∙[kaft met op de rug een etiket met daarop geschreven]No. 2
∙Particuliere
∙Aanteekeningen
∙W. de Clercq
∙1811/12
∙[daaronder een etiket met signatuur]F
∙II
∙[Op het voorplat een etiket met daarop geschreven]1811 en 1812.
Mémoires
Lundi 2 sept. 1810 [1811] Voilà le jour par où je commence.
C'est le premier jour de la foire institution qui fut utile
mais qui par l'occasion où l'on se trouve dans les
grandes villes pour pouvoir se procurer tout pour son
argent a beaucoup perdu de son crédit.
Une baleine avait été prise près de Monnikendam
elle était longue de 30 pieds. Je la vis dans une barque.
La tête était mutilée et elle commençait à se putréfier
et répandait une forte odeur. Des négocians l'avaient
achetée pour f 400.
Bertuch nomme cette espèce Nordkaper Balaena
Musculus et Lacepede dans l'histoire naturelle des
Cetacés. Baleineoptere Museau pointu.
On racontait qu'il s'était vérifiée une prédiction du
fameux Ludeman qui disait qu'on aurait la paix
dans l'année qui serait remarquable par les signes
suivans
1. Il croîtrait des roses aux saules.
2. Une cigogne nicherait sur le toit de l'église neuve.
3. Les légumes et fruits seraient mûrs une mois avant
le terme ordinaire
Ces signes sont accomplis. Je vis ces prétendues roses
qui sont composées de feuilles de saule. Bonheur à ceux qui
le croient mais par malheur je suis fort incrédule
pour la science divine de l'astrologie.
Le club du Lundi eut lieu. Nous fûmes fort gais. On fit des
gasconnades sans nombre. Le médecin nous montra l'ordre
de St. Michel porté par le grand Deruiter. Par la
négligence de l'orfèvre les chaînes d'argent auxquelles
cette croix avait été attachée furent jetées dans le
creuset. Une parente de De Ruiter avait été forcée
par la misère à vendre les marques honorables qui
distinguaient ce marin qui fut toujours héros
et honête homme. Sic transit gloria Mundi.
On y voyait l'archange terrassant le dragon dans un cadre
émaillé. L'ouvrage était assez beau.
3 Sept. Point de nouvelles. Mon pauvre Papa est
encore malade de la goutte.
4 Sept. Nous fûmes tous chez le grand papa. Ce
bon vieillard était fort gai et se réjouissait de
voir tous ses petits enfants en si bonne santé autour
de sa table.
5. 6. 7. 8. Je passai ces quatre jours à Rupelmonde. La
famille Van Heukelom y était logée avec Madlle
C. Lange jeune personne très aimable. Le tems
était superbe et le ciel sans aucun nuage tandis
que le soleil sans nous accabler de ses rayons,
en les lançant plus obliquement embellissait
les objets d'une aimable lumière. Nous fîmes
vendredi un tour à Ter Aa et Breukelen. Samedi
à Vreelandt et Dimanche à Sterrenschans. Le reste
du tems fut employé à divers exercises. Nous fîmes
une excursion dans le bateau qui était a moitié
rempli d'eau et nous nous exerçâmes a ramer les
yeux fermés. Les arbres fruitiers enchantaient
nos yeux pas le nombre de leurs fruits.
Le poisson dont on avait retiré environ f 1000 en le
montrant aux curieux a été revendu pour f 600.
Des professeurs de Leyde sont venus en ville pour
s'en procurer la possession.
Une Comète a paru dans notre système solaire. Je
la vis le 8. On ne pouvait distinguer qu'une espèce
d'étoile nébuleuse.
On a recommandé aux prédicateurs de prêcher la
soumission à l'empereur en désignant les jours de
8 et[?]15 septembre comme très convenables pour
cette exhortation.
On dit que l'empereur viendra ici le 20 ou 21
de ce courant. Mais d'autres contredisent cette
nouvelle et assurent que son départ a été différé.
Lundi 9 sept. La Comète fut encore visible.
Nous la vîmes chez mon oncle de Vos par un
télescope ce qui ne produisait pourtant aucun
effet.
Il s'éleva une vive dispute entre J.d.V. et D.D. au sujet
de la prééminence de leurs discours prononcés à
leur sortie de l'école latine. J.d.V. avait choisi le discours
de Sophonisbe à Massinisse et l'autre la plainte
de Niobé. La première était cependant bien
supérieure.
Mardi 10. Je fus faire une visite au pauvre M.
C. Schroder il était tout à fait changé et extré-
mement faible. Le médecin dit qu'il a l'éthésie.
Je fus aussi au Westermarkt et au Botermarkt
où la foule était extrême. Il y avait les jeux accoutumés
des marionettes, des soi-disants Ceylanais mangeant
des poules toutes crues, un rival de Simson, un Ventri-
loque, un théâtre optique, des expériences physiques
le nain S.J. Paap, un enfant de 11 ans qui pesait
des centaines de livres, etc. etc.
Mecredi 11 Sept. Je fus à la loterie dans le Munt
on distribue des billets qui content 2 sous et dont
il y en a 14 et alors on fait tirer une lettre d'un
baquet si c'est une consonne on tire quelque chose
selon eux de la valeur d'un florin, si c'est
une voyelle de la valeur de f 4 et enfin
l'aigle impérial de la valeur de seize
florins. On reçoit des marques qu'on peut échanger
ensuite pour plusieurs effets tels que de la poterie
des tabatières des liqueurs etc. La foule y était
si terrible que c'était avec la plus grande
peine qu'on pouvait se procurer quelques billets.
Le plus souvent on ne tirait rien.
Jeudi le 12 sept.
Je fus avec mon oncle de Clercq chez Mr. Byben
qui donnait dans le Théâtre Allemand de
l'Amstelstraat une représentation de
feux chinois. Il y avait trois cadres l'un à
côté de l'autre. Le plus grand était de 5 pieds et demi.
Il y avait le dessin de plusieurs très belles illumina-
tions, mais la société était peu nombreuse et
en général la représentation triste puisqu'on devait
être dans l'obscurité. Nous vîmes aussi le jeune
homme de 290 [onl.]. Il avait les mains fort petites
mais les jambes étaient des masses de chair.
Samedi 14 sept.
J'avais été invité à Kennemeroord par mon oncle Rahusen.
Je me rendis à ce lieu charmant où je trouvai D. Rahusen
un Mr. Decourt négociant de Dordrecht. Ma cousine
Rahusen Mlle P.C. Ten Cate et M.J. et E. de Clercq. Nous
fîmes après-dîner un tour à Heemstede petit village.
Le chemin menait à travers des prairies et nous
retournâmes par le Agterweg. Ils sont charmans ces
environs de Harlem. Une rivière où des ruisseaux
sont les seules choses qui s'y laissent désirer.
Dimanche 15.
Nous allâmes dans le Hollewagen au bois et
fîmes le tour de la ville. Sur ces buitensingels on
a des vues superbes sur les dunes éclairées par le
soleil. Les Tilleuls dans le bois étaient pour la
plupart déjà privés de leurs feuilles. Nous
nous rendîmes ensuite au Geleerde Man. Le ciel
était serein et ce jour fut presque trop beau pour
le mois de septembre. Nous nous promenâmes
encore dans le bois. Après-dîner nous eûmes encore l'occasion
de voir knuppelen un pauvre chat enfermé dans
un tonneau qu'on devait en faire sortir avec
des morceaux de bois qu'on jète contre le tonneau.
Le tonneau était presque entièrement cassé
mais Messire le chat refusait toujours d'en tirer.
Aussi, Messieurs les paysans manquaient
souvent leur but.
La famille Hartzen vint à Kennemeroord le
soir. Les jeunes gens dansèrent au son de
la flûte de Kees quelquefois remplacée par
par le clavecin de l'aimable M.R. Tout alla
à merveille. Madlle A.E. Hartzen qui réunit
beaucoup de grâces à une jolie figure dansa
supérieurement bien.
Lundi 16.
Nous fûmes de bonne heure en ville et je
commençai à traduire les lettres à T.E. à N.
Le soir le club fut chez nous. W. de Vos et D.D. firent
une partie de cartes (jassen) en latin. Dylius
paya la glace à la crème qu'il nous devait
en expiation de la sentence inconsidérée sur
les complimens de Masinisse à Sophinisbe.
On ouvrit ce jour sur la bourses une caisse
avec le titre Annonces de la chambre de commerce.
On n'imprime point ces annonces de peur que
l'ennemi n'en aye[?] trop tôt connaissance. O
lepidum caput.
Mardi
Je vis une très belle vente de tableaux chez M.
Croese on y remarquait entr'autres
Une chute d'eau par Ruisdaal
Un très beau paysage par Moucheron le père
Une chasse au sanglier par Snijders et Rubbens
Une Madelaine de Guido
Deux paysages de Hobbema
Deux paysages de Barbius[?]
Un tableau de famille par van der Tempel
Le jeu à la boule par Ostade
La mort de Procris par Mieris
Une armée Romaine triomphante par Van der Ulft
Un cheval par Potter
Un homme lisant devant une fenêtre par où
entre le soleil par Van Strij
Un hyver par Ruisdaal
Un très beau tableau de Wouwerman
représentant le commencement d'une chasse.
Depuis Mardi 17 jusqu'a Vendredi 27.
∙Je fus encore le jeudi au Botermarkt avec C. et S.
Nous vîmes le petit homme de Zandvoort qui
est vraiment curieux, il montait sur un petit
cheval tirait du pistolet, etc.
Vendredi j'allai à la campagne en barque. La compagnie
était plus nombreuse que divertissante. Excepté
le chuchotement de deux jeunes hommes qui paraissaient
assez fat et le caquet de trois vieilles servantes
on n'entendait guère parler. Aussi sans m'embarasser
de la compagnie je me mis à lire dans les révolutions
de Portugal qui me menèrent jusqu'à la fin du
chemin. Il faisait une pluie terrible. Mon grand Papa
fut fort aise de me voir.
Le lendemain Nous fîmes une petite promenade
et puis un tour en voiture à Maarssen avec Mlle
Lange le tems était fort beau.
Dimanche nous fûmes nous promener à Vreelandt.
Mr Wip avec son épouse et son fils
dînèrent chez nous. Ce fils qui a été en pension à
Elburg, est maintenant au Bureau du maire,
le garçon est vif enjoué et avait beaucoup gagné
dans l'espace de quelques années que nous ne
nous étions pas vus.
Cependant tout retentit de la nouvelle intéressante
que S.M. I. et A[?] se rendraient dans la bonne ville
d'Amsterdam. Une publication du Maire servit à
y préparer les esprits. Aussitôt les villages furent
aussi en mouvement à Ouwerkerk il y a un
arc de triomphe. À Abkou on en érige 3 et
Loenen et le district de Mijnden s'empressent
à en élever un.
Je placerai ici quelques détails en égard aux prépa-
ratifs qu'on fait à Amsterdam ils vont jusqu'au
27.
Le commissaire de police a fait défendre toutes les
petites boutiques brouettes etc. qui couvraient
les places publ. où obstruaient le passage dans les
rues. Le panorama doit être abattu. Plusieurs
des plus belles maisons d'Amsterdam ont été
mises en réquisition pour recevoir des comtes, des
ducs, des dames, etc. On augmente le nombre des
gardes d'honneurs à pied et à cheval. On prépare des
illuminations sur le Hooge Sluis sur le pont près
du Brouwersgracht. Il y a un arc de triomphe
dans le reguliers Breestraat la fontaine du bonheur
placée sur le Heeremarkt sera posée sur le
Nieuwmarkt.
Vendredi 4 Octobre. Les préparatifs continuent
encore. Tous les jours on diffère d'un jour l'arrivée de
l'Empereur et cette arrivée premièrement fixée à
Mercredi ensuite à Vendre ou Samedi aura lieu selon
l'opinion Dimanche ou Lundi. Mercredi nous eûmes
chez nous les deux Mess. Walré le lieutenant et le sourd
nous nous amusâmes fort bien, ils dînèrent ici avec
Kramerus et demeurèrent fort tard.
Sur le brouwersgracht il y a un temple au milieu
duquel s'élève une fontaine. C'est une très belle pièce.
Sur le pont du Hartestraat il y a un trophée
où l'on voit les canons et un caducée.
Sur le pont du Leidsche Gracht il y a un trophée avec
les attributs de Neptune.
Sur le spiegelstraat il y a une belle étoile.
À la fin du Keizersgracht il y a une belle fontaine.
Sur le pont des amoureux il y a trois colonnes sur
la plus grande on avait une statue pédestre. Entre
ces colonnes a disposé des arches ce que fera un bel
effet tant à l'occasion des illuminations qu'à l'occasion
du feu d'Artifice qui aura lieu à cette place.
Dans le Plantages il y a une grand arc de triomphe
où il y a en haute l'inscription
Ceasari augusto invicto post bella in Italia
Hyspania Germania Egypto Lusitania feliciter gesta
post innumera proelia et victorias marisque
libertati fere confecta Amstelodamum tertium
caput Imperii intrante senatus populus que
d.d.d.
Un peu plus au dessous on voit les 5 traités de paix
qu'il fit concluré[?]
Paix de Luneville
Amiens
Presbourg
Tilsit
Vienne
et sur les deux colonnes ses principales batailles
avec les années
Bataille d'Arcole | Bataille de Jena |
des Pyramides | Eylau |
de Marengo | Friedland |
Austerlitz | Wagram |
Sur le Muider et Amstelstraat les habitans
ont placés devant leurs maisons des paliers qu'ils
ont couverts de feuilles de buis ou du sapin. Ceci
produit un spectacle fort singulier. Devant l'église
des Juifs portugais on voit une arche.
Sur le reguliers Breestraat on voit un second arc
de Triomphe où l'on a représenté sur les deux
colonnes, des figures [onl.] soutenant un
trophée. En haut on lit l'inscription suivante
Imperium sacrum genium Napoleontis primi
imperatoris pacificatoris ovantes triumphantis
omnes heroes antiquitatis medii aevi et nostrorum
temporum superantis artium et scientarium protectoris
musa vetat mori.
Aux deux cotés de cet arc ainsi que de celui du plantage
on a érigé des échafaudages propres à servir d'orchestre.
À la bourse il y a une décoration qui entoure la statue du Mercure.
Sur le Doelensluis on voit une décoration
qui représente le derrière d'un vaisseau.
Sur le Leliesluis on voit deux palmiers et au milieu
les chiffres de leurs Majestés.
Devant Felix où la ville donnera une fête à sa majesté
on a élargi le canal d'une vingtaine de pieds.
Plusieurs propriétaires de maisons ou de chambres
sur la route de S.M. on eu l'occasion de les louer pour
le jour de l'entrée à des prix considérables.
Mardi 8 octobre 1811
Puisque il n'était pas probable que S.M. viendrait avant
Lundi j'allai encore avec mon grandpère à Rupelmonde.
La fontaine placée sur le Heeremarkt a
été transportée sur le Nieuwmarkt. Le Panorama
a été démoli et tout se prépare à l'arrivée de S.M.
Sur le chemin du Nieuwersluis s'élevaient encore
de nouveaux arcs de triomphe et des festons de verdure
et de fleurs couronnaient les maisons situées sur
son passage. Malheureusement ces ornemens étaient
pour la plupart flétris et au lieu de l'image de
la joie n'offraient que l'image de la destruction.
Au Nieuwersluis et même dans notre résidence
s'élevaient des décorations de fleurs. Cependant la très
prudente administration de cette contrée qui
craignait que la couleur de quelques fleurs rappelle
aux Hollandais ce nom d'orange jadis si cher à une
grande partie de la nation ordonna qu'on ôtât
indistinctement toute fleur de la couleur jaune
et les préposés qui annoncèrent cet ordre remplirent
dignement leur ministère en exerçant eux-mêmes
sans miséricorde la sentence prononcée contre ces fleurs.
Nous apprîmes Dimanche au soir que l'empereur
était arrivé le jour-là à Utrecht avec son
épouse que devant son palais il était monté à
cheval pour faire un tour par la ville que non
seulement il avait reçu les placets qu'on lui
présentait, mais qu'il avait montré la plus
grande affabilité envers le peuple qui l'entourait
et qu'il avait défendu à ses soldats de l'écarter.
En revenant dans la ville nous apprîmes qu'on
avait donné l'ordre à toutes les personnes qui
demeuraient dans la ville sur la route de l'empereur eussent
soin de se pourvoir du pavillon français et de se
préparer à voir leur maison ornées de verdure
par des préposés de la mairie. Ceci a eu lieu en effet.
On a commencé hier dans le Kalverstraat il y avait
une foule de monde innombrable. Des troupes de gens munis de branches de chênes
se frayaient une voie et attachaient les
dépouilles des forêts sur les palais de briques.
Les branches disposées en guirlande reposaient sur
des guirlandes de toile rouge blanche ou bleue
ce qui forme un très joli effet. Ceux qui avaient
osé, se fiant à leur propre goût prendre eux-
mêmes le soin d'embellir leurs maisons
virent ces ornemens irréguliers déchirés impitoyable-
ment, et furent réduits à voir leurs fenêtres ornées
de la même manière que celles de leurs voisins
qu'ils avaient voulu surpasser.
Talma a amené avec lui M. Damas Mlle. Duchesnois
et Mlle. Bourgoing. Ces quatre artistes ont déjà
∙quelques représentations et Talma surtout
remplit tous les spectateurs d'admiration. Le
théâtre peut à peine contenir la foule des curieux.
∙Hier nous fûmes au jour de famille où nous avons
bien ri. Le médecin a conté nombre d'histoires
qui tous ont été impitoyablement interrompus
par son cruel Aristarque.
Il fait une grande chaleur pour le mois d'Octobre mais
les
chemins sont insupportables puisque le sable dont
on a partout couvert les rues s'est couverté en
une épaisse boue.
idem
On raconte comme une chose certaine que S.M.
viendra demain. Les gardes d'honneur ont reçu l'ordre
de se rendre à dix heures à la bourse. Le Kalverstraat
était encore plus brillant que hier puisque à chaque
maison on avait attaché un pavillon. Ceci a eu
lieu jusqu'au Plantage. Une foule de gens de
tout sexe de tout âge et de toute classe s'y précipitaient
en foule. Dans toute la ville il règne une confusion
extrême. Là vous voyez des piétons, et surtout
des gens du peuple contempler tout dans une admiration
muette (bouche close à cause de la Police) là on voit
des carosses et des équipages brillans remplis de
femmes et d'enfants se succéder. Là l'on voit
des gens s'avancer en portant sur leurs
épaules de longues palissades qui doivent servir à
composer une barrière qui défende l'enclos
du perron des importunités des passans là des
gens tout couverts de verdure fendent la foule
d'un pas précipité. Là des juifs vont criant
des guirlandes de feuilles à trois sous l'aune. Là
des hommes grimpent en haut pour attacher
les guirlandes tandis que les tranquiles habitans
tout ébahis regardent ce beau ménage. On entend Toullard[?]
toutes les personnes qui se rencontrent s'adresser ces deux
questions Savez vous quelque chose de nouveau? Quand
vient l'empereur et cette arrivée qu'on regardait il
y a quelques semaines plutôt comme un sujet de douleur
que d'allégresse et dont personne ne se souciait occupe
maintenant le public de plus vieux au plus jeune. O Tempora.
Sur les grands marchés on établira des
loteries de vivres dont les pauvres gens reçoivent
des billets gratis. On en distribue à chaque communauté.
M. Talma a été engagé par l'administration du théâtre
français.
Le tirage de la conscription a eu lieu. Plusieurs
connaissances tombaient dans les termes.
Samedi passé on a célébré les noces de A. de Clercq
et Mr. Brand. Elles ont été très brillantes. Le
frère de la fiancée a donné un très beau feu
d'artifice.
J'ai vu hier au spectacle Français la Métromanie
pièce qui m'a singulièrement amusée. M. Morel
dans le rôle de Francalien et Mr. Garnier dans
celui de Danis n'ont laissé rien à désirer. Cette
pièce en vérité est charmante.
On donnait aussi Le retour du croix ou le portrait
mystérieuse farce où l'on parodiait les sublimes
mélodrames aux aventures incroyables et aux
belles sentences. C'était fort gai mais selon
la gaieté des Français qui dégénère vite dans le
genre équivoque ou profane.
Lundi 30. On a continué avec ardeur les prépara-
tifs pour l'arrivée de S.M. On a arrosé de sable
les routes qui mènent au palais pour faciliter
les couriers. On continue à démolir tout ce que
peut offusquer le passage.
Samedi. Je suis allé avec Kramerus et ma cousine
P.C. Ten Cate à Rupelmonde. Il faisait un tems affreux et dans
la voiture même on n'était pas à l'abri. Nous nous
amusâmes à divers jeux. Dimanche matin nous
fîmes un tour de promenade à Maarssen et fîmes
une visite à Mr. P. Bronkhorst qui s'offrit à nous dans
le costume le plus singulier. Il nous lut une
lettre de sa chère épouse dont la lecture pensa
nous faire crever à force de retenir nos ris, tant à
cause du bel organe et de la belle manière de lire du
lecteur qu'à cause du stile de la lettre. Il nous
fit voir ensuite sa campagne grande de
trois arpens qui était assez jolie. Ensuite il nous
régala sur la vue d'un cochon gras.
Dans tous les villages il y avait des marques
publiques de la joie des rustiques habitans. Plusieurs
arcs de triomphe décoraient le chemin. Le premier
était au premier Tolhek. On y lisait ces mots
Napoleon le grand
Héros de l'univers
Un second était a l'entrée d'Abcou il y avait ici
à Napoleon le grand
Il y avait dans Abkou un troisième qui n'étaient
pas encore achevé.
À Baambrug et À Loendersloot on en voyait pareille-
ment. À Baambrug il y avait À l'empereur et l'impératrice.
Entre Baambrug et Loendersloot on avait d'après
l'instruction du maire érigé devant les campagnes
et les maisons des paysans des petites portes de
verdure et de fleurs ce qui présentait un coup
d'oeil assez joli.
À Loenen l'arc de triomphe était fort beau. Il était
de deux colonnes autour desquels rampaient
des guirlandes. Des jeunes filles de Loenen complimenteront l'Impératrice.
L'arc de triomphe à Mijnden avait été installé et
décoré par douze jeune filles de Nieuwersluis avec
une gaîté villageoise.
Breukelen avait son arc de triomphe avec inscription
latine.
Maarssen en avait trois. Le premier portait
cette inscription
Spes magna pacis dum numina sancta precamur.
Un second était dédié a l'Impératrice et au Roi de Rome.
Il arrive ici de jour en jour de nouveaux personnages
appartenans à la suite de l'empereur. Le duc de
Bassano est logé chez Mr. Hope et le duc de Castiglione
chez Mr. Bakker.
La police continue à faire des règlemens pour empêcher
toute confusion. On a défendu de se promener en
carosse pendant les fêtes ou illuminations.
Les comédiens sont déjà arrivés ici.
On ne sait si S.M. arrivera dans sa bonne ville
demain ou Mecredi. Le prince de Plaisance est
allé à sa rencontre.
Mercredi
Octobre 1811
Enfin vint ce jour si longtems attendu où l'empe-
reur des Français devait faire son entrée dans
la troisième ville de son empire. Le tems était beau
et tout le monde s'empressait de se rendre aux
lieux où il pourrait voir la procession. À onze
heures environ nous nous rendîmes à la maison
où J. Walré occupait deux chambres dont une donne
sur la rue. Cette maison était
située entre le Heilige weg et le Munt dans le
Kalverstraat. Le Kalverstraat était occupé par les
bourgeois de la garde nationale situés cependant
à une assez grande distance les uns des autres.
Fenêtres perrons tout était rempli d'une foule
innombrable de curieux qui les yeux éhabis
attendaient peut-être dans une indifférence parfaite
le passage de leur maître. Et c'était les mêmes Hollan-
dais qui - mais pourquoi rappeler des faits glorieux-
c'étaient les mêmes hollandais qui avaient applaudi
au prince d'orange qui avaient dansé la carmagnole
sur le Dam qui avaient consenti à l'élévation
de Schimmelpenninck, qui avaient crié le vive
le roi, et maintenant vive l'empereur. Tel a toujours
été le peuple tel il sera toujours. Et on voulait faire
il y a peu d'années de cette multitude un corps plein de patriotisme
de vertu d'honneur!!! Mais c'est assez nous arrêter
à ce sujet et je crois que pour la plupart des gens
la curiosité était le principal attrait. C'était mon cas. Je voulais
voir l'homme qui de simple particulier s'était élevé
au trône le plus puissant de l'Europe le vainqueur
de l'Egypte et d'Austerlitz et de Jena. À deux heures
et demi on vit arriver premièrement des lanciers de la garde
à cheval. Leur uniforme était rouge, ils portaient
des très beaux casques et des lances, à l'un des bouts desquels
était attaché un petit pavillon. Suivait un
corps de lanciers en uniforme bleu sur des chevaux
blancs. Ensuite quelques curassiers[?] à cheval. Puis trois
carosses attelés de 6 chevaux avec des dames
de la cour et le carosse de l'impératrice attelé de
8 chevaux qui était très grand et très brillant avec
plusieurs glaces (se qui a donné peut-être
naissance à l'histoire du carosse de crystal). Elle
était richement habillée et avait le visage couvert
d'un voile. Après cela venait encore carosses
et une grande multitude de curassiers à cheval
en uniforme bleu au blanc. Telle était la suite
de l'impératrice.
Après cela venait la garde d'honneur à cheval en
habit vert et culotte rouge. Ce corps était très beau.
Suivaient encore des curassiers et enfin plusieurs
chefs et généraux à cheval parmi lesquels était
l'empereur. Assis sur un cheval blanc en habit
bleu avec une écharpe rouge et un chapeaux tout
simple ce qui le faisait surtout reconnaître.
Il était fort gros et un peu courbé. Il
était fort gracieux et saluait à droite et à
gauche. Après cela venaient neuf carosses accom-
pagnés de chasseurs où étaient le préfet et
d'autres personnages de distinction.
Enfin venaient les gardes d'honneur à pied et
les mariniers suivis des gendarmes. Une file d'une
trentaine de carosses fermait la marche. C'était
eux qui contenaient les membres du tribunal
de première instance du conseil d'État etc.
Le passage de tout cela avait duré environ trois quarts d'heure.
Jeudi le 10 octobre 1811
Une illumination a eu lieu hier. Elle était fort
simple aucun des édifices ni décorations publiques
était illuminée. Tout cela était réservé pour la
grande illumination qui aura lieu aujourd'hui. Les
garde d'honneurs à pied font le service devant le palais.
Le Dam a été décoré de la même manière que le Kalverstraat.
Ce matin l'empereur a été au chantier. Il y est allé en barque.
Après son retour l'impératrice fit le même trajet.
J'étais alors au marché de grains. Il se répand une rumeur
que des barques chargées de grands personnages s'approchent.
Tout le monde se précipite vers la balustrade. On vit
arriver alors une chaloupe décorée de l'aigle impérial mise
en mouvement par 8 à 10 rameurs de la garde impériale.
L'impératrice y était avec trois ou quatre de ses dames.
Elle était mise fort simplement. Le concours du monde
était fort grand tant sur les ponts que sur les bateaux,
situés dans le Damrak. On entendait crier Vive
l'impératrice ou plutôt un bruit confus et sourd. Je
ne puis nier que de pareilles scènes ne produisent
sur mon esprit une forte émotion. J'aime tout
ce que impose tout ce que se fait en public avec
solemnité et mon plus grand plaisir serait de
pouvoir me transplanter sur les places publiques
d'Athènes ou de Rome, lorsque l'admiration suivait
le héros du jour qui avait sauvé sa patrie où le
poète qui la célébrait dignement. Cependant ces
cris m'affectèrent d'un sentiment douloureux. Lors
qu'on pense que sur cette même place s'embarquèrent
les magistrats catholiques et les religieux lors
de la révolution dans le 16me siècle quand la ville
fut livrée à Guillaume 1er que ce même Dam vit
successivement tant d'illustres princes qui tous
sont engloutis dans la nuit du tombeau
et que maintenant un Corse, ennemi du commerce
qui faisait fleurir cette ville règne sur ces lieux
affranchis pas nos aïeux. Alors mais pourquoi
parler de nos aïeux. Laissez cela aux enfans
qui peuvent à la bonne heure
cueillir quelques notions de notre histoire dans
les écoles. Mais un homme d'esprit ne peut plus
s'arrêter à pareilles choses. Nous sommes français
et même on a défendu de mettre dans un vers latin
batava juventus. L'empereur même a déclaré
au maire qu'il ne pouvait pas comprendre de
quoi nous nous plaignons que nos villages étaient
florissans qu'on voyait bien autre chose en
France. Ainsi c'était nous reprocher le peu que
nous avions conservé après tout de tribut et d'impôts
c'était nous reprocher notre activité qui tâche
encore de réparer faiblement les maux qui
nous accablent. Il disait qu'il avait levé deux
conscriptions dans une année, qu'il en lèverait
encore plus que si nous voulions partager les
prérogatives de la France nous en devions aussi
partager les fardeaux. Ainsi quand nos villes et
nos fertiles campagnes et villages seront chargées
en déserts quand on n'y verra plus que des
femmes, des vieillards décrépits et des hommes
incapables de travailler. Quand peut-être faute
de bras pour pourvoir à notre défense la mer
aura repris son empire et roulera ses vagues dans
les rues d'Amsterdam c'est alors que nous serons
français. Mais c'est assez approfondir ce sujet.
Une particularité remarquable c'est que une
heure avant le passage de l'empereur on vit passer
un cortège de prisonniers espagnols qui
étaient presque sans habits et dans la plus
profonde misère. Cela aurait dû servir à montrer
les fruits de la victoire.
Il y a eu sur le Kadijk un incendie qui a consumé trois
maisons. Cette aventure dans tout autre
tems aurait fait beaucoup de bruit et bien on
n'en parle[?] la[?]. L'empereur est le seul sujet des discours
d'une ville entière.
Vendredi le 11 octobre 1811
Hier enfin a eu lieu l'illumination générale. Le tems était
très beau. Une foule de peuple remplissait les rues.
Le petit temple sur le pont du Brouwersgracht est
une des choses les plus jolies que j'aie vues. Nous vîmes les
grandes illuminations suivantes
Le temple du pont du Brouwersgracht
L'illumination du prince
L'illumination du maire
Les deux palmiers sur le pont du Leliegracht
Le bureau de poste qui était très joliment décoré
La bourse qui faisait aussi un très joli effet
L'hôtel de la mairie
Le vaisseau sur le Doelesluis
L'illumination du préfet dans le Doelestraat
Les belles colonnes sur le pont des amoureux
La fontaine située à la fin du Keizersgracht
L'arc de triomphe dans le Reguliers Breestraat
Une étoile située sur le pont du reguliersgracht
Une pareille sur le pont du Spiegelstraat sur le Keizersgracht
Un temple pareil à celui du Brouwersgracht sur le pont
du Koningsplein
Une trophée sur le pont du Keizersgracht sur le Leidsche gracht
Une décoration sur le pont du Wolvestraat sur le Heeregracht
Une gloire sur le pont du Hartestraat sur le Keizersgracht
Une décoration sur le pont près du Houtmarkt
Nous ne pûmes arriver dans le Plantage à cause de
la presse terrible de manière qu'on était presque écrasé.
On dit que l'Empereur a traversé
les canaux dans un yacht le soir de l'illumination.
Quant aux illuminations particulières elles étaient comme
à l'ordinaire pour la plupart une simple latte avec quelques lampions.
Cependant quelques-uns pour fêter ce grand jour avaient
mis un double rang ou avaient bordé leurs fenêtres.
Quelques maisons de grands personnages étaient décorées
plus magnifiquement.
Ce matin encore j'ai vu l'empereur passer en barque dans
le Damrak. Une foule terrible obsédait les ponts et les
bateaux.
Samedi 11 Octobre 1811
Hier après être revenu du marché j'étais occupé
à lire dans l'antichambre quand tout à coup un cri confus
se lève. Je m'élance sur la rue et bientôt j'apperçois[?] l'empereur
qui traversait en bateau le Keizers et Heerengracht.
Je pus alors fort bien le distinguer. Il avait un uniforme
vert et regardait par sa lorgnette.
Lundi 13 Octobre 1811
Samedi je fus au spectacle on donnait Iphigénie en
Aulide. Après la petite pièce on attendit quelque tems
et tout à coup on annonce l'empereur. Il vint avec
son épouse et tous deux se tinrent un moment debout et
firent leur révérence au peuple. L'empereur s'était
habillé comme à l'ordinaire mais l'impératrice était
fort richement vêtue et avait un diadème de diamans.
À leur arrivée commencèrent les cris. Il faut cependant
avouer que quelques français présens au spectacle
avaient bien le haut ton. La salle était décorée
de bougies et on avait distribué parmi les spectateurs
des branches de laurier. L'Imp. sans être belle a un
air de jeunesse et un visage assez agréable elle est
longue et pâle. À peine L.M. furent elles arrivées qu'on
leva la toile. Elles se retirèrent à la fin du quatrième
acte. La pièce m'enchanta car quelle jouissance d'entendre
les vers de Racine déclamés par Talma. Cet acteur
ravit tous ceux qui le voient par sa voix claire et sonore
son appareil majestueux. Enfin on ne pouvait
voir en lui qu'Achille surtout dans la scène
avec Agamemnon lorsqu'il met la main à
son épée et à la scène du 5me acte où il quitte Iphigénie.
C'est l'Achille d'Homere Madll. Duchesnois a deployé
beaucoup de talent dans Clytemnestre quoi qu'elle ne
puisse être comparée à Madm. Wattier. Elle crie trop
et n'a pas assez de noblesse. Cependant lorsqu'après
avoir foudroyé Agamemnon par ce terrible morceau
vous ne démentez point une race funeste
et lorsqu'elle se jète sur sa fille et l'ammène avec
elle ou lorsqu'elle se jète aux genoux d'Achille
alors on ne peut qu'admirer.
Mll. Bourgoing a bien rempli le rôle d'Iphigénie ce rôle
doux et charmant qui doit toujours intéresser.
M. Garner et Lagardère ainsi que les autres acteurs
qui remplissaient les autres rôles ont fait leur mieux
cependant l'on reconnaissait toujours les acteurs
du drame ou de la comédie.
Hier on allumerait enfin le fameux feu d'artifice
sur lequel on a débité tant de contes et de mensonges.
À entendre parler les gens il n'aurait produit que
le petit effet de faire sauter en l'air le Hoogesluis
entier. Il paraît cependant que la grande pièce que
quelques-uns évaluent à 1500 Livres de poudre à canon
a été défendue par l'empereur. Nous allâmes chez mon
cousin Kops. Nous n'avions cru nous trouver là en
famille mais nous fûmes bien etonnés de
voir arriver bientôt une foule de personnes
de toute espèce et dont le nombre [onl.] monta
bientôt à une cinquantaine. Cependant nous
attendîmes en vain le feu d'artifice et après avoir
été debout dans l'attente pendant quelques heures.
Nous retournâmes enfin avec la triste consolation
que ceux qui avaient du attendre le feu d'artifice
dans le mauvais tems (car il faisait un
vent affreux) avaient été bien plus mal partagés
que nous.
Hier la distribution des vivres par loterie aux
pauvres gens a eu lieu. Cependant les prix étaient
comme 1 à 4.
Mardi 15 do.
Il est difficile de croire tous les discours qu'on attribue
à l'Empereur. L'un raconte ceci, l'autre cela. Nous allons
passer quelques anecdotes concernant son séjour ici.
Mr. Schim lui ayant dit que puisque ses mesures défendaient
le commerce extérieur il facilitait du moins celui de
l'intérieur. Il répondit Monsieur j'entre parfaitement dans
vos principes. Il fut invité à dîner chez l'empereur
avec le Prince et deux autres seulement et leur
conversation fut fort longue et fort animée.
À Utrecht parlant avec quelqu'un qui était
issu des fugitifs lors de l'édit de Nantes il dit à un prêtre
catholique qui assistait à cette audience "Voilà votre
ouvrage.
Ayant éternué lors de son entrée à Amsterdam un
garçon lui dit Dieu vous bénisse. Quelques jours après
il fit appeler ce garçon lui donna 5 Napoleons et offrit
de l'admettre dans une de ses écoles militaire.
Voyant Mr. Krayenhof exministre de guerre. Il dit:
Quoi l'on ose me présenter un tel homme Monsieur vous
avez bien mal conseillé mon frère. Il répondit Sire
je le lui conseillerais encore jusqu'à la fin de ma vie.
L'Empereur parut interdit et Kr. ayant continué Mais Votre
Majesté connait son frère. S.M. répondit Je connais
mon frère et je connais aussi ceux qui l'ont conseillé et
lui tourna brusquement le dos.
Parlant avec Me. Braunsberg du jeu il ditMadame
vous êtes femme d'un négociant ainsi vous jouerez
certainement gros jeu. Elle répondit Pas à présent sire.
On rapporte qu'il a dit en parlant de son frèreMon
frère est un fou et qu'il a adressé aux envoyés
des Juifs ce compliment mignon Je vous déteste.
Nous fûmes hier au jour de famille. Je lus
un vers que j'avais fait sur la mauvaise réussite
du feu d'artifice et qui fit beaucoup rire. Mon grand
père était terriblement verbeux.
L'empereur est parti ce matin pour den Helder.
On dit que l'amiral de Winter lui a préparé
là une fête choisie.
Mecredi 16. Puisque le départ de S.M. l'Empereur
pour De Helder ne nous fournit plus l'occasion de parler
de fêtes ou de préparatifs je vais noter ici quelques
anecdotes relatives à son séjour ici.
S.M. est arrivé à Zaandam accompagné seulement de l'imp.
de la duchesse de Montebelle avec ses enfans de deux grenadiers
et de quelques autres pages et personnages de sa suite. Le
signal qui annoncerait son arrivée avait manqué. À
peine sut en son arrivée. Les deux maires n'étaient pas
prêts et à peine lui a t-on fait voir la maison du
Czar Pierre. Alors sont venues encore quelques jeunes
filles qui devaient présenter un bouquet mais qui
n'ayant pas eu le tems vinrent dans leur costume
ordinaire et firent leur compliment. L'Empereur cependant
riait à gorge déployée et en fut fort content et même dit
tout haut Il faudrait donner une dot à cette fille.
