraîche après

du vin de Bourgogne. C'est un auteur presque dans le

genre de notre Wagenaar plutôt chroniqueur que historien.

Cependant les derniers volumes qui décrivent les opérations

de la guerre de 7 ans sont écrits d'une manière plus

intéressantes et donnent de toutes les expéditions


pagina: 295

faites alors par les Anglais un narré fort agréable.

Cette histoire va jusqu'à la signature des préliminaires

en 1762. Vid. Hist. d'Angl. Ext. 2.

Je fus Samedi soir au spectacle. On donnait Rodogune.

Il est assez connu que les quatre premiers actes de cette

pièce ne signifient pas trop et que c'est le 5er acte surtout

où se concentre l'intérêt. Mais quoique les premiers actes

languissent en quelque sorte toutes celles où paraissait

Cléopâtre s'animaient car Mad. Ziezenis joua ce rôle supérieurement.

Sa première apparition sur le théâtre fut superbe. Sa harangue

à ses fils ses fureurs sa mort tout cela était d'une

beauté inimitable. Snoeck joua très bien le rôle d'Antioche.

Mad. Hilverdink joua Rodogune assez bien. Everts

ne me plut aucunement. En effet il faut avouer

que le 5. acte de la pièce produit beaucoup d'effet.

Le nouv. ballet était fort joli. Il y avait de fort jolies

scènes et situations. Mad. [onl.] jouait très bien le

rôle d'une femme jalouse qui veut empoisonner

une autre et l'est elle-même. Graive était l'auteur

du ballet. Les crix tumultueux du parterre le

rappellèrent et il rentra au milieu des applaudisse-

mens les plus terribles.

Annales du Lundi

Premièrement assez pacifique. Au dessert le médecin

rendit à C. Walrée les vers de son père du papier

anglais dans une enveloppe charmante avec une lettre

pleine de complimens que J. de Vos lut quoique contr. son attente

il n'y trouva rien concernant l'invitation. Enfin après

de vives alternations les trois participiens vendaient à

Dylius leurs [onl.] pour un dédit raisonnable.

On répand encore des nouvelles les une plus effrayantes

encore que les autres. Selon les uns l'armée française a

capitulé l'empereur n'est plus en état de faire une campagne

les Russes sont à Wilna, Dantzig etc. etc. l'empereur devra

abdiquer et je n'en crois encore rien.

Cours de physique

1. du sel mêlé dans l'eau lorsqu'on y jète de

l'acide du vitrol le sel s'évapore. C'est la meilleure

précaution contre l'épidémie.

2. Lorsqu'on allume un feu de souffre sur un petit sou

cette pièce se dévide en deux parties non homogènes


pagina: 296

et l'on reçoit un sou d'argent et un de cuivre.

3. Du sel ammoniac et de la chaux qui séparément n'ont

point d'odeur donnent une odeur détestable quand

ils sont mêlés.

4. Du blanc d'oeuf mêlé avec de l'acide de vitriol produit

la coagulation en corps.

5. Du sel avec un peu d'eau. On y jète de l'alkohol dissant

le sel ceci étant chauffé l'Alkohol s'évapore et le sel

tombe au fond.

6. De l'eau entièrement saturée avec du sel peut encore adopter

du sucre.

7. De l'eau saturée avec du sel peut encore prendre 1/3 de

plus quand elle est chauffée.

8. De l'eau et de la Magnésie ne se mêlent pas mais bien

lorsqu'on y mêle de l'acide sulfurique.

9. De l'huile et de l'eau ne se mêlent pas mais bien lorsqu'on

y joint de la soude. Ainsi se forme le savon.

10. Du cuivre pulvérisé est dissou par l'acide de salpêtre

11. De l'eau forte ne peut pas dissoudre la cire.

12. formation du gas inflammable avec du zinc et du vitriol.

Jeudi 31 Déc.

J'ai passé encore une soirée délicieuse au théâtre on

donnait Gijsbregt van Amstel. A. Snoeck était Gijsbregt

et Mad. Wattier Badeloch. Ceci changeait entièrement

la pièce. Avec quelle énergie de quelle manière sublime

Mad. Wattier jouait-elle ce rôle. Dans le 4o acte quand

tous ces récits se font les autres acteurs sont là comme

des poupées sans mouvemens mais ici ils prenaient

part à tout ce qu'on disait et le jeu de Snoeck et de Mad. Wattier

pendant tout le rôle du bode était superbe.