Mais personne ne répliqua et les jeunes filles se retirèrent.
Enfin voyant que personne ne se souciait d'eux l'empereur
dit à sa suite Messieurs le tems se couvre embarquons nous.
Il attrapa encore une vieille femme à qui il fit ôter
son bonnet pour voir sa coiffure. Enfin ils s'embarquèrent
dans un yacht que l'empereur acheta tout de suite
et donna en cadeau selon les uns au batelier et
selon les autres à celui qui l'occupait ce jour le gouvernail
l'ayant emprunté à l'un de ses amis. Le grenadier
qui avait accompagné l'empereur à cette expédition et
qui raconte ces particularités disait qu'il n'avait jamais
vu l'empereur en si bonne humeure qu'en ce pays-ci.
D'autres personnes assurent la même chose.
L'Impératrice a été hier encore en bateau et fera
aujourd'hui une pareille expédition.
Les gardes d'honneurs ont eu l'honneur de garder le
palais. Les Français ont dit que cet honneur n'avait prèsque
été accordé à aucun corps de gardes d'honneurs pas même
à ceux de Paris cependant je crois que le nôtres s'en
seraient fort bien passés. Plusieurs sont déjà malades
puisque à leur garde de nuit ils n'osent avoir
ni redingotte ni manteau. Un d'eux s'étant endormi
il s'écria à demi réveillé Qui vit - La Garde - Arrêtez.
Monsieur on n'arrête pas la garde.
Snoek a joué très bien Hamlet la semaine passée. Talma
s'étant rendu chez lui, lui dit qu'il n'avait jamais vu
si bien remplir ce rôle.
Jeudi 17 Octobre 1811 Hier nous vîmes
encore l'impératrice en bateau. Elle a été avant
hier à Broeck. Sans être belle, elle a cependant un
air de fraîcheur et de jeunesse.
Étant à table nous fûmes abordés par mon grand Oncle
de Vos qui venait me prendre pour aller au théâtre
hollandais. Je n'y résistai pas. On donnait Omasis
ou Josef en Egypte traduit du Français de Baour
Lormian par M. Westerman. Cette pièce est assez bonne
il y a des morceaux pathétiques. Snoeck jouait le
rôle d'Omasis Jelgershuis Simeon,
Rombach Rhamnes Madle. Greveling Almais,
Westerman Jacob Mlle. Kamphuisen Benjamin.
Ce sont surtout les deux derniers actes qui raniment
le vigueur de l'action qui languit un peu dans
les trois premiers. Le caractère d'Omasis est bien soutenu
celui de Simeon est peut-être un peu outré. La
mauvaise déclamation des acteurs Hollandais
me frappa surtout ce soir puisqu'il n'y avait que
quelques jours que je venais d'entendre Talma. L'oncle
nous fit rire durant la représentation par les excla-
mations brusques que le jeu des acteurs ou les
circonstances de la pièce lui arrachaient quelque-
fois.
Nous vîmes après une pièce intituléeLes arts re-
conduits par Mars sur le Parnasse à l'occasion de l'entrée de S.M. par M. van Ray.
Ce van ray est auteur de quelques petites comédies, il participe
à la censure des livres et n'a pas rougi de faire défendre
l'impression du 3me volume des poésies de Helmers qui
contenait un poème sur la grandeur de la
Hollande. Il est d'une très basse extraction
car sa mère fut une femme publique. Cette pièce
était digne de son auteur car le contenu en était
difficile à comprendre. C'était une mélange de
pantomine de danse de déclamation et de chant.
Snoeck était Apollo, Mme. Wattier Melpomene et
Majofsky Jupiter, mais leurs rôles
réunis ne fournaient pas plus d'une trentaine de
mauvais vers. Cependant le courier assure qu'ils
se sont surpassés eux-mêmes dans cette pièce.
Une pareille en français intitulée les chanteurs
de Sardam a été jouée par les artistes français
n'a pas mieux réussie. L'auteur en était M. Chaset auteur de quelques vaudevilles.
Celui-ci était déjà en habit galonné derrière les
coulisses pour se montrer quand on demanderait l'auteur.
Mais il n'a pas eu ce plaisir. Il paraît qu'il a été
loué pour faire ici des vers pour S.M. car il est l'auteur
de la misérable traduction d'une misérable pièce
Hollandaise où on fait parler le palais et d'une
épigramme ou petit conte intitulé le Tapis à l'enchère
qui ne vaut pas mieux. Les poètes Hollandais n'ont
point encore célébré S.M. Helmers s'est éloigné de la ville pour
ne pas voir la bassesse des Hollandais et il est
fort malade. Le médecin Kleinhof a fait
un vers Latin. Parmi la suite de l'empereur se
trouve M. Pair, directeur de la musique de la
chapelle de l'Empereur qu'on dit être un des premiers
componistes de l'Europe.
Vendredi 18 Oct. 1811
Pour diversifier les sujets je rendrai compte ici de
quelques livres lus depuis 1 sept. et je continuerai
avec cette notice.
Wagenaar J'ai enfin fini son volumineux
ouvrage que j'ai lu en entier excepté les deux volumes
qui vont depuis le commencement du règne de Philips
jusqu'à la fin du gouvernement de Leicester
que j'ai lus dans Hooft. Je crois qu'on trouverait
avec peine un historien aussi exact et clair que
Wagenaar. Son stile n'est jamais diffus. Cependant
ce ne sont pas de ses brillantes narrations qui
nous plaisent dans un Titelive ou un Vertot, ou de
ses apperçues de ces pensées judicieuses et de ces morceaux
d'éloquence que nous rencontrons dans Robertson,
Tacite, Hooft ou Salluste. Aussi c'est très rare quand
il en vient jusqu'à faire une remarque et quoique
je n'aime point ces historiens enflammés par l'esprit
du parti cependant des réflexions judicieuses semées
ça et là ne font que rendre plus agréable la lecture
de l'histoire. Il faut aussi avouer qu'il a trop
négligé l'histoire des moeurs des coutumes de
la civilisation des arts et de sciences. On pourrait
l'accuser d'avoir été peut-être trop exact. Surtout
il est fort prolixe dans les détails des négociations
et des traités. Ce qui est pourtant une des parties les
plus ennuyeuses de l'histoire moderne. L'histoire
depuis l'abdication de Charles 5 jusqu'à la paix
de Nimègue est sans doute l'époque la plus intéressante
de notre histoire. Car après cela jusqu'à la fin
de 1711 nous ne paraissons jamais que dans un rôle
subalterne. On n'entend plus parler d'aucun illustre
marin depuis Ruiter et C. Tromp, d'aucun illustre
général enfin on ne voit plus de ces hommes qui
affrontèrent tous les dangers pour étendre notre
empire ou notre commerce. Cependant l'intérêt
quoique beaucoup moindre se soutient encore jusqu'à
la mort de Guillaume 3 où il baisse encore
car l'histoire de la guerre de la succession d'Espagne
se rapporte presque uniquement à ce que firent
les autres puissances. Il est aussi à remarquer
que tandis que dans les époques précédentes Wagenaar
pouvait puiser d'une foule d'historiens tels que
Hooft, van Meteren, Reyd, Bor, Brand, Strada, Benti-
voglio etc. il ne trouvait ici aucun historien
remarquable. Lamberti soutient encore les
premières années du 18me siècle. Cependant après
la paix d'Utrecht on voit régner une longue paix
et le lecteur se console de l'aridité des détails
par la consolation du bonheur dont on jouit
dans de tems-là. Car les moindres particularités
touchant les traités d'Hanovre et de Séville [onl.]'y sont
traités miniteusement tandis qu'on n'apprend
rien de la situation du pays les [onl.] que lors
de la révolution en 1747 que le récit des faits passés
dans les villes de la Hollande devient de
nouveau intéressant. Cependant on peut dire
que peu de pays ont une histoire si correcte
si véridique et si impartiale.
Quelques traits de la vie de Frederic Guillaume 3
par Dampmartin.
Le Dampmartin auteur de plusieurs ouvrages
historiques a été ici comme émigré et doit être
un homme d'une vaste Érudition. Cependant on
ne peut disconvenir que l'ouvrage noté ci-dessus ne
porte l'empreinte de la prévention et de l'esprit
de parti. Le style en est diffus et difficile à lire. Frederic
Guillaume y est presque élevé aux cieux et sa
passion pour la comtesse de Lichtenau y est aussi
traitée sous l'aspect le plus favorable.
Mémoires de la princesse Wilhelmine de Prusse.
∙Les mémoires sont fort agréables à lire moins pour
la valeur des faits historiques que pour voir un tableau
vivant des tracasseries et des intrigues de la cour. J'ai
entendu que le Journal de l'Empire en disputât
l'authenticité mais je ne puis comprendre comment
une autre personne serait descendue à des détails
si minutieux. Je n'oserais point en assurer
l'impartialité puisque il est bien difficile de voir
sans prévention des personnes qui vous tiennent
de si près ou des actions qui nous intéressent parti-
culièrement. Il faut pourtant convenir que
c'est un ouvrage fort attachant à lire.
Baur 4de deel
Cet assemblage de biographies a le défaut que ces
vies trop courtes s'effacent les unes les autres et
ne laissent pas d'impression durable dans la mémoire.
Je ne puis pas dire que j'y ai puisé beaucoup de
nouveau excepté pourtant les vies de Clement 14
et Pie 6, qui m'intéressaient fort. L'histoire d'un
enfant prodige, Heineke est très particulière on
y trouve entr'autres les vies de Dubois, Menzikof
Potemkin, Iwan Ankerstorm, Damiens Phebe
Daun, Clerfayt, Boerhave, Oosterdijk.
Hugo de Groot en Reigersbergen par Loosjes.
C'est un ouvrage excellent et après Lijnslager
un des meilleurs ouvrages de cet auteur que je
connaisse. Le caractère de Maria Reigersbergen
surtout est supérieurement bien peint. Il
y a même plusieurs morceaux qu'on pouvait
nommer poétiques.
Samedi 19 Octobre 1811
L'empereur est revenu Jeudi soir en ville. Les gardes
d'honneur avait eu une peine infinie à la suivre.
La plupart étaient succombés en chemin. L'un avais
la patte de son cheval cassée l'autre était tombé
sous son cheval etc. Il y en avait seulement quatre
qui l'avaient suivi jusqu'à Halfweg mais ce fut
aussi le terme de leurs efforts. Si l'on veut lire des
particularités sur le séjour de S.M. l'Emp. au Helder et
de l'imp. à Harlem on peut lire les gazettes où les
choses sont du moins traitées avec adulation mais
quant à moi puisque je n'écris que pour moi-
même je rougirais trop ensuite de n'avoir pas parlé
le langage du coeur.
Toutes les décorations pour les illuminations étaient
abattues le pauvre Kalverstraat dépouillé de ses festons
et de ses jolis pavillons quand tout à coup le bruit
se répand que l'on est occupé à rebâtir l'arc de
triomphe du Plantage et que S.M. l'empereur d'Autriche
se rendra ici pour rendre une visite a sa fille à
qui l'on dit que notre climat convient merveilleusement.
Le tems seul pourra démontrer la vérité de cette
assertion quoique pour moi j'y ajoute très peu de foi.
Lundi 21 Octobre 1811
Samedi au soir mon papa fut au spectacle. On donnait
Olympie (en holl). À peine la pièce fut elle finie qu'il
s'éleva un cri confus au feu au feu, la consternation
se répand aussitôt dans l'assemblée en un moment le
parterre et les loges sont désertes. Tout fuit
et s'élance vers la porte. Cependant rien n'annonce
un incendie, les acteurs lèvent la toile. Snoeck et
Jelgerhuis avec tous les autres acteurs se montrent
sur la scène pour montrer la fausseté du
bruit mais ils ne peuvent se faire entendre. Enfin
on apprend que ce n'est qu'une fausse allarme commencée
par quelques misérables garçons assis au Paradis. Le
calme renaît et bientôt le théâtre est plus plein
qu'auparavant.
On avait enfin fixé à hier au soir l'époque
où l'on verrait ce fameux feu d'artifice. Nous nous
rendîmes encore chez le cousin Kops, où nous
trouvâmes à peu près les mêmes convives mais
le nombre en étais beaucoup moindre. Je me
nichai sur le garnier. En effet le feu d'artifice
commença bientôt. Mais à part un superbe bouquet
on ne vit rien de remarquable à moins qu'on
ne veuille compter quelques
fusées lancées de tems en tems. Tout paraît avoir
été gâté par l'humidité. L'empereur avait honoré
ce divertissement de sa présence, et je crois
qu'il en aura été bien mécontent. En effet cela
ne valait pas la millième partie du bruit qu'on
en a fait.
L'empereur a encore donné audience hier. Il était
en très bonne humeur. Lorsqu'on vient à cette audience
on n'a point lui faire un discours mais seulement
répondre aux demandes qu'il daigne vous faire.
À Hoorn on a été fort attrapé. Ces bonnes gens
avaient appropriés pour lui une maison entière
avec une salle d'audience qu'ils avaient décorée soit
par ses portraits soit par des tableaux qui
représentaient ses victoires. La seule chose qu'on
a pu lui persuader a été celle de galopper par la
ville d'un bout à l'autre.
Pour preuve qu'il est bien loin des craintes
que quelques-uns lui ont attribué peut servir
entr'autres qu'à De Helder il est avancé sans escorte seul au
milieu de 3 ou 400 prisonniers espagnols qui
étaient là occupés à travailler.
Passons aux nouvelles littéraires
Haller Alfred Ce livre moitié philosophique moitié
historique et moitié romanesque est un ouvrage
estimable où les avantages d'une monarchie tempérée
sont vivement démontrés. Il contient des particularités
fort intéressantes sur Alfred le grand.
Meissnet Alcibiades 4 vol.
Cet ouvrage qui peint à merveille le caractère
à la fois voluptueux et héroique d'Alcibiade dans un
très beau style est fort intéressant. Il est seulement
à regretter qu'on ne sache pas toujours si tel ou
telle anecdote est tirée des historiens ou de l'imagination
de M. Meisner. Sous cet aspect la derrière partie
l'emporte sans doute sur la première en vraisemblance. Car de
quelle longueur ne sont pas les dialogues d'
Aspasie avec Glycérion. Il est malheureux que
Socrate ne puisse pas y jouer un plus grand rôle.
Schiller Wallenstein
Je ne sais pas si on ne pourrait nommer cette pièce
une des plus intéressantes de cet auteur. Sans doute
Don Carlos, la Pucelle d'Orléans contiennent
de plus grandes beautés mais cette majesté, cette
terreur qu'inspire ce formidable Wallenstein et
qui n'est ternie que par son irrésolution le beau
caractère de Max Piccolomini la mort cruelle
du héros tout cela attache vivement. Cependant
comme ouvrage dramatique quelle différence y
a-t'il encore avec les chefs d'oeuvre du théâtre français.
Turandot est une petite pièce assez plaisante
tirée des mille et une nuits.
Mackbeth est traduit de Shakespear.
Weisse 1e Theil
Eduard 3 Cette pièce est très froide et paraît être
le commencement de l'auteur. Un jeune prince qui
est toujours de l'avis du dernier qui parle. Une
mère qui presse son fils à faire tuer ses deux oncles
et qui lui fait tuer son père qu'il ne connaît pas
tout cela pour un amant boel offre peu d'agrémens. La
fureur d'Isabelle seule et ses remords sont
énergiques.
Richard 3 Cette pièce est a mon avis meilleure.
La cruauté de Richard et son amour même
ont trembler sa fureur et sa perte satisfont
les specateurs.
Crispus C'est le même sujet de la Phèdre de Racine
mais tandis que celui-ci fait tomber le plus grand
intérêt sur cette femme coupable Weisse ne fait
craindre que pour son Crispus.
L'accusation et la déclaration d'amour sont plus
belles dans Racine puisque Fausta n'est pas une
femme atroce et que son crime peut être excusé
d'autant moins qu'il n'y a pas de question de
la mort de Constantin. Celui-ci aussi au lieu
du voeu de Thesée livre son fils à sa femme qui l'accuse
ce qui est injuste et cruel. Cependant la fermeté
et l'héroïsme de Crispus qui meurt empoissonné
dans les bras de son ami et de sa maîtresse intéressant
vivement et plus encore que le récit fabuleux de
la mort d'Hippolyte.
Mustapha et Zeangir
Le sujet de cette pièce est intéressant. L'héroique
résignation de Mustapha l'amitié de Zeangir
est très bien décrite. Cependant on voit trop depuis
le commencement que Mustapha doit périr. Le piège
dans lequel le fait tomber Rustan est un peu
trop grossier. Les remords de Soliman sont les remords
d'un tyran et son caractère à ce mélange de férocité
et de défiance est dignement peint. La mort de
Zeangir par laquelle Roxane se voit arraché
le seul fruit de ses crimes termine dignement la pièce.
Hagedorn gedichte 3 Th.
Ce poète est un des plus estimables de ses compatriotes
puisque on y voit partout briller dans ses ouvrages l'honnête homme
et l'ami de la religion.
Le 1e volume contient les poésies morales qui ne
sont pas les moindres et où brille le poème sur
le bonheur et un recueil d'épigrammes, parmi
lesquelles il y en a de très jolies.
Le 2 volume contient des fables et des contes d'après
La Fontaine Bocace et d'autres auteurs inconnus.
On y remarque un style élégant et facile.
Le 3e volume contient des odes pour la plupart galants
ou bacchiques mais parmi lesquelles il y en a de
très belles. Une surtout en l'honneur de Bacchus
m'a plu supérieurement.
Des notes judicieuses prouvent une vaste érudition.
Winterbloemen 1ste deel door Bilderdijk
Depuis longtems l'Ossian Hollandais n'avait rien
produit. Mais les Winterbloemen ne valent pas les Na-
jaarsbladen. Ce n'est pas que Bilderdijk ne reste
toujours Bilderdijk, mais on est las de ces adorations
continuelles d'Homère de ses invectives contre
les étrangers et surtout de ses éternelles jérémiades.
Ce que m'a plu le plus dans ce volume sont
deux imitations d'horace et une épître de
Turnus à Enée.
Lundi 21 Octobre. S.M. a été hier à Muiden et à
Naarden.
Pour diversifier le sujet je rapporterai un discours entre
le ministre de l'intérieur et Eymer heuker[?] du marchée
de grains. Il m'a paru assez curieux. Il se faisait par
interprète. Mais le voici dans les deux langues.
Mint. Vous êtes négociant d'Amsterdam. Ey. Ja zijn Exc.
M. Combien de grains y a t'il dans la ville. E. Vierduizend
last. M. Est-ce assez. Neen zoo de Keizer van tijd tot tijd
Vriesland, Groningen en Nimwegen vrij laat dan wel.
M. On a déjà exporté de Groningue tant de milliers
de quintaux . Ja maar dat waren vijf soorten van
graanen bij en vooral haver. La liberté d'exportation
ne peut-être donnée depuis Nimègue on en exporte de là
plus au sud. Il faut en chercher au nord. Wat noemt Z.E.
't noorden. La Russie la mer Baltique Depuis Petersbourg
jusqu'à Hambourg. Indien Z.E. ons schepen en zekerheid
kan bezorgen willen wij 't wel haalen. Quelle est
la cause du moins de débit des grains. Eertijds was
het débit 15000 last en nu 3000. Dat komt omdat de
arbeiders geen geld verdienen en omdat de stad vol armoede
is. Zoo ook door de laage prijs der groentens. Ik heb vijf en
twintig raapen voor vier duiten en een grote kool voor
een stuiver kunnen krijgen. Dat komt door de douaniers.
Ik ben onder mijn soort een rijk man geweest. Er
staan drie kisten op mijn kantoor die plagten vol
te zijn nu kan je er wel thee in komen drinken. Men
houdt het geld op andere plaatsen. En de dure vragt.
Ik heb over negenhonderd gulden een acquit van
vier gulden betaald. Et qui retire l'argent de cet
acquit. De Douaniers. Sacre bleu. Mais j'ai moi-même fait acheter
des grains. Ja te Hamburg maar zullen die in magazijnen
gelegd worden. Non vous et tout autre pourrez les
acheter et je compte qu'ils feront baisser la prix des
grains de dix pour cent. Ils seront ici dans cinq
jours. Ja dan zal 't laat worden.
Il reste à rapporter de dimanche que le soir durant
le feu d'artifice les tours furent illuminées par des
flambeaux nommés feux de Bengale qui répandaient
une clarté extrêmement vive ce qui fit croire à
plusieurs personnes qu'il y avait du feu.
Tout le Kalverstraat par où devait passer S.M.
était illuminé.
Mecredi 23 Octobre 1811 Nous fûmes hier au soir
aux français. On donnait Le Babillard, Iphigénie en Tauride.
Le Babillard est une petite pièce assez jolie où Gargier
jouait très bien.
Dans Iphigénie Talma remplissait le rôle d'Oreste.
Mll. Duchesnois celui d'Iphigénie et Damas celui de
Pylade. Talma répandait sur son
rôle cette mélancolie qui quelquefois se changeait
en fureur et quelque fois dans un morne silence.
C'était dans la première scène du second acte où il vient
enchaîné qu'il fallait le voir lorsqu'il voit l'abyme
ouvert sous ses pas et les serpens siffler autour de
sa tête. Quelle noblesse ne montrait-il pas dans
ses adieux à Pylade et dans cette situation terrible
ou Iphigénie lui rapporte le nom d'Agamemnon.
Damas jouait le rôle de Pylade avec assez de noblesse quoi
qu'il passe trop souvent les bornes du naturel.
Mlle. Duchesnois me plut assez dans le rôle d'Iphi-
génie quoique ses crimes et sa laideur rebutent aux
premiers instans. C'était surtout le 3ème acte
où ces acteurs se sont signalés dans cette scène où
Orestes et Pylade se disputent la mort. Cette tragédie
est très intéressante et on y remarque de très
beaux vers.
En revenant du spectacle nous voulûmes passer
près de Felix car cet édifice était illuminé à l'occasion
de la fête que la ville y donnait à l'empereur. Arrivés
près du huidenstraat nous voulûmes passer de l'autre
coté du Keizersgracht. Mais le passage était barré
par des gendarmes. Nous nous arrêtâmes quand
tout à coup l'empereur qui revenait de Felix
passa. Premièrement l'on voyait des garde d'honneurs à cheval.
Ensuite des carosses accompagnés de houssards et
de pages à cheval portant des flambeaux. Suivaient
encore d'autres voitures et une escorte de
curassiers. Tout cela allait ventre à terre.
Felix était joliment illuminé. Il y avait une décoration
devant cette maison, consistant en un temple surmonté d'un
soleil. Le canal était illuminé par des guirlandes
de lampions qui allaient d'un arbre à l'autre et
par les illuminations particulières.
La foule dans les environs de cette illumination
était innombrable.
Jeudi 24 Octobre C'est aujourd'hui que leurs majestés
sont parties de cette ville. L'E. à 7 et l'I. à 9 heures. Ils
ont fait cadeau à M. Bakker chef des gardes d'honneurs à cheval
et M. Gulcher chef de ceux à pied à l'un une tabatière
et à l'autre une bague enrichie de brillans. On estime
la valeur de l'un de l'autre de ces présens à 100 ducats.
Hier au soir L.M. ont assisté au spectacle. Les hollandais
donnaient Phèdre.
Les personnages qui ont vu l'E. de près ne peuvent
reconnaître à sa vue le héros vainqueur de l'europe.
Si on ne le savait pas on ne verrait pas là l'Empereur.
Il a donné ici plusieurs décrets qui doivent attester sa bienfai-
sance. C'est seulement dommage qu'il y en a
un qui établisse la régie sur le tabac ce qui prive
ici une infinité de personnes de leur gagne-pain.
Je reviens de Felix et je donnerai ici une courte
description des changemens qu'on a fait à cet
édifice pour l'approprier pour la fête.
Devant l'entrée de la salle du concert on a placé
une alcôve de rideaux bleus avec des bordures en
rouge et jaune. Une lustre y brûla.
La salle du concert est drapée jusqu'à une certaine
hauteur de soie bleue en forme de rideaux. Dans
les intervalles on voit 8 miroirs au dessus
desquels sont attachés des drapeaux. En entrant
on a à droite et à gauche deux orchestres.
Au fond de la salle où était ci-devant l'orchestre
on a placé une estrade de quelques marches. Là
sous un dais rouge on a placé deux sièges pour
leurs majestés. À droite et à gauche de ces sièges
on voit un trophée où on remarque une armure
complète du tems de la chevalerie. Tout ceci
produisait un fort bel effet.
Dans legehoorzaal
on a peint les colonnes et la plus grande partie de
la salle en blanc. Au fond où était la chaire
on a élevé un orchestre peint en blanc et rouge.
Les rideaux sont également de blanc et rouge.
Des lampes sont suspendues. Les murailles sont
peintes d'une couleur bigarrée fort faible. Sur ce
fond on voit de distance en distance des lyres.
Cette chambre a un air encore plus gai que
la salle du concert.
Il y avait une foule de monde qui
venait voir toutes ces décorations. La fête a fort bien
réussi. Aussi tout était-il arrangé avec goût et
doit avoir été encore bien plus frappant le soir
lorsqu'il était éclairé par cette foule de lumières et
lorsque tant de personnes bien habillées s'y promenaient.
Cependant on convenait que le local était fort
petit. Premièrement on avait eu l'idée de faire
un plancher plus haut qui serait commencé un
peu au dessous de la base des fenêtres. Ceci aurait
été ridicule. Il n'y a point eu de souper mais on
y a présenté toutes les rafraîchissemens possibles.
Mr. Zuilen van Nieveld qui a chanté les couplets a
reçu un collier composé d'un double rang de perles
avec une de ces petites montres que les dames portent
sur leur sein.
Mr. Rendorp colonel de la garde d'honneur et M. Gobius
chef des Mariniers ont reçu parcellement l'un une
tabatière avec le chiffre de l'Empereur, l'autre une
bague.
On a eu moins de facilité à voir l'Impératrice que
l'Empereur puisqu'en sortant elle avait presque
toujours une voile ou du moins un chapeau qui lui
couvrait la figure. Elle paraît être très timide du
moins en présence de l'Empereur. Étant à Harlem
comme parmi les jeunes filles qui lui présentaient
le bouquet il y en avait de fort grosses contrefaites
laides où qui boitaient, elle dit à une des dames
de sa cour que ses demoiselles devraient être un peu façonnées.
Talma joue à soir Mahomet. On dit à ce sujet
que La Rive dit un jour qu'il avait étudié ce rôle de
vingt manières différentes et n'avait pas encore
pu parfaitement y réussir que M. de Voltaire
paraissait avoir eu du plaisir à faire un rôle
propre à désespérer tous ceux qui voudraient
jamais entreprendre de la jouer. On dit aussi
que Talma n'a pas beaucoup de plaisir à
le jouer puisqu'il dit qu'il n'a pas pu encore
y réussir à son gré.
Vendredi 25 Octobre 1811
Le Maire van Brienen a reçu de S.M. une riche tabatière
decorée du portrait de l'Empereur.
L'Empereur a son départ hier a ditJe viendrai bientôt
vous revoir.
J'ai encore oublié de noter qu'à Felix on avait pratiqué
une sortie de derrière qui passait par l'atelier d'un
charpentier. Tout le monde excepté l'Empereur et
sa suite devait passer par cette partie.
Aujourd'hui hier et avant-hier les gazettes sont rem-
plies de décrets impériaux. Il y en a trois aujourd'hui
qui commandent l'érection d'une maison de force d'un
aqueduc pour conduire de l'eau douce à Amsterdam et
d'une garde de nuit. Tout cela sera payé par les habitans.
Toujours des nouveautés mais non des améliorations.
Samedi 26 Octobre
L'Empereur a donné au Schout bij nagt Vandoren une tabatière
avec son portrait on en estime la valeur à 20000 fr.
Nous parlâmes hier quelqu'un qui revenait de Dantzig.
Il nous dit que cette ville était on ne peut plus malheu-
reuse qu'aucun négociant était presque sur bon pied
et qu'outre le manque du commerce cette ville
surpassait en maux les deux autres villes d'Elbing et
de Konigsberg, puisqu'elle avait en quartier une armée
de 28000 français dont 16000 étaient occupés sans
relâche aux fortifications et rendaient cette ville
une des plus fortes de l'Europe. On y avait en cette
année 10 Licences pour commercer avec l'Anglettere.
Il y avait une grande abondance de grains et d'autres
productions et l'on pouvait placer son argent à de
forts hauts intérêts puisque les Polonais devaient
avoir de l'argent pour le produit de leurs terres. La
vie n'y était pas chère.
À cause d'un décret de l'Empereur sur le payement
des dettes de la ville les actions sont montées en
trois jours depuis 16 jusqu'à 58.
Le départ de l'Empereur a fait rentrer le calme
et le silence dans la ville.
Le seigle était encore monté hier de 6 à 8
florins d'or.
Littérature
Gallerie interessanter Personen 1 und 2 tln.
durch Schiller 1804.
C'est un ouvrage fort intéressant. On y trouve des
notices succinctes sur des personnes qui se sont distinguées
dans la révolution. Il y en a à la vérité qui sont trop
courtes pour donner une juste idée de ces personnages
mais quelques-unes comme celles de Buonaparte La
Fayette Moreau sont assez détaillées. Celles des anciens
tems sont en trop petit de nombre. Nous donnons ici dessous
une notice des biographies que cet ouvrage contient.
1.
Joseph 2 Empereur d'Autriche 1741-1790 régna 10 ans
Gustave 3 roi de Suède assassiné. 1746-1792 - régna 21 ans
Cathérine 2 Impératrice de Russie 1729-1796 - régna 34 ans
Bonaparte général, premier consul. 1769-...
Reubeel membre du directoire 1746-...
Carnot membre du directoire 1753-...
La Fayette Général Major en Amérique puis Commandant
de Paris, émigré 1757
Bemourier officier de cavalerie, puis commandant en Pologne
lors de la confédération, commandant de Cherbourg enfin
général de l'armée du nord et émigré 1739
Pitt politique Anglais 1759...
Kaunitz ministre en Autriche sous Marie Thérèse 1711-
1794
Herzberg premier ministre de Frédéric le grand 1725-1795
Potemkin Général en chef sous Cathérine 2. 1736-1791.
Loudon Feld-maréchal des Autrichiens vainqueur à
Kennersdorf, général distingué contre Frédéric 2 et contre
les Turcs 1716-1790
Mirabeau orateur révolutionnaire membre de l'as-
semblée nationale 1749-1791
Robespierre tyran révolutionnaire terroriste 1759-1794
Danton Terroriste, guillotiné 1759-1794
Marat tyran révolutionnaire assassiné 1743-1793
Eulog Schneider Ecclésiastique. Poète. Auteur. Terroriste.
guillotiné 1756-1794
Franklin Libraire Philosophe. Auteur. Physicien.
Politique un des fondateurs de la liberté de
l'Amérique 1706-1794
Cook voyageur anglais. 1728-1788
Mohamed faux prophète 571-632 - 10 Hegira
Cromwell Protecteur d'Anglettere 1599-1658
Jeanne d'Arc Pucelle d'Orléans, brulée comme sorcière
1412-1431
Ulrich von Hutten Gentilhomme allemand, chevalier
illustre, guerrier valeureux, homme de lettres auteur,
luthérien 1488-1523
Petrarca Poète Italien 1303-1374
2.
Marie Thérèse Imp. d'Aut., Reine de Bohème et Hongrie
1717-1780. Régna 40 ans.
Friedrich der einzige roi de Pruisse 1712-1786 régna
40 ans.
Stanislaus August roi de Pologne abdiqua en
1795-1732-1798
Prince Eugène général Autrichien vainqueur dans
les batailles de Zenta, Turin, Hochstadt et Belgrade.
1663-1736
Prince de Coburg général Autrichien deux fois
vainqueur des Turcs ensuite vainqueur des français dans
les pays-bas en 1794. 1737-...
Wurmser général Autrichien conquit les fortifica-
tions Françaises à Weissenburg et Lauterburg en 1793.
1724-1797
Suworow Général russe vainqueur en Turque, Pologne
et Italie 1725-1800
Pichegru Général français dans la Hollande et sur
les rives du rhin. Accusé de conspiration et déporté à
Cayenne en 1797. 1761-...
Custine Général français sur les rives du rhin et
général en chef de l'armée du nord, guillotiné 1740-1793
Moreau Général français dans les pays-bas puis géné-
ral en chef de l'armée du Rhin, fit une retraite admirable
en 1796, fut battu en Italie 1799, fit une campagne
glorieuse en Allemagne en 1800. 1763-...
Hoche Général en chef de l'armée de la Moselle
puis de l'armée des côtés à Brest, forma le projet d'une
descente en Angleterre 1768-1797
Charette Général des royalistes dans la Vendée
(chouans) fusillé 1763-1797
Barras Membre du directoire, écarté par le premier
consul 1755-...
Merlin von Douai Ministre de justice et de police
durant la révolution 1752-...
Sieyes Ecclesiastique puis membre du directoire pro-
tecteur de la 3me constitution 1748-...
Voltaire Poète lyrique, épique, tragique, comique, phi-
losophique, déiste 1694-1778
Necker Trois fois ministre de Finances auteur de
plusieurs ouvrages 1732-...
Fox Ministre d'Angleterre puis chef de l'opposition dans
le parlement. 1749-...
Paine faiseur de brosses ensuite commis de Douane
passa en Amérique, écrivit un livre fameux sur les droits
de l'homme ensuite repris dans la convention nationale
à Paris repasse en Amérique mais s'est fait haïr 1737-...
Bahrdt Théologien hétérodoxe, directeur d'un institut
d'éducation et aubergiste, auteur de plusieurs ouvrages
1741-1792
Ninon de l'enclos femme fameuse par son esprit et
sa beauté 1616-1706
Shakespeare premièrement marchand en laine, ensuite
le premier des auteur tragiques de l'Angleterre 1568-1618
Colomb navigateur à qui on doit la découverte
de l'Amérique 1442-1506
Münzer chef des anabaptistes en Allemagne qui
engagea les paysans à la révolte, décapité 1490-1525
Tököly chef des insurgés Hongrois contre l'Empereur
1656-1705
Dimanche 27 Octobre 1811 On dit que l'Empereur a
donné à Mad. Wattier-Ziesenis une pension de 2000 francs.
Talma n'a pas si bien réussi dans Mahomet que dans
ses autres rôles.
Le théâtre fut désert lors du bénéfice de Mad. Duchesnois.
Aussi elle donnait Phèdre qu'on avait vu la même
semaine de Madme. Wattier et en outre les autres rôles
étaient bien mal remplis. Cromène Blache jouait
le rôle d'Hippolyte. On dit que premièrement à la vue du peu de
monde elle ne voulut point jouer.
Hier le départ de Madlle. Cramer eut lieu. Quoiqu'il
fut longtems attendu et même désiré cependant
son départ ne laissa pas de nous attrister surtout lorsque
Mietje nous rapporta le misérable logement qui
serait sa demeure.
Nous fûmes hier au soir chez mon oncle de Vos. Il
nous fit voir de très belles estampes entr'autres
un superbe portrait de l'ancien Pitt. Un pareil de Fox
des estampes d'après des tableaux de Wouwermans, Kobel
l'ancien, Bakhuizen, Hobbema, Berghem, Dusart.
Le naufrage d'un vaisseau Anglais et la mort du capitaine
avec toute sa famille. Le portrait en grand de Louis 16.
Ses adieux à sa famille. La mort de Socrate d'après David.
Les fils de Typo Saib délivrés aux Anglais. Charles 1e
Cromwell dissolvant le long parlement. La mort du général
Wolf. La mort du général Pierson. La sortie de Gibraltar.
La victoire de l'amiràl Howe. Le combat sur l'île de
Jersey. Le grand assaut sur Valenciennes avec plusieurs
autres encore très belles Marguerite d'Anjou devant Eduard 4
Garrich dans plusieurs rôles et dans
King Lear. Une estampe de Shakspear's Much to do
about nothing.
Littérature
Weisse Trauerspiele 2 th.
Die Befreyung Thebes Cette pièce est assez intéressant.
Le danger croît d'acte en acte. Le caractère de Chorin
celui d'Aspasie de Callicratides sont très beaux et la
mort de ce dernier en tirant la flèche lorsqu'il a entendu
les mots de Thèbes est libre sont heureusement emprun-
tés de la vie d'Epaminondas. Le rôle d'Arete est faible
et Pelopidas et Epaminondas ne se montrent pas assez
dans une expédition dont cependant selon l'histoire
ils eurent presque seuls l'honneur.
Atreus et Thyestes Encore cette terrible histoire
d'Atrée dont on a fait déjà tant de tragédies. Cependant
celle-ci a une toute autre catastrophe. Thyeste
après sa fuite a violé une fille pendant la nuit près
d'un temple. Celle-ci s'est marié à Atrée et son fils n'est
que le fils de Thyeste sans qu'il le sache. La peste règne
à Argos et ne peut-être appaisé par le retour de Thyeste.
Thyeste est ramené et Atrée ordonne à Aegiste, son
prétendu fils de tuer Thyeste. Celui-ci reconnaît son fils par
un glaive et aussi la femme qu'il viola. Il paraît que
cette femme (la reine) est sa fille. Elle se tue de désespoir
Aegiste par vengeance tue Atrée et remonte avec
son père sur le trône d'Argos.
Il faut convenir que cette catastrophe satisfait mieux
que celle de Crébillon puisque Atrée a encore la douleur
de voir triompher Thyeste. Cependant celui-ci qui
premièrement a enlevé la femme de son frère et qui
ensuite de but en blanc en viola une autre ne
peut pas nous intéresser beaucoup. Aegiste tue
aussi Atrée avec trop de sang froid et en général
cette pièce est assez barbare. Mais le 3e acte où Aegiste
veut tuer Thyeste et reconnaît son père est très
beau.
Rosamunde
Voici encore une pièce non moins barbare. En effet
il paraît que cet auteur a eu plus le pinceau de Cribillon
que celui de Voltaire ou Racine.
Rosamunde est une princesse mariée à Alboin
roi des Lombards qui a vaincu et fait mourir son père.
Elle le fait périr par vengeance et s'enfuit avec un
certain Hellmich à qui elle se marie et avec sa
fille Abissuinthe. Ils reçoivent un asyle chez Longin,
exarque de Ravenne qui devient amoureux d'Abissuinthe.
Rosamunde croit cependant être aimée de
Longin et pour lui faire place elle n'a rien de mieux
à faire que d'empoisonner Hellmich, mais celui-ci s'en
étant aperçu lui fait boire le reste du poison. Alors
les deux amans sont réunis.
Le rôle de Rosamunde est énergique celui d'Abissuinthe
a de beaux morceaux. Mais Hellmich est un bon
homme et ce Longin aussi. Cette pièce est écrite en
vers rimés ainsi que ceux du 1r volume mais La délivrance
de Thèbes et Atrée sont en jambes. En tout je crois que quoique
on ne puisse point accorder à cet auteur le génie
de Schiller que cependant ses tragédies sont des ouvrages
de mérite.
Romeo et Julia Tragédie en prose imitation de Shakepeare.
Je ne l'ai point lue mais d'après ce que j'en ai lu je
ne la crois pas si énergique que l'original.
Le 3 vol. qui je n'ai point lu contient deux
tragédies en prose Die Flucht et Jean Calas.
Lundi 28 octobre
Hier nous fûmes à l'église chez M. Koopmans. Son
sermon roulait sur le mépris des choses mondaines.
Il était assez rempli de lieux communs.
Voici encore quelques détails sur la fête de Felix.
L'empereur et l'impératrice étant entrés, les demoiselles
présentèrent leur bouquet à l'impératrice. Après cela
ces deux personnages s'assirent et il régna un morne
silence. Les chambellans prirent leurs places derrière
leurs majestés et d'autres grands personnages encore
derrière eux. Ce silence fut interrompu par un signal
que le maire donna de son chapeau plumé au Mr. Joder
pour commencer la cantate. Lorsqu'elle fut achevée
la silence recommenca encore jusqu'à ce que quelques
gardes d'honneur prirent des dames par la main
et commencèrent à former une quadrille qui fut
dansée. Il y en avait trois. Après cela on dansa une
Anglaise fort monotone et ensuite une walse composée
par M. Pair. On forma ensuite encore une quadrille
quand tout à coup l'Empereur se leva. Aussitôt la
musique cessa et les danseurs s'écartèrent pour
lui faire place. Alors L'emp. fit le tour des dames de l'un
côté suivi du maire du prince de Neuchâtel et des autres
grands et l'Imp. en fit de même de l'autre côté suivie
de ses dames. L.M. adressaient à chacune quelques
mots en passant. À la porte ils se rencontrèrent et
aussitôt ils sortirent de la salle avec tout leur
cortège. Aussitôt l'ordre qui avait régné disparut
tout ce mêla et à peine pouvait on comprendre
qu il n'y avait qu'un moment que la salle avait
contenu encore beaucoup plus de personnes.
L'Empereur et l'Imp. n'avaient presque dit mot.
Car ils étaient à une telle distance qu'ils devaient
se pencher l'un vers l'autre pour se dire quelque
chose. Et sa M. l'Emp. ne pouvait pas même feindre de s'amuser
fort, car j'ai parlé quelqu'un qui lui a vu lâcher
un bien gros bâillement.
Nous fûmes hier chez le grandpapa où nous
fûmes régalé sur une tête de veau.
Mardi 29 Octobre
Le seigle était encore monté de 8 fl.
∙À l'assemblée nous trouvâmes l'antagoniste du médecin
dans une petite attaque de fièvre. Ceci bannit tant
soit peu les disputes. Cependant nous eûmes beaucoup
de plaisir. Bruto et Netto jouèrent encore un grand rôle.
Littérature
Die nacht eines Fluchtlinges von Kotzebue 3 act.
Je lus cette pièce chez Duicker. Elle est fondée sur une
anecdote historique et assez intéressante. Charles Edouard
le prétendent en est le héros.
Samedi 2 Nov.
Le cours de cette semaine n'a offert presque aucun événement
remarquable digne d'être placé ici. Le nouveau règlement
d'études de mes soeurs a été reçu avec applaudissement
et suivi avec zèle.
Mecredi on a procédé à l'élection d'un tribunal de commerce
depuis 10 h. jusqu'à 4 et 1/2 et puis depuis 7 h. jusqu'à l'heure
de la nuit. Je noterai ci-dessus les membres élus.
Mon oncle de Vos est assez incommodé. Il a la bouche
pleine d'abces.
Le seigle est monté encore d'une trentaine de florins.
Hier 118 id. 244 gd. 119. 120. 122-248. 250. 255 gd. Aujourd'hui
121 H.[graanmaat] 256. Cette augmentation est étonnante.
Littérature
Deutschlands Orginaldichter 1 & 2 Theil
ou morceaux choisis des meilleurs poètes Allemands.
Il y a des odes superbes de Klopstock et des morceaux
charmans d'autres poètes. Mais en général je trouve
que les poètes de cette nation dans leurs odes [onl.]
se répètent souvent. C'est toujours à Bacchus sur
l'alliance du vin et de l'amour etc. Ramler ne me
plaît pas trop, il a trop d'expressions ou
de comparaisons dérivées du latin. Je trouve que
la langue Allemande n'a pas assez d'harmonie pour
se passer de la rime mais surtout ces fréquents
enjambemens qui s'y rencontent me déplaisent.
La Romance est une espèce de poésie où je trouve
que les Allemands excellent surtout, quoique
nous avons entr'autres des
romances charmantes de Bilderdijk.
Suite
On a premièrement des odes et chansons de
Ax, Blum, Burger, Claudius, Cramer, Dusch,
Eschenburg, Gleim, Gottter, Hagedorn, Holty, Jacobi,
A.S. Karschin, Von Kleist, Klopstock, von Kronegk,
Lessing, Michaelis, Freiherr von Norrmann, Ramler,
Schiebeler, T. Schmidt, Thomsen, Uz, Weisse, Zacharia,
Boie, Denis, von Gerstenberg, Hartmann, Kretschmann,
F.L. Graf zu Stolberg, Voss.
Des Romances de
Eschenburg, Bertuch, Burger, Claudius, Crome, Gleim,
Gotter, Hagedorn, Holty, Lowen, Michaelis, Schiebeler,
F.L. Graf zu Stolberg.
Des Élégies de
Eschenburg, Holty, Klopstock, K.E.K. Schmidt, Unzer,
Voss (Voyez morceaux choisis T. 11 no. 50 à 60)
Lundi 4 Nov. 1811
L'Empereur a donné à la ville d'Amsterdam 30000 florins
pour les pauvres. Notre communauté cependant n'en
reçoit pas plus que 62.10,-. La plus grande désolation
règne ici parmi ceux qui faisaient des affaires en tabac.
C'est aussi une chose fort cruelle.
À Harlem l'Empereur s'est moqué du légat de Teyler disant
que celui-là avait bien mal placé ses fonds.
La semaine passée des gens entrés chez une femme
agée et après l'avoir assassinée ont emporté tous
ses effets.
Mon oncle de Vos est malade du scorbut à la bouche.
Hier je fus à l'église chezBakker. Il prêcha le pen-
chant de l'homme à la sensualité (Paul Épitre aux Romains
7 v: 14-15). Son sermon contenait de très bonnes réflexions
sur le gouvernement des passions.
Hier Talma jouerait pour la dernière fois. J'y fus. On
donnait Oedipe. On donna premièrement Champagnac
et surette petit vaudeville assez agréable. Enfin l'on vit
Oedipe et Talma s'y montra dans le triomphe de l'art.
Premièrement l'on voyait l'homme calme qui se croyait
vertueux d'époque en époque il devenait plus sombre
jusqu'à l'explosion terrible. Sa fureur était terrible.
Quand le prêtre l'accusait. Mais on aurait du le voir
dans cette superbe scène du 4e acte où
il confie à Jocaste les horreurs de son sort
∙dans ces terrible mots:
Vous frémissez madame.
Ensuite quand Icare lui rapporte qu'il n'est pas le
fils de Polybe, lorsqu'il arrache son secrèt à Phorbas
lorsqu'il crie aux dieux.
·Et vous m'en punissez.
Dans ce monologue au lieu de cette terrible fureur de
ces élancées sur le théâtre qu'on aurait vu faire
par tout médiocre acteur, il restait immobile sur
la place et même dans un égarement il était
encore obsédé par l'horreur. On le voyait se courber
vers l'ombre de son père. Enfin il sortait par ces
terribles mots qu'il adresse à Jocaste
·Vos destins sont remplis.
Laius était mon père et je suis votre fils.
Mad. Dauteuil remplit avec beaucoup de noblesse
le rôle de Jocaste. On voyait qu'elle avait profité de
Talma et de Md. Duchesnois. Elle eut de très beaux
momens. Son costume était fort riche.
Les autres étaient tous remplis plus ou moins mal.
Blache était le grand-prêtre Lagardère Dimas et ensuite
Icare mais surtout Garnier qui jouait le rôle de
Philoctète et qui marchait avec un carquois énorme
un arc de cuivre et un terrible casque remplit vacquilla[?]
au plus mal qu'il était possible.
Quand la représentation fut finie on cria Talma
Talma. La toile fut levée et Talma dans ses habits ordinaires
se passa sur le théâtre conduit par Morel. Celui a rassemblé
les papiers jetés sur le théâtre et avertit le public
qu'il l'était que les commissaires en fussent instruits.
Peu après il revient et lit deux vers à la louange
de Talma. Le troisième était ainsi
Chaque rôle nouveau vous est une victoire
Vous remplissez tous nos désirs
Talma rien ne manque à ta gloire
·Othello manque à nos plaisirs.
La toile fut baissée mais aussitôt on entendit de tous
côtés des cris Othello Othello. La toile fut encore levée
et M. Morel dit au public
Messieurs quelque sensible que soit M. Talma à
l'accueil que vous lui faites il ne peut point
remplir vos désirs. Un ordre impérieux le rapèlle
à Paris. Aussitôt on n'entendit plus rien
que quelques siflets qui accompagnèrent
l'acteur qui avait fait cette belle annonce.
Voici les listes des pièces que Talma et les
acteurs français ont donnés ici.
Adelaide | T. Vendome |
Phèdre | D. Hippolyte |
Du. Phèdre | |
B. Aricie | |
Andromaque | T. Oreste |
D. Pyrrhus | |
Du. Hermione | |
B. Andromaque | |
Iphigénie en Aulide | T. Achille |
Du. Clytemnestre | |
B. Ipigénie | |
Hamlet | T. Hamlet |
Du. Gertrude | |
B. Ophélie | |
Zairi | T. Órosmane |
B. Zairi | |
Gaston et Bayard | D.Nerestan |
T. Bayard | |
D. Gaston | |
Andromaque | Du. Euphémie |
Ipigénie en Aulide | |
Iphigénie en Tauride | T. Oreste |
Du. Pylade | |
Du. Iphigénie | |
Mahomet | T. Mahomet |
B. Palmyre | |
Phèdre (ben de Duc) | D. Phèdre |
Rhadamiste | T. Rhadamiste |
D. Arsame | |
Hamlet | Du. Zenobie |
Philoctète | T. Philoctète |
Manlius ben: de Talma | T. Manlius |
Oedipe | T. Oedipe |
Un des chefs d'oeuvre de Talma paraît être le Hamlet
mais Oedipe n'est aussi pas une de ses moindres pièces.
Dans Manlius il doit fort briller, aussi surtout lors-
qu'en faisant lire à Servilius la lettre qui rapporte
sa trahison il lui dit. Qu'en dis-tu.
Orosmane doit être un rôle qu'il ne convient lui-
même ne pouvoir pas bien jouer. Il l'a joué par
complaisance pour Mad. le Bourgoing qui a
rempli le rôle de Zaire. À Paris même c'était un
acteur nommé la Torse qui remplit ce rôle. Talma reçut
de l'Empereur 2000 francs pour ses leçons de déclamation
20000 fr. et puis tire du théâtre 20000 francs
par année.
Mardi 5 Novembre 1811
Hier nous eûmes le plaisir d'apprendre la nouvelle
du mariage prochain entre Mon oncle van Heukelom
et Mad. Walbeek, elle nous fit beaucoup de plaisir. Le
médecin hier en paraissait jaloux. Il disait qu'elle aurait
du moins le prendre qu'il serait venir[?] avec quelque chose[?]
que l'oncle n'avait pu etc. etc. Enfin il dit mille autres
folies.
Nous eûmes hier au soir la première assemblée des
Catechumènes. Voici les héros:
P. Bel | Leenderts | P. Ten Cate |
P. van Eeghen | van der Smisse | W. de Clercq |
G. Lange | J. Bruin | |
C. Hartsen | A. Waerman | |
T. Hollerman | Langerhuizen |
Hier je vis un petit livre doré fort joliment relié en
maroquin qui contenait les prières pour Napoléon
écrites en hébreu et en français. Elle était composée
en grande partie par le grand Rabbin Moïse Saul
(connu par le dessin de l'oncle) qu'ils sont flatteux ces
juifs. Ce sont eux qui ont reçu aussi avec tant de
pompe Guillaume 1 à son arrivée ici.
Voici la liste des membres du tribunal de commerce.
Juges: | |
W. Willink | J.T. Pontoi |
A. van der Hoop | J. Teysset |
J.G. van der Meulen | P. Wendorp |
G.D. Crommelin | D. Bierens |
[accolade willink t/m crommelin:] 2 ans. | [accolade pontoi t/m bierens:] 1 an. |
Suppléans: | |
J. Bernts | C. de Lepel |
J. Danckerts | W. van den Broek |
T. Gülcher | P. van Lennep |
P. van den Broeke | M. Broere |
Joh. Jorisse | J. Gall von Frantensten |
G. Schimmelpennink | B. Kramer |
J.M. Trassinet | W. Bruin |
J.L. Momma | G.H. Meijer |
[accolade bernts t/m momma:] 2 ans. | [accolade lepel t/m meijer:] 1 an. |
President: |
P.A. van de Eis. |
Samedi Si l'on voulait rapporter ici tous les bruits
populaires on pourrait faire une ample collecte.
L'empereur a exigé de toutes les maisons d'orphelins
au dessus de 15 ans pour recruter les régimens de
pupilles.
Nous avons perdu un digne homme dans la personne
du professeur Hesselink. Il reúnissait une grande
érudition à une grande amabilité et une grande
aptitude pour enseigner. J'ai suivi sous lui l'année
passée un cours de mathématiques.
J. Biben a été chez moi. Il a été 14 jours à Schokland et Urk
et quelques semaines sur les côtés de l'Overijssel. Il part
la semaine prochaine pour Paris.
Littérature
Schiller Dreiszigjährigen[?] Krieg 3 v.
Il y a peu d'ouvrages historiques dont la lecture est
si attachante que celle de ce charmant ouvrage. Le style
en est clair et facile et entremêlé de réflexions et
de tableaux très bien placés. On pourrait le recommander
à chacun (pourvu qu'il aime l'histoire) et je trouve cet
ouvrage digne de la réputation qu'il a acquis en Allemagne
(J'en ai fait un extrait) on y trouve outre cela
les vies des personnes suivans
Le cardinal de Richelieu
Maximilien duc de Bavière
Amalie comtesse de Hesse
Le chancelier Oxenstierna
Wallenstein
Eschenbrug Beyspielsammlung
Ceci est un assemblage de morceaux choisis en Grec
Latin Italien Français Anglais Allemand. L'auteur
y a joint des notices succinctes sur les auteurs et leurs
ouvrages. Je vais noter ici les morceaux en marquant
d'une croix celles qui m'ont plues par excellence.
Table | |
Phaedrus | Aquila et Cornix, Vulpes et corvus |
Avianus | Asinus Pelle leonis indutus |
Christ | Formida et Cicada |
Desbillons | Homines duo caecus et claudus |
La Fontaine | Renard et cigogne, Cigale et Fourmi |
La Motte | L'homme instruit de son destin |
Richer | Le hibou l'allouette et le Pan |
Le Noble | Le renard et le corbeau |
Dorat | La chouette. Le dévoument généreux |
Aubert | La merle |
Imbert | Le lion jugé |
Didot | La course des chevaux + |
Gay | The council of horses |
Denis | The fox and the grapes. The cock and the fox |
Moore | The goose and the swans |
Boner | Vom unwerthen Amt[?] |
Burkard-Waldis | Vom lugenhaften Jüngling |
Hagedorn | Der Fuchs und der [onl.] |
Der Bey und der Post + | |
Gellert | Der Jüngling und der Greis |
Das Kind mit der Scheere + | |
Lichtwer | Die zwei Kaninchen |
Die seltsamen Menschen + | |
Gleim | Die Biene |
Beratschlagung der Pferde | |
Lessing | Zeus und das Pferd |
Der Affe und der Fuchs | |
Michaelis | Der Bauer unter der Eiche |
Willamor[?] | Die Katze. Die Maus |
Zacharia | Die Spinke und das Podraga |
Nicolai | Der Rabe und die Eiche |
Das Schilforohr und die Eiche | |
Pfeffel | Das Johanniswürmchen |
Der Schmetterling und die Biene | |
Von zwei Frischen[?] |
Conte
1) sérieux
Ovidius. Niobe
Mallet. Edwin and Emma
Goldsmith. The country clergyman
Jerningham. The deserter +
D. Arnaud. Le courtisan +
A. Lambert. Pigmalion +
Gellert. Der arme Greis +
Hagedorn. Der Sultan und sein Vizier Azem
Kleist. Emire und Agathocles
Wieland. Balsora
2) comique
Chaucer. The freres tale
Dryden. Theodore and Honoria +
Swift. Baucis and Philemon +
Prior. Protegenes and Apelles
Pope. The merchants tale
La Fontaine. La matrone d'Éphèse
Grécourt. Le cuisinier scrupuleux
Piron. Le cordelier cheval +
Voltaire. Les trois manières +
Dorat. Theone et Kia +
Hagedorn. Johann der Seifensieder
Rost. Der blöde Schäfer
Wieland. Schach Lolo +
Nicolai. Die Bückligen[?]
3) allégorie
Claudian. In nuptias Honorii et Mariae
Rousseau. La Morosophie
Voltaire. Thélème et Macare +
Pope. The temple of fame +
Lowth. The choice of Hercules +
Parnell. An allegory of man +
J.C. Schlegel. Krieg der Schönheit und des Verstandes
Gotz. Das Vergnügen
Herder. Die Lillie und die Rose
Nacht und Taf[?]
Die sammerung[?]
Idylle
Vergilius | Daphnis |
Nemesianus | Bacchus |
Calpurnius | Amphiteatrum |
Vida | Noce[?] |
Sannazaro | Galatea |
Rapin | Alphonsus |
Ronsard | Éelogue[?] sur la mort de Marguérite |
Racan | Plaintes d'un amant |
Segrais | Uranie |
Mad. Des Roulières | Le mouton le Ruisseau |
Fontenelle | Ismène |
Gresset | Le siècle pastoral |
Léonard | Le Bonheur |
Berquin | Milon |
Spenser | The sheperd's calendar |
Ambrose Philips | Mico Argol |
Gay | The ditty |
Pope | Winter or Daphne |
Messiah + | |
Collins | Hassan oriental eclogue + |
Shenstone | Disappointment |
Gesner | Phillis Cloe |
Von Kleist | Irin + |
J.S. Schmidt | Moses |
Blum | Laurens und Palämons Lob |
Voss | Der Geburtstag |
Bronner | Die belohnte Wohltat |
Deutschlands orginaldichter 3
On a premièrement des odes spirituelles. Je trouve
toujours dans celles-ci une espèce de monotonie et
de prosaïsme qu'il est difficile d'éviter selon moi.
Klopstock est le plus poétique en ce genre et Gellert
le plus raisonné. Ceux de Lavater sont trop longs.
Parmi les pièces que le rédacteur nomme
Didactiques on trouve plusieurs petites pièces char-
mantes de Gleim et un joli poème contre les Déistes
par Gotter dans un style familier et badin.
On a trouvé celui qui avait commis le meurtre de
cette femme mentionné ci-dessus. Il l'a commis avec
sa fille. Il se nomme Pasman. Il a déjà confessé
son crime.
Lundi 11 Novembre 1811.
Les facteurs du marché de grains ont été convoqués
chez le Maire et là on leur a signifié qu'ils eussent
à donner une notice de tous les grains qui se
trouvent à cette époque dans les magasins d'Amsterdam.
On vient de perdre M. de Bosson un des plus habiles
accoucheurs de cette ville. Il avait été en fort bonne
santé mais après avoir rendu des secours à une femme
accouchée il tomba frappé d'un coup d'apoplexie
à terre. Ce fut chez un apothicaire près du
Heerestraat. Là on le mit au lit et il y mourut
après quelques jours sans avoir repris connaissance.
L'élection du tribunal de commerce est annullée
puis qu'elle n'avait point été accompagnée des formalités
requises.
Hier nous avons entendu un fort beau sermon de
M. van Goeuns qui tournait principalement sur le carac-
tère de St. Paul (Épître aux romains).
Je dînai chez mon grandpère avec M. van Goeuns, J. Cops,
J. de Vries et L. Wirtz.
M. de Vries nous lut un morceau d'une belle traduction
des noces de Thetis et de Pelée de Catulle par Bilderdijk.
M. Scheltema maintenant juge de paix à Zaandam et connu
par son érudition dans notre histoire et littérature
a trouvé un manuscrit fort précieux, contenant des
Mémoires sur le séjour de Czar Pierre à Amsterdam
et Zaandam. On y fixe[?] comme l'origine de l'afection[?] de
Czar Pierre pour Zaandam. Ayant eu une maladie
dans sa jeunesse on avait du chercher à l'amuser de
toutes manières et un Zaandamois avait le mieux
réussi à l'amuser en lui construisant des petites
barques. C'était aussi dans le commerce de cet
ouvrier qui partit ensuite pour son pays qu'il reçut
quelque notion de l'Hollandais. Il arriva à Amsterdam
sur un Keuler Aack mais ne voulut pas s'y arrêter
et partit avec le même batîment. Parmi les habitans
que cet équipage grotesque avait attirés sur le
rivage se trouva l'ouvrier connu par le Czar. Celui-ci
l'appela aussitôt par son nom et lui dit Je viens
loger chez toi. En vain l'ouvrier lui représenta
qu'il avait une vieille mère qui logeait chez lui
il n'en démordit pas. La mère dut déloger et Pierre
vint à loger dans l'appartement de la mère. Il
ne demeura à Zaandam que 14 jours.
Napoléon en voyant la maison du czar avait
dit On peut bien être grand empereur sans être
charpentier.
L'Empereur a demandé à Leyde s'il y avait des traductions
d'auteurs classiques en Hollandais et surtout de
Plutarque. Il a doit
avoir dit environ ces mots "Ne faites point à autre
ce que vous ne voulez pas qu'on vous fait. Ainsi
votre [onl.] et surtout obéissez au prince voilà le principal
préceptes de la religion. Pour le reste nous
verrons cela dans l'autre vie."
Jeudi 14 Novembre 1811
Lors du séjour de l'empereur dans cette ville la malheu-
reuse situation des affaires était effacée ou du moins
étourdie par la foule des plaisirs et des spectacles. On
commençait avoir d'un oeil plus favorable ce souverain
qui nous avait été si terrible depuis sa capitale.
Des espérances trompeuses naissaient dans le coeur de
quelques individus. Mais bientôt tout s'évanouit et
les Hollandais furent accablés de nouveaux maux. En
effet quand on considère l'Europe que de ruines
de désolation mais il en a été ainsi de tous tems.
Là où l'oeil humain ne peut percer veille[?] pour nous un
Dieu le vengeur du juste et l'ennemi des méchans.
Un de nos concitoyens revenant d'un voyage de france a
raconté à ses amis l'état misérable des ports de la france,
de Marseille, Bordeaux, Rouen. Ici on a exigé absolument
qu'on livrait 500 orphelins au dessus de 15 ans. Les
régens de l'Oranje-appel maison où sont maintenant
nos orphelins se sont vus contraints de les livrer.
Ceux de l'Aalmoezeniershuis sont partis hier.
C'était un spectacle douloureux (à ce qu'ont assuré des
témoins) de voir tant de parens se presser vers les orphelins
pour prendre adieux le dernier congé, tandis que des sergens
les retenaient et voilà ces Saturnia régna qu'on nous
prédit!!!
Mardi 19 Novembre 1811
Point de nouvelles et un rhume que j'ai eu m'a empêché
d'apprendre beaucoup de nouveau. Nous eûmes hier
chez Marchand l'explication du chap. 9 (de l'épître aux
Rom). Dans le club le pauvre D.D. fut terriblement
tourmenté. On lui acheta le produit du compte du
rabbin pour 20 ps. Il ne pouvait pas comprendre
l'imbécillité de cet achat.
On parle de la réduction de toutes les communautés
religieuses et sectes.
∙1) Katholiques.
∙2) Calvinistes
∙3) Luthériens
∙4) Juifs
Il y a eu une vente dans le brakke grond
où j'ai acheté quelques livres. On vendait assez à
bon marché excepté quelques ouvrages recherchés
comme un De Lille complet en 17 vol. f 72,-. Les lettres
à Emilie f 26,-.
Littérature
Deutschlands orginaldichter. 4 v.
Ce volume contient
1) des poèmes didactiques comme Dusch Wissenschaften in
[onl. Gotisch]. C'ést un beau poème d'où j'ai copié quelques
morceaux. On y trouve aussi Wilhof Die [onl. Gotisch]
[onl.]. C'est un poème dirigé contre ceux
qui admettent le système der [onl.] Welt.
2) des épigrammes.
3) des idylles parmi lesquelles il y en a deux très jolies de Voss.
Eschenburg vol. 2.
Voici la liste des morceaux intéressans que renferme
ce volume.
Sinngedichte | Griechische Anthologie |
Martialis | |
Katullus | |
Ausonius | |
Von Lorgarn | Allamanni |
Wernicke | Giov. della casa |
Hagedorn | Zoredano |
Kästner | Casoni |
Ewald | Guarini |
Lessing | Zappi |
Von Kleist | Marat |
Göcking | St. Gelais |
Kretschman | Gombaud |
Maynard | |
J.B. Rousseau | |
Seneca | |
Panard | |
Piron | |
Waller | |
Butler | |
Dryden | |
Prior | |
Swift | |
Pope | |
Opitz | |
Oleavius | |
A. Gryphius | |
C. Gryphius + |
Madrigal
Petrarca. T. Tasso Lemene
Montreuil Moncrif Lainez
Hagedorn Götz
Sonnette
Petrarca, Bernardo Tasso, Annibale Caro G. della Casa Pucci
Scarron, Fontenelle, Regnier, Desmarais.
Shakespeare Milton.
Opitz, Flemming, Schiebeler.
Rondeaux Voiture Mad. Deshoulières Götz
Triolets St. Amand Ranchin Hagedorn
Improntu Hamilton L'Attaignant
Logogryphes Ung: Dufresny Wieland
Bouts rimés Gotter
Satiren
Horatius, Juvenalis Persius
Arioste Alamanni, Salvator, Rosa, Menzini, Dotti, Gosri
Regnier Boileau
Donne, Rochester, Pope, Swift, Young, Churchill, Johnson,
Rachel, Canitz, Haller, Hagedorn, Rabener, Michaelis, Stolberg.
Poèmes didactiques philosophiques
Pythagoras, Solon, Theognis, Phocyclides
Syrus, D. Cato.
Lukretius aus dem ged | De natura rerum |
Polignac | Anti Lucretius |
Brown | De immortalitate animi |
L. Racine | La religion + |
Voltaire | La loi naturelle Epîtres morales + |
Pope | Essay on man. Moral essays + |
Waller | Divine love |
Prior | Solomon, the progress of mind |
Young | Nights |
Akenside | Pleasures of imagination |
Ogilvie | Providence |
Hayley | The triumphs of temper |
Pyle | The progress of refinement |
Opitz | Ruhe des Gemüts: Vielgut + |
Zernitz | Von den Endzwecker der Welt + |
Haller | Von dem Ursprung der Uebels |
P Hagedorn | Die Glückseligkeit |
Juiro[?] | Versuche vom Menschen |
Gellert | Reichtum und Ehre |
Giseke | Einflusz des Geschmacks + |
Von Creuz | Die Gräber + |
Kastner | Streit zwischen Vernunft |
und Glaube + |
Von Cronegk | Der Winterabend + |
Wieland | Die Natur der Dingen |
Gleim | Halladat |
Withof | Sinnliche Ergötzungen |
Moralische Ketzer | |
Uz | Die kunst fröhlich zu seyn |
Dusch | Zuverläszigkeit der Vernuft |
Diedrich avait perdu les autres volumes ce
qui me fit beaucoup de peine.
Jeudi 21 Novembre 1811
Voici encore deux anecdotes qui ont rapport au séjour de l'em-
pereur dans cette ville.
Les ouvriers qui travaillaient au Quartier St. Charles avaient
ordre les jours que l'empereur sortait de se poster sur le Dam
et de crier Hoezee. Ensuite ils devaient autant qu'il
leur serait possible occuper le long de son trajet les ponts
et canaux par où il passait pour faire la même cérémonie.
2. Dans le Joodenbuurt on avait ouvert une souscription où
chacun qui avait souscrit pour crier Hoezee reçut ensuite
un florin. Il y avait 300 souscripteurs.
L'assemblée chargée d'élire de nouveau le tribunal de
commerce est comparu hier on a élu les mêmes de l'élection
précédente excepté
à la place de M. Bierens | J.S. van der Poll |
Wielink |
Parmi les nouvelles absurdes qui circulent journellement
se trouvent celle qu'il règnerait à Groningue une peste
et que la grande cour était décorée d'un drapeau noir
avec une tête de mort.
Que depuis Tienen et Zeeburg même jusqu'à l'autre extrémité
de la ville on ferait une digue pour empêcher les
inondations et le (afslibbing).
Ceux des conscrits ou remplaçans partis d'ici donnent
dans leurs lettres de forts tristes détails sur leur
situation.
Quoi qu'au milieu de Novembre le tems n'est pas encore
froid et très beau.
Au marché on se repose enfin car les prix sont
plutôt plus bas que plus haut. Le Colzat est monté
3 à 4 L. dans quelque tems, l'huile ƒ 65. L'orge est aussi
monté depuis quelque tems.
Littérature
Archenholz Geschichte des 7 jährigen Krieges 2 v.
L'auteur de cet ouvrage estimable paraît s'être donné
beaucoup de peine pour fournir un récit exact des
événemens remarquables de cette guerre. Il
fut pendant la dernière partie de cette guerre officier
dans le régiment Prussien de Torcade. On ne trouve point
ici des portraits brillans mais des peintures qui paraissent
copiées d'après nature et des détails intéressans. Tels
sont la bataille de Torgau et le bombardement de
Dresde. Enfin selon moi c'est un bel ouvrage je l'ai
lu avec un grand plaisir. On voit dans le récit du
terrible état de l'allemagne de ce tems là un exemple
que dans nos malheurs nous n'avons point encore le
droit de nous plaindre (v. Extr).
Meisner Criminal Geschichten 1 v.
Ce livre est extrait en grande partie des skizzen du cet
auteur fameux. Je ne saurais juger du style qu'on dit être
la meilleure prose de l'Allemand. Les tableaux qu'il présente
sont souvent terribles et ils m'ont
assez attaché. Il y en a aussi quatre d'après Fielding.
Parmi ceux qui me plaisent le plus sont les suivans
Meurtre causé par la perfidie d'une amante.
Meurtrière Incendiaire et infidèle à l'honneur et pourtant
seulement une fille malheureuse.
Meurtrier par jalousie et des circonstances survenantes
Meurtre de la justice française / La perruque.
Il y en a plusieurs autres d'intéressantes. Elles sont au
nombre de 37. Celles qui suivent parmi lesquels il
y a celle du docteur Junker sont pour la plupart
d'un autre genre.
Matthison Gedichte 1 v.
Ces poésies sont presque toutes du genre Lyrique et
sentimental. Plusieurs ont ce qui me déplaît souvent
dans cette poésie c'est qu'ils ne disent rien. Quoique
plusieurs ont dit qu'en fait de poésie il s'agissait
seulement quo modo on disait quelque chose cependant
je trouve que chaque pièce de vers doit toujours avoir
un certain but. Il y a cependant de fort jolies pièces dont
je veux copier quelques-unes. Mais les mêmes idées
retournent souvent. Parmi ceux qui sont plus étendus
on trouve [onl. Gotisch] Die Sehnsucht nach Rom
Die Wanderzeit Elegie auf ein [onl. Gotisch]
qui m'ont fort plues.
Mardi 26 Novembre 1811
Il a [onl.] maintenant l'on verra de belles choses.
On établira des Lycées des universités. Les maîtres de
pension n'osent éduquer des enfans au dessus de
l'âge de 9 ans et ils n'osent leur enseigner que les
premiers élémens.
Un maître allemand s'est brûlé la cervelle d'un
coup de pistolet. Il était à 10 heures le soir dans
une auberge et fut aux lieux avant de s'en
aller. L'hôte étonné qu'il ne revenait pas ouvre la porte.
Il entend partir le coup de pistolet. Il ne sait à qui il
fut destiné. Il appelle ses gens on apporte de la
lumière et on trouve le malheureux noyé dans son
sang.
On entend toujours de nouvelles épreuves pour remplacer
les marchandises coloniales. Les bons
bourgeois font déjà usage du café artificiel. D'autres
boivent de la chicorée (suikerij) toute pure. D'autres font
des mélanges. D'autres boivent du café de gland, d'autres
y mettent de vieilles fèves. Quant au tabac on y met
3/4 de chicorée (krulendijvie) on a fait des expériences
avec le miel. J'en ai goûté et ceci m'a plu beaucoup plus
que je ne le crus.
Littérature
Heinrich der Löwe 2 Th.
Cet ouvrage est l'histoire de ce prince traité d'une manière
dramatique comme l'Alcibiade de Meisner. Mais il
s'en faut de beaucoup qu'elle soit si intéressante.
Aussi il y a quelque chose de peu naturel dans une histoire
toute en conversations. Celle-ci est divisée en 6 Abschusze
qui sont autant de pièces. Je fais suivre ici une
courte notice de la vie du héros.
Henri le lion était fils de Henri le généreux duc
de saxe et de bavière. Celui-ci poursuivi par l'empereur Conrad
mourut dit-on par le poison. Son fils né en 1129 et âgé de
dix ans lors de la mort de son père fut élevé par son oncle Welf
et sa grand-mère Richsa. Il se distingua bientôt dans tous
les exercices chevaleresques. Il céda la Bavière à sa
mère Gertrude qui se maria à Henri d'Autriche.
Henri fit ses premières armes contre les Esclavons qui
habitaient La Poméranie, qu'il soumit. Lorsque Frédéric
fut empereur il fut lié avec lui d'une étroite amitié
et lui sauva la vie dans un combat à Rome. Sa renommée
se grandit tellement qu'on parlait partout du grand duc
(von dem groszen Herzog). Il fit ensuite une croisade
et pendant ce tems l'empereur avec lequel il avait
déjà eu dispute au sujet de l'élection du pape tâcha
de lui aliéner ses sujets. Henri à son retour refusa
d'accompagner l'empereur en Italie et dès lors celui
a conçut contre lui une haine terrible jointe à l'envie
des princes de l'empire. Henri fut condamné sur des
raisons frivoles et sans fondement et mis dans le
ban de l'empire. Ce prince malheureux se vit attaqué
de tous côtés. Il fut réduit à la seule ville de Braunswick
et quelques états adjacens. Il fit enfin la paix par laquelle
il conserva Braunswick mais dut se retirer pendant
trois ans de l'Allemagne. Il se retira chez son beau-Père
Henri 2, roi d'Angleterre dont il avait épousé la fille
Mathilde princesse pleine de talens en secondes noces.
Il revint en Allemagne avant le terme expiré à la sollicita-
tion de l'électeur de Cologne jadis son ennemi. L'empereur cependant
en partant pour la terre sainte ne voulait point laisser
Henri en Allemagne et celui-ci dut s'expatrier de
nouveau. Cependant comme ses ennemis violaient
la trêve il revint en Allemagne et fit la guerre
avec quelque succès. Il se réconcilia enfin avec
Henri fils de Fréderic. Son fils Henri épousa
la fille de l'oncle Palatin. Henri le lion mourut
à Brunswick en 1195. Il fut un prince brave et
religieux éclairé pour ces tems là où les princes
étaient les serviteurs des abbés et des moines. Il
protégea surtout les études de l'histoire et fit
rassembler les vieilles chroniques.
Jeudi 28 Novembre 1811
Mardi nous eûmes chez mon oncle Van Heukelom
une petite partie de danse. Il y avait environ une trentaine
de personnages tant grands que petits. Nous nous
amusâmes fort. Je fis à ce propos une réflexion. Pline dit
Mirum est ut animus agitatione motuque corpus
excitetur. En effet jamais je n'ai plus d'idée à faire
de vers qu'après avoir dansé ou lorsque
par exemple à la campagne je me suis donné beaucoup
de mouvement. Ce fut à Rupelmonde que je fis le vers
sur la noce d'argent dorée, le poème déchiré sur Rupelmonde,
le vers adressé à Biben et plusieurs autres. J'y commençai
aussi Hueskar et les Indiens et même à ce que je
crois Lady Sidney. Le soir en revenant de la danse
j'avais ainsi qu'après le bal du Casino mille projets.
Je voulais recommencer de nouveau le poème sur
les plaisirs dont je ne puis cependant pas encore
concevoir des idées bien nettes. Il faut que bientôt
je me remette un peu à la poésie. L'idée de Miltiade
malgré ses défauts, me paraît toujours assez bonne
et même les Espagnols me remontent quelquefois en
tête. Il a longtems que je ne fis rien. Mais je forme
pourtant beaucoup de plans et il ne tient qu'à un
moment heureux de les développer. Mais c'est assez
de cela. Passons à autre chose.