Rien n'égalait aussi la manière dont Mad. Wattier récita

ces vers

Waar wiert opregter trou

C'était au dessus de toute louange.

Comme elle récita bien le premier récit de son

songe quelle belle scène joua t-elle avant même que

son mari entrât.

La scène où Gijsbregt dit

Ik kan bescheidenlijk en klaar 't geklikkak horen

En 't ramlen van het staal

produit un très bel effet.

Kloris en Roosje pièce plate et triviale est cependant

assez supportable par la manière originale

dont Majofsky y joue.

∙220[?]


pagina: 297

Livres lus

22 Wagenaar Vaderlandsche Geschiedenis 2e vl. 18 v.

23 Quelques traits de la vie de Frederic le grand 1v.

24 Bâtir 4e deel

24 Hugo de Groot en Maria v. Reigersbergen door Loosjes 1v.

26 Haller [onl. Gotisch] 1 v.

26 Meissner Alcibiades 4 v.

27 Weisse [onl. Gotisch] 2v. 37, 38

27 Schiller Wallenstein

27 -[Gotisch]

27 -Turandat

Shakespear Henry 5 62

- V. 13 p's 62

28 Hagedorn Gedichten 3 v.

Schiller [onl. Gotisch] 2v. 34.35.36

Kleist Gedichten 1 v. 60, 61

[onl.] Gedichte 2 v. 67,68,69.

Deutschlande [onl. Gotisch] 4 v. 40, 41, 48, 50

Eschenburg [onl. Gotisch] 2 v. 45, 46, 47, 48, 51, 52, 53

Kotzebue [onl. Gotisch] 45

Fielding Journey to the next world 1 v. 69.

Schiller [onl.Gotisch ] der 30 jr. krieg 2 v. 45

Huchenholz [onl. Gotisch] der 7 jr. krieg 3 v. 54.

Matthison Gedichten 1 v. 54

Heinrich [onl. Gotisch] 2 v. 55, 56

Geschiedenissen der ver. Nederlanden T. 11 25, 73

Vert.[?] Weber [onl. Gotisch] 2 v. 73

[onl. Gotisch] 73

1812

De drie Mannen 78

Kants Sieg Euterpe 79, 80

Kotzebue Johanna van Montfaucon 89

Loots Werken 1 v. 89, 90

Le règne de Louis XI 1 v. 90

Reis van Mungo Park 3 v. 90

Vondel Treurspelen 2 v. 91

Pope's works 4 v. 94, 95, 103

De Vos Leven en Character van Hulshof 101

Hulshoff Lykrede op de Vries 110

Dryden's works 4 v. 111, 114, 115, 132

Shakespaere Richard 3, Henry 8 e.a. king John, Richard 2 112

Cowley Denham 1 v. 115

V. der Palm Bijbel voor de Jeugd 1 v. 116

Bilderdijk Fingal 2 v. 116

Bouilly Conseils à ma fille 2 v. 124

Histoire de Laren 14 v. 127

Gibbon 1 en 2 131

Cornelius Nepos 131

Butler Hudibras 132


pagina: 298

Bagatelles où Promenades à petersbourg 134

Vondel Gedichten 1 v. 134, 135, 136

Bilderdijk Mengeldichten 4 v. 136, 146, 147

Poésies de Mad. de Salm 1 v. 141, 142, 143

Gesch. v. Ligthoofd 1 v. 143, 144

Young Works 4 v. 145, 146, 154

Histoire des Wahabis 1 v. 150

Heriadan Barbarossa 150

Justinus 144

Laudatio Jani Dousae 150, 151

Hulde aan G. Hesselink 153

Addison Works 1 v. 155

Poot Gedichten 3 v. 157, 158, 159

Waller Poems 1 v. 165

Delille la conversation 1 v. 166

Bilderdijk Winterbloemen 2e v. 166, 167

Lantier Les voyageurs en Suisse 3 v. 177.