Le jury a absous un homme convaincu d'avoir blessé
sa femme d'un coup de pistolet tiré à dessein dont elle
n'était cependant pas morte. On l'excusa puisqu'il
fut prouvé qu'il avait quelquefois des actes de
folie.
Ayant reçu un billet d'entrée je me rendis à la
mairie où se tiennent les délibérations de la cour
d'assises. Je fus introduit dans une chambre spacieuse
où il y avait une éminence avec des gradins pour les juges
suivaient des bancs pour ceux qui comme moi
avaient des billets enfin le peuple qui s'y attroupait
en foule était placé derrière une barrière. Il s'agissait
de l'affaire de deux servantes qui avaient volé et
transporté des effets de la valeur de quelques florins.
Lorsque je vins je vis rentrer la cour d'assise qui
fut instruit publiquement que le jury
avait déclaré que les accusées étaient coupables.
Les membres du tribunal étaient habillés en
noir mais le président ainsi que M. Tadema le
procureur impérial avaient des manteaux
rouges. L'avocat M. Tonné avait une toge noire
un rabat et un drôle de bonnet sur la tête. Les accusées,
deux femmes vieilles et laides furent conduites
dans une enceinte destinée à cet effet par des
soldats. Le Procureur impérial voulait que ces
femmes fussent punies par une réclusion de
9 à 10 ans, mais l'avocat voulait adoucir de beaucoup
la punition. Cependant ses raisons n'étaient pas
toutes également convaincantes. Après quelques
débats tous les juges s'en retournèrent
dans une autre chambre pour y délibérer et
fixer la sentence. Les accusées furent reconduites.
J'attendis en vain la décision de la cour et dus
m'en retourner enfin sans avoir vu la conclusion.
Le jury est fini aujourd'hui. C'est un poste fort
importun pour ceux qui ont des affaires. Ils n'osent
pas se séparer avant la décision. Celle ce doit être
oui ou non. Il y a eu des jours où ils ont été
assemblés pendant 24 heures. Cependant dans un
cas pareil on leur donne à dîner.
On dit que cinq frégattes sont partis pour les Indes.
Point de nouvelles. Le prix des grains est baissé. Le Coolrat
monté de 3 L. est baissé de L. 2 surtout puisque la gelée
n'a pas continué. Il fait un tems assez
humide. Le thermomètre est de 48 à 52 degrés.
Mon grandpapa de clercq est dangereusement
malade. Un vomissement de sang, maladie que il avait
eue il y avait une trentaine d'années et dont
il conservait toujours les symptômes s'est renouvellée.
Il a été saigné ce matin et est aujourd'hui dans
la même situation mais il n'ose ni lire ni
écrire ni beaucoup parler ni fumer ce qui est
bien cruel pour quelqu'un d'une nature aussi
active.
Lundi 1 dec.1811. Je fis hier une bêtise des
plus grandes. J'allai m'asseoir dans le premier banc de
diacre dans la grande église sans penser où j'étais. Maman
qui l'avait aperçu me fit heureusement dire de m'en
aller et par là la pièce finit qui autrement aurait
pu avoir des suites désagréables. Plusieurs personnes
avaient déjà fait des réflexions mordantes le dessus
sûrement parce qu'ils croyaient que c'était par orgueil.
L'aurait été un orgueil bien mal placé. Il faut ajouter
que la porte de ce banc était ouverte ce que ajoutait à
l'illusion.
Hier au soir nous eûmes encore une illumination
générale. C'était bien beau. Chacun l'avait fait avec
la plus grande économie possible. C'était une race
de lampions dont la plupart étaient éteintes par
le vent depuis l'un bout du canal à l'autre
on ne voyait personne se promener sur les rues
en effet c'était une illumination digne de l'importance
que nous mettions dans ce jour ce sont les paroles du Maire.
Il est venu de Paris un rapport fort favorable sur la
société du nut van 't algemeen que le prince lui-même
a lu avec beaucoup d'emphase.
À Leide il y a une dispute violente entre les étudians
et les officiers françois. Ils se sont cités les uns les
autres et à une auberge hors de la ville sont comparus
en effet vingt officiers et 30 étudians. Les premiers alors
à qui le courage manquaient, on dit on refuse le combat
et le commissaire de Police a fait retourner tout le
monde chez lui.
Mon grandpère de Vos prêcha hier au midi sur l'usage
de la raison on en ademettant des témoignages humains
ou divins (révélation). C'était un fort beau sermon,
mais comme à l'ordinaire assez profond. Aussi l'auditoire
était il fort loin d'être nombreux.
Le courir d'Amsterdam paraît maintenant sous le
nom de Feuille Politique du département de Zuiderzee.
Littérature
Kleist. Gedichte
C'est un charmant auteur. Il était capitaine en
service prussien et fut tué à la désastreuse
bataille de Kunnersdorf, on trouve dans cette collection
huit odes assez jolies.
Des Lieder. comme disent les allemands parmi lesquelles
on remarque des jolis morceaux.
Des Idylles. Ce que me déplaît en général dans les idylles
en sont deux espèces. Notamment une celle où un berger
ou une bergère se plaignent de l'infidélité de leurs
amans ou maîtresses et celles où deux bergers se disputent
le prix du chant. C'est ce qu'on retrouve éternellement dans
toutes les pastorales modernes et dans celles de
ce Gesner qu'on élève jusqu'aux cieux. Parmi celles-ci
qui sont en petit nombre on remarque Irin c'est
le conseil d'un vieux pêcheur donné à son fils. Cette
pièce est charmante et si elle n'eut été trop longue
je l'aurais copiée.
Les Contes et les Fables sont en trop petit nombre.
Parmi les Épigrammes il y a quelques-unes assez
saillantes.
Parmi les Rhapsodies on remarque une tragédie en prose
ou plutôt l'idée d'une tragédie comme l'a dit l'auteur lui-
même. Elle n'est qu'en trois actes et encore ceux-
là sont fort courts. Le sujet est la mort de Sénèque.
Dans le 1r acte ... Un des amis de sénèque et Pompeja retirés
à leur campagne vient engager le philosophe à retourner à Rome.
À 2. Un capitaine vient pour chercher Sénèque. Un de ses
amis se présente à lui sous ce nom. Mais sénèque rectifie la
méprise.
À 3. On voit la mort de sénèque au milieu de ses amis.
Pompeja se perce au milieu d'un de ses évanouissemens
le croyant mort. Il arrive un messager qui rapporte tous
les miracles arrivés à la mort de sénèque.
Le printems. C'est un ouvrage charmant on voit
là un vrai peintre de la nature comme Thompson.
C'est premièrement l'arrivée du printems qui chasse l'hiver
les beautés de la campagne opposés à l'horreur de la guerre
la description d'une ferme le tableau de la pluie
bienfait ici qui féconde la terre et enfin un hommage
au créateur.
Puis le même poème en Italien.
Ensuite un poème héroïque nommé Cyssides et Pachis
en trois chants. Ce sont deux amis Macédoniens assiégés
dans une forteresse par les Grecs après la mort d'Alexandre
et qui sont tués tous deux. Ce poème ne m'a pas singuliè-
rement plu quoiqu'il y ait cependant de belles descrip-
tions.
Voyez pour Kleist T. 11. 31. 32. 33. 34. 35. 36. 37. 38. 39.
Mardi 3 Décembre 1811
Ce maître allemans nommé Schmiede qui s'est brûlé la
cervelle comme nous l'avons dit plus haut avait été auditeur
à une armée mais s'était évadé avec la caisse et avait
changé ici son nom. C'était un athéiste déclaré.
M. Stuart dans ses prières pour l'empereur a passé les
bornes de la décence car il a dit que l'empereur était un
instrument dans la main de la Providence, pour notre
bonheur. Lorsqu'il annonça qu'il allait prier pour lui
la moitié des fidèles est sortie de son église.
C'est une particularité d'être notée que hier malgré le vent
qu'il faisait le tems était si doux qu'ayant été obligés
d'ôter le feu d'une chambre à cause de la fumée nous
ne souffrîmes aucunement du froid.
Il règne actuellement beaucoup de maladies.
Pour prouver quel était le concours du monde lors de
l'illumination, il suffit de dire qu'au milieu de la
soirée on a volé chez une quantité de personnes les lampions.
Dans un recueil qu'on ferait pour démontrer les lumières
répandus, dans le 19e siècle on pourrait placer un vers
sur la comète placé dans le journal de l'empire
et dont les dernières vers sont
Pourquoi s'embrasser de mille sotsdit-on
N'est-il pas évident que c'est l'être suprême
Qui regardant la France et content de lui-même
Vient visiter le grand Napoléon.
On doit hésiter si l'on doit admirer le plus le comble
de l'impiété de la bêtise ou de l'ineptie. L'auteur a encore
eu l'impudence de signer son nom et sa qualité de
géomètre. Il a bien profité de la géométrie celui-la.
C'est pousser la flatterie bien loin. Et si j'étais un homme
tel que l'empereur je ne souffrais pas qu'on me
louât d'une si sotte manière.
Hier je lus un vers au jour de Famille dans lequel
je blâmais le médecin de son ignorance dans l'hist.
de Josef. Je lui en faisais un petit extrait et
ensuite je lui fis cadeau au nom du jour de famille
de la vie de Joseph par Hulshof. Je lui donnai en même
tems une liste d'ouvrages pour consulter à ce sujet
et quatre estampes qui expliquaient l'histoire.
Gr. de Vos lut un vers sur les prédicateurs calvinistes.
On résolut de disputer publiquement des thèses et
le grand-papa de Vos fut chargé d'en composer quelques
unes.
Mecredi 4 Décembre 1811
Les Gazettes d'Amsterdam et de Harlem paraissent
maintenant sous le titre de Feuilles d'annonces etc.
Littérature
Shakespeare King Henry 5 and the first part of K.H. 6.
Je vais faire l'extrait de ces deux pièces historiques puisque
la vérité y est assez bien ménagée de manière que le
grand Marlborough ne rougissait pas d'avouer qu'il
devait la plus grande partie de ses connaissances dans
l'hist d'Angl. aux pièces de Shakespear.
Henry 5.
1. Deux évêques font la louange du prince et parlent d'un
édit prononcé contre les donations faites aux Ecclésiastiques.
Henri vient et se fait représenter par l'archevêque de
Canterbery les droits qu'il a sur la france. La guerre
contre la France est résolue. Les ambassadeurs de France
entrent et au lieu de tribut apportent une caisse avec
des boules. Des déclarations de guerre succèdent à ce sarcasme.
2. Henri se dispose à partir. Il fait arrêter trois conspirateurs
Scroop et Gray et Cambridge.
Paris. Délibération du roi de france et de ses conseillers.
Un ambassadeur anglais vient demander qu'on livre
le royaume à Henri qui a un droit incontestable sur
lui. Le roi de france refuse cette demande mais propose
envain d'accorder au roi sa fille Cathérine avec deux
duchés insignifians.
3. On livre un assaut aux murs de Harfleur. Le
gouverneur capitule ensuite.
Les Français prennent la résolution de s'opposer
avec énergie à Henri.
On raconte que le duc d'Exeter a emporté un poste.
Les anglais reçoivent un héraut français qui demande
qu'ils implorent leur grâce.
4. Les Français campés près d'Agincourt font des bravades
sur leur victoire certaine.
Les anglais quoique postés défavorablement se préparent
au combat. Henri gagne la bataille d'Agincourt.
5. La paix se fait entre la France et l'Angleterre. Henri épouse
Cathérine, fille du roi de France.
Vendredi 6 Décembre 1811
Si j'avais commencé plutôt ces mémoires j'y aurais pu placer
des détails du règne de Louis 1e ou d'autres événemens
que les circonstances présentes font plutôt sortir que
rentrer dans la mémoire. C'est pourquoi je suivrai ici l'occasion
d'en raconter quelque chose de tems en tems.
Lundi 9 Décembre 1811
Samedi avec la barque de dix heures je partis pour la ville
d'Harlem. Le tems était diablement froid et surtout au
passage de Halfweg le vent balayait le visage d'une manière
rien moins qu'agréable. Je trouvai dans la barque
J. Walré. J'arrivais chez M. et Madame van der Vlugt tous
deux fort gais surtout l'épouse. Là j'appris que je devais faire
un vers pour lire le soir au Leerzaam Vermaak ce que m'em-
barassa fort. J'assemblai pourtant en hâte quelques
rimes et j'en fis un morceau, fort mal cousu à la vérité.
Nous nous rendîmes le soir à Leerzaam vermaak. La
grande pièce était Misantropie et Repentir. Quoiqu'on
puisse en dire malgré tous les défauts de cette pièce elle
sera toujours une des meilleures de l'auteur et le sujet
est intéressant. La salle de Leerzaam vermaak est petite
mais les décorations sont assez jolies.
Mr. Walré remplit avec beaucoup d'énergie le rôle de [onl.]
et Mr. Gerling celui d'Eulalie d'une manière charmante.
V. Loosjes avait le rôle de Bitterman et avait
beaucoup d'originalité dans cette carricature. Son fils
était représenté par W. Walré. C'était le premier rôle
d'importance qui celui-ci jouait. M. et Madame Kops
étaient le comte et la comtesse. Ces rôles ne se montraient
pas beaucoup mais Madame Kops doit avoir un
très beau talent pour la tragédie.
W. van der Vlugt était le major Harst il joue avec
noblesse et déclame très bien.
T. van der Vlugt qui représentait le vieillard était
tellement masqué qu'il était impossible de le
reconnaître. Il imitait fort bien la voix cassée d'un
vieillard.
C. Walré était la soubrette. Elle avait fort bonne
mine et joua assez bien.
P. Mabé était le valet de l'inconnu. C'est un jeune homme
qui ne fait qu commencer. Il est un peu trop raide mais
cela ne lui allait pas mal dans ce rôle.
On donna après Hij moet duelleren. C'était une farce. W.
van der vlugt jouait fort bien le rôle d'un jeune capitain
de houssards et M. Kops[?] d'une vieille femme méchante
et coquette. Mais P. Mabé jouait l'amant d'une manière
beaucoup trop froide. Il devait baiser sa maîtresse C. Walré
mais il le fit bien gauchement. Il était tellement
embarassé avec son épée que tous les spectateurs en riaient.
G. et W. Walré étaient deux valets et V. Loosjes était un
homme devenu [onl. Gotisch] par l'argent de
sa femme et qui ne s'amusait qu'à prendre des papillons.
Il faisait mourir de rire.
Après la représentation nous nous rendîmes dans un salle
où les membres avaient toujours un souper dans lequel
j'eus l'honneur d'être admis. Il y pend un tableau où
sont représentés M. Walré et G. Kops (déjà mort) dans la partie
de chasse de Henri 4. Tous les acteurs peuvent jouir de ce
souper. Nous fûmes fort gais. Je dus lire mon vers qui
plut plus qu'il le méritait. Mr. Walré le lut ensuite
beaucoup mieux que moi. C. Walré chanta ensuite
quelques couplets. Nous retournâmes chez nous dans une
telle obscurité qu'on ne pouvait pas voir devant soi.
Hier nous fîmes quelques visites. Étant chez Mr. Walré
j'y vis la collection des ouvrages de Democriet. Il y avait
entr'autres Bombastus poème héroïque en 8 chans avec
de très beaux dessins par Van der Walle. Ce doit être
un des meilleurs ouvrages de cette société. Il
y avait toute une caisse de manuscrits.
Je fus aussi dans une espèce de café nommé blondrage.
Il n'y vient qu'une société particulière.
Le soir nous eûmes la compagnie de Mr. Stierling et
son épouse. Ce Mr. Stierling est aussi un membre de
Democriet et c'est un médecin fort habile. Il a connu
Bilderdijk à Brunswick et a écrit un ouvrage contre
son poème sur la maladie des savans par rapport aux
connaissances médicales qu'il lui dispute: Nous vîmes
des dessins de Waterloo, Langendijk et autres et fîmes le
soir des bouts rimés. Il ne savait plus rien de ses vers,
mais nous récita des morceaux, d'un portrait, de l'age d'or,
d'un vers contre Napoleon et d'un vers sur la naissance de son enfant.
Voici encore quelques anecdotes.
Mr. Walré avait donné au directeur de police une liste
de pièces pour les faire approuver on a rayé A. Hambroek,
J. Simonszoon de Rijk, Jacoba van Beijeren et presque tous
les ouvrages de Kotzebue.
Je lisais d'un de mes connaissances un rapport d'un discours
tenu par M. Gogel dans l'assemblée du Syndicat. On avait
inséré de tems en tems l'éloge de l'empereur son voyage était
représenté comme un événement qui avait tout décidé et
réparé tous les désordres qui pouvaient encore régner. Ceci était
entremêlé partout, par ordre supérieur.
Bilderdijk était quelque part et avait apporté un fragment
de son poème sur la maladie des savans. Walré prend le papier et
lit un morceau. Bilderdijk est touché
jusqu'aux larmes et s'écrie De qui sont ces vers, ce ne
sont pas les miens.
Samedi 13 Décembre 1811
Lundi nous eûmes la compagnie du prof. Siegenbeek.
Il est fort taciturne et ne parle pas beaucoup. Il a maintenant
un collège sur l'histoire de la littérature dans les diverses
langues d'après la renaissance des lettres. Dylius a bien
peur quand il y a quelque personnage étranger. Aussi il
fut bien tourmenté au sujet d'une histoire qu'il fit.
Je lus mon vers de Leerzaam vermaak et les deux bouts
rimés. On distribua des thèses qui doivent être disputées
publiquement le lundi suivant. Mecredi j'assistai
pour la première fois aux leçon de lecture que donne
mon cousin J. Kops aux étudiants. Nous lûmes la
bible Gen. Cap. 37 et 39 et puis un cantique. C'est une
chose surprenante lorsqu'on voit combien de
choses il y a à observer dans la lecture. C'est comme
Marcel disait que de choses dans un menuet. Jeudi
nous eûmes la répétition de deux petites pièces que
nous jouerons Lundi prochain chez le grand-père.
La première est De toren van Ravenna et la seconde
De poeet en de Dokter. Elles sont toutes deux de ma
composition. La dernière a réussi assez bien. Peu
s'en fallait que tout n'eut été dérangé puisque
ma tante d. l'était fâchée que ses filles n'avaient
pas de plus grands rôles. G. et Gr. de Vos jouèrent
très bien mais pour moi je fus pour ainsi dire
en frénésie car je ne fis que rire du commencement
jusqu'à la fin. Il a fait très mauvais tems
cette semaine et surtout des forts brouillardes.
La matière qui fait naître le plus d'anecdotes est
maintenant l'adoption de nouveaux noms par les
Juifs et la saisie des Mendians. Un vieux Juif a
reçu le nom de Crispin un autre s'est appelé Hope,
un autre Keizerwil etc. Les mendians étrangers
seront renvoyés et d'autres reçevont un bedelbrief.
Il y a en [onl.] un homme qui s'est brûlé la cervelle.
Mais une chose vraie c'est que dr. Verschuur qui à sa campagne
au Vuurst vit près de Baren vit un carosse arrêté par les
mauvais chemins et un français qui jurait et tem-
pêtait contre le cocher qui voulait joindre un 3me cheval
ce que l'autre refusait disant que ce n'était que pour
augmenter les frais. Des menaces on en vint aux faits
et le Français après avoir roué de coups de pieds l'homme
et les chevaux voulait tirer son pistolet sur lui. Verschuur
parvint à l'appaiser en quelque manière courut à Baren et
revint avec des gendarmes pour arrêter Mr. le françois
qui montra sa carte et qu'on reconnut être - Mr.
Deviliers Duterrage. Son épouse à ses côtés nageait en pleurs.
Le commissaire qui était là à l'étroit loua les
gendarmes de leur exactitude fit atteler le troisième
cheval qu'on amenait déjà et promit de payer l'argent.
Je continue encore à traduire Pline le Jeune et à
lire Apulée. M. Tissot est enchanté [onl.] nouvel ouvrage
il veut la traduire et y joindre des estampes.
Il s'est presque crevé les yeux à force de lire cet
ouvrage dont le caractère est si diablement petit.
Au reste il fut fort entiché de Juvenal mais il est
bien revenu ensuite.
Voici une conversation entre l'empereur et
le Prof. Kemper
Emp. Qu'enseignez-vous.
Kemp. Le droit naturel, le droit des gens.
Emp. Il y a aussi un droit du canon.
Kemp. Sire nous espérons que sous vos auspices le
droit du canon et celui des gens se concilieront.
Littérature
Gleim's Werke
1. Th. Lieder 2 Reisen. Je connais peu d'auteurs qui me
plaisent autant dans la poésie légère que ce Gleim. Cependant
je trouve les vers qu'on voit dans les derniers volumes plus
anacréontiques et plus agréables encore.
2. Th. Preussische Kriegslieder. C'est un genre presque
nouveau. Ce sont des vers supposés écrits par un vieux
grenadier sur les batailles de 1756 et 1757. Le style quoique
fort simple est cependant nerveux et présente
quelquefois de belles images. On y trouve
1756
À l'entrée de la campagne |
Avant la bat. de Rosbach |
Après la bat. de Lowositz |
Après ,, ,, |
1757 |
Après ,, ,, Lissa |
À l'entrée de la campagne |
À l'impératrice après |
Avant la bat, de Prague |
la prise de Breslau |
Avant la bat. de Collen |
|
Après ,, ,, |
3. Fabelen. Je trouve qu'il n'y a point de genre où
les poètes se copient plus les uns les autres que
dans la fable. Phèdre a copié Ésope, La Fontaine Phèdre
et combien n'y en a-t-il pas qui ont copié la Fontaine.
Hagedorn a pillé une foule de fabulistes. Gay et Gellert
sont encore des plus originaux. Florian a copié Gay.
Il faut aussi avoir beaucoup d'esprit pour imaginer
une belle fable. Parmi celles de Gleim il y en a
de fort belles mais parmi cette quarantaine nous
en voyons 26 empruntés de La fontaine d'autres de Gay
et je me rappelle d'avoir lu plusieurs imitations de
celles qui sont originales. On doit encore faire abstraction
de celles qui n'ont rapport qu'aux circonstances et qui
ainsi ne plaisent pas toujours.
Les plus jolies sont
Der [onl. Gotisch]
Die Katze die Maus
Der Raupe der Schmetterling
[onl. Gotisch]
[onl. Gotisch]
Die Gartnerin Die Biene
Trois romances héroï-comiques qui sont assez jolies
quoique la dernière l'histoire d'un capitaine hollandais
qui logeait dans une baleine est trop extravagante.
Th. 3. Der Tod Adams. C'est un drame de Klopstock versifié
par Gleim. C'est un bel ouvrage. L'idée de la mort pour ce
père des hommes en effet doit avoir été terrible. Voici
un court extrait.
Seth et Selima fille d'Adam qui doit se marier ce jour s'étonne
de la mélancolie qui règne sur le visage d'Adam. Adam
découvre à Seth que ce jour doit être celui de sa mort et
que lorsque le soleil sera couché il mourra. Ceci lui est
prédit par l'ange de la mort.
Adam est appuyé sur l'autel d'Abel qu'il conserve dans
la cabane et où est son tombeau. Selima annonce q'un
homme sauvage veut parler à son père. Kain entre et maudit
son père de lui avoir donné le jour et croyant ensuite
l'avoir tué et sort dans le plus grand délire. Adam reste seul
avec Seth et veut écarter sa famille.
Ève vient annoncer à Adam qu'on a retrouvé un
de ses fils les plus chéris et est effrayé de son apparence
terrible. Trois mères lui apportent pour la première
fois leurs enfans. Il embrasse encore sa famille. Seth
annonce que le soleil se couche Adam meurt
Weltrichten [onl. Gotisch]
(il entend enfoncer le rocher fatal)
Tod du bists [onl. Gotisch]
Mad. de Genlis a imité cet ouvrage dans son Théâtre sacré.
4 Th. On voit premièrement une pastorale Der blöde
Schäfer dont le sujet est assez amusant.
Puis une grande quantité de vers Anacréontiques.
Je connais peu d'auteurs qui en ayent saisi si bien
le ton. Il règne une variété étonnante et toujours
le poète vous présente des objets agréables sans cependant
être indécents.
Une traduction Anacréon Je n'en ai lu que l'ode de
la colombe pour la comparer à celle de Nieuwland et
celle du poète Hollandais m'a parue bien supérieure.
Des traductions d'Horace. Je trouve quand on peut lire
Horace en original les traductions ne valent pas trop au
moins qu'elles ne soient comme celles de Bilderdijk.
Alexis und Elise en trois chants est une romance charmante
et naïve.
Lundi 16 Décembre 1811
Je fus samedi chez mon grand-père de Vos il avait un petit
livre latin composé par divers auteurs,
sur divers sujets en grande partie comiques comme Ulularia
ce qui était un traité complet sur les hiboux et tout ce
qu'on pouvait alléguer en leur faveur Laus fumi Laus
podagrae, Oratio funebris in canem in Gallum in felem.
Chez mon cousin Kops des voleurs sont entrées pendant
la nuit ont fait presque le tour de toutes les chambres
et ont pris ce qu'il leur plaisait.
Hier D. Koopmans nous a entretenu sur la vraiegodzaligheid
c'était un peu sec et assez rempli de lieux communs.
Littérature
Fielding. Journey to the next world
L'auteur après sa mort fait le voyage vers l'enfer avec quatre
ou cinq autres esprits. Ils arrivent dans la ville des maladies
(city of diseases) où chacun fait une visite à la dame qui
l'a dépêché d'ici bas. Ils passent ensuite près du palais
de la mort et vont faire leur cour à l'empereur.
Ils arrivent enfin vers Minos. Celui-là n'admet que
ceux qui se sont fort distingués en bien ou en mal car
pour les autres chez que le bien et le mal se balance
pour ainsi dire il les renvoye sur la terre et ils doivent
tirer un nouveau lot dans la roue de la fortune.
L'auteur est admis dans l'Elysée où il est fort étonné
de rencontrer Julien l'apostat qui lui raconte
l'histoire de ses transmigrations en: esclave, Juif
général héritier charpentier beau sot (fop) Moine
joueur de violon sage roi fou mendiant homme d'état
soldat tailleur alderman poète chevalier et maître
de danse. Ici l'histoire est tout à coup interrompue et
on voit arriver Anne de Boulen qui fait l'histoire
de sa vie. Ce petit ouvrage est écrit avec beaucoup
de sel et d'agrément.
Mardi 17 Décembre 1811
Hier nous nous assemblâmes chez le grand-père où nous
jouerions nos comédies. Le Binnenkamer avait été
transformé en salle de spectacle à l'aide de deux paravents
dont l'un formait une tour dans la première pièce et
l'autre servait à cacher les acteurs qui n'étaient pas en
scène. Mon oncle de Vos était le souffleur et fit un petit
prologue. J'étais le chevalier Amadis, Guill. de V. le comte
G. l'écuyer, Mieko une paysanne et M.d.C.
et E.d.C. ses filles. Nous chevaliers, nous étions magnifiquement
équipés avec nos sabres, nos boucliers et nos chapeaux
plumés. La pièce fut assez bien jouée et produisait un assez
grand effet. Aussi la mort d'un revenant et l'apparition
de Grisers sur la tour sont des coups de théâtre d'importance.
Après que la sonnette qui annonçait la retraite eut
retentie, la scène fut changée et nous fîmes deux chambres
de l'un côté on voyait celle du poète et
de l'autre celle du médecin. L'une et l'autre entouré de ses
attributs. N.B. G. de Vos avait apporté une foule de petites
bouteilles avec des médecines qu'il avait préparées lui-même
de craie d'encre etc. Je fus le poète W. d. V. joua très bien
le rôle du médecin et G. celui du valet. Ma soeur fit rire
de son bizarre accoutrement. In toto cette pièce fit
beaucoup rire et surtout le pauvre médecin. Au reste c'était
lui qui m'avait provoqué.
La comédie ainsi achevée au contentement général on en
vint à ses fameuses thèses. Le grand-oncle défendit une
thèse, qui disait qu'on devait ériger un tribunal de médecine.
C'était le vieux point sur lequel j'ai déjà fait des odes.
Mais le bon homme n'y comprenait rien disait ne
pas croire ce qu'il soutenait et tomba accablé par Dylius.
Mon Père dut défendre la thèse que les femmes sont
plus propres à la médecine que les hommes. J. de Vos
l'attaqua vigoureusement mais cette dispute fut trop longue
et on fut obligé de la faire cesser. D. soutint contre le
grand-père une thèse sur les avantages de l'éducation
publique sur la privée mais on défendit et attaqua mal.
Mon oncle de Vos soutint que Platon avait banné les
poètes à juste titre de sa république. Dylius et moi
nous opposâmes. Je défendis deux thèses la première
qu'il ne serait pas à désirer que l'homme inventât
l'art de voler, 2. que l'accumulation de grains ne prévenait
pas la famine. La première thèse fut vigoureusement
disputée. Mais enfin cet exercice finit par nous ennuyer
et je ne crois pas que nous y reviendrons en longtems.
Littérature
[- J'ai entre les mains un fort joli ouvrage du baron de
Risbeck sous le nom de [onl. Gotisch]
Je vais en faire quelques annotations
pour me ressouvenir. Le voyage commence en 1780.
Kehl forteresse bâtie par Louis 14.
Carlsruhe résidence d'un [onl.] de Bude. Les fabriques ont
encouragées dans cet état.
Bruchsal résidence de l'évêque de Speyer.
Speyer petite ville impériale que subsiste du commerce en bois.
Stutgard Le prince jadis dissipateur s'est adonné a la
philosophie.
La souabe subsiste en grande partie de l'agriculture.
Les montagnes du Wurtemberg offrent des aspects fort pittoresques.
La petite principauté Hohenzollern est la [onl.]
de la famille des rois de Prusse.
L'apparence du lac de Constance est superbe.
On remarque à Constance la différence de l'énergie
et l'activité avec les villes Helvétiques. Les préjugés
des Catholiques, la mauvaise éducation, l'orgueil de
la noblesse en sont la cause.
Augsburg Cette ville est dans le déclin. Les moeurs
n'y sont corrompues. Le commerce est fort diminué.
München
On a ici un théâtre mais on n'aime que les pièces
remplies de meurtres et extravagances.
L'auteur est un bon homme mais le timon de
l'état est dans les mains des moines et des femmes.
Il y règne la dépense et la profusion.]
Jeudi 18 décembre 1811
J'entendis hier à Felix un discours du prof. Kemper
sur O.Z. van Haren. Je vais noter ici quelques particulari-
tés de cet homme illustre.
Il naquit en Frise d'une famille fort illustre et dont
l'origine remonte dans les tems les plus reculés. Cette
famille vécut premièrement à Maastricht. Un van haren
signa la requête des nobles et fut chambellan de
Guillaume 1er et ensuite de Guillaume Louis stadhouder de
Frise. Un autre Van Haren servit l'état dans douze ambassades.
O.Z. van Haren fit ses première études dans le latin à Zwol et visita
ensuite les universités de Franeker et d'Utrecht. Il fut étroitement
lié a ce Guillaume 4 qui n'avait que quelques années de
plus que lui. Il fut premièrement élu membre du gouvernement
de Sloten et succéda ensuite à son oncle comme grietman de
Westwolderadeel. Par ses talens distingués et par la faveur
du prince il fut nommé député de la frise à la Haye et
prit place dans l'assemblée des états généraux. Là il
s'attira l'amitié du greffier François Fagel et de Bijnkershoek tous
deux déjà avancés en âge. Il estimait surtout le premier
jusqu'à l'adoration. Lors de la guerre de la succession d'Au-
triche il fut Gedeputeerde te velde fut ensuite envoyé aux
cantons suisses pour demander du secours en troupes et
nommé enfin ambassadeur à la négociation de paix d'Aix-
la-chapelle. Il conserva toujours l'amitié de Guillaume 4
et de la gouvernante. Cette dernière le chargea de
composer une oraison funèbre sur son époux et de mettre
par écrit ses observations sur le gouvernement de cet
état pour l'usage de son fils. Après sa mort van Haren fut
entouré d'ennemis qu'il s'était en grande partie attirés par
les conseils qui tendaient toujours à conserver la
neutralité entre la France et l'Angleterre. Une accusation
particulière contre lui fut érigée en affaire d'état. Van
Haaren dut s'éloigner et se livra ensuite au repos. Il eut
là encore des malheurs consistans en des attaques que
quelques furieux firent sur sa maison et dans l'incendie
qui consuma sa bibliothèque et tous ses manuscrits
et que quelques-uns supposent avoir été excités
par ses ennemis. Van Haaren a laissé après lui son oraison funèbre
sur Guillaume 4. Un disc. sur la vie du gouv. gen. Kamphuys
et sur la persécution des chrétiens en Japon. Il avait
composé une vie du pensionnaire fagel et une histoire du
Hollandschen krijgsdienst mais ces derniers ouvrages ainsi
que tout le fruit de ses recherches et travaux furent perdus.
Il existe encore de lui une histoire contemporaine de la
patrie mais elle n'a pas encore été trouvé. Son plus
fameux ouvrage est le poème der geuzen. Le prof.
nous cita Le retour d'un fils dans les bras de sa mère
et l'action héroïque de Rochus.
Littérature
Geschiedenis der vereenigde Nederlanden
dep. Tom. 11-25.
J'ai lu cet ouvrage pour compléter mon cours d'histoire
touchant feu notre république puisque ce tome 11 commen-
ce là où Wagenaar finit. Cette histoire raconte les faits
et c'est aussi le plus grand éloge qu'on puisse en faire. Car
l'histoire est racontée par un père à son fils ce que ne
produit rien du tout et a trop l'air d'enfantillage.
L'auteur n'indique aucune source dont il a puisé pour
son ouvrage ce que Wagenaar fait avec tant d'exactitude.
Il effleure souvent des points importans et appuye singu-
lièrement sur des circonstances peu intéressantes comme
sur des remonstrances au gouvernement sur des requêtes
sur des émeutes insignifiantes.
Il ne nous donne pas la moindre notice sur le caractère
des personnages de son histoire tandis qu'il raconte
avec exactitude sur les voyages du prince et de la princesse
sur les auberges où ils logèrent etc. En effet je n'ai aussi
fait que parcourir les derniers volumes qui m'ennuyait.
On pourrait appeller cette partie de cet ouvrage Extrait
des gazettes.
Vert. Weber Sagen der Vorzeit[?]
C'est un assemblage d'histoires de la chevalerie fort bien
écrites. Il y en a je crois plus de neuf volumes. Je n'en
ai lu que deux qui contiennent
Männerschwur und Weibertreue
Der Harfner
Das Ritterwort
Wollf
Das heilige Kleeblatt
Der Mühler im Schwarzthale
Der grosze Bruder
Briefe eines reisenden Franzosen
C'est un ouvrage fort intéressant sur l'Allemagne écrit
par le baron de Risbeck. Je n'ai lu que la première partie
contenant le séjour de l'auteur à Stuttgart Salzbourg
Munich et Vienne. Il traite de tout de la politique de
l'économie des moeurs du théâtre.
Lundi 23 Decembre 1811
On vient d'arrêter ici une femme scélérate qui a trompé
beaucoup de gens.
Veuve d'un médecin à Alphen elle a changé son nom en
celui de Willink et s'appuyait sur cette famille riche
et considérée. Elle était accompagné de deux hommes qu'elle
disait être ses hommes d'affaires. Elle loua une grande
maison sur le Heerengracht. Elle acheta des
meubles et autres effets en quantité pant les uns
d'argent comptant les autres en partie avec
des promesses. Cependant plusieurs de ces effets vendus
par elle furent trouvés par les anciens propriétaires
ce que excita des soupçons. Le commissaire de police s'arranga
les frères Lurasco qui avaient une bonne somme à
prétendre. Ceux-ci demandent de l'argent on veut
les payer d'excuses, ils insistent et font un train terrible.
Le commissaire de police entre alors comme pour dissiper
le tumulte. En attendant plusieurs créanciers qui avaient
eu vent de l'affaire s'étaient assemblés et crient à
tue-tête Voilà ma pendule, mes tapis, mon secrétaire etc.
Ils s'avance enfin un homme fort grave qui après avoir
demandé silence, dit Messieurs vous avez le bonheur de
pouvoir encore désigner vos effets mais pour moi
(montrant sa bouche) tout est passé par-là (c'était le
rôtisseur). Enfin on exige que la dame paye. Elle
est fort confusionnée. Eh Madame, Donnez donc des sûretés.
N'avez vous point des obligations. Je n'en ai pas.
Alors elle est saisie et conduite à la maison de correction
avec ses deux complices. On raconte de ces fripons-là
l'anecdote suivante. Il vient un monsieur chez une femme
qui vend des dentelles. Il en achète pour quelques centaines
de florins. Il fait chercher de sa voiture une boîte y met
les dentelles et l'a fait rapporter. Mais tirant sa bourse où
se trouvent 20 à 30 Louis d'or. Il dit Madam j'apperçois
à regret que je n'ai pas assez d'argent sur moi. Garçon
rendez moi la boîte. Nous la cacheterons vous
l'apporterez chez moi et je vous payerai. Il s'en va. La
femme va après quelque tems à l'adresse indiquée
on ne connaît point ce monsieur. Elle n'en est pas
plus inquiétée mais comme personne ne vient elle
ouvre la boîte après quelque tems et n'y trouve -
rien. Le valet en posant la boîte dans la voiture
avait habilement escamoté les dentelles.
Je fus hier à l'église le matin chez J. Kops qui prêcha
sur le miracle de Jesus en nourrissant 5000 hommes
c'était plutôt un tableau élégant et le midi chez
mon grand-papa qui fit un très beau sermon sur l'annoncé
à Marie.
∙[- Jeudi 26 Décembre 1811
∙Je viens de relire quelques tragédies de Vondel. Je vais joindre
quelques remarques sur elles mais ce sera en hollandais.
∙Maria Stuart
∙Men bemerkt spoedig dat de liefde voor den roomschen
godsdienst onder anderen de dichter aangespoord heeft
tot het vervaardigen.]
Vendredi 27 Déc. 1811
La colonie de Batavia a été prise par les Anglais.
C'était une nouvelle qu'on attendait depuis bien
longtems. Il y avait une expédition de particuliers
qui devait partir mais à présent ils s'en garderont
bien. Quelques frégates devaient aussi partir incessam-
ment. M. Daandels qui est revenu il y a peu de Batavia
doit en avoir rapporté un trésor considérable conquis
sur le roi de Bantam.
Il paraît être presque évident que l'empereur accordera
des licences pour tirer du sucre et du café
d'Angleterre moyennant une double importion.
Le prince de Ponte comparaît lui avoir joué un
mauvais tour puisque les Anglais importent librement
leurs marchandises en Suède. On dit qu'il a déjà fait
confisquer les revenus de ce prince situés en France.
Les rapports qu'on entend faire de l'Espagne deviennent
de plus en plus alarmans. Il doit régner une entière
famine dans ce pays qui n'est plus approvisionné par
la Hollande et l'Afrique où pendant trois années les
moissons n'ont pu être recueillies et où tant de
milliers de français, anglais et insurgens ravagent
les contrées. Je parlai quelqu'un qui tenait d'un
seigneur portugais arrivé ici à Amsterdam que
les généraux les plus humains même faisaient atterrer
un village par leurs troupes et les habitans devaient
apporter tous leurs comestibles qui étaient enlevés
avec promesse d'un payement prochain.
Mr. Langhorst qui a fait pour affaires un voyage
en France se trouvant à Bayonne avait passé les
frontières et arrivait à un endroit à deux heures
de distance qu'il apprit avoir reçu la jour précédent
la visite d'une troupe d'insurgens. On lui fit les
plus pressantes exhortations pour l'engager à retourner
sur ses pas ce qu'il fit aussi. Pour un simple courier
il faut une escorte d'une centaine d'hommes avec
deux pièces de canon. On rapporte aussi des troubles
qui seraient arrivés à Paris et à d'autres endroits de
la France, mais je n'y ajoute aucune foi.
Je fus hier au soir du mon oncle de Vos pour voir
des dessins. Il y avait entr'autres M. Willink B.
de Bosch Muller Molquenboer, Roos Engelberts, Jolles Apostool
J. de Vries Van Hal Van Drielst Van dijk. Nous vîmes
premièrement des dessins de figures et historiques des
maîtres hollandais flamands français et Italiens.
La dédication du temple par Luiken. L'adoration des mages
par Bloemaart .Le (titelplaat) frontispice des métamorphoses
d'Ovide par Picart. Une tête par Lairesse Marie Tesselschade
par Galswijk. Un portrait par Visser. Une allégorie par Le Brun.
Moise devant Pharaon, et L'expérience par Poussin. Une scène
de l'enfer par Rubbens. La femme adultère aux
pieds de Jésus Christ par Rembrand. Une tête de lionne
par Snijders Jésus au Berceau par Pater Segers. Une
scène villageoise par Teniers une sainte famille
l'ascension de Marie un ange par divers maîtres
Italiens. Une procession par Vanius.
Nous vîmes ensuite des paysages par Verboom Ruysdael
Rogmans A. van der Velde W. van der Velde. Le colysée
par Berghem Ostade Waterloo.
Il y en avait encore une foule d'autres superbes
dessins. Nous eûmes après cela une collation
qui fut égayée par les chants de Mr. Roos dans
la manière populaire. On récita ensuite à l'envi des
anecdotes et des épigrammes de Langendijk Vos Huighens
et autres. Mr. Apostool nous fit rire ensuite par quelques
parodies de Rusting.
1812
Vers la fin de l'année passée j'entrepris de noter
quelques traits de ma vie dans cette époque, avec des
réflexions sur ma lecture. J'espère continuer dans cette année
ce travail tant pour ma récréation que pour m'exercer
dans le stile français.
Mecredi 1 Janvier 1812.
Voilà donc une nouvelle année commencée. Un horison
nébuleux se développe dans le lointain, mais Dieu
peut tout changer. La nouvelle année nous trouva chez
mon oncle J. de Vos où nous étions gaîment assemblés.
Cependant la triste perspective de l'avenir ramenait
bientôt une tristesse qui cependant était effacée
par le souvenir du bonheur dont la providence nous
fit jouir dans le sein de nos familles. Que cette journée
doit être attristante pour tant de personnes qui dans
l'année passée ont perdu leur gagne-pain. Hier les
boutiques des marchands en tabac étaient assiégées par
le peuple et c'était une grâce si l'on en pouvait acheter.
La populace criant Nous ne nous soucions pas du
tabac de l'empereur.
M. van Brienen a mandé par une circulaire qu'il quitte
son affaire.
La semaine passée on a fait une irruption dans la
cuisine de mon oncle de Vos où l'on a dérobé plusieurs
effets appartenans aux domestiques.
Jeudi 2 Janvier
C'était hier une affluence de complimens à n'en point
finir. Tout le monde vous abreuvait de souhaits qui
pourtant ne signifient rien. Comme un exemple de la belle
discipline et de l'ordre admirable qui règne ici dans le
gouvernement on peut citer le trait suivant.
M. de Veer fut appellé par le maire à ce que je crois avec
tous ceux qui possédaient des postes dont il se formait
là une réunion de tous les ordres de la société.
Il y apprit par un papier qu'on lui foura dans les
mains qu'il était devenu Expéditeur de la 1er classe
de l'octroi d'Amsterdam et qu'il devait revenir à 8 1/2.
Il revint en effet à l'heure indiquée sans savoir ce
que c'était que son poste et il s'en retourna à 2 1/2 heures
de la nuit sans en savoir rien de plus. Voilà comme
les choses vont ici.
Il se trouve ici plusieurs conscrits qui ont déserté leurs
drapeaux. Les malheureux!!
Le nombre des lest de seigle et de froment arrivés ici pendant
le cours des 6 dernières semaines se montre à 3500.
Le nombre des marchands de tabac était 700. Il n'y en a que
200 de conservés.
Nous eûmes chez mon grand-papa de Clercq un souper de famille.
C'est d'après le sens de l'almanach.
J'entendis le sermon de Mr. Stuart sur le texte suivant
Laat hen hunne dagen tellen opdat zij
een wijs hart bekomen. Ps. 50 v. 12
Vendredi 3 Janvier
On raconte beaucoup de diverses insurrections qui doivent
avoir eu lieu même dans Paris et surtout parmi la
noblesse Italienne.
Samedi 4 Janvier 1
Il a paru un ouvrage avec le titre Règlement de l'octroi
d'Amsterdam. C'est ce livre qui contient toutes les impostions
relatives à la ville qu'on doit payer. Il mécontente beaucoup
de gens.
Plusieurs employés qui avaient perdu des postes assez considéra-
bles en ont reçu en échange d'autres qui ou donnent des
appointemens si minces qu'on ne puisse en subsister
ou impose les conditions les plus humiliantes. Quant
à tous les postes lucratifs ce sont des français qui les
reçoivent. Injustice criante.
Quant au loix il règne ici encore une jolie confusion.
Et comment messieurs les Français veulent-ils faire
exécuter des loix qu'ils comprennent ni servent
eux-mêmes dont pour le plus souvent ils tirent
de fausses conclusions.
Littérature
De drie mannen
C'est une traduction de Picard. On a donné cette pièce au
théâtre hollandais. Comme la plupart des pièces de picard elle
est entièrement en intrigue. C'était aussi un sujet trop
français pour pouvoir plaire à notre public. C'est une
diseuse de bonne avanture qui fait donner des leçons à
un mari trop jaloux et à un autre qui l'est trop peu.
Dimanche 5 Janvier 1811
Littérature
Euterpe par Kantelaar et Siegenbeek
Ce volume contient
Un discours de M. van Lennep contenant un coup d'oeil
rapide sur les causes de la décadence des lettres chez un
peuple. Il regarde le siècle de la poésie épique comme le
premier et dans son plus grand éclat lorsqu'un peuple ne
fait que sortir de la barbarie suit ensuite la poésie lyrique
et enfin la tragique. Il compare la décadence des lettres
chez plusieurs peuples. Ses appraçus[?] sont justes son
stile nerveux et enfin c'est fort beau morceau.
2. Notice sur Verburch ou Van der Burg.
L'époque de sa naissance est ignorée. Il fut l'ami de Hooft
Huygens Brosterhuisen etc. Il fut fort loué par les
auteurs de ce tems comme poète érotique. Il fut secrétaire
du duc de Brederode et assista à plusieurs ambassades comme
à celle qui avait pour objet le mariage de Guillaume 2.
Il fut ensuite agent des états à Liège et passa la fin de
sa vie dans la retraite à Amsterdam où il mourut en
1660. On trouve encore de ses vers hollandais dans
divers recueils, au nombre de 18.
3. Sur E. Koolaert geb. Hoofman
Cette femme peut être celle qui parmi son sexe a le
plus excellé dans la poésie dans notre langue. Elle
naquit en 1664 à Haarlem se distingua tôt et apprit
le latin et le grec. Elle se maria à Pieter Koolaert
qu'elle aimait beaucoup mais qui se ruina par sa
folle prodigalité. Elle le suivit à la cour de Hesse
où il obtint un poste mais après sa mort elle
fut presque réduite à l'indigence. Elle surpassa
son sexe autant en talens qu'en vertus. Plusieurs
vers cités dans cette notice sont superbes.
Theorie der bijschriften dans une lettre de J.
Lublink à J. de Vries. Il exige que chaque Bijschrift
soit une espèce de récit et cite quelques exemples de
lui-même et d'autres.
Menschenkennis de volmaaktheid bevorderende
Une ode par Arntzenius qui contient de très beaux morceaux.
Lundi 16 Janvier 1811
Hier nous fûmes à l'église chez mon grand-père mais je
ne compris pas grand-chose à la dernière partie du sermon.
Il roulait sur le texte qui dit que c'est le pain de l'âme qu'il
faut rechercher.
Il culbuta une chaise dans le Heerengracht évènement admirable
du moins il attira beaucoup plus de monde que l'église.
Je vais apprendre le grec.
Mardi 17 Janvier
On racontait qu'il y avait une sédition assez considérable
à Paris et l'on débitait une foule de contes.
Annales du Lundi.
1re Séance chez l'oncle.
M. Kemper avec son épouse y assistait.
On trompa le bon homme Dylius. Mon oncle de Vos s'étant
déguisé en cuisinier au moyen d'une serviette et d'un bonnet
de nuit lui fit accroire que tous les membres s'étaient
masqués. Il donna dans le panneau et s'affubla
d'un habit de mon oncle avec sa perruque. Il entra tout
fier et fut fort étonné de trouver toutes les personnes
dans leurs habits ordinaires.
À table nous fûmes magnifiquement régalés.
Je lus un vers sur le N. an.
Dylius raconta deux histoires assez naïves.
Kemper offrit à J. de Vos de le faire dîner chez le prince.
Minuit sonna c'était l'anniversaire de mon
grand-père. Nous lui adressâmes premièrement quelques
impromptus et ensuite nous remplîmes à nous quatre des
boutrimes en son honneur. Dylius avait fini le
premier et était tout fier, mais sa dernière
ligne était de quelques pieds plus longue que les
autres. Celui de Kemper était le meilleur et le
mien le plus sale. Nous conservâmes celui du professeur
et livrâmes les notres à l'oubli en les déchirant.
Mecredi 8. Janvier
J'assistai hier à la distribution des prix de l'académie de
dessin de cette ville, dans l'église des Remonstrans.
N. Loots fit à cette occasion un discours en poésie.
Il y avait un grand concours de monde et aussi de dames.
L'orateur fit premièrement ses excuses aux trois ministres
d'oser monter sur une chaire si souvent sanctifié par
leurs discours. Il passa ensuite à son sujet qui fut
l'éloge de la beauté. Il demanda pardon à Bilderdijk
d'avoir choisi un sujet chanté par lui. Il montra la
beauté comme une divinité insensible toujours variée
et échappant à toutes les définitions. Il la montrait dans
une fleur dans un beau paysage tandis qu'elle
abandonne le palais des grands. Il peignit ensuite un
philosophe courbé sous le poids de ses méditations
pour définir la beauté quand tout à coup une vierge
dont il fit une fort jolie description lui dit
... omhels haar beeld in mij.
Il montra ensuite la beauté sous toutes les formes dans
le beau désordre des astres. Il la montra née aux
premiers rayons du soleil.
Gij huwde de eerste lente aan de eersten morgenstond.
Il reconnut ensuite la beauté comme source des arts.
Il peignit l'état végétant de celui qui ne reconnaît
point son empire. Il parla de l'influence de la beauté
sur les états.
Gij spraakt door Helena en Troje stond in vlammen.
La beauté désarma même les Dieux, elle monta jusque
dans l'Olympe il peignit son culte sous le nom de Venus.
Ensuite il la perd de vue il reconnaît et admire
l'harmonie de l'univers, il reconnait encore la
beauté comme la source de la musique.
Après cela il la revoit sous la forme de la peinture et
passe de là à l'occasion de la distribution des prix.
Ce vers était en général fort beau quoiqu'il y eût
de tems en tems bien quelques expressions surannées à la manière
de nos nouveaux Philosophes comme
gij mensch
Wanneer gij goden maalt
En dat een hoger beeld nog faalt
Zoo maalt - geen zelven
puis ses fréquentes rapproches
d'un artiste avec un créateur un dieu.
In totum c'était un ouvrage digne de son auteur. Il
employa différentes mesures. Une même de 7 1/2 à 8 pieds.
Étant descendu il fit en prose la distribution des
trois prix qui consistaient dans les gravures de
Lairesse de La Farge et une médaille. Les trois
dessins couronnés furent pendus devant la chaire.
Après une exhortation à la bienfaisance Loots remonta
sur la chaire et récita un vers de reconnaissance
à tous ceux qui avaient contribué à cette fête.
Il renfermait de fort beaux morceaux comme en
recommandant la bienfaisance envers cette académie il
fit la comparaison d'une mère qui quoique sa portion
de pain soit devenue moindre distribue encore ce que
lui reste à ses enfans. C'était superbe.
Parlant du penchant pour les arts qui régnait encore
chez nous il finit par la comparaison d'un cygne qui
quoique obligé à traverser un marais fétide où elle
perd quelques plumes reparaît avec plus de majesté
dans une belle rivière dans sa première blancheur.
C'était aussi dans des vers magnifiques.
Pendant les intervalles la musique y jouait son rôle.
Anecdotes contemporaines
Deux paysans parlant de l'entrée de l'empereur dans
Amsterdam et s'étonnant de la simplicité de son costume
l'un d'eux dit Dat geloof ik wel ik doe ook mijn beste
rok niet aan als ik mijn koeien ga melken.
Un autre demandait pourquoi certain seigneur
ne portait point de gants dit Il a toujours les mains
dans nos poches.
M. le Franck van Berkhey récitait il a plusieurs années
un vers sur la délivrance de leyde. Il disait que quand
un nouveau tyran voudrait jamais usurper le pouvoir
dans cette ville
zij de eerste kogel voor mijn grijzen kop gespaard.
Un tisserand qui avait écouté attentivement fut
tellement transporté qu'il s'écria tout à coup
En God ... de tweede voor de mijne.
Politique
L'empereur a décrété une nouvelle conscription
parmi ceux qui sont nés en 1790.
∙Quelqu'un lié d'intimité avec le préfet et qui dînait
souvent chez lui, dit qu'il lui a assuré, qu'il voyait
qu'on voulait ruiner ce pays et que sa retraite
n'aurait d'autre suite que de faire place à d'autres qui
seraient encore bien plus mauvais que lui quid[?] est
veritas.
Hier les bruits sur les troubles dans Paris continuaient
encore.
On est en général fort mécontent de la répartition
des impôts de la ville. Il y en a une de 15 sur chaque vache.
Il vint quelqu'un à la porte avec des veaux fort jeunes
et exigea une pareille imposition de ces bêtes qui ne
valaient pas plus de 4 escalins de sorte que le propriétai-
re aima mieux abandonner tout son troupeau.
Le brabançon qui vendait cet été les loix françaises
débite maintenant les tarifs des francs et des florins
mais je crois avec peu de fruit.
Jeudi 6 Janvier
Point de nouvelles seulement quelques bruits populaires
que les sots ou les ignorans peuvent seuls croire.
Mon G.P. de Cl. qui a été encore indisposé au commencement
de cette semaine est un peu mieux maintenant.
Le tems conserve encore toujours la même température le
Therm: 38 à 42 cependant il a fait assez froid pendant
les derniers jours.
D'après le conseil de mon oncle de Vos je me suis remis
à dessiner des têtes des mains etc. Plusieurs de
mes amis copient des estampes en couleurs ce que je trouve
une fort mauvaise manière. A. Fock en avait achevé
deux dont l'une représentait l'enlèvement de Dyonise
et l'autre Tésée et Philomèle après avoir été violée.
Outre la société de poésie qui tient aussi ses séances
dans le local de Concordia et qui est assez suivie
on peut compter parmi les assemblées littéraires
de cette ville une réunion de jeune poètes: A. Hartsen
A. van Halmael le jeune Boscha C. Buys etc. Un
de mes amis qui y assista s'était fort amusé.
Van Halmael avait récité les deux derniers
actes d'une tragédie intitulée Coriolan A. Hartsen
excelle surtout dans les vers burlesques et équivoques.
C'est un jeune homme de beaucoup de talent.
Hier un certain Mr. Schenk doit avoir récité
dans Felix la traduction d'un morceau de
Young sur l'immortalité de l'âme.
Parmi les poètes naissans on peut compter une Mll. van Hulst
à peine âgée d'une quinzaine d'années. Elle sait plusieurs
langues et possède beaucoup de talens. Entr'autres on
m'a rapporté qu'elle fait déjà des vers depuis l'âge de
6 ans. Dernièrement elle doit avoir adressé un
fort joli vers à Mr. Snoek après qu'il eut joué le
Beverley. Je désirerais fort voir de ses productions. En
cas que je fus grand poète j'aimerais à encourager le
talent naissant. Mais peut-être aussi par le penchant
naturel aux hommes prennent-ils de l'ombrage.
On raconte la mort de C. Grafstede. Ce jeune homme était
fils d'un Heuker qui fut fort protégé par notre comptoir.
Après la mort de son père il lui succéda dans le
maniement de ses affaires. Il fut fort protégé et
pour lui donner du crédit nous passâmes avec trois
autres une guarantie de 10 m. florins. Il négligea
son commerce et enfin nous dûmes payer la
guarantie et nous reçûmes en remboursement
des assignats dont plusieurs avaient été distribués
à beaucoup d'autres créanciers. C'était quelqu'un
qui pouvait mentir diaboliquement et qui avait
encore un orgueil sans bornes. Enfin il tomba dans
la dernière conscription et apparemment n'ayant pas
trop d'argent à fournir il partit lui-même après
avoir extorqué par des menaces de
l'argent aux boulangers. Nous entendîmes peu
après qu'il était malade à l'hôpital d'Anvers
et même on dit qu'il s'est privé lui-même de
la vie.
Il ne paraît depuis quelque tems rien de nouveau
dans notre littérature. Une foule de codes et de
Manuels nous inondent de toutes parts. Joignez à cela
des traductions de quelques romans de La
Fontaine et voilà tout. Les almanacs qui ont paru
ne signifient pas grand chose. Une pour l'instruction d'un
ménage. Une autre over de muzen en gratiën où
il a des copies de tableaux assez joli et une
collection de petits vers dont la plupart par
Westerman. Aussi une très belle élégie sur la
mort d'un enfant par Kantelaar.
Vendredi 10 Janvier
Je fus hier au soir à Felix. Ce fut Mr. Bilderdijk qui y
tint un discours sans titre. Le titre qui selon moi lui
serait le plus convenable serait La vérité de l'immorta-
lité de l'âme démontrée par l'imperfection de la félicité
humaine. Il y avait des morceaux superbes comme entr'-
autres la réponse au sage qui disait que la félicité humaine
était dans la science. Que savez-vous o mortel disait-
il. Il faisait ensuite la description des idées qu'avaient
eu les anciens peuples de l'immortalité. Il récita
ensuite l'extension d'un chant des Indous à l'égard
de l'immortalité. Il finit par une fort belle ode.
Il doit avoir lu dans une autre société un vers
sur le monde des esprits qui doit être encore
plus beau.
Il n'a pas une manière agréable de réciter quoiqu'elle
soit selon les règles de l'art. Mais sa voix est trop
faible et pas assez sonore. Aussi
plusieurs placés au fond de la salle n'avaient pu
le comprendre entièrement.
Il devient de plus en plus dangereux de parler en
public sur des événemens politiques. J'ai entendu
dire que quelques-uns avaient été arrêtés pour avoir
dit. On dit que Marmont est grillé.
On a répandu parmi le peuple que l'empereur était
prisonnier.
Mardi 14 Janvier 1812
Annales du Lundi 2e Séance
Le médecin dut quitter l'assemblée pour une indisposition
survenu à M. Tin van Keulen. Nous apprîmes qu'il visitait
300 maisons et qu'il n'avait perdu que 11 personnes durant
le cours de l'année passée.
Pour vanter ses connaissances en théologie il rapporta qu'il y avait
dans la bible les mots de bloote billen et aussi que le roi Sedekras
donnait au prophète Jeremie chaque jour eene bolle uit
de bakkersstraat. Il entreprit à cet effet une gageure et
fut malheureusement pris au mot en disant qu'il payait
quand il gageait. Le prix fixé était une portion de glace.
Il gagea ensuite avec J. de Vos qui soutenait
qu'il ne pourrait trouver ces textes en moins de 5 minutes.
Il les avait notées ce que n'empêcha pas qu'il fut longtems
à chercher quoiqu'il gagnât l'escalin[?] qui fut payé
tout de suite.
Il fit trois histoires de culottes tombées de M. van der Kemp, Jaarspel[?]
en Van Eijk. Il avait tellement brodé la seconde que Ignatius
lui rompit en visière et lui raconta comment l'affaire
s'était passée. C'était arrivé à un diacre député à une
assemblée Synodale.
L'oncle P. d. C. raconta une histoire d'un ministre qui
culbuta les fesses nues au milieu de l'assemblée. Elle
ne fit pas beaucoup d'effet.
Mon oncle de Vos débitait entr'autres hier qu'il tenait d'un
officier de génie qu'on érigerait sur les cotés des tours divers en
plusieurs étages. En bas il y aurait des réservoirs d'eau douce
plus haut un magasin de poudre ensuite un magasin de vivres,
ensuite des lieux habitables et ensuite sur la plateforme
un retranchement où seraient posés plusieurs canons. Ces
tours seraient construites en talus de manière à pouvoir
résister à tous les boulets.
Point de nouvelles. La conscription répand ici la désolation
surtout parmi les personnes qui ne sont pas assez riches pour
pouvoir payer des remplaçans dont le prix augmente toujours
on se plaint aussi beaucoup de l'effet désastreux de
l'octroi d'Amsterdam.
Dimanche j'entendis un sermon sur l'entretien de la concorde
par mon grand-père. Il m'avait fort plu. C'était dans un
tout autre genre qu'à l'ordinaire.
Les prix du froment et du seigle sont encore montés
excessivement. Plusieurs négocians en autres articles
viennent chez nous pour spéculer.
125 H. R319 gd.
128 H. Norder vaut 310 gd.
120 H. Rogge 257
Les prix des autres grains n'ont point éprouvé
de variations considérables.
Après un tems doux qui a duré beaucoup de tems
il commence enfin à geler. Cet événement relève les
espérances des patineurs.
Jeudi 16 Janvier. C'était mon anniversaire. Je reçus
quelques petits cadeaux de mes frères et soeurs.
J'entendis le soir à Felix un discours de M. Scheltema sur
le séjour de czar Pierre à Sardam. Outre d'autres informations
il avait recueilli la plus grande partie dans un journal
écrit dans ce tems la par un certain Norme alors Vroedschap
de Sardam. J'en ai donné déjà une idée plus haut mais je
veux donner ici quelques anecdotes.
Il ne fut à Sardam en 1797 que quatorze jours. Après cela il fut au
chantier de l'amirauté à Amsterdam et il fut présent
à la construction d'une galiote dont on lui fit présent et
auquel il donna le nom d'Amsterdam.
Rien ne l'importunait et ne le fâchait tant que la foule des
curieux. Quelqu'un le fixait de trop près il lui détacha[?]
un soufflet. Un autre jour étant dans le petit bateau
(boeier) qu'il avait acheté le maître de la barque qui allait
à Amsterdam voulut passer près de lui pour donner à ses
passagers la liberté d'observer le prince. Il se fâcha tellement
qu'il lui jeta deux bouteilles à la tête.
Rien ne lui faisait plus de plaisir que d'être appellé Pieter
Baas. Lorsqu'on l'appellait Votre Majesté ou Monsieur il
vous tournait le dos.
Son principal ami à Zaandam fut un certain Kalf
dont le fils après avoir beaucoup voyagé s'établit à
Halfweg et changea son nom en celui de Marquis des
Veaux. Lors de son second voyage visitant avec ce
Kalf le père une église mennonite qu'on venait d'achever
et où Kalf était ministre (liefdeprediker) il lui dit
de faire un sermon mais bien court Kalf était monté
en chaire dit les mots suivans Pensez bien Parlez
bien et agissez bien. Le czar en fut fort content et
dit à son prêtre qu'il devait aussi en faire de pareils.
Ils étonnait tout le monde par son extrême intrépidité
dans tous les dangers. Il alla un jour de Zaandam à
Amsterdam malgré la tempête la plus violente.
Parmi sa suite il y en avait plusieurs et entr'autres
le prince Mensikof qui furent employés les uns comme
faiseur de barques d'autres pour la construction de mâts.
Ceux-ci se plaignirent beaucoup au commencement
de la douleur que souffraient leurs mains qui
n'étaient pas accoutumés à des pareils travaux. Le
prince Sibiliski qui était celui qui se conformait
le plus aux manières de Czar.
Ses amis à Amsterdam étaient surtout le bour-
guemaître Nicolaes Witsen Adam Zilt et les deux
van der Heijden qui l'instruisaient en diverses choses.
Il conserva toujours une bienveillance particulière pour
les Hollandais et surtout pour les Zandamois. Il en
avait toujours beaucoup dans ses chantiers et les
capitaines de vaisseau hollandais avaient toujours
un libre accès dans son palais. La lettre que lui
écrivirent les Zandamois lors d'une cherté de drains
est remarquable par sa naïvité. Dans les chantiers de
Bedford il se faisait appeller encore Pieterbaas van
Zaandam. Il avait voulu introduire dans son empire
la langue hollandaise et avait à cet effet fait traduire
plusieurs ouvrages en russe et fait imprimer en deux
colonnes. De ce nombre étaient la bible et quelques
ouvrages sur les sciences et les mathématiques. Mais
ceci ne réussit pas et ce ne fut que dans la construction
des vaisseaux qu'on conserva les termes d'art hollandais.
Le roi d'Angletterre lui avait fait présent d'un
fort beau jacht et il lui fit cadeau d'un diamant
précieux négligemment enveloppé dans un papier
gris. C'était bien une vraie image de son caractère.
Lorsqu'il revint en 1717 il était plus avilisé que
la première fois. Il voulut voir l'ouvrier Kist chez
qui il avait été logé lors de son premier voyage mais
celui-ci refusa de se rendre auprès de l'empereur
disant que celui-ci lui devait encore de l'argent
pour son louage.
Il fit bâtir une maison en deux étages à Petersbourg
dont une chambre n'est meublée que de fûts
transportés tout exprès de Zaandam. Son résident
ici avait eu ordre d'acheter pour Cathérine un ameub.
complet d'une maison hollandaise avec des tableaux
de maîtres hollandais etc. Pour Catherine
cet ouvrage précieux ne fut point envoyé à cause
d'une brouillerie qui survint entre lui et le
Czar.
[NB: volgend gedicht in handschrift ondersteboven:]
[-iest ... men pluckt geen roos of voelt
De doren die de hant quetst, hoe men woelt
Om rijckdom, hoe men zweet om eer en staten,
'T genoegen vlught, al lagen al de straten
Met kronen gout en scepteren bezaeit.]
Vendredi 17 Janvier
Littérature
Kotzebue Johanna von Montfaucon
Voilà encore une de ces pièces qui font courir le peuple
au spectacle mais qui signifient très peu. Ce sont toujours
des caractères d'une générosité ou d'une monstruosité hors
de la nature. Le parti le plus juste triomphe toujours. Puis
encore une amourette, une reconnaissance, des châteaux des
preux chevaliers des assauts, des combats, des bourreaux, s'il
se peut une prison, une noce et un niais. Il y a aussi beaucoup
de cela dans la pièce nommée ci-dessus. Cependant il y a des
beaux morceaux et le rôle d'un jeune homme qui doit ou
laisser périr son bienfaiteur ou perdre en le sauvant à jamais
sa maîtresse est frappant. Mais voilà aussi ce qu'il y a de
meilleur. On a vu cent fois un chevalier menaçant une femme
de faire tuer son fils si elle ne veut l'épouser des personnes
de distinction déguisés en hermité[?]. Au reste il y a des belles
décorations et beaucoup de mouvement et c'est ce qu'il
faut à notre public.
Loots werken
C'est une collection de la plupart des ouvrages de Loots.
De overwinning op Chatam C'est selon moi le chef d'oeuvre de
l'auteur et un des plus beaux morceaux de poésie que possède
notre langue. Loots excelle surtout dans ses images et
ses comparaisons et celles-ci brillent surtout dans cet ouvrage.
Tout y est superbe. Ce serait un morceau à apprendre par coeur
d'un bout à l'autre.
De Dwingelandij Lierzang Premièrement je trouve cette
pièce un peu trop longue et quoiqu'elle renferme des images
superbes cependant je trouve qu'il règne trop d'exagération.
Eeuwzang C'est encore un ouvrage excellent. Le léger tableau
qu'il fait premièrement des siècles passés et ensuite des
progrès des arts et de la civilisation dans le dernier siècle
et les gémissemens qu'il exhale en faisant mention des
désastres de la révolution m'ont fort frappés.
De Volkswoede Cette pièce sur la mort des de Wit m'a
moins plue. Je trouve aussi que la versification ne n'en est
pas si coulante que celle des autres ouvrages de l'auteur.
L'idée de faire adresser des avertissemens à de Wit par des grands hommes
victimes comme lui de la rage du peuple m'a paru fort
poétique.
Les rapprochemens de notre ancienne gloire le tableau
de notre situation présente et les voeux pour l'avenir
nous intéressent dans Amsterdam mais l'auteur convient
lui-même qu'il n'avait pas eu l'occasion de le retoucher.
Léonidas n'était pas le genre de l'auteur qui est plus
admirable lorsque dans une belle ode il est transporté
au ciel dans son vol audacieux. Ici l'histoire fournissait
trop peu de matière à l'essor des fictions du poète. Aussi l'on
voit qu'il s'est efforcé de rendre dans ses vers tous les
bons mots de Léonidas. Mais ceci n'empêche pas que
ce soit encore un bel ouvrage.
De voortreffelijkheid van den mensch in de beoefening der
schone kunsten. Prononcé à l'occasion de la distribution
des prix à Felix Meritis. Voilà l'auteur encore sur son
terrain et comme il sait tirer parti de son sujet. C'est
surtout le dernier morceau cette contemplation d'un tableau
du déluge ne laisse rien à désirer et est au-dessus de
toute louange.
Il n'a pris pas moins d'essor dans l'Élégie sur la mort
de Kuiper mais je trouve que l'effet en est toujours
terni par les vertus presque divines qu'il attribue
à son héros que l'on sait n'avoir pas tant excellé dans cette
partie. Comme M. Stuart a dit que lorsqu'il passait des
nuits entières hors de sa maison. C'était une preuve de
son génie qui lui faisait négliger le son de songer au
tems. La dernière comparaison de Loots avec les
derniers momens d'un cigne quoique souvent employée
est ravissante.
En général Loots est et sera toujours un de nos plus
grands poètes pour les images pour le fini de l'exécution
et l'harmonie des vers.
Le règne de Louis 11
Voilà encore un ouvrage comme il y en autant. C'est un extrait
de l'histoire de Louis 11 fort court et qui est peut-être
plus propre à embrouiller qu'à débrouiller la mémoire.
L'auteur cherche ensuite dans ce règne les causes
de la révolution parcourt à cet effet les règnes suivans
comme tant d'autres ont déjà fait et finit par un
hommage au héros qui a débrouillé le chaos de
la révolution. Le style est assez agréable mais je
ne serais point étonné si l'auteur n'eut eu plus
d'idée à faire une spéculation pécuniaire que littéraire.
Reis van Mungo Park 3 vol.
C'est un des voyages les plus intéressantes que j'aie
lus depuis longtems. L'auteur a sans doute fait
de grands services aux géographes. La vérité perce
dans ses récits. On lit avec intérêt ses détails sur sa
prison à Benown par les maures sur le bon caractère
des Nègres sur l'excellent nègre Karfa etc. et on y voit
en même tems un très joli tableau des petits rois
de cette partie de l'Afrique de leurs déprédations de
leur commerce de leurs guerres etc. Il est dommage
que l'auteur n'ait pu parvenir jusqu'a Tombut et
Koussa qui doivent être des villes fort grandes et
peuplées mais il ne put pénétrer jusques là à cause
qu'il était sans ressources et que ces lieux sont habités
par les maures qui sont inhospitaliers cruels et fort
intolérerans envers tous ceux qui ne son point Mahometans
comme eux.
Vondels treurspelen
Dans le dessin de repasser encore notre littérature j'ai
lu la plupart des tragédies de Vondel et toutes les fois
que je les relis j'y trouve de nouvelles beautés. J'ai lu
pour la première fois Jozef in Egipten et je trouve le
caractère de Jempsar supérieurement bien. Ce n'est pas
comme chez Phèdre un amour criminel mais c'est la
volupté qui parle par elle. Palamedes Lucifer et Gijsbregt
me paraissent les chefs d'oeuvres de l'auteur puis
Jefta et les Gebroeders où il y a aussi de fort beaux
morceaux et Les Leeuwendalers sont aussi un ouvrage
charmant. Quel dommage que tant de personnes qui
disent aimer notre littérature ne connaissent pas
de pareils ouvrages. Quel génie fécond n'avait pas ce Vondel.
Les étrangers le connaissent si peu que je lus
un ouvrage où on donnait à Vondel le nom du Shakespear
de la Hollande. C'est à la manière des Français pour effrayer
les gens par de grands mots mais on verra qu'il n'y
a point d'analogie entre ces deux grands hommes
lorsqu'on les lit puisque Shakespear est l'auteur
qui s'est le plus écarté des Grecs tandis que Vondel
les suit avec un scrupule terrible car p.e. l'idée de manquer
à une règle dans l'avant-scène lui fit pendant longtems
perdre l'idée de faire Jefta. J'admire ces deux
génies immortels mais les rapprocher ce serait comme
si on appellait Klopstock le Voltaire de l'Allemagne.
Samedi 18 Janvier 1811 [1812]
Hier mon oncle Van Heukelom avait été fiancé. Premièrement
nous aurions eu une souper à cette occasion chez mon grand-papa
mais son indisposition avait fait évanouir ce projet et nous
fûmes à un thé chez Mon oncle Rahusen. Toute la
famille Van Heukelom y était aussi. On fut premièrement à
promener en long et en large discourir quelque peu. En-
suite on joua et on se retira à onze heures. C'était toute la peine
mais c'était bien désagréable de retourner chez soi lorsqu'on
commençait à avoir du plaisir et lorsqu'on était en état
de veiller encore quelques heures avec la plus grande facilité.
Ce sont des plaisirs français que nos pères n'ont jamais eu et
qui ne sont pas à désirer.
Lundi 20 Janvier 1811 [1812]
Je fus avec Mlle. Motie et les petites Van Heukelom voir
un cabinet de figures de cire sur le Dam. En vérité
il était beaucoup plus joli que ceux que nous voyons
d'ordinaire aux foires. Il y avait de fort belles figures entr'autres
Venus et Adonis qui s'entrelaçaient des guirlandes ces
figures étaient nues et d'une grandeur plus que naturelle
on les faisait tourner de manière qu'on les voyait
aussi par derrière et ces parties-là n'était pas moins bien
faites. Il y avait une Madelaine copiée d'après une
statue de marbre posée dans le parc de Bruxelles
une tête de Voltaire après sa mort, Buffon, Charlotte
Corday et Marat, Jeanni Albert, et plusieurs petits bustes
superbes entr'autres une tête d'enfant dont une moitié en vie
et l'autre morte. En totum ceci mérite bien l'attention
des amateurs.
Hier je fus à l'église chez mon grand-père
de Vos. Il récita ce sermon sur la lettre de St. Paul à
Philémon dont j'avais déjà lu une partie. Quoiqu'il
y eut comme à l'ordinaire beaucoup de remarques
saillantes ce n'était pas un sermon pour la
multitude.
Mardi 21 Janvier 1812
Annales du Lundi
3ème Séance
chez le grand-papa
Avant mon arrivée on était déjà scandalisé des cartes de
visite de Dylius où il avait l'impudence de mettre Doktor
Dylius.
Vers le souper il vint quelqu'un pour parler à mon
grand-papa celui-ci revint en nous présentant M. Numan
disant avoir appris de lui quelque chose que l'intéressait.
J'étais trop éloigné du haut de la table où se trouvaient
M. Numan Mon oncle de Vos et mon Papa et P. de C. pour bien saisir
la conversation mais elle tournait sur des torrens qui
tombèrent dans les mets chez un ami de J. d. V.
Au dessert il parut une grande boîte de carton et chacun
attendait avec impatience ce que en sortirait croyant
qu'il y aurait quelque chose à manger mais on fut bien
étonné quand mon grand-père ouvrant la boîte après
beaucoup de pourparlers en tira un vase de fleurs de papier
très artistement faites par un ami de M. Numan et qu'il à
ce dernier avait apportés. Ensuite parut la glace qui fut
reçue avec des grands applaudissements et consumée avec
plaisir. Je lus un petit impromptu de 8 vers fait à ce sujet.
On fit voir un dessin de Mlle. Zwijndregt représentant
De boutade[?] et des copies de G. de Vos d'après Numan. Le premier
article éprouva des contestations mais le second fut
comblé d'applaudissemens. M. Dylius communiqua
à l'assemblée qu'il avait pris des engagemens avec M. Falck.