Hoffham Theorie der Ned. Poezy, 178

De Nuptiis Thetis et Pelie 178

Delille Les trois règnes de la nature 180

Akenside poems 1 v. 181

Loosjes Ebba Niels 183

Vellejus Paterculus 184

Gray

Lyttelton

[met accolade achter Grais en Lyt:] Poems 1 v. 185, 186

Bilderdijk Nieuwe Mengelingen 2 v. 186, 187

Garth Poems 1 v. 187, 188

Les dejeuners de mon cher oncle 2 v. 193, 194

Leven van Juffr. Brummelkamp 194

Beautés et tabl. pittoresques de la Nature 195

Hume History of England 12 v. 195

Cats 1[?] v. 197, 198

Hist. de Mesd. de St. Jeanvier 198

Cras ad Boschuim 199

Atala 199, 200

Florus 202

Lettres de Temple 2 v. 201

Swift works 2 v. 204

Mémoires de Temple 1 v. 245

Millevoye Charlemagne 204

La Cretelle Tome 5e: 245

Dripaty Lettres sur l'Italie 3 v. 241

Voss Louise 241

Reinbeck reize 2 v. 241

Legouvé Mérite des femmes 242

Levensbeschr. van mannen en vrouwen 1 v. 242

Blumauer Gedichte 253

Oeuvres de Piron Tome 2 254

Lannoy Dichtwerken 1 v.

- Nagelaten Dichtwerken S[?] 254, 255

Schermer Gedichten 255

Mosheim kerkelijke Geschiedenis 14 v. 258

Vertot Revolutions de Portugal 258


pagina: 299

Racine le fils la religion 252

Milton Poems 259, 266

Curtius 266

Koolaart Gedichten 266

Marmontel les Inca's 268, 279, 2 vol.

Swift Travels of Gulliver 268

De Kruyff gedichten 268

Lessing Trauerspiele 269

Manlius 269

Regnard Les Menechmes, le légataire universel 270

Shakespeare Death of Cesar 270

Wetsteen het gelukkig ongeval 270

De venetiaansche drielingen 270

[onl. Gotisch] 1 v. 270

Délassemens de l'homme sensible 270

Henneboo gedichten 271

Kuyper Dichtoefeningen 271

Rhulières Anarchie de Pologne 272, 4 v.

Gay Poems 273 2v.

Ipex[?] gedichten 273

Spandau Gedichten 273

Jonker Fransen oorlog 276

Stijl opkomst en bloei der Nederlanden 276

Michaux Printemps d'un proscrit 276

De beer Poortugaal Ledige uuren Dichtpoogingen 276

Shenstone Works 280

∙Pope essay on man 280

Addison cato 280

Robertson History of America 282 3v.

∙Rotgans willem de 3e 282 283

∙Loosjes laatste togt van de Ruiter v. 1 283

Rotgans Gedichten 287

Nomsz Cora 290

De Sott[?] Mémoires vol. 1 et 2 291

Mercier portraits des rois de France 291

Siegenbeek Museum v. 1 291

Van der Wilp gedichten 291

Huidekoper Gedigten 292

Helmers de Hollandsche natie 293

Dornseiffen Over de helden van Homerus 294

Les enfans contes 2 v. 294

Barron hist. of England 7, 8, 9, 10, 294


pagina: 300

∙[leeg]


pagina: 301

Indifférence

Disposition pour M.R.

Julie

Le[?] Première entrevue avec S.

Sentiment naissant

Vuide

Des vers

Nouvelles entrevues

La barque, le bras

La double confidence

La leçon italienne

Continuation de la confidence

La promenade manquée

La promenade les mendians

La soirée délectable

∙[- onl.]Les poèmes

L'entrevue à la longue

Les Parens

Scoupçons divers et intéressans

la Prophétie sympathique

le caractère du prétendu

ses infidélités

Le père ce qu'il dit

La confidence au rival

L'aventure surprenante

à Overveen

La lettre où les sentimens

par écrit

quelque danger d'infidélité avec

M.B.

∙[-Les trois ménages

∙H.N. et C.B.

∙P.B. et J.S.]

Julie se marie

Indifférence Noce de Julie

Entrevue avec S. à S.V.

indifférence de F.

Scoupçons de Mad. G.

La promenade et la rencontre

avec F.


pagina: 302

La première visite à Harlem

Les vers de traan

Craintes

Dénouement de l'affaire de F.

Le vers de Herstelling

Sécurité tranquile

confiance avec H.G. Le secret

ne lui est pas découvert

2e visite à Harlem

Des nuages. Le mystère

La confidence de l'amour de

∙N.B. situation terrible

calme rétabli. Discours posé

Situation critique de H.G. comme

il s'en tire

Résolution Lettre à Mad. G.

conférence vers le sage[?]

L'être amicale de Mad. G.

Incertitude affreuse

Explosion

fin