Le pauvre D. fut accablé d'énigmes et de charades et de
koopjes. Entr'autres il ne pouvait deviner quels hommes
n'étaient pas morts sous le nouveau test. Mon grand-père
interrompit les huées en faisant une motion en
l'honneur de mon anniversaire. D. m'adressa à cette
occasion l'impromptu suivant
Sier van uw jaren
Blijf lang welvaren
Ce vers fut vivement critiqué J. de Vos dit
Moog gij nog veele jaren
Zoo gelukkig als thans verjaren
J'y répondis par un impromptu adressé à D.
L'oncle invita l'assemblée à venir manger des choux
chez lui.
Ce même membre avait fait la semaine passée une
proposition d'aller tous habiter un château qui
était à vendre près de Vreeland. Cette proposition fut rejetée.
On dit que la guerre va éclater entre la Russie et
la France et même l'on parle d'une coalition de
puissances du Nord puisqu'aussi l'ambassadeur en Suède
est parti sans prendre congé.
Les remplaçans deviennent rares et chers.
J'ai entendu que quelqu'un se rencontra il y a quelque
tems avec deux Français qui apprenaient
l'allemand. Leur en ayant demandé la raison. Ils
répondirent Quand le vieux père mourra le beau-fils
dira cela m'appartient et puis nous aurons des postes
en Allemagne.
Les grains sont encore environ un même prix 120 N. G. R. 260,
124 H. R. 320 Raapoly 62.
Il commencera à ce que je crois enfin à geler.
Samedi 24 Janvier
Nous fûmes hier à un souper chez le grand-papa de Clercq
où nous nous amusâmes beaucoup. Il y régnait beaucoup
de gâité quoiqu'on fût plus de 30 personnes. Il y en avait bien
une [onl.] assis sur la belle alcôve dont nous avons
si souvent fait un théâtre.
Littérature
Pope's works vol. 1 & 2
On trouve dans ce recueil
Pastorales
Ce fut un ouvrage de la jeunesse de l'auteur. Je n'aime pas les pastorales
en général à moins qu'elles ne soient fort jolies. Il y a quelques
belles idées dans celles-ci. Il y en a quatre sur les diverses saisons
et une cinquième qui a pour titre Messiah est sublime.
Elle est pour ainsi dire une paraphrase de la prophétie
d'Isaie à cet égard. On y a joint des comparaisons avec
le Pollio de Virgile.
The Forest of Windsor
C'est un fort joli poème où il y a des belles descriptions.
La fin qui consiste dans la prédiction que fuit la
Tamise du bonheur de l'Angleterre est aussi fort belle.
Essay on criticism
C'est un poème qui ne se fait pas tant remarquer par le
coloris brillant et la verve qui règne dans l'art
Poétique de Boileau que par la justesse des idées et
des figures et par le bon sens qui y règne et l'élégance
de la diction.
The rape of the lock
Ce poème ne saurait être mis en parallèle avec le Lutin
il y règne bien moins de fécondité. C'est une certaine Bélinde
à qui un baron (on ne sait pas qui) coupe une boucle
de cheveux après beaucoup de peines pour la retrouver
elle est emportée au ciel et changée en astre.
Cependant cela n'empêche pas que ce poème ne soit
fort agréable à lire. La description de la [onl.] de la
mélancolie sont fort jolies et la fable du Sylphis
et surtout le discours d'Ariel ainsi que la description
du jeu d'hombre m'ont fort plues.
Sappho to Phaon
Eloise to Abelard
Personne n'a jamais à ce que je crois constaté la beauté de
ce morceau où l'on voit toute l'impétuosité et
les feux de l'amour.
Vol. 2
The temple of fame
Ce poème ne m'a pas trop plu. Je ne suis pas grand amateur
d'Allégories surtout lorsqu'elles sont si longues. Il y a cependant
des idées ingénieuses.
Deux contes imités de Chaucer.
Celui de January and May ou l'histoire d'un vieux chevalier
qui se marie encore et que sa femme mène par le nez.
Ce conte est assez curieux.
Un autre intitulé The wife of Bath est l'histoire
d'une femme qui a eu cinq maris et qui avoue de les
avoir bien tourmentés tous.
Suit un grand morceau consistant dans le premier livre la Thébaïde de
Stace. Comme le commencement ne m'en plaisait pas
je ne l'ai pas lu ainsi que les imitations de divers
poètes Anglais qui ne intéressent pas si l'on ne connaît
ceux dont l'auteur a imité la manière.
Quelques poésies fugitives parmi lesquelles se font remarquer
4 ou cinq fort jolies épîtres en vers.
Une vingtaine d'épitaphes parmi lesquelles celles
sur Eliah Fenton, sur Guy et Newton m'ont
surtout plues.
Lundi 27 Janvier 1811 [1812]
Je fus hier à l'église chez Mr. Coopmans, il devait faire
une oraison funèbre sur le Professeur Hesselink. L'église
était fort remplie et il y avait beaucoup de professeurs
invités par Mr. Coopmans. Il y avait de belles choses dans
son discours mais on convenait en général qu'il était
trop long. Il parla premièrement de la carrière littéraire
du défunt, ensuite de sa manière d'enseigner à ses étudians
et des livres qu'il avait publié ensuite de son caractère
et enfin de sa vie privée comme époux père avec
l'histoire de sa mort. De tems en tems on apprenait
de beaux traits mais les détails minutieux étaient
répandus avec trop de profusion car le talent d'un
orateur consiste principalement à savoir l'ensemble
et de le présenter sous des points de vue frappans.
Son texte était Lazarus onze vriend slaapt. C'était une
fort belle idée, mais il en tira peu de parti. Son exorde
comprenait la contraste lorsqu'on regarde un cadavre
avec l'idée que tout est fini vu avec celle d'un être
immortel. Il raconta premièrement d'une manière fort
succincte l'éducation du prof. prem. à Groningue ensuite
à Lingen sous le prof. van de schank[?] enfin à Amsterdam
sous Here Oosterbaan ensuite il fut ministre à Bolsward
enfin successeur d'Oosterbaan à Amsterdam pour la partie
théologique et morale mais en 1800 il joignit les sciences
philosophiques telles que la logique la Physique et
la Géométrie. Outre plusieurs traités sur différens sujets
dont quelques-uns furent couronnés par Teyler il
composa son Uitlegkundig woordenboek qui lui
succeta[?] des désagrémens parmi ceux qui pensaient différe-
ment. Quoique son caractère fût fort doux il fut en butte
aux accusations de quelques malveillans qui voulurent
le noircir comme néologue et même révoquer en doute
son honnêteté et sa franchise. Il avait un jugement
juste un esprit éclairé et une grande aptitude
à enseigner car il savait tout éclaircir pour ses
disciplines. Une difficulté qu'il avait à s'exprimer donnait
à sa voix une lenteur et une monotonie désagréable.
Il était moins l'instructeur des étudians que leur
ami et ils avaient recours à lui lorsqu'ils désiraient
quelque conseil. D. Koopm. qui avait été son élève pendant
20 ans cita quelques traits de ses recommandations aux
étudians pour prêcher ainsi qu'un morceau de son dernier sermon.
Ensuite l'orateur entra dans le détail de ses malheurs
de ménage de la mort de ses deux épouses de ses fils dont
le second Fedde donnait de grandes espérances et ensuite
il s'étendit fort sur sa dernière maladie et sur ses
différentes rechuties sur la peine qui lui causait
le sort de son fils qui tombait dans la conscription.
Cette partie-là était sans contredit trop longue. Plusieurs
femmes répandrèrent[?] des larmes en quantité mais les
pleurs d'une femme ne démontrent pas toujours
l'éloquence du discours. Un des traits qui me touchaient
vivement mais que d'autres regardaient comme d'assez
peu d'importance fut le suivant. On trouva un jour
pendant sa dernière maladie en prononçant ses mots
Ik verlang na huis na huis en montrant du doigt le
ciel. In toto pour celui qui ne connaissait point Hesselink
il régnait une superfluité de détails qui ne pouvait
pas l'intéresser telles que la description de sa figure,
de sa marche. Je ne veux nier que l'orateur ne fut
touché jusques au fond du coeur mais ce n'est pas encore là
l'éloquence et tout le monde ne va point à Corinthe.
Une fois il parut en fureur et fit de violentes
apostrophes à la mort mais la fin on voyait bien
que l'art y perçait trop. Le sermon dura aussi deux
grandes heures. Je m'y étais rendu à 1/a[?] passé pour
pouvoir me procurer une bonne place et à 1 heure
j'y étais encore. Aussi j'eus pendant tout le
jour un mal de tête affreux.
J'eus pendant cette semaine une composition avec
Bruin. Sa versification commence à devenir beaucoup
plus aisée je crois qu'il aura beaucoup de talens
pour le genre satyrique. Il m'a lu le fameux
vers sur Kolf dont il avait
été en secret l'auteur un très joli vaudeville
sur le régie tabac et un morceau assez long contentant
le tableau du gehoorzaal à Felix après le concert où
les jeunes gens des deux sexes se réunissent alors
pour boire le punch.
Annales du Lundi
4ème séance chez l'oncle
Nous vîmes tous chez l'oncle pour le dîner
des choux qui préparés par Wijntje furent excellens.
Le premier sujet de discussion fut l'oraison funèbre
sur M. Hesselink. J. de Vos soutenait que ce
n'était pas un ouvrage supportable qu'il n'y avait
point d'éloquence de stile de goût. Le grand-papa avec
mes chers parens entrèrent en brèche pour le pauvre
ministre qui était encore foudroyé par Loyola.
Après l'assoupissement de ce différent il vint[?] un billet
pour le médecin et chacun crut que ce cher convive
nous abandonnerait quand il nous dit que ce n'était qu'une
invitation d'entendre une leçon du professeur Vrolick
sur les artères du ventre.
J. de Vos qui in fas et nefas ruit[?] déclina le talent
des deux illustres musiciens Boers et Brachthuizen.
On fit entrer Wijntje et le médecin à qui les dames avaient
promis un baiser à condition qu'il en donnerait un à
cette chaste vierge se leva après de vaines tentatives et
malgré la défence d'Ignace la planta contre le mur et
lui imprima un baiser doux et sonore.
Comme nous avions promis d'avoir un vers sur les
choux je lus un petit vaudeville qui en vérité ne
signifiait pas grand-chose quand le médecin tira
à son tour un papier de sa poche et se mit a déclamer
un vers où malheureusement les rimes courtes étaient
un peu trop employées. Il remercia l'oncle de son régal
et après avoir dit que l'année depuis la dernière fête
était révolue il annonça qu'il ferait à ce sujet une
proposition en vers mais il entendait ses chevaux
et devait partir. La dernière partie du vers fut fort applaudie.
On loua les idées mais on blâma la versification.
Après cela il se leva une dispute au sujet de l'histoire
de M. Vroom devenu suspect et devant signer tous
les jours son nom à la police pour avoir entendu
les propos de deux hommes qui marchaient devant
lui. Le grandp. déclama vivement contre cette
histoire.
Le soir je revins à la charge. Dyl. en attendant avait
raconté une foule de faits peu vraisemblables
qu'il y aurait une imposition sur les chauffe-pieds
que Maman serait élue dans la société maternelle
qu'on courrait risque de payer quelques florins en
faisant l'aumône à un mendiant. La chose la plus
intéressante qui arriva ce soir fut l'explication
plus précise que donna Dylius à sa proposition disant
qu'il proposerait l'alternative d'une partie d'hyver ou
d'été.
Le discours que nous tint hier au soir M. Koopmans fut très
joli il raconta entr'autres l'anecdote suivante:
On parlait dans une société de jeunes gens sur l'époque où l'on devrait se
repentir (bekeeren) et un des plus sérieux dit le dernier jour
de sa vie. On se récria sur l'inconhérence de ces mots.
Quand le ferez-vous donc lui dit un de la société. Aujourd'hui
car je ne puis jamais être assuré que je vive demain.
On a des lettres des orphelins engagés comme soldats
dans lesquelles ils se plaignent fort de leur situation.
On parle beaucoup de guerre.
Les prix des grains continuent encore à hausser
considérablement.
Février
Samedi 1er Février
Il s'est passé peu de fort remarquable dans le cours de
cette semaine. Mardi je fus à souper chez M.J. van
Heukelom qui selon l'assurance qu'il en avait donné
serait de la dernière familiarité. Mais ce fut bien autre
chose. Nous fûmes reçus dans une belle chambre ou
il y avait une quantité de personnes. J'eus ensuite le
bonheur de jouer avec Mll. van Halmael et Mr.J. de Lanoy
et j'eus le contentement de perdre mon argent par le
jeu misérable de quadrille à trois. La table était servie
avec luxe et abondance. J'étais encore à côté de cette
Mll. van Halmael (laide à faire peur) à qui je ne pus
arracher le mot. Cependant le discours s'anima au
dessert. M.B. van der Vliet avait fait venir sa guitare
et chanta plusieurs airs fort jolis. Il chanta aussi
des duos avec sa soeur. M.J. van heukelom récita
quelques couplets à l'honneur de la fête. On voulut
forcer M. van Halmael qui a le ton bien décidé à réciter
mais celui-là tint ferme et ce ne fut qu'à force de
prières qu'on put lui arracher un vers de Bilderdijk.
Je récitai le doucereux morceau qui finit mes Indiens
et M. van der Vliet un morceau tiré du mérite des
femmes par Legouvé et M.J. van Heukelom un
rôle dans la manière de Sterk. Enfin nous nous séparâ-
mes à 3 h.
J'avais annoncé cette semaine à Quicker sa clôture
définitive et à Ferguson sa suspension une fois par
semaine.
Mecredi mon grand-père m'annonça que M. Bosscha se
chargerait de m'initier dans la langue d'Homère.
Une pièce qu'on avait annoncée comme superbe intitulée
la bataille de Sontenor a été jouée quelquefois ce doit
être ce qu'on a joué de plus mauvais pendant quelques
années.
Les Français ont pris Valence.
Une chose qui a causé beaucoup de combustion dans
le genre commercial c'est la banqueroute des caissiers
Kerkhof Hobius et Chemet. On dit que le déficit est de plus
de 6 cent mille florins. Ce sont surtout des raffinadeurs
en sucre qui y perdent.
Cette semaine a offert un intérêt bien décidé pour plusieurs
personnes à causé du tirage de la conscription qui a eu
lieu. Dans l'un canton la proportion est beaucoup plus
favorable que dans l'autre. Le prix des remplaçans est de
ƒ 2 à ƒ 3000. On rapporte un joli trait du préfet. Ayant
demandé à quelqu'un ce qu'il y avait de nouveau celui-ci
dit que la conscription répandait la consternation
et la désolation partout. Oh, oh reprit-il ce sont là
mes plus beaux jours!!! Dicta digna terroris.
On raconte que l'impératrice veut se retirer dans un
monastère de jalousie parce que l'empereur a fait un enfant à
Madme. Montebella. Il ne faut pas voir de si près sur
cela.
On raconte que le roi de rome est un petit monstre
qu'il est tout tête.
Les grains sont encore montés cette semaine 127 H.
Norder 335.
Nous eûmes quelque chose à faire par l'ordre
qui nous reçûmes d'acheter 50 Lest de Colzad.
La noce aura lieu le soir et le récit en
aura lieu demain si nous vivons et sommes heureux.
L'avoine a aussi pris quelque faveur pendant le
cours de cette semaine.
Lundi 3 Février 1811
C'était samedi le jour qui était destiné pour la noce. Je fus
après dîner chez mon grand-papa pour conférer avec
M. Bosscha sur l'apprentissage du Grec un migraine le
retint chez lui. J'y vis le poème De aequalitate
hominum par De Bosch où se trouvent de beaux
morceaux et qui est précédé d'une très belle ode d'Oosterdijk.
Je me rendis ensuite chez mon oncle Rahusen où tout
était déjà en règle et où toutes les dames étaient rendues
bien parées. Après le Boston on se mit à table pour y
souper d'une quantité de mets dont l'énumération serait
fastidieuse. Au dessert je lus mon vers que j'avais
bien retrouché et dont j'avais retranché la moitié consistante
dans la peinture d'un bon mariage et d'un célibataire.
Après moi M. Lannoy récita un vers intitulé La victoriade
chant héroïque faisant allusion au nom de Victoire de
la fiancée. Nous apprîmes depuis qu'il avait le
même vers en hollandais en poche. On se sépara à 3 heures
et malgré toutes les délicatesses qu'on offrit je suis bien
aisé de n'avoir dans longtems une pareille fête.
Pour surcroît de malheur un fatal lendemain
m'appella encore hier. J'espère pouvoir travailler ou
lire un peu plus dans cette semaine.
Je fus hier encore à l'église chez mon grand-père. C'était
sur l'emprisonnement du christ. Il fit un exposé de
ce qui s'était passé et après cela quelques considérations
sur la conduite des Apôtres du Christ et de Judas.
À la bourse Samedi on a appris la faillite des frères
de Lange agioteurs, qui doit être considérable.
Littérature
Leven en Character van Hulshof door De Vos
J'ai lu avec plaisir cette esquisse de la vie d'un grand
homme et je gagerais bien que tout lecteur impartial
ne le trouvât bien préférable à celui de Koopmans. Le morceau
sur le fils de Hulshof est très touchant. Mon grand-père
exigea que je le lui lusse et il visa encore des
larmes d'attendrissement à des souvenirs si chers. Un
des ouvrages les plus beaux de Hulshof doit être son
discours où il combat l'optimisme ou le
système De Leibnitz et Wolf. Des étrangers et
entr'autres le célèbre Merian en ont reconnu et
publié le mérite.
Annales du Lundi
5e Séance
chez J. de Vos
La première partie du souper fut assez calme on laissa
raconter en paix à J. de Vos l'histoire du jeune meurtrier
de Bruxelles à J. Walré l'histoire de son bureau des bons
du Syndicat et des perquisitions de son frère pour être
placé et à Dylius et P. de Clercq l'histoire du
chien enragé de l'Overtoom et du valet de Mr. Steiger.
Au dessert D. ayant fait faire silence et dit qu'il allait
parler sérieusement avoua que des affaires domestiques
avec la famille Vollenhoven le forçaient de différer
son invitation jusqu'au départ de son contribernal. Nous
lui demandâmes son vers et il récita quelques fragmens
d'un entier qu'il avait pu construire. On applaudit cependant
à ses bonnes intentions. J. de Vos s'était érigé en président.
Il dit que l'assemblée était convaincue de la sincérité de
ses démonstrations et de la justesse de ses motifs, qu'elle
préférait la partie d'hyver à celle d'été. Ces motions
furent applaudie. On décréta de part et d'autre comme
à l'ordinaire qu'il n'y aurait pas de vers et que le souper
ne serait pas brillant. D. proposa de venir tous en
masquerade. Cette proposition fut rejetée.
Littérature
Esprit des Journaux
Il n'y a pas beaucoup de nouveautés.
L'Argonautique de Valerius Flacus trad. par Dureau de
Camalle
Hist. littéraire d'Italie par Guinguené on donne de
grands éloges à cet ouvrage.
Précis de la géographie universelle 3 v.
La lyre sacrée contenant des morceaux de Racine Rousseau
Racine le fils Le Franc de Pompignan les poèmes de
Sobre Ruth le jour des morts par Fontanes.
Lettres de Mad. de Pompadour 4 vol.
Dans les Théâtres
La mort d'Annibal trad. en 3 actes où on a remarqué
du génie mais qui n'a pas eu de succès.
Concisca ouvrage d'un Jésuite que l'on a voulu faire
regarder comme le modèle des deux gendres. Cette
pièce n'a pas eue beaucoup de succès.
Il y a aussi un trait d'un enfant en Amérique qui
a une aptitude singulière pour les calculs.
Parmi les hommes illustres morts l'année passée on compte
François Péron auteur du Voy. aux îles australes.
Marie Joseph Chénier
Esmenard
Nicolai auteur du voyage en Allemagne
Pallas
Parmi un de ces livres que le désir d'écrire ou de se
singulariser enfante, on peut compter les tribulations ou
misères de la vie humaine trad de l'Anglais. Ce n'est
qu'un compilation de vexations ou petits désagremens
qui peuvent vous arriver dans différentes occupations
de la vie et cela continue pendant deux gros volumes.
Pope's works 3 and 4
J'ai lu avec enthousiasme et admiration l'admirable
Essay on man qui est après les Géorgiques de Virgile
un des plus beaux ouvrages que je connais en ce
genre. Les moral épistles qui suivent et qui traitent
du charactère des femmes de l'usage des richesses et contiennent
aussi des remarques fort judicieuses et des portraits
fort piquans. Suivent des imitations d'Horace et des satires
de Donne qui ne m'ont pas fort plus. Aussi il faut convenir
que la satire dans une langue étrangère est difficile
à comprendre parce qu'on fait toujours allusion
à des choses que le lecteur ignore. Ce défaut est encore
plus marqué dans la dunciade. Aussi ne l'ai je pas
lue puisqu'elle ne m'offrait pas assez d'intérêt.
Mecredi 6 Février
Hier les grains étaient encore montés 127 H. N. D. 402
121 H. À[?] 300 gd.
On vient de publier le catalogue de Monsr. De Bosch
et ceci m'a donné l'idée de mettre ici quelques
anecdotes sur lui.
Il avait été destiné à devenir apothicaire. Mais telle
était son goût pour la littérature latine qu'il était
occupé à piler des drogues avec un Nepos devant
lui.
Après un certain poste de la chambre des comptes étant
libre son père l'ambitionna. Il alla faire une visite
à son oncle Bernardus de Bosch pour le prier d'employer
son crédit près du bourguemaître. Celui-ci lui
répondit[?] brusquement qu'il ne voulait point mendier
des postes pour sa famille. Le jeune homme [onl.]
l'idée d'obtenir lui-même ce poste. Mais son oncle lui dit
Ni toi ni ton frère, vous ne l'aurez. Piqué il se
rend à l'instant chez le bourguemaître et lui fait
la demande. La femme de celle-ci qui dirigeait toutes
les affaires s'était mêlée au discours le postulant
dit Madame je suis venu pour parler à Mr. le
Bourguemaître et non à vous. Il obtient le poste mais
le pis était qu'il était complèttement ignorant dans
l'Arithmétique qu'il apprit cependant en très peu de temps. Je tiens
ces détails de lui-même lorsque je fus avec lui chez
mon grand-père de Vos et que j'expliquai devant lui
un morceau de Sloris[?] dont il fut fort content.
Je n'ai jamais vu d'un homme si entiché de
son grec et de son latin. Ses auteurs favoris étaient
Homère Terence et Nepos. Il poussait l'estime
pour les anciens jusqu'à l'adoration. Dans le discours
que j'eus alors avec lui le mot on dit m'était échappé.
Mr. De Bosch me serra la main et me dit Mon ami
applique-toi à comprendre un auteur latin et quand
tu sais cela ne t'embarasse pas de tout ce que les
hommes peuvent dire de toi.
Une autre fois je le recontrais à Rupelmonde. J'étais encore
fort petit et les vers de Van Alphen faisaient mes délices.
On en parla tandis que notre de Bosch vantait Luiken.
Je me mis en posture et je récitai avec toute l'onction
dont j'étais capable un vers fort long de Van Alphen.
J'avais cru recevoir bien des applaudissemens et je
tombai de bien haut quand De Bosch me dit en me
montrant quelques vers sous une estampe représentant
un enfant qui prie et me dit Mon ami si tu avais
appris ces six lignes tu en aurais plus profité
que de tout ce que tu as récité. Il dit de la chambre
à coucher de Rupelmonde qui regarde sur le Vecht
que c'est là qu'il désirait faire un vers. Après dîner
il déserta la compagnie qui prenait le thé dans
le Tuinkamer et allait chez les servantes qui
étaient sur le steiger disant qu'il ne voulait pas
se laisser enfermer.
Samedi 8 Février
C'est une chose surprenante que l'on s'accoutume
autant aux circonstances malheureuses qu'heureuses.
Lors de la réunion de notre pays avec les Français il
paraissait que nous serions entièrement anéantis. Un
farouche désespoir régnait sur tous les visages. Mon grand-
père même avait dit Ce sera bien assez si nous conservons
seulement du pain bis. Toutes mes réflexions pour atténuer
l'impression profonde de ses désastres était traité d'en-
fantillage. Tous les maux qu'on ne voyait qu'en perspective
sont arrivés. Et cependant tout retombe dans une apathie
et indifférence qu'on ne puit expliquer. La régie et les
droits réunis ont causé cependant encore quelques
milliers de plaintes. Je ne doute pas que le peuple ne
fut prêt à se soulever. Il est toujours avide de
changemens. Je veux donner cependant ici quelques détails
sur les deux émeutes de l'année passée.
C'était sur notre canal chez Mr. ... qu'on faisait la
visitation par rapport aux denrées coloniales. Déjà le
matin on s'était apperçu de quelques mouvemens. Parmi
les douaniers qui faisaient la visite il y avait un hollandais
le fils d'un boulanger, devenu douanier après avoir
trahi son père en indiquant les denrées qu'il avait
cachées. Ceci lui avait surtout attiré la haine du peuple.
Aussi lorsqu'il rentra à cette maison dont il était
sorti pour un moment un sergent dut lui faire
place avec son épée. Le peuple était resté autour de
la maison dans une attitude menaçante jusqu'à ce
qu'enfin environ à 2 heures un douanier en habits particuliers
chargea sans qu'il fut attaqué son fusil et tira
(par méprise soit seulement pour effrayer) et un homme
innocent qui venait seulement pour voir ce qui en
était fut tué sur le pont.
L'autre émeute aurait pu devenir plus dangereuse. Elle
était occasionnée par un transport de conscrits trop
faiblement gardé. On les dispersa et on délivra les
conscrits ceci arriva près du Jodenhoek. Cependant
les soldats s'étant avancés on tira sur le peuple et
quelques-uns furent tués ou blessés. Je sais quelqu'un
de mes connaissances qui fut au Jodenhoek au moment
de cette émeute et qui m'assura qu'il y régnait la confusion
la plus horrible. Près du Nieuwmarkt les Français
furent aussi battus. Le Haarlemmer schuit où
se trouvaint aussi des conscrits fut attaqué par des
poissardes et l'on coupa la corde. Sur le Haarlemmerdijk
un commissaire de police fut maltraité. Il régnait une
consternation extrême ce jour là en ville. C'était un
Jeudi. Il arriva cependant comme dans toutes les
séditions qui n'ont pas de but déterminé et qui ne
sont point faits à l'instigation de quelque grand c.a.d.
les attroupemens se dispersèrent enfin. La suite cependant
en fut plus malheureuse. De tous ceux qui avaient
été arrêtés trois furent condamnés à mort. Il y avait
parmi eux un mauvais sujet nommé Piet met de Kruk
qui avait déjà été l'instigateur de séditions dans le
tems du prince d'Orange. Je n'ai point entendu de
particularités touchant le second, mais le troisième
était un jeune homme dont le sort fatal intéressa
toute la ville. Il était garçon-barbier et d'une conduite
irréprochable. Son accusateur était un sergent "diender"
qui était reconnu pour un coquin, avec un conscrit
à ce que je crois qui cependant peu après rétracta
son témoignage. Convaincu de son innocence il était
fort gai et ne s'attendait à rien moins qu'à ce que
lui devait arriver. Le jeune Mr. Van der Pol était son
avocat. Mais celui-ci fut interrompu plusieurs fois dans
sa défense avec la dernière brutalité. De son côté le garçon-
barbier avait produit des témoins qui assuraient où il
avait été pendant ce matin fatal. Il n'y manquait que
quelques minutes et si la supposition de l'accusateur
eut été vraie il auraut du dans ces minutes courir
d'un bout de la ville à l'autre y prendre une pierre
la lancer courir à toutes jambes vers celui
qui attendait ses services et être calme comme à
l'ordinaire. Le témoignage de sa vie et de ses moeurs
n'effectua rien. Il dut mourir. Son camarade qui
rasait mon oncle de Vos le parla encore quelques
heures avant sa mort et lui dit au nom de Dieu
Jean dites-moi êtes-vous coupable. Il lui répondit Je
dois mourir dans peu d'heures et pourquoi voudrais
je donc dire un mensonge. Je témoigne devant Dieu
et ma conscience que je suis innocent. Les soldats qui
devaient tirer sur lui étaient si troublés que
la première fois[?] manqua de le tuer et qu'ils changèrent pour la
seconde fois et le malheureux martyr fut
renversé dans son sang. Je parlai sur cette affaire
Mr. Van Hall qui était presque malade de l'émotion
que lui avait causé cette mort. On a su depuis
d'une femme qui avait entendu parler dans la maison de force: quelques
officiers membres du conseil,
deux ou trois jours avant le jugement et qu'alors ils s'étaient
dits ceux-là mourriront. O nefas dignus Erinnis.
Le suivant exemple démontre quelle force les
passions peuvent déjà avoir dans un enfant. À Bruxel
sur un bal d'enfants un garçon de 14 ans selon
quelques-uns fils d'un boucher engage une demoiselle
pour danser avec lui. Elle lui répond Je ne danse pas
avec le fils d'un boucher. Il répond Je me vengerai
avant de sortir de la salle. Il court chez lui, y prend un
couteau revient au bal et tue par méprise une
autre fille l'unique espoir de ses parens. Dans ses
interrogations il n'a témoigné point de remords s'écria
qu'il fut fâché de s'être mépris dans sa vengeance.
Cette semaine-ci on donnerait ici le spectacle
d'un ventriloque qui consisterait en trois pièces. On
attendit bien longtems après la première lorsqu'enfin
au lever de la toile un suppôt du ventriloque entra
en scène et assura le public qu'on n'avait plus
rien à attendre puisque M. le ventriloque venait
d'être arrêté. Tout le monde courut hors de la salle et
on vit M. le ventriloque emmené par deux gens de
Justice. Quelqu'un dont il avait acheté pour une
certaine somme s'était rendu au spectacle et son
argent ne lui pouvant pas être remboursé du
montant de la recette il avait fait arrêter notre rire[?]
en montant la plus grande impolitesse envers l'honorable
public qui se vit mené par le nez comme dans
la fable de Hanswurst par Gellert.
Voilà les prix des grains encore montés
120. 121 H. Over Rogge 304. 308 et même 310. 312 gd.
124 H. vr. J. 392 gd.
97 H. N.W.G. 170 gd.
87 H. 96 gd.
Il faut pourtant enfin que cela finisse ou je crains
fort que M. Napoléon ne saisisse un prétexte
qui serait peut-être trop juste, pour mettre fin
à cette montée exorbitante et pour s'arracher
le suprématie aussi dans cette branche de
commerce.
Lundi 10 Février 1811 [1812]
Je fus samedi au théâtre Français où je m'amusais fort
bien quoiqu'en effet il y eut une grande quantité de
nos nouveaux frères au parterre.
La jeunesse de Henri 5 en 8 actes
Henry 5 infidèle à son épouse s'amuse à toutes sortes d'expéditions
nocturnes. Le comte de Rochester son ami et son favori
promet de le corriger lorsque la main de Lady clara en
sera le prix. Ils vont à une taverne déguisés en matelots
pour voir la nièce de l'aubergiste ancien corsaire dont
un des pages est devenu amoureux et qu'il visite sous le
nom de Georgini[?] maître Italien. Dans le discours on parle
de Rochester et le bon aubergiste dit que sa nièce est en
même tems nièce de Rochester qui ne s'intéresse pas à son
sort. Le comte part et laisse le prince dans l'embarras
qui ne peut pas payer. On le prend pour un frippon. Une montre
qu'il donne pour gage et qu'on reconnaît appartenant
à la couronne confirme cette supposition. Le prince furieux
contre Rochester et au désespoir se trouve enfermé et échappe
enfin par une fenêtre et arrive au palais après bien des
fatigues. Lady Clara le surprend dans son bel équipage. Elle
introduit chez lui le capitaine et sa belle nièce qui viennent
rapporter la montre et qui sont fort étonnés de
reconnaître à la fin leurs deux frippons. Rochester reçoit
sa grâce avec la main de Lady Clara et le page celle
de la jeune fille. Le prince demande à tous le plus grand
secret et promet de se corriger. Cette pièce est fort amusante surtout dans les derniers actes.
Les rôles étaient fort bien remplies. La Gardère
était le prince Garnier le comte de Rochester. Morel le
vieux capitaine Mad. Dauteuil Lady Clara Mlle. Dangeville
la jeune fille. Ces acteurs sont vraiment des artistes
très estimables surtout Garnier qui sait se plier à tous
les rôles.
Champagnac et Surette Vaudeville par Charet Champagne
est devenu riche veut afficher un luxe ruineux et [onl.]
toutes sortes de maîtres. Surette jeune fille qu'il a
autrefois aimée paraît chez lui sous divers déguisemens
enfin tout se découvrent et ils se marient. Il y a de
fort jolis couplets.
Les bourgeoises de qualité en 13 actes par Dancourt
C'est une critique fort gaie de ces bourgeoises qui
prétendaient à des titres ou à un mariage avec des
nobles. L'intrigue n'en signifie pas grand chose
mais les caractères sont fort plaisans. Mad. Dangeville
remplissait supérieurement bien le rôle d'une
femme qui voulait à toute force être comtesse.
Hier chez Coopmans sur St. Pierre. C'était un fort
beau sermon.
Mardi 11 Février
Annales du Lundi
Il ne se passa pas beaucoup. Les esprits étaient assez calmes.
J. d. V. soutint qu'on vendrait de ses ouvrages chez M. de Bosch. Le
grand-père reprocha à D. d'avoir oublié son grec. Je lus
une pièce d'un anonyme qui ne réussit pas et ensuite ma
satire sur Amsterdam.
Je dois encore revenir sur notre marché de grains où
tout monte de plus en plus. Même dans des articles
dont on est encore approvisionné tels que le blé noir et l'avoine.
Il y a des personnes qui veulent absolument employer leur
argent en grains et tous ceux qui par la régie ont perdus leurs
affaires se sont saisi avidemment de cette occasion pour
remplacer leurs profits. Aussi tout va-t-il avec une fureur
que les courtiers seuls qui y font leur profit peuvent
comprendre. Cependant il y a plusieurs personnes qui
songent pourtant à faire leur retraite. Les prix de tout
étaient montés hier.
127 H. Nassau Dietse |
430 gd. |
120 H. Brab: Rogge |
315 gd. |
101 H. W.G. |
185 gd. |
86 H. Hav. | 106 gd. |
101 H. Am: Boek. |
45 L.[?] |
Parmi les personnes dont les causes doivent être portées
devant le Jury est celle d'une femme de Wijk te Duurstede.
Celle-ci avait appris par le moyen d'une élève le contenu d'un
testament de sa tante qui reposait sous son patron par lequel
son mari aurait un héritage de ƒ 5000. Pour s'en assurer plus
vite elle empoisonne sa tante mais soit qu'elle
conservât l'amitié pour la élève ou qu'elle voulait s'approprier
encore plus directement l'argent elle n'imagina rien de
mieux que d'empoisonner son mari. On dit qu'elle a fait
périr de la même manière son père. Quoiqu'il en soit elle
a été arrêtée avec le clerc et une servante qui la secourut
dans ses complots atrocés. M. Kramp qui l'avait vue souvent
dans sa prison à la maison de force dit qu'elle ne donnait
pas des preuves de la moindre sensibilité et que même
l'idée de périr par la guillotine ne produisait aucune
impression sur elle. Elle a avoué le meurtre de sa tante
et de son mari mais elle nie avec obstination celui de son
père surtout aussi puis qu'en ce cas-là la peine est plus grave
et qu'avant la guillotine on a la main droite coupée.
Mecredi
Hulshof Lijkrede op Klaas de Vries
Voilà une excellente oraison funèbre: Quelle simplicité
quelle éloquence. Klaas de Vries était un ministre mennonite
homme instruit et qui attirait surtout nombre de gens
à sa prédication par la simplicité et la naïveté et la
facilité de ses sermons. Son caractère fut excellent. Et
hulshoff lui a érigé un monument qui durera autant
qu'on lira notre langue. Comme une preuve du style toujours
beau et souvent sublime de l'auteur peut servir la
figure suivante.
Deze waarheid zal bestaan, zelfs wanneer het bezielde stof
dat dit gebouw vervuld in lijken zal veranderd zijn.
Il suit plusieurs vers qui ne signifient pas grand chose.
Celui de De Bosch est un de ses premiers. Celui de W. Kops
littérateur savant mais qui ne prétendait
nullement à la poésie finit par ce vers.
De Vries was Hulshofs lof de lofspraak Hulshof waardig.
Jeudi 13 Février
Voilà que hier une partie de de la contre-révolution
a eu lieu sur notre marché sur la nouvelle qu'on
avait défendu dans la belgique la distillation des
liqueurs fortes et la crainte que ceci aurait pareillement
lieu à Schiedam. Le seigle fut vendu 13 fl. plus bas.
On a ranimé le propos de l'amalgame des
cultes et l'on dit que le régisseur est déjà en ville.
Mélanges
Un des hommes les plus singuliers que notre patrie ait
produit dans le dernier temps est sans doute Haafner.
On en peut juger par ses ouvrages. Cependant on a accusé
sa véracité et ses avantures romanesques ainsi que
son style poétique pouvaient naturellement faire
naître cette idée. Cependant plusieurs personnes qui
l'ont connues ont assuré que c'était un homme
absolument sans prétention ou enflure. Mon grand-
père de Vos l'a connu et était charmé de son esprit. Deux
choses dans son voyage avaient entr'autres été révoqués
en doute. C'était son séjour dans la caverne et
la morsure d'un serpent. À l'égard du premier article
il lui dit venez chez moi et je vous montrerai les
lettres des Anglais qui ont visité cette caverne
après moi et à l'égard du second il montra
quelques doits encore roidis par la cicatrice de
cette terrible morsure.
Dryden works v. 1 & 2
D'après le plaisir que Pope en général m'avait
causé à la lecture j'avais espéré que Dryden
compté parmi les plus fameux poètes anglais ne
m'en ferait pas moins, mais ces deux volumes m'ont
fort trompé dans mon attente.
Le premier volume commence par un éloge de Cromwel
rempli d'un bout à l'autre des flagorneries les
plus basses. Suit un poème sur la restauration de
Charles 2 où celui-ci est élevé
jusqu'aux cieux. Ceci ne donne pas une idée
avantageuse de l'auteur.
Vient ensuite un poème que l'auteur se plaît d'appeler
historical et dans lequel il célèbre l'année 1666 à
laquelle il donne le nom d'Annus mirabilis. Il fait
là l'apothéose de la guerre avec la Hollande et la
description de toutes les batailles navales mais il
parle de nos ancêtres avec le mépris le plus révoltant
et selon lui la bataille de 4 jours fut gagnée par
les Anglais. Il y a de beaux morceaux sur l'incendie
de Londres mais les flatteries de Charles 2 dans cet
ouvrage ainsi que dans deux poèmes qui suivent
sont insupportables. C'était sans doute à propos de
ce poème que Loots a dit.
Grijp Dryden nu de lier gesnaard om laf te vleijen
Zing kruipend voor uw vorst gelijk weleer gij deed
De glorie van zijn volk daar 't felle slachting leed
Un poème sur la révolte d'Absalon. Tout est ici allégo-
rique. Charles 2 est David Le duc de Monmouth Absalon
Shaftsbury Achitophel etc. Je trouve ce poème froid
à glacer.
Je veux bien convenir que je ne comprend niThe
medal ni Mac flecnoe The layman's faith qui se rapportent
tous deux aux circonstances aussi que long
poème au commencement du 2 vol. intitulé
The panther and the hind qui est tout à fait
allégorique sur les disputes et les cabales de la
cour.
Quelques épîtres sur différens sujets où il
y a beaucoup d'esprit et de poésie.
Une infinité de Prologues qui sont
diablement ennuyeux à lire.
Quelques élégies parmi lesquelles il y en a
d'assez jolies.
Vide T. 12 No. 79 80 81.
Point de nouvelles politiques rien exceptés des
événemens qui arrivent de tems en tems et qui
vous forcent à garder la plus grande circonspection
en rue puisqu'on arrête les gens pour les moindres
bagatelles. On a même pour tirer encore quelques florins
fait revivre l'affaire des passeports et arrêté force
gens qui n'en avaient point.
Littérature
Shakespear. Henri 6 2 & 3 Richard 3 Henry 8
Plus je lis les pièces de Shakespear plus je m'amuse
et plus je trouve quelle profonde connaissance il avait
du coeur humain. Quoique j'aie lu dans un ouvrage
Anglais qu'on devait ranger les trois parties de Henry 6
parmi les moindres ouvrages de Shakespear je ne suis
pas de cet avis et j'y trouve de fort beaux morceaux.
Richard 3 est sans doute supérieur son caractère
est supérieurement bien peint et il s'y trouve
des scènes superbes.
Henry 8 est encore plus historique. On voit que
l'on est dans un tems plus civilisé, mais l'art avec
lequel certaines parties sont conduites est fort beau.
Le caractère de cette bonne Cathérine et de Wolsey
sont fort bien peints ainsi que les menées des
courtisans.
J. Bruin m'a lu hier une pièce en un acte qu'il a
intitulée La métromanie et dont l'idée n'est pas
mal choisie mais un peu forcée.
Mecredi 19 Février
Annales du Lundi chez P. d. C.
C'est par là que je veux commencer. C. Walré et D. Rahusen
y étaient aussi l'on fut fort gai et fit toutes sortes de
folies. Dylius était parfaitement en bonne humeur
il osa gager avec mon grand-père un régal de glace qu'une certaine
expression (wie die een toren gaat bouwen zit niet eerst
neder en overrekent de kosten) se trouvait dans le vieux testa-
ment au lieu qu'elle était dans le nouveau. Ainsi défait
on lui conseilla de ne plus exposer ses connaissances
théologiques mais bientôt il y retomba en disant qu'un
texte (de vliegen doen de zalve des Apothekers stinken
en opwellen) se trouvait dans les proverbes où l'ecclésiaste.
Mon grand-père gagea que ce mot ne s'y trouverait point.
On fit chercher la bible et Dylius fut vainqueur.
Il fut alors bien glorieux de sa victoire. Il raconta
premièrement que quelques dames s'étaient trouvés
mal de l'usage d'une espèce de café artificiel ainsi que le
conte qu'on avait fait d'une femme qui avait mis au monde
un enfant moitié loup et moitié ours. Il avait été voir
cette femme à l'hôpital et lui avait trouvé le ventre
d'une circonférence fort étendue mais elle n'avait encore
rien produit.
On parla ensuite du chant. J. de Vos chanta l'air de
Pierlala à la manière Italienne et Dylius chanta
plusieurs airs du mariage secret mais ce n'était que
Parlando. On lui fit ensuite imiter Dessaur. On
fut très gai mais un rhume que j'avais me
gâta le plaisir de la soirée.
J'ai été beaucoup occupé des préparatifs de la fête chez
Dylius.
Parmi les mesures paternelles de S.M. pour le bonheur des
Amsterdammois on peut compter le décret qui lève la garde
soldée parmi la réserve des deux conscriptions. On a déjà donné
ƒ 2200 pour un remplaçant dans cette garde ce que est en grande
partie occasionné par la crainte que ces gardes ne soient
bientôt employés autrepart car après de telles mesures
on doit se défier.
Au marché la stagnation causée par la crainte qu'on rétracte
la permission de distiller des liqueurs fortes a cessé et
les prix sont montés considérablement. Hier un seul
courtier a vendu 900 L. 120 H. R. 330 gd. Ces prix sont
énormes et peut-être ils deviendront bientôt plus
énormes encore.
Une pièce qu'on a donné avec assez de succès au théâtre
Hollandais est le moulin d'Auerstad dont le sujet est tiré
d'une anecdote arrivée dans le tems des dernières guerres
des français. Il y a entr'autres une scène où l'on voit
un champ de bataille semé de cadavres c'est une idée digne
de nos Racines modernes qui pensent faire oublier la
faiblesse de leur exécution par la pompe des décorations
et du spectacle. O lepidum caput.
Le grand-père de Vos fit un beau sermon sur le désespoir
de Judas mais sa voix et sa déclamation furent si
faibles que peu de personnes pouvaient l'entendre
et encore moins le comprendre.
Littérature
Dryden T. 3. Cowley. Denham
Partout j'ai lu que M. Dryden avait été un des poètes les
plus féconds de son pays, et voici encore un volume qui
ne contient que des imitations. Je dois aussi observer que
plus je compare la langue Poétique de l'Angleterre avec
la nôtre et la française je trouve dans cette dernière
beaucoup plus de force et dans l'autre beaucoup plus
d'élégance que chez nos confrères insulaires. Mais passons
à Dryden.
Palamon et Arcite conte de Chaucer qu'on pourrait tout
aussi bien appeller un poème à cause de la noblesse du
style et de l'action voici le sujet.
Thesée est excité par les veuves des sept chefs
morts devant Thèbes à assiéger cette ville. Il la prend et fait entr'autres
prisonniers Palamon et Arcite tous deux princes du sang
liés par la plus étroite amitié. Cependant l'amour qu'ils
conçoivent tous deux dans leur prison pour Emilie soeur
du roi d'Athènes met la discorde entr'eux. Arcite est relâché
à la prière de Périthous sous condition expresse de ne
jamais paraître sur le territoire d'Athènes. Il tombe malade
d'amour et déjà l'un pied dans la tombe se déguise part
pour Athènes et occupe bientôt une place distinguée
à la cour. Un jour il se plaint dans un lieu écarté des
obstacles qu'éprouve son amour. Palamon son rival
échappé du prison se trouve caché dans ces lieux et le
reconnaît. Ils prennent la résolution de disputer la
belle en champ clos. Mais au plus fort du combat Thesée
arrive avec sa suite on lui conte l'affaire. Il veut premièrement
les condamner à mort mais ensuite il leur donne la
liberté et exige que dans un an ils viennent reprendre
le combat chacun accompagné de cent chevaliers. Le roi
fait en attendant construire un cirque somptueux
et fait tout préparer pour rendre cette fête brillante.
Les champions arrivent. Arcite implore la faveur de
Mars et l'autre celle de Vénus. Le vieux Saturne décide
que le favori de Mars sera vainqueur et que celui
de Venus aura la belle. Palemon perd le combat mais
Arcite victorieux fait une chute qui lui coûte la
vie et Palemon voit enfin son amour couronné.
Tel est le sujet de ce poème intéressant où il
se trouve de fort belles descriptions.
Quelques fables d'après Ovide et le 1er livre de L'illiade.
Sigismonda et Guiscardo de Boccace
La belle Sigismonda est fille de Tancrède prince de
Salerne qui la chérit tendrement. Mais importée par
l'amour elle contracte un mariage secret avec un
simple gentilhomme nommé Guiscardo. Son père
s'en apperçoit et après avoir vainement tenté de
persuader sa fille il fait périr son amant et lui
envoie son coeur. À cette effroyable vue Sigismonda
s'empoisonne.
Ce conte est assez joli mais je trouve que Sigismonda
fait un peu trop la raisonneuse.
Cowley
Voilà encore un poète anglais qui ne me plaît pas trop.
Il n'y a aussi ici qu'une trentaine de vers de lui. Cela
s'appelle je crois de la poésie légère mais en ce genre-là
nous avons de meilleurs poètes.
Parmi ce petit nombre il y a encore des imitationes d'Anacreon,
de Catulle, d'Horace et de Martial. Je me suis accoutumé
une fois pour toutes de ne pas lire ces éternelles
imitations des poètes latins.
Puis viennent encore des vers sur la mort d'un tel et
d'un tel qui quelques jolis qu'ils puissent être
ne vous intéressent jamais beaucoup.
Les morceaux les plus jolis de cette collection sont
selon moi The complaint et surtout la belle ode
To Light.
Denham
Voilà encore un joli poète. On trouve ici un petit
poème champêtre intitulé Cooper's hill. J'ai découvert
entr'autres ici un larcin de M. Delille qui a traduit
presque mot pour mot le morceau sur la chasse
de Denham. C'est un peu trop fort. Il s'est bien gardé
de joindre ce morceau aux autres descriptions de
la chasse qu'il place dans ses notes.
The progress of learning quoique moindre est aussi
un joli poème.
Puis encore quelques pièces fugitives parmi lesquelles
The petition of the poets to the house of commons et
Friendship against love and marriage m'ont le
plus plu.
La traduction du 2 livre de l'Énéide.
V. der Palm Bijbel voor de Jeugd vol. 1
V. der Palm ne peut rien écrire qui soit mauvais. C'est
incontestable. On remarque dans cet ouvrage qui contient
la paraphrase des premiers chapitres de la Génèse jusqu'à
Noé la même clarté d'idées et l'éloquence qui brille dans
ses ouvrages. Mais l'auteur ne se serait-il pas laissé
entraîner par son imagination brillante pour
former des hypothèses plus convenables dans un ouvrage
à Systemis que dans un livre destiné à donner à des
enfans la notion de la bible. On peut remarquer ceci
surtout dans l'explication qu'il donne de l'histoire
du serpent.
Bilderdijk Fingal
J'ai relu avec beaucoup de plaisir cet ouvrage du
premier de nos poètes. Il est vrai que les redondances
continuelles d'Ossian et les mêmes images fatiguent
mais c'est aussi une versification telle que celle de
Bilderdijk qui seule peut les faire excuser.
Kuthullijn vice-roi de Kormak dans Erin (Irlande)
est attaqué par Zwaran roi de Lochlin (Norvège). Il doit
faire une retraite mais Fingal roi de Morven (Écosse)
venant au secours de ses alliés défait Zwaran à son
tour le fait prisonnier et le force à la paix.
Au reste comme le dit Bilderdijk avec vérité on ne peut
pas appeller ceci un poème épique ce ne sont que des
chants héroïques. Aussi ces chants sont-ils remplis
de toute espèce d'épisodes et d'aventures de toutes
sortes de Héros qui sont récités par les bardes lorsqu'ils
doivent fêter par leurs chants les repas de leurs
rois.
M. Koopmans a fait cette semaine à Felix un discours
sur le professeur Hesselink comme Philosophe
Physicien et Mathématicien qui a été fort goûté.
Bilderdijk a récité hier un vers sur le monde des
esprits mais l'élévation de son sujet joint à
extrême faiblesse de son organe a fait que ses
accens n'ont pas produit beaucoup d'effet sur
les âmes de la plupart de ses auditeurs.
Le seigle était monté jusqu'à 120 H. 346 gd. mais
la nouvelle des restrictions qu'on imposerait sur
la liberté de la distillation des liqueurs fortes en
a fait baisser le prix de 10 gd.
Mardi 25 Février 1812
Encore tout rempli des plaisirs de la veille je n'en puis
rien imaginer de mieux que de coucher au plus vite
quelque chose sur le papier.
Fête de Dylius
Nous nous assemblâmes tous après 6 heures en différens
costumes. Mon papa était ministre ma mère sa femme
C. Walré une paysanne dans le rôle de Kaatje dans la
partie de chasse de Henri 4 et P. de Cl. portefaix C. d. C. paysanne
allemande C. de Vos frisonne et son mari Paysan. Quant
à moi j'étais paysan ou garde comme on voulait m'appeller.
Dylius était tout surpris de nos costumes. Il vit mon papa au
bout de l'escalier et se mit toute de suite au fait en
disant Dag professor Paradijs. Nous vîmes qu'il s'était
fait beaucoup de changemens dans la chambre. Van Huissen
était disparu le tableau de Rembrand avait remplacé
Boerhave. On voyait Walacus et deux portraits
anglais etc...! Bientôt le médecin qui était disparu
revint dans un costume superbe de chambellan rouge
brodé en or. Nous en fûmes ravis et lui fîmes
remarquer qu'il n'y manquait rien que des boucles d'or
qui furent aussi bientôt ajoutées. Chacun enfantait
mille propos joyeux qui se rapportaient à son déguisement.
Les deux vieux pères ne tarissaient pas Leurs ris.
Enfin l'oncle lut une espèce de sermon en vers sur
la médecine avec une quantité de mots Arabes qu'il
avait tiré d'un ouvrage de Pater Abraham. C. Walré lut
vers composé par son père et dont un livre de [onl.]
intitulé Nut der Soberheijdt faisait l'argument. Après
cela on fit une excursion à la chambre à coucher où on
trouva tout le cabinet joliment arrangé dans une
fort jolie armoire vitrée. Il nous montra différentes
curiosités qui excitaient aussi la curiosité surtout
celle des dames. Après que tout eut été admiré à
loisir on proposa une partie de cartes et lorsqu'elle
fut terminée il nous invita au souper. Les deux
battans s'ouvrirent et nous ne vîmes non seulement
tous les dessins marqués de notre ancienne bien-
veillance encadrés, mais aussi une lampe austriche.
Le souper fut splendide. Nous eûmes de la biche, du dindon de la soupe
de la gelée du brochet du saumon, des légumes une tourte
des pâtés à la viande de la gelée de pommes de chêne enfin
toutes sortes de délicatesses. On apporta le dessert mais
nous attendîmes longtems après la pièce de milieu
et bientôt on vit arriver le mont Parnasse où si
se promenaient toutes les muses. Il y avait des vers
allégoriques et entr'autres un vers
d'anniversaire sur C. Walré par J. de Vos.
C. Walré chanta des couplets fort joli composés par son père.
Mon oncle de vos et moi nous sortîmes pour nous
habiller et après avoir pris quelques morceaux de
l'excellente glace aux pêches nous jouâmes notre dialogue.
Le parnasse s'étant levé il en avait pour sortir un ballon
avec divers hommes dans un petit bateau portant
des devises en l'honneur de l'amitié. Bientôt la
glace disparut et on vit paraître un tour de
friandises et de confitures. Les dames remplirent
leurs cornets de papier de toutes les jolies choses
qu'il y avait entr'autres des nides[?] de [onl.]. Bien-
tôt nous découvrîmes une composition allégorique
où Dyl. avait voulu représenter toute la famille
sur le parnasse en poupées avec un
vers allégorique. Enfin on demanda l'auteur et
Dylius parut. Cette fête avait été charmante. Le
vieux jean avait servi en bonnet de nuit et
le jeune jan en femme car le médecin lui
avait pris son bel habit de livrée. On proposa l'invitation
de F. v. Heukelom pour se rendre là après deux lundis qui fut acceptée.
Jeudi 27 Février 1812
Dans longtems je n'ai pas parlé de nouvelles politiques
et en effet j'en sais bien peu. La circulation ordinaire
des nouvelles et tout respire un calme plus dangereux peut-
être que la tempête. On dit que toutes les lettres destinées
pour la Suède sont arrêtées à Hambourg.
J'ai renvoyé le maître alllemand le grand Quicher. J'en ai vu
jamais homme si flegmatique et si sec. Dans les derniers
tems il entrait dans la chambre avec ces mots Guten Abend
Herr Du Clercq. Wie befinden Eure Papa und Mama.
Il corrigeait machinalement qu'une traduction puis
Haben Sie nun kein Feder? Il tirait un tome
des comédies de Kotzebue de sa poche. Je lisais. Il me
reprenait deux ou trois fois pendant la lecture et proférait
quelques acclamations quand les acteurs se disaient des
insolences comme de Ach Herr-je Wer sagt das. Il avait
encore deux phrases [onl. Gotisch]
das Getreide noch nimmer. Puis quelques minutes avant
huit heures il saississait son livre disait Wollen wir
nur aufhören et sortait. C'était toujours le même manège.
C'était un bon homme et qui savait bien les principes
de sa langue et voilà tout. Il donnait des leçons
en anglais et en français. Étant occupé un jour
lorsqu'il vint à lire dans un volume des british
poets je lui en montrai le texte et lui demanda
s'il connaissait cet ouvrage. Il jeta les yeux sur le mot
Edinburgh mot imprimé au bas de la page pour
notifier le lieu de l'impression et dit aussitôt Ach
ja der Edinburgh ist ein groszer Mann der hat viele
schöne Bücher geschrieben. Un grand défaut qu'il avait
était sa curiosité qu'il fit violemment agir dans
ses premières leçons mais il s'en abstint enfin lorsqu'il
vit que je n'avais aucun plaisir à répondre à ces
questions indiscrètes.
En Anglais je traduis De indianen in Engeland et je lis
The life of King John de Shakespeare. M. Ferguson me
plaît beaucoup. C'est un homme qui a beaucoup plus
de connaissances qu'on le dirait supercifiellement.
En Latin Pline et Tacite. M. Tissot vient de perdre
sa femme. Cette perte l'aflige vivement et le contrarie
fort puisque non seulement il se voit forcé de soigner
les détails du ménage mais aussi de laisser ses
enfans seuls chez lui.
J'en suis au Grec avec M. Bosscha. C'est un homme qui
me plaît fort quoiqu'il ne soit pas entièrement libre
de la rouille de pédantisme dont aucun maître d'école
ni recteur ne peut se préserver. Nous en sommes main-
tenant aux Aristus et en général aux verbes. Ce
sont ces contructions que je trouve fort difficiles dans
le grec.
Le dessin va assez bien. Je n'y deviendrai cependant jamais
un fénix. D'après le conseil de mon oncle je suis retombé
au milieu des têtes des mains et des pieds.
La catéchisation continue aussi encore. Mes
réponses sont sur certains sujets beaucoup
meilleures que sur d'autres. En général je trouve
que Mr. Koopmans traite la chose un peu superficielle
du moins je ne me sentirais pas encore disposé à
faire ma confession de foi après un tel cours et j'aime-
rais surtout à faire encore des recherches sur
les bases fondamentales de la religion et consulter même
à cet égard les écrivains qui en sont les ennemis.
Alors le reste de l'édifice est facilement bâti
car nous ne sommes plus dans un siècle où l'on n'a
attaqué que les vétilleries des sectes entr'elles mais
jusqu'à l'existence de Dieu, de notre âme la naissance
de Jésus Christ et ainsi c'est plutôt sur de
pareils sujets qu'il faut s'armer que sur des disputes
entre les Réformés les Mennonites etc.
Je lis avec beaucoup de plaisir sur la bible l'ouvrage
de Niemeyer.
La lecture de J. Kops. C'est encore là une occupation
qui m'ennuye assez. Il dit trop souvent la même
chose et la lecture d'autres finit bientôt par
vous ennuyer. Nous lisons maintenant Stijl. C'est
un ouvrage de beaucoup de mérite que j'espère bientôt
lire en entier.
Géométrie et Physique. J'ai négligé un peu ces deux
articles dans les derniers tems. Je vais bientôt me
remettre à la Physique. J'ai repassé il y a peu les
commencemens de Wolf.
Extraits d'Histoire. J'en fais encore avec ardeur car
je trouve que c'est là le meilleur moyen de se planter
l'histoire en tête. Celui qui m'occupe maintenant est
l'extrait de l'Histoire de la révolution.
Copies. Je trouve encore une des occupations les plus
agréables celle qui me retrace les morceaux des meilleurs
auteurs. The british poets et quelques poètes Hollandais
me fournissent une ample collection plus grande
que je suis en état de copier chaque semaines.
La copie des sentences a été un peu négligée. Pope
m'a fourni beaucoup de phrases heureuses.
Je continue encore à être grand amateur de
la poésie. J'ai entamé avec Bruin une tragédie sur
la mort d'Hannibal mais les vers en l'honneur de
Dylius et de ses fêtes m'en ont empêché dans les
dernières semaines.
M. Van der Palm a prononcé hier à Felix un discours
qui doit avoir été fort beau. Il a parlé de la poésie arabe
dont il a cité un exemple après avoir décrit les moeurs
et le génie de ces peuples. Il a fini par un exemple
de la poésie Hébraïque.
Le misérable van Ray qui ose interdire la publication
à nos meilleurs ouvrages a donné une traduction de
Cendrillon où il a fait un haché misérable de ce joli
opéra. La traduction est si pitoyable que quel-
quefois elle contredit les règles du bon sens.
La jolie Romance de Je suis votre servante. La petite
cendrillon est terriblement massacrée. L'épître de dédication
à Made. Kamphuizen est au dessous de toute critique.
Parmi les fautes grossières qui s'y trouvent on lit
entr'autres De huis der Vorst. De pareilles jolies expressions
y fourmillent et c'est là l'homme qui est le censeur de
tous les nouveaux ouvrages. On a défendu de dire dans une
pièce daar komen de franschen zij hebben honger en
dorst et dans une autre de parler de moutons
Espagnoles. O lepidi capites.
Jeudi 5 Mars 1812
Encore une Semaine de passée et point d'annotations.
Cependant bien de fêtes deux bals! C'est beaucoup. Le premier
fut chez Boissevayn. De jolies filles de la gaîté enfin on
s'amuse mais jamais presque oublie.
Les Annales du Lundi
Chez le grand-papa
On célébra les fiançailles de M. Dylius et de Mll. Walré
et but des conditions à leur santé. Le grand-père fit son
régal de glace. Je lus mon vers sur les amusemens de la
semaine passée. J. de Vos gronda le médecin de nous avoir
trop bien régalés. On récita et chanta les vers de J. Walré
on décréta que toutes les pièces lui seraient envoyées.
Une société de jeunes gens des deux sexes avaient
formé la résolution de jouer une pièce. Ils l'avaient
apprise et la représentèrent dans un local que mon
oncle Rahusen leur prêtait. C'était une maison qu'il avait
dans les Houttuinen. Cette partie lui plut tant qu'il
résolut d'en donner une seconde à ses frais. Ceci donna la
naissance à cette partie. On s'assembla dans la maison mentionnée
ci-dessus. Le théâtre était joliment établi sur un
grenier avec des bancs en amphithéâtre et une fort jolie
décoration. La première pièce fut l'assemblée de famille de
Ribouté.
Un riche propriétaire est mort et a laissé une fille qu'on
ne croit point légitimée. Il est mort sans faire de
testament mais ce fait est ignoré et on suppose que cette Angé-
lique est unique héritière. On convoque une assemblée de
famille. Les membres de cette famille sont: Araminthe
jeune veuve coquette sa soeur Rosine personne assez insigni-
fiante Valmont fat de Paris Torlis banquier fiancé à
Angélique et Valère jeune officier amant d'Angélique tous
nourris des bienfaits du père d'Angélique. Enfin
Valville frère du défunt misantrope et philosophe.
Araminte et Valmont obsèdent Angélique de flateries
mais lorsqu'on apprend qu'elle n'a rien ils la traitent
indignement et font renoncer fortes à son mariage
avec elle. L'assemblée de famille a lieu. Blainville confond
les ingrats en leur montrant un acte par lequel Angé-
lique est légitimée. Il se retirent confus. Valère reçoit
la main de sa cousine. C'est une pièce assez bien écrite
et en fort bons vers.
Blainville H. Willink Il était entièrement masqué
et eut en effet de fort beaux momens.
Valère J. v. Eeghen réussit beaucoup moins aussi
il faut convenir que c'était un rôle ingrat. Mais il
avait dans tous ses mouvemens et actions trop de
froideur et de raideur.
Valmont J. Vollenhove Il n'avait pas besoin de
sortir beaucoup de son caractère pour ce rôle qu'il exécuta
fort bien.
Torlis J. de Lanoy Il joua fort bien et observa
fort bien tout qu'il devait.
Le Notaire Beirenbroek C'était dommage que ce rôle
était si petit car il l'exécutait avec beaucoup de justesse.
Fabrice A. Hartsen Il joua ce rôle avec beaucoup de gaîté.
Angelique C. Bruin C'était vraiment au dessus de toutes
louanges. La charmante naïveté qui régnait dans
son jeu était adorable surtout lorsqu'elle conjurait ses
parens de lui laisser le portrait de son père.
Araminthe J. Hartsen joua avec beaucoup d'enjouement
et de vivacité.
Therèse et Rosine S. & D. Kool C'étaient deux petits
rôles assez insignifians. La première se faisait remarquer
par des gestes qui étaient tout de travers.
De toneelrepetitie par H. Hartsen.
Van der Scherm notaire est jeté dans le tragique et lui
et sa chère famille ne font que répéter et jouer la
comédie du matin au soir. Ils ont pour compagnon un
acteur nommé Rolberg amoureux de Klaartje, servante
du notaire. La famille de celui-ci doit jouer l'assemblée
de famille celle qui doit jouer le rôle d'Angélique est tombée
malade. Rolberg fait consentir Klaartje à s'évader et veut
l'introduire comme l'actrice qui remplacera le rôle
d'Angélique. À l'instant Van der Scherm s'avance dans
le costume le plus grotesque et répétant le passage où
Hamlet est poursuivi par l'ombre de son père. Sa fille
et un monsieur qui entrent en répétant l'assemblée de
famille le troublent dans ses rêveries. Il est au
comble du désespoir surtout parce qu'il croit qu'ils
répètent Cendrillon. Sa femme au grand panier le calme.
Il promet d'assister à la répétition. Rolberg offre son Angélique.
Dans l'intervalle M. et Madame van der Scherm répètent
la scène où Hamlet fait jurer sa mère sur l'urne de
son père. Ils se servent à cet effet d'une théière. Enfin
les acteurs arrivent, on rapporte la nouvelle de l'évasion
de Klaartje ce qui met Mad. v.d. Scherm au désespoir. On
reconnaît Angélique. Celle-ci tombe aux pieds de sa
maîtresse et demande sa grâce. Elle est accordée et
on la marie avec Rolberg.
Cette pièce est écrite en vers Hollandais mais on y a mêlé
une terrible quantité de phrases françaises.
J. v. Eeghen dans le rôle de Rolberg jouait mieux que dans
la grande pièce.
A. Hartsen et J. Hartsen dans les rôles de Mr. et Mad. van
der Scherm ont captivé tous les suffrages.
J'avais composé un petit vers français pour jeter sur le
théâtre. Je l'avais déjà fait lire à H.W. qui le lut mais
bien mal. On appela l'auteur quelques-uns demandaient
l'auteur de la pièce, d'autres celui du vers. Ceci occasionna
une grande confusion. À cela se joignait encore qu'on ne
put réussir à lever la toile. On aurait voulu que j'eus
paru, mais dans ce cas ils auraient pu m'envoyer quel-
qu'un. Enfin A. Hartsen parut et le spectacle finit.
Le bal qui suivit fut fort gai.
Point de nouvelles politiques. On raconte que les français
ont été battus à Rugen.
On gagne beaucoup d'argent au théâtre hollandais
par la représentation d'une misérable traduction de
Cendrillon par van Ray.
Vendredi 6 Mars
Depuis quelque tems les prix de nos grains ont cessé de prendre
faveur. Cependant ils sont encore montés à des prix exorbitans
mais la grande quantité de bleds qu'on envoie de l'Issel
et d'autres départemens étonne les spéculateurs. Le maire a
convoqué chez lui plusieurs négocians en grains et leur a dit
que vu la grande différence des prix du bled dans les
villes Anséatiques S.M. avait résolu de diriger les speci-
laams[?] des négocians vers ce point afin de se procurer ici
une plus grande quantité de bled et que non seulement
on arrêterait toute entrave mais qu'on pourrait se procurer
les permis avec la plus grande célérité. Cependant cette
déclaration a fait très peu d'effet sur les négocians à
cause de la longueur et de la difficulté de la route et n'a
eu aucune influence sur notre marché.
Hier au soir j'entendis à Felix un discours du Prof. Bosscha.
Il commençait par dire que quoiqu'on ne pût point se glorifier
d'avoir pris naissance dans un état aisé ou d'une famille
illustre, que cependant ces prérogatives n'étaient
du moins pas sans valeur. Qu'il en était de même avec l'amour
et le devoir de soutenir la gloire du Pays où l'on était né.
Il s'entendit sur l'ingratitude et l'esprit supercifiel des
étrangers qui après avoir allumé chez nous le flambeau
de leurs sciences nous représentaient comme un peuple
chez qui quelques rayons de civilisation venaient de
percer tout nouvellement. Il s'étendit premièrement
sur le caractère moral des habitans, puis il retraça l'origine
des sciences chez nous. Ils s'étendit beaucoup sur les Bataves
mais un sommeil presque invincible suite du bal de la
nuit passée m'arrêta en ce moment. Il parla ensuite
d'Érasme d'Agricola et de plusieurs autres savans et
dit que comme ce n'était qu'à la littérature ancienne
que les peuples de l'Europe devait leur civilisation il serait
de la plus grande ingratitude de ne pas honorer ces hommes
qui s'étaient distingués en rassemblant, en éditionnant
ou en expliquant les acteurs latins ou Grecs. Il parla
beaucoup sur ce chapitre et y revint à chaque instant. Il
nous montra Schultens et Valkenaer dans la littérature
étrangère, Grotius dans la théologie et le droit naturel.
Il dit enfin que s'il voulait considérer ces grands hommes dans toutes
les classes il aurait beaucoup trop longtems à faire et finit
son discours qui avait duré plus d'une heure et demie.
Littérature
Conseils à ma fille par Bouilly 2 v.
Ce charmant auteur avait captivé tous les suffrages
par les contes à ma fille. Ceci sous le titre de conseils renferme
une nouvelle série de contes pour une jeune fille plus
âgée. C'est un style charmant mais les sujets comme dans
presque tous les ouvrages français sont souvent un peu
trop forcés et romanesques Parmi les plus jolies on trouve
Les oiseaux de Mad. Helvetius
La robe de Mad. Cotin
L'arbre de Catinat
Le premier pas dans le monde
Les dangers d'un bon mot
Le choix d'un époux etc.
Mardi 10 Mars 1812
Encore une comédie chez Cramer. Qui est ce Cramer. C'est
un f. dans l'étendu du terme. C'est un petit fat qui après
avoir écrit sur le théâtre français un espèce de journal
sans sel nommé De Kraai s'est mis aussi en tête d'écrire
des comédies ou rhapsodies. La première fut De hut in 't bosch.
Elle est presque illisible. Car sans parler de l'invraisemblance
de sujet cette pièce est si longue et surchargée de déclamations
qui ne signifient rien qu'elle déplaît à tout le monde.
Cependant on la joua souvent et avec un grand concours
de spectateurs. Het vissersmeisje eut encore plus de succès.
C'est bien une rhapsodie on y voit des combats des poursuites
des fuites une noce et un bouffon. C'est tout ce qu'il faut
pour plaire sur une scène où à la 1er représentation on n'a
pu trouver de place pour voir la Cendrillon
maltraitée par le misérable van Ray. On dit que Cramer
va publier un nouveau chef d'oeuvre nommé Het Geraamte
et un vaudeville nommé Het spook en de broeibakken.
11 Mars
Enfin revenons à notre partie. Nous nous assem-
blâmes déjà à 6 heures dans une maison vide où il
n'y avait que quelques bancs pour les dames les messieurs
avaient la permission de se tenir debout. J'y trouvai très
peu de connaissance et nous fûmes pendant un couple
d'heures à nous promener en long et en large. Enfin
on monta à l'assaut et après avoir franchi une
infinité d'escaliers on arriva au grenier où devait se donner
la représentation. Les bancs étaient tous d'une égale
hauteur mais pour faciliter la vue on avait ménagé
un certain espèce entre les spectateurs et le théâtre.
La toile était assez joliment peinte avec la devise rien
sans peine. Il faut savoir que c'était Cramer qui à la
fois avait été le charpentier et le peintre de son théâtre.
On commença par Bruis et Palaprat traduit en prose
Hollandaise par un certain Van der Vijver, maître d'école
qui était en même tems acteur. Langhorst et Herstman
étaient Palaprat et Bruis. C'était très bien. Zwaving le duc
de vendôme. Il n'était pas là son rôle aussi l'exécuta-
t-il assez mal ainsi que Mad. Cramer le charmant rôle de
danteuil. Ce n'aurait pas été si mal si elle n'eut mal
prononcé tous les mots. La décoration était une chambre
avec des colonnes rouges. Cramer fut un assez bon huissier.
Après avoir attendu un tems excessif nous montâmes
pour voir Philoctète joué par Langhorst. C'était vraiment
quelque chose d'extraordinaire. Ce n'était qu'un amateur mais
c'était superbe dans un rôle aussi difficile que Philoctète
on voyait sa douleur enfin c'était un nouveau Talma
et tous les spectateurs en étaient ravis. Hersteman
était Pirrhus et Van der Vijver Ulysse. Ce n'était pas mal
mais ce n'était point Langhorst. Les costumes étaient
fort jolis. Hercule joué par Cramer au lieu de descendre
dans un nuage ne se fit entendre que derrière les coulisses.
On a donné Mardi un nouvelle représentation de ce Philoctète
seul où plusieurs acteurs ont assisté mais tous étaient
ravis.
Enfin on donna Le chanoine de Melan. C'est l'affaire de deux
officiers français qui viennent chez un chanoine manger
son soupé et épousé la prétendue de son neveu.
Cette pièce est fort gaie. Zwaving jouait très bien le chanoine.
Cramer remplissait le rôle si horriblement fou du neveu.
Son épouse était Célérie et une petite Mle. Abo Lareviante.
C'était aussi assez joli mais en général rien ne ressemblait
à Philoctète. C'est un phénix dans son genre. Bruin
dit dans un vers qu'il récita à la fin de la pièce.
O Lankhorst in uw spel erkent men Talma weer.
Il a paru une loi de Mr. le préfet contre tous les foncti-
onnaires publics qui ont transgressé les loix en exigeant
des largesses pécuniaires. M. Abbema le souspréfet a été
mis en prison pour avoir pris des sous pour son signature
pour chaque Attestation de vita on dit qu'il sera condamné
à mort (Quelle apparente justice). Il me souvient d'une
anecdote de Diogène à ce sujet. Voyant conduire en prison
quelqu'un qui avait volé une fiole du trésor public d'Athènes
il s'écria voilà deux grands voleurs qui en conduisent un petit.
Enfin le 2 et 3 Mars on a décidé la cause importante des
empoisonneurs de Wijk bij Duurstede et la cour d'assises a condamné
à mort: la femme Brummelkamp Gerrit
Verkerk le clerc son amant et Anna Rijswijk la servante
comme complices du meurtre de Mad. Beerenburg qui avec son mari de-
meurait dans la maison de Brummelkamp à qu'il avait promis
de lui laisser une partie de son héritage et enfin de celui du
mari Brummelkamp. L'histoire de cette femme que j'ai
entendu raconter avec des détails circonstanciées est entr'autres
une preuve comme on peut être entraîné
petit à petit au crime le plus endurci tel que celui de cette
femme dont l'insensibilité était portée au point que quelques
jours avant la mort de son mari elle lui préparait ses habits
mortuaires et que lorsqu'il était tourmenté par les angoisses causées par le
poison elle lui donna de l'eau qui ne devait servir
qu'à aggraver son mal. Son mari était entièrement adonné
à la boison et ce fut proprement la cause des malheurs et
des crimes de la femme. Elle avait plusieurs enfans. On a
encore tenté d'excuser la complicité de la servante en lui
supposant alors dans un état de maladie ou de déraisonnement.
Il paraît que dans ces derniers tems l'on veuille excuser
tous ces empoisonneurs de cette manière. Or je demande
qu'est que c'est que la démence. C'est un état où la
raison ne peut agir sur nous. Et l'homme maîtrisé
par ses passions est il raisonnable. Comme cela on pourrait
toujours excuser les criminels de cette espèce car à
bien considérer tout il y a bien des foux sur la terre.
Comme cet homme qui dans le jury passé on a absolu quoiqu'il
eût tiré sur sa femme seulement par ce qu'on avait cru
prouver qu'il était fou à cet époque. S'il était fou il
fallait donc l'enfermer car le renvoyer qu'est-ce autre
chose que de lui donner des lettres patentes pour assassiner
tous ceux qu'il voudra. Cependant les trois condamnés
en ont appelé au tribunal de Cassation à Paris.
Annales du Lundi
Nous fûmes chez mon oncle van Heukelom par reconnaissance
de toute la gaieté qu'il avait cherché chez nous l'été passé. Dyl.
fut faire une visite à une dame dont la peau est hérissée
de pointes lorsqu'il a la fièvre. Nous n'apprîmes rien de nouveau
c'était la présence de la Demoiselle qui par ses ariettes et
sa fausse mort nous a occupé bien longtems.
À notre marché l'orage est tant soi peu passé et la calme
renaît 120 H. gr. Rogge 320 gd.
Littérature
L'histoire de la Révolution par Bertrand du Moleville
14 v. en 8o.
C'est un ouvrage que j'ai lu avec beaucoup de plaisir. L'auteur
ex-ministre constitutionnel de marine est fort impartial
quoiqu'il soit porté pour la côté royaliste. Je crois bien qu'on pourrait
de tems en tems y trouver des inexactitudes mais en général
l'ouvrage est écrit avec soin et pureté. Il n'y a que quelques
personnes dont il forme dans l'un volume un portrait
différent que dans un autre. Parmi eux est roland[?] que
lors de son ministère il fait considérer comme un homme
lâche et faible, gouverné par sa femme et lors
de son suicide comme un homme qui avait des sentimens
élevés et de l'énergie. Mais ces fautes sont bien rares. D'après
le plan d'ouvrage il devait aller jusqu'un jour de Brumaire mais
il ne va malheureusement que jusqu'au dix-huit fructidor[?].
J'en ai fait l'extrait.
Le 16 Mars
Il paraît que le tems ne se fatigue point a être fort
froid quoiqu'il ne gèle point.
Les deux Mr. Kramer et Van Sprekens se sont enfin
séparés. En effet deux hommes pareils ne pouvaient pas
longtems harmonier ensemble. Van Sprekens est un
homme très zélé par son négoce, mais qui en outre manque
entièrement d'éducation et de civilisation. Cramer au
contraire est quelqu'un qui passe tout le jour à fréquenter
les théâtres où les acteurs à faire des comédies ou les
apprendre. Enfin c'est un homme qui met la plus
grande affectation, et fatuité dans sa voix ses manières
et ses habits. Si l'on entend le récit des négligences de
Cramer il faut convenir en effet qu'elles sont exorbitantes
comme p.e. un jour il emporte toutes les notices du prix
courant des huiles pour les distribuer à la bourse
et n'y vient point. Un autre jour il est chargé
de faire parvenir à Mr. Braunsberg une notice
d'une vente faite pour leur compte, mais il n'en fait rien.
Cependant Cramer rejète la faute sur son compagnon il
dit que celui-ci a fait des spéculations et s'est enrichi avec
l'argent de son père qu'il n'a point d'égards
pour lui etc. O lepidum caput.
Mardi 17 Mars 1811
On rapporte beaucoup d'excuses en faveur de la cause ci-dessus
on dit que violente hémoragie fut la cause qu'il ne vint
point à la bourse. Du moins[?] présent il dit qu'il s'a bien
s'appliquer.
Helmers a récité la semaine passée à Felix un vers sur
le commerce. Il commençait en se représentant s'être dans
un temple de Mercure où on fait des sacrifices à ce Dieu. Puis
il fit un tableau du nord et du midi, de leurs productions et
comme ils étaient réunis par le commerce. Ensuite il fit
un tableau de notre grandeur et commerce passé et finit par
une perspective assez heureuse pour l'avenir.
J'ai parlé quelqu'un qui a lu le rapport de Mr. Noel et Cuver
sur l'état de l'instruction publique dans la Hollande.
Ils donnent les plus justes éloges aux Hollandais surtout
aux écoles de la ville et du nut van 't algemeen qui disent
ils surpassent tout ce qu'on voit de pareil en Europe
mais ils blâment fort la rouille de pédantisme qui est
encore attachée à l'école Latine.
L'Athenaeum illustre conservé son nom et son existence.
Annales du Lundi
On fêta le Mariage de Dyl. Plusieurs baisers furent volés
avec force on eut des histoires en foule jusqu'à ce qu'enfin [onl.] le
dessert. D. fit le récit de tous les maux de se marier
qui fut énormément long. Aussi racontait-il toutes
les particularités et était-il interrompu sans cesse.
J'avais fait pendant ce tems un extempore que
je lui lus.
Encore Cendrillon toujours Cendrillon. On va donner un ballet
de l'illustre petit poucet.
Il fait froid, le coolzad est monté 1 L. La liberté des distilleurs
des liqueurs fortes est permise derechef. Le seigle n'est
pourtant monté que 3 fl. ce qui m'a étonné si le gel
continue la graine de choux montera bientôt
encore plus considérablement.
Jeudi 19 Mars 1812.
Hier je fus à Felix où j'entendis un vers de Mr. Helmers sur le
bois de Harlem. C'était comme à l'ordinaire chez cet auteur
beaucoup de morceaux brillans mais l'ensemble ne me
plaisait pas trop. Aussi il faut avouer que sa mauvaise
prononciation (car il ne peut prononcer l'r) détruisait
souvent l'effet de ses beaux vers.
Il commença par dire: Qu'un autre chante les lieux
charmans, où de riches vallons entrecoupent des montagnes
etc: je ne les chante pas. Mais c'est le bois de Harlem qu'il
chantait. Il faisait une description des fleurs qui parfu-
maient ce bois et des troupeaux qui erraient à travers
les ombrages, quoique je n'aie jamais l'honneur de les
voir, il faisait des descriptions du porc de la brebis du
cheval et qui je trouvais cependant fort déplacées.
Bientôt il en revint sur ces déclamations si chéries de
nos poètes philosophes. Il racontait sa longue maladie
et dit-il lorsque mes yeux s'ouvrirent dans la lumière
je n'allai point rendre grâce au créateur dans de fragiles
enclos (leeme hutten) mais ce fut au Spanjaardslaan où rien
ne me séparait de lui. Il répéta bien quatre fois cette
figure ainsi que les récits de l'indépendance du poète. Alors il
franchissait l'espace, comme à l'ordinaire nageait dans
l'éther traversait les septimes solaires, forçait tous
les princes et les tyrans à comparaître devant son tribunal
et cherchait au firmament des planètes éteintes etc.
Ces phrases revenaient sans cesse. On se douta bien qu'il évoqua
les ombres de Ripperda, de Kenau Hasselaar etc. etc. même
des Bataves mais c'était beau. Il adressa ses chants aux
pavillon et aux autres palais qui entourent cette enceinte.
Ceux-la dit-il n'était pas comme les pyramides les fruits
des sueurs des humains mais ils étaient les fruits
de l'industrie et du commerce. Il fit aussi la peinture du
Bois lors d'un jour de fête, mais les principaux traits en
étaient pris de la description du jardin de Kensington par
Delille. Encore des grandes phrases sur les poètes. Enfin
le tout finissait par un morceau sur L. Koster
et une violente diatribe contre les tyrans qui disait-il
malgré tous vos efforts il ne vous est plus possible
d'établir votre empire par l'ignorance ou la superstition.
Il a employé dans les deux vers suivans des mots qu'on
ne trouver point je crois chez aucun poète
Hier graast de moederkoe ver van haar hokkelingen
Wijl jonge vaerre en pink al dartlend om haar springen
Quelqu'un auquel je parlai la semaine passée et qui en
qualité de Harlemois distingué était à portée de le savoir
me dit que cette ville était dans l'état le plus désastreux.
La semaine prochaine on devait annoncer à quelques milliers
de pauvres qui tiraient du pain de la ville qu'ils ne pouvaient
plus compter sur cette assistance. On redoutait même une
insurrection à la suite d'une pareille mesure. Les maisons
de charité étaient dans l'état le plus déplorable. Ce qui
était le pis de l'affaire c'est qu'on avait une somme suffisante
provenance des importations[?] pour la ville, pour pouvoir non
seulement payer les créanciers mais continuer à soulager
les pauvres. Cependant on n'osait pas toucher à cette somme
d'après les ordres de Mr. Alphonse et il était probable qu'elle
serait envoyée quelqu'autre part. Ici on dit que le gouver-
nement a disposé arbitrairement d'une partie de l'argent
de la ville par lequel elle devait payer ses dettes. Je veux
croire que l'empereur soit innocent de pareils abus qui
même sont souvent redressé lorsqu'on a de bonnes adresses
à Paris mais n'est-ce pas une faute essentielle dans un
état despotique que des subalternes puissent décider
arbitrairement dans des choses pareilles.
Pour prouver encore quelle foi on doit ajouter aux rapports
des étrangers fanfarons peut servir l'anecdote suivante.
Un professeur allemand dans un petit village de silésie avait
fait afficher dans toutes les gazettes de l'Europe qu'il possédait
un lycée où l'on apprenait le nec plus ultra
pour l'extraction du sucre des beteraves. Un de mes amis
J. Lucht s'y rendit mais non seulement ils furent renfermés
dans de misérables huttes de terre qu'il était impossible
de réchauffer mais même on leur donna une nourriture
insupportable qui les rendit tous malades et
enfin on s'apperçut que M. le professeur n'était guère
plus avancé qu'on ne l'est ici.
Encore des contes politiques de toute manière. Harlingue
déclaré en état de siège. Une coalition de puissances
septentrionales un armement de tous les individus de
16 à 40 ans, un combat entre les conscrits hollandais
réunis aux Westphalingiens et les français etc.
C. Walré vient de nous quitter après le séjour de plus
d'un mois. Elle est toujours aussi forte aussi gaie
et même un peu trop volage in summa charmante.
Littérature
Gibbon vol. 1 & 2
Je les ai lus avec beaucoup de plaisir ils vont depuis le
règne des Antonins jusqu'à celui de Claude le Gothique.
Le style m'en a beaucoup plu mais comme l'édition que
je lisais n'était point complète et que j'aime mieux
pouvoir la lire ensuite en Anglais j'ai jugé mieux de
différer la lecture des volumes suivans et je m'abstiendrai
ici de plus longs extraits ou d'un plus grand nombre de
remarques.
Vendredi 20 Mars
Depuis quelque tems nous goûtions un calme trompeur qui
couvrait l'abyme. C'est enfin aujourd'hui que l'explosion
s'est déclarée par le décret trop fameux de la garde nationale.
Je n'ai presque jamais vu régner une pareille consternation.
Et n'est-elle pas naturelle. Premièrement trois conscriptions
dans l'espace d'une année puis une garde soldée et maintenant
une garde nationale. Enfin sous quelque nom qu'on
veuille le déguiser on veut tous nous faire soldats. Et
pourquoi pour satisfaire l'ambition d'un tyran. Quelle
foule de réflexions affligeantes ne se présentent pas à
l'esprit. Cependant on doit avouer qu'il est à désirer que
la grandeur du mal réunisse en vain tous les esprits
vers un seul but et ce but doit être. Mais ne
pénétrons pas dans l'avenir, adressons
nos prières au Dieu de nos pères.
Littérature
Cornelius Nepos
J'ai relu avec beaucoup de plaisir cet ancien compagnon
de mes premiers travaux en latin.
Samedi 21 Mars
Aujourd'hui tout se constate et nous avons même
les règlemens dans nos papiers de cette garde nationale
qui sous quel titre qu'on veuille le déguiser n'est qu'une
conscription.
Je veux citer ici un trait de la bonté d'âme du préfet.
Lorsqu'il reçut les dépêches qui contenaient ce décret un de
ses commis homme de bonne famille et qui est tous les jours
avec lui était alors dans sa chambre. Quelle âge avez
vous demanda le préfet. Trente huit ans. Eh bien
vous marcherez. J'espère qu'on m'excusera à cause de
ma mauvaise vue. Non non reprit le préfet
en colère rien ne vous excusera. Peu après le fit
la réflexion suivante. Quels commis prendrai-je alors. Eh
bien j'aurai des invalides.
Pour prouver l'ignorance de la plupart des employés
français il suffira de l'anecdote suivante. Il vient au
bureau des timbres quelqu'un pour demander des timbres
pour des lettres de change jusq'à 600.000 fr. Six cent
mille francs s'écrie un des directeurs je ne croyais pas
qu'il y avait tant d'argent au monde.
Maintenant une anecdote qui fait plus d'honneur à
l'humanité. M. Rouwenhof revenant un jour chez lui
dans la semaine derrière y trouva quelqu'un qui lui parla
en ces termes. M. vous m'avez sauvé jadis la vie. Des circonstances
malheuris m'ont jetées dans la misère mais à force d'industrie
je suis enfin parvenu jusqu'à pouvoir enfin me remettre
tant soit peu dans un état d'aisance. J'ai regardé comme
la dette la plus sacrée l'argent que je vous devais daignez
l'accepter. C'était un compte de 1792. M. Rauwenhof lui
fit en vain des instances pour lui faire garder son argent
et fut touché jusqu'aux larmes de cette preuve d'honnêteté.
Lundi 22 Mars 1812
Point de nouvelles rien que de la consternation.
Littérature
Dryden vol. 4e[?]
Ce volume contient la belle ode sur le pouvoir de l'harmonie.
C'est une pièce admirable.
The cock and the fox conte imité de Chaucer. Il est fort gai.
The flower and the leaf. C'est une espèce de vision allégorique
assez froide. Le poète est dans un bosquet où il voit les chevaliers
de la fleur et de la feuille qui se combattent. Mais la pièce
est un peu trop longue.
The wife of Baths tale. C'et une imitation de Chaucer
et le même conte que celui du chevalier Fox qui
est de Voltaire ou de la Fontaine et que Bilderdijk a si
supérieurement imité.
Puis quelques traductions d'Ovide.
Butler Hudibras 2 v.
C'est un espèce de poème burlesque ou satirique sur les illuminés
du tems de Cromwel. Il y a beaucoup d'érudition mais il est
tellement rempli de vieux mots et d'allusions qu'il est
fort difficile à lire pour les étrangers. Il est aussi fort
long de sorte que j'en n'ai lu que la première partie. Ce
Hudibras est une espèce de Donquichotte qui combat à tort
et à travers. Son premier exploit est contre des villageois
qui veulent faire combattre un ours. Il y a aussi une
foule de conversations entre lui et son équipe[?] et une scène
entre lui et un astrologue est ce que j'y ai trouvé de plus joli.
Mardi 24 Mars 1812
Annales du Lundi
Encore bien de la gaîté. Le médecin avait un rhume violent.
Il dut chiffrer. Si un hareng et demi coûte un sou et demi
combien coûtent douze harengs. Il essaya de mille maniers
mais jamais il ne put réussir à comprendre cette somme.
J'avais fait une recension de quelques-uns de ses fragmens
de vers qui fut applaudie. Le médecin dit si l'on savait
quelle sédition il y avait eu parmi la garde soldée de Rotterdam
on lui demanda pourquoi. Parce que dit-il on a recueilli
tous les musiciens pour jouer un air devant Erasme qui
voulait danser. Pour surprendre de vos[?] il lui demanda
combien de pillules on pouvait fabriquer d'une drogue
un autre demanda au médecin en combien de seaux on
pourrait renfermer la mer. Il répondit qu'il l'ignorait.
En un seau reprit-on s'il était assez grand. P. de Clercq et
J. de Vos lui firent aussi le reproche de n'avoir pas encore payé
la somme d'un florin ou plus qu'il leur devait pour
l'anéantissement de leurs prétensions sur l'argent qu'il
avait gagné.
L'horizon se rembrunit toujours. Maudite conscription
sans cela je mènerais une vie douce et tranquille. Mais
pas tout à fait tranquille car je désire l'agitation mais
pas à un tel point Mr. T. a eu un plan qu'il ne serait
peut-être pas prudent de confier au papier. On
a convoqué des personnes je ne sais pour quele garde
nationale et on leur a donné tout de suite des armes
S'il y avait moyen de fuir la ty... . Combien je
bénirais la providence si je pouvais respirer sur un sol
plus libre. Hier M. Coopmans était aussi fort triste
mais enfin point de murmures.
Dieu sait ce qu'il nous faut beaucoup mieux que nous-
mêmes.
Mecredi 24 Mars 1812
L'espoir est une déité qui se plaît bien à tromper les gens. Les
bruits qui circulent parmi le peuple ne prétendent à rien moins
qu'à détrôner l'empereur ou à lui prêter les projets les plus extrava-
gans. On le fait voyager jusqu'aux bords du Gange.
Je veux citer ici le beau projet de M. [-Tissot] comme la preuve de
ma folie d'avoir pu y croire un moment ainsi qu'il paraît par la
note de hier.
Je fais avec lui un voyage en Suisse. Après quelques mois mes
parens reçoivent la nouvelle de ma maladie et enfin de ma mort.
On prend le deuil on fait annoncer mon douloureux trépas.
M.T. revient avec de faux certificats datés d'une des villages les
plus inconnus de la Suisse. En attendant j'ai changé mon
nom, mes parens m'envoient de l'argent et je commence un
petit commerce jusqu'à ce que les choses vont mieux.
Littérature
Bagatelles. Promenades d'un désoeuvré dans Peters-
bourg 2 vol.
M. van Lennep qui avait été à Petersbourg nous avait
recommandé cet ouvrage comme un des livres les plus jolis
qui traitent de cette ville. En effet l'ouvrage m'a assez plu
mais le panégyrique continuel que l'auteur fait des Russes
me déplaît. En effet Petersbourg doit être une belle ville. Il
y a plusieurs monumens publics la statue de Pierre I, l'église
d'Isaac, l'église de Kasan où il y a de superbes colonnes de granit
etc.
C. Divinez où vous êtes. L'auteur suppose quelqu'un à qu'il bande
les yeux. Il le mène à St. Petersbourg. Il lui ôte premièrement le
bandeau dans le lieu où les vaisseaux marchands abordent ensuite
au jardin d'été, dans l'île de Krestowsky le séjour des bourgeois
devant Kammeniostrof île délicieux qui fait partie de la ville
dans la promenade près de l'amirauté, enfin dans la perspective
de la Newsky. Il croirait avoir été dans six villes différentes.
Voici les autres chapitres
L'aplomb, les Traversées, l'homme indépendant, La nuit et le jour, le
Piéton, Établissement d'utilité publique, les Équipages, La ressemblance,
Parlez au portier, La promenade a vue d'oiseau, La fête de la cour, le
pauvre diable, les conseils du promeneur, Les frileux, La vie comparée,
La police et contrepolice, Ne condamnez pas, la grande contestation,
La nécessité indispensable, Les distances, L'uniforme, l'Esprit de Trafic,
Les malheureuses, Le palais royal, Voir et être vu, Les gageures,
Le souterrain, La jeune cité. Vinavat, Le journal.
Vondel Gedichten
C'est une chose singulière que parmi les jeunes gens on connaît
quelquefois si bien les poètes français et si peu les nôtres. En connaît-
on ce sont Bilderdijk, Van Merken, Feith, Hoogvliet, Langendijk, Asschenberg, le
Gijsbrecht et quelques Morceaux de Vondel tandis que la plus grande
partie de Vondel ainsi que de Dekker Antonides Hooft Huygens etc.
sont parfaitement inconnus. J'en vois plusieurs raisons 1r le
vieux style qu'on y trouve quelquefois 2 et
principalement le peu d'intérêt que les sujets offrent souvent à
quelqu'un qui n'est pas versé dans notre histoire et surtout
l'extrême longueur des pièces et la voluminosité des ouvrages.
Je vais premièrement parler de ce que se trouve dans ce volume
et ensuite de ce que je choisirais pour une Édition choisie des oeuvres de Vondel.
Zegezangen Le premier poème est la conquête de Grol et
c'est vraiment une espèce d'épopée. Les figures les portraits les
fictions tout y est bien amené et c'est un poème qu'on
ne lit jamais sans plaisir.
Les autres sont beaucoup moins intéressants.
Il y a des odes sublimes mais il y en aussi qui ne peuvent être
lues avec plaisir comme sur des cérémonies catholiques sur
des saints, des papes etc. Il y en est de même des autres poésies
surtout des vers de noce.
Commençons donc
Zegezangen
Verovering van Grol
Lijkoffer aan Maegdenburgh
Klinkdichten
Op het verongelukken van Roscius
Aan den Drost hooft
Op Pieter Kornelisz hooft
Begroetenis van Fredrik Hendrik. Ce vers est assez long mais il y a
de beaux m.
Op Fredrik Hendrik
Op Amelia
Het raadhuis
Lof der Zeevaert
Je sauterais la naissance du prince Guillaume Henriette Marie
t Amsterdam, ainsi que l'entrée de Marie de Medicis.
Lofrijmen
Op Amsterdam
Op de geboorte van Anna Roemers
Op den nieuwen atlas van de blaauwen
Op Daniel Zegers
Op Koningin Kristine
Op Joost Buijck
Op Geerart Vossius
Op Vondel
Lierdichten
Amsterdams Wellekomst
Inwijing der doorluchtige school
Huig de Groots verlossing
De Roomsche lier
Kasper van Baerles aanspraeck
Aen den Beeck
De Rhijnstroom
Spiegel van Marie Spiegels
Aan Vredewensch
Geboortekrans
De beurs van Amsterdam
Dankdicht aan Boreas
De getemde Mars
Bede voor 't Wale weeshuis
Bruiloftsdichten
Bruiloft van de Pol
Bruiloftsliet
De Haven
Hekeldichten
Roskam
Harpoen
Decretum Horrible Quelle énergie dans ce morceau et
quelle douceur dans la péroraison.
Jaargetijde van Oldenbarneveld C'est aussi un morceau
superbe.
Lijk- en grafdichten
Aan Geraert Vossius
Kinderlijck
Op Izabel le blon
Mengelrijm
Aen den lasteraer van Huig de Groot
Op Hendrik Bloemaert
Gezangk
Vechtzangk
Zang
Beeckzang
Reij van Bacchanten
Princelied
Krancketroost
Ceci ne veut pas dire qu'il n'y a pas de beaux vers hormis ceux-ci
mais que ceux-ci sont propres à servir à donner une idée de
toutes les poésies de Vondel.
Vendredi 26 Mars 1812. Bilderdijk Mengeldichten
Faut-il souvent quelque sagacité pour démoler le génie de
nos anciens poètes et le démêler dans de vieux volumes tout le
monde peut sentir les beautés de Bilderdijk. Une imagination
toujours féconde des figures superbes des imitations qui
renchérissent presque toujours sur l'original voilà ce que présentent
tous les ouvrages de ce grand poète. Qu'on ouvre au hasard ces deux
volumes de sa poésie mêlée et partout on trouvera quelque chose de
joli.
Vol. 1e
Quelques traductions d'Ossian, Kathlin Komala Oïna Kroma
Oithona.
Trois Romances. Floris de 4d Beilaart Argine. Je doute qu'on
en puisse trouver de plus jolies. Quelle noble simplicité dans
celle de Beijlaart ce serait un morceau à apprendre par coeur.
Quelle richesse d'expressions dans le morceau intitulée de
Kranke quelle onction dans les deux pièces Het vertrouwen
et Zucht eens vaders.
Deux imitations de Theocrite
Paris oordeel est dans un genre plus gai. Le conte ne quadre[?] pas
bien selon loi avec la morale qu'en tire le poète.
2 vol.
Lathmon l'expédition d'Oscar et Gaal dans le camp ennemi
De Krijg met Karos contient la mort d'Oscar.
Les morceaux les plus jolis de ce volume sont: De kerker De
verovering Troostzang. Trois pièces pindariques sur une
noce La nuit imitation de l'écossais Et la superbe Romance
d'Ahacha. Elle est dans un genre tout à fait nouveau c'est
l'élégie d'une négresse de Guinée qui pleure la mort de
son amant. Toutes les images en sont tirées du pays et du
climat c'est un morceau curieux et touchant. On doit
admirer la fécondité du génie de l'auteur qui sait se plier
à tous les tems possibles. L'épopée la tragédie l'ode la romance
La pastorale l'Élegie La poésie légère, La poésie morale
il excelle dans tout.
Vendredi 27 Mars 1811
Littérature
Manuscrits
1. Le Vers de Helmers sur le commerce mentionné ci-dessus.
Il s'y trouve de fort beaux morceaux mais il y a comme
dans tous les ouvrages de ce poète beaucoup de déclamation
et d'enflure. On doit aussi être historien et naturaliste pour
comprendre tous les noms étrangers insérés dans ce vers.
2. Un discours que Fokke a tenu sur Aristote. La première partie
contient la vie de ce philosophe la seconde part la notice de
ses ouvrages et enfin la 3e partie le détail de ses préceptes sur
la tragédie voici une courte notice de la vie d'Aristote extraite
de cette pièce fort bien écrite.
Aristote naquit à Stagyres. Il perdut de bonne heure son père
et resta sur la tutelle de ses tuteurs qui négligèrent son éducation.
Lorsqu'il eut en mains l'argent de son père il le dissipa entièrement
desorte qu'à 17 il n'avait plus rien et fut obligé de gagner sa vie
en vendant des petits pots de beaume. Il alla consulter l'oracle
de Delphis et les prêtres le conseillèrent de s'instruire dans
la philosophie et qu'il deviendrait un jour un grand philosophe.
Il alla à Athènes où il fut admis dans l'école de Platon dont
il fut un des disciples les plus célèbres. Il croyait pouvoir lui
succéder lorsque celui mourut après qu'il eut assisté à ses
leçons pendant plus de 20 ans, mais Speusippe neveu de Platon
lui succéda. Aristote se retira en Asie où il reçut une
lettre de Philippe qui l'engageait à se charger de l'éducation
de son fils Alexandre alors âgé de 15 ans. Lors du départ
de ce prince il voulut emmener à toute force Aristote qui
refusa de le suivre et lui donna Calisthène son disciple pour
l'accompagner. Il se rendit à Athènes où il succéda à
poste de Platon et Speucippe et il donna à cet école un
nouveau lustres. Dans quelques-uns de ses dogmes il était
d'une opinion toute contraire à celle de Platon, ce qui piquait
la curiosité. Il s'attira l'animosité des prêtres par ce qu'il
détournait ses disciples du culte et ce ne fut que la puissante
protection d'Alexandre qui put le soutenir. Celui-ci lui envoya
80 talens pour subvenir aux frais nécessaires pour recueillir
des sources pour composer une histoire naturelle. Après
la mort de ce prince on lui intenta un procès et il se retira
à Chalcis où il mourut dans sa 63 années. Ses amis pour éviter
à ses écrits la persécution des prêtres furent courir le bruit
qu'il les avait brulés. Mais on les enfouit dans une grotte
non loin de la ville où il mourut. La tradition s'en conserva
pourtant jusqu'à ce que quelques siècles après cette époque
un riche particulier de chios en fit l'acquisition et les fit
déterrer. Ces ouvrages avaient soufferts horriblement ainsi
il n'y a pour la plupart que des fragmens
mutilés qui soient venus jusqu'à nous on prétend qu'il
avait écrit plus de 400 traités sur différentes branches
de science et de littérature.
Mardi 31 Mars 1812.
Voici une anecdote qu'on m'a assurée être de la plus grande
véracité.
L'empereur à son retour d'Amsterdam dans l'année passée
arriva au passage d'une rivière où la communication était
empêchée parce que la barque (pont) dont on se servait là
était dérangée. Il fallait pourtant que l'empereur passât.
Il fit premièrement demander aux gardes nationales et
d'honneur qui l'accompagnaient s'ils voulaient le transporter
avec tous ses bagages. Ceux-ci refusèrent ainsi que les habitans.
Puis il fit faire une pareille demande à ses soldats et reçut
une réponse négative. Alors il lui fit dire qu'en cas de refus
il les ferait décimer Qu'il le fasse, s'il l'ose lui répondit-on.
Il leur fit offrir l'avancement nouveau refus. Enfin ce furent
quelques prisonniers Anglais qui se trouvaient là qui exécutèrent
le transport à condition qu'il signât leurs passeports pour
l'Angleterre. Il le fit et passa.
On raconte que l'Empereur répudiera son épouse et qu'il
fera passer le roi de rome pour un enfant supposé. D'autres
disent que l'Imp. a demandé au sénat la permission de se retirer à
Vienne avec le roi de rome mais que non seulement on le lui
a refusé mais qu'on lui a indiqué Paris comme lieu d'arrêt.
On dit aussi qu'en Poméranie un régiment français a passé
entièrement du côté des ennemis.
Une femme du communité vint à l'imprimerie impériale pour
y acheter une gazette. On lui demanda quelle gazette elle
devait avoir. Elle répondit Ik moet die krant hebben daarin
staat dat de keizer weg is.
Il paraît se constater qu'il y a eu une émeute à Scheveningen.
Les habitans devaient donner leur contingent à la conscription
maritime. Ceux-ci consentirent à partir en cas que l'on
soignât leurs femmes et leurs enfans on leur donna
une réponse élusive. Mais ils se rendirent avec une troupe
nombreuse de femmes à la Haye où ils cassèrent les
vitres de l'hôtel du maire. On dit même que le préfet a été
menacé ou blessé. Il a cependant su calmer les esprits tout
est rentré dans l'ordre et on a levé le contigent.
Il est assez particulier de citer la seule festivité qui a eu
lieu l'anniversaire du roi de Rome. Toutes les sociétés publiques
les cafés etc. doivent se fermer à une heure fixe mais les
commissaires de Police ont fait savoir que pour ce jour-là
on pourrait s'amuser à son aise et rester un peu plus
tard.
Parmi les terribles impositions qui pèsent sur quelques classes
les traîneurs et les horlogers sont des plus maltraités. Les
derniers doivent faire marquer toutes leurs montres et payer
huit à neuf florins d'une pièce qui peut-être ils ne vendent
jamais. Ils doivent pareillement tenir note de toutes les
montres qu'on leur confie ne fût-ce que pour les remettre
en ordre avec les noms et demeures des propriétaires.
Je fus encore Samedi à l'Examen de Phisique dans
Felix. J'étais fort étonné de ne pouvoir plus ouvrir la
bouche dans un endroit où pendant 6 années j'avais fait
briller mes talens oratoires. Il y en avaient qui répondaient
fort bien. Mais il y en avait beaucoup où l'on remarquait
plus le language du perroquet que celui du Physicien. En vérité
la Physique n'est pas une science si facile que
le croyent nos pédans. Ce n'est rien que d'apprendre par
coeur toutes ces formules, définitions et expressions vagues
mais il s'agit d'approfondir et alors ce n'est pas une science
pour des enfans. Il y a un pareil établissement
dans le nut van 't algemeen. L'instituteur ayant
demandé à un garçon s'il connaissait la physique
un des pédans qui assistaient à cette séance s'en effaroucha
fort et demanda. Comment il était possible de soupçonner
qu'un jeune homme ignorait les principes de la Physique
science qui, dit-il a pénétré également dans
le palais des rois et les huttes du pauvre. Serait-ce grâce à un
livre de Mr. Buys. En ce cas-là je crois que notre homme se
sera trompé car sans ôter à cette ouvrage le mérite qu'il
possède effectivement ce n'est pas là le livre à former des
Physiciens. La sottise d'introduire des enfantillages
dans un livre pareil tandis que les définitions sont souvent
impossibles à comprendre pour des enfans nuit beaucoup.
Plusieurs choses sont traitées beaucoup trop superfi-
ciellement. Pourquoi Buijs ne suit-il pas pour des
élèves plus âgés le cours de Van Bemmelen. Le jeune homme
de 16 à 17 ans et celui de 9 à 10 ne peuvent pas apprendre la
Physique dans le même cours.
Hier nous fîmes au milieu d'une pluie à vent le voyage
à Kennemeroord. On a fait de fort jolis changemens à cette
campagne. Tout commençait à percer plusieurs arbustes
étaient déjà en fleurs mais la campagne était encore
bien loin de présenter les attraits d'un jour de printems.
Mon pauvre papa a été bien malade de la goutte et l'est encore.
Annales du Lundi
On s'amusa beaucoup comme à l'ordinaire. Le pauvre
Dyl. fit beaucoup de contes et dut encore beaucoup souffrir.
Il demanda pourquoi il y avait tant d'oeufs à Pâques.
Il fit l'histoire du souper ennuyeux de la société des
noyés.
On reprit la somme des harengs il ne la comprit
pas encore.
Le D. disputa avec son fils sur la richesse des nations.
Enfin l'on eut toutes sortes de sujets de gaîté. On discuta
comment naissaient les chapons si le poulet respirait dans
l'oeuf, si l'homme respirait avant de naître si l'homme
était composé de deux moitiés égals etc. etc.
Vendredi 2 Avril
Je fus cette semaine à la maison de Mr. De Bosch
pour voir la bibliothèque. Elle avait maintenant l'air
assez dérangé puisque toutes les reliures et grandeurs
étaient mêlées mais lors du vivant de M. de Bosch lorsque
toutes les livres étaient rangés selon leurs reliures
ou grandeurs elle doit avoir offerte un coup d'oeil
très beau. J'y vis aussi beaucoup de ces fameuses primae éditiones
ou principes. Elles sont textuellement copiées d'après
les manuscrits ainsi souvent il n'y a pas de titre. Il y a
même quelquefois les titres des chapitres en rouge avec des peintures.
Le caractère en est cependant fort distinct et beaucoup
plus joli que celui des impressions d'une cinquantaine
d'années après. Il y avait un Virgile un des premiers qui
ait été imprimé qui était tout à fait en lettres
capitales. On voyait aussi une prima éditio d'un Lactantius[?]
qui a coûté 7 à 800 florins. Il y a 40 exempl. d'Homère 100 de
Cicero 35 d'horace 28 de virgile et autant de Terence.
Homère, Terence et Nepos étaient les auteurs favoris
de de Bosch. Il y avait aussi plusieurs très belles éditions
modernes parmi lesquelles un virgile de Baskerville et
un de Didot. Quelques livres étaient superbement reliés
mais d'autres dans des simples reliures de corne
ainsi une classification plus élégante aurait bien mieux
fait ressortir la beauté des ouvrages bien relies.
Hier au soir on a représenté pour la première fois het geraamte
de Kramer. C'est à présent le plus sot mélodrame que j'aie vu.
Celui-ci est un enchaînem. de combats, de meurtres, de spectres
etc. et on n'y a oublié aucun des ingrédiens qui sont
nécessaires pour composer un pareil ouvrage. Cependant
l'enthousiasme du public a été furieux. Il y a eu un vacarme
effroyable on voulait appeller l'auteur enfin le bon
auteur n'a pas pu dormir de joie. Il a dit lui-même qu'on
lui donnerait bientôt le surnom du Kotzebue d'Amsterdam.
Quelqu'un lui demandait pourquoi après sa pièce
l'on ne donnait qu'un simple divertissement. Il dit
qu'après avoir vu son ouvrage on était tellement
enchanté qu'on n'avait plus rien à désirer. Quel
dommage que la scène soit ainsi dégradée et quelle
honte que nous rouillions ainsi notre goût non
seulement en souffrant mais en applaudissant à
a de pareilles bêtises.
Petit poucet n'a pas du tout réussi. On ne croit pas
qu'on en donnera une seconde représentation.
Vendredi 11 Avril 1812
Annales du Lundi
Le professeur Kemper y assistait. Le pauvre Dyl. fut attaqué de
toutes manières. On disputa si l'on devait dire over drie eeuwen
ou na drie eeuwen. On voulut parier sur l'époque de la mort
de Haller. Le prof. raconta l'ineptie d'un professeur français.
J. de Vos assura que le nom de Polichinelle dans chaque nation
signifiait un manger délicat. Arlequino Hansworst John Ridding
Jean potage. Le Dylius donna trois mots dont nous devions
chercher l'étymologie.
Les bruits qui se répandent tendent tous à faire croire à la
guerre. On dit qu'en Russie il y a une levée en masse de tous les
hommes en état de porter les armes depuis 18-37.
Ici les conscrits qui ont tiré des hauts numéros sont déjà appelés
pour la garde nationale.
La pièce de notre cher Cramer dont le succès répondit tellement
à ses espérances a été tout à coup défendue. Une des raisons en
est qu'un des acteurs principaux chevalier du lion découvre
son bouclier et dit en s'adressant à son ennemi Le lion ne dort point
car il va bientôt signaler sa valeur contre un tigre sanguinaire.
Dans un autre endroit (un des deux lâches écuyers) berçant un
enfant dit j'aimerais mieux être fille d'enfant que soldat. Belle
raison pour défendre une pièce. C'est le misérable van Ray qui
est l'auteur de pareilles chicanes. Cet homme qui n'a pas le
sou à emprunté de l'argent à plusieurs personnes
et on n'ose pas le redemander de crainte d'être mis en prison
puisqu'il jouit du plus grand crédit chez M. Duterrage. On fait
refuser même de permettre l'impression de l'oraison funèbre de
M. Hesselink par Koopmans et cela parce que dans la prière on dit
wij bidden u voor alle vorsten der aarde en met name voor Napoleon
tandis qu'il fallait nommer Nap. tout seul et en outre par
ce qu'il prie Dieu d'accorder la sagesse à l'empereur.
∙J'ai été avant hier à Felix pour entendre un vers de Loots qui
en vérité était fort beau quoique j'ai entendu de lui de meilleurs
morceaux. C'était encore de l'homme du libre arbitre de
la vertu du devoir etc. etc.
Littérature
Poésie de Mad. de Salm 1 v.
Cette dame comme toutes les dames auteurs a à ce que je crois
une bonne dose de prétention. Ses vers sont agréables quoique
il s'y trouve ça et là des traits qui devraient être corrigés.
La meilleure pièce est sans doute l'Épître aux femmes. Il y a
beaucoup de vérité. L'auteur reproche aux hommes leur arrogance
et leur tyrannie en voulant seules s'approprier le domaine
des sciences et des arts. Elle combat toutes les objections qui
ont été faites aux femmes auteurs. Il y a dans cette épître
des morceaux pleins de sel et de satire. Mais aussiqui
prouve trop ne prouve rien. Quoi dit-elle
Ce feu qui nous dévore est-il donc inutile.
Le Dieu qui dans nos coeurs a daigné l'allumer.
Dit-il que sans paraître il doit nous consumer.
Portons nous sur nos fronts écrits en traits de flammes.
Seules vous n'êtes rien puisque vous êtes femmes.
Non sans doute et il y aurait de l'injustice à refuser aux
femmes le commerce des muses qui étaient tous des jeunes
filles. Mais elle ne se contente pas de défendre les femmes
elle attaque l'homme.
L'homme enflé d'un orgueil sacrilège.
Rougit d'être égalé par celle qu'il protège.
Sa voix dès le berceau nous condamne à l'erreur.
Moins fort de ce qu'il sait que de notre ignorance.
Il croit qu'il s'agrandit de notre insuffisance.
Et sous les vains dehors d'un respect affecté.
Il ne vénère en nous que notre nullité.
C'est trop fort car puisqu'on ne fait pas une femme
pédante ou poète ce n'est pas la condamner à l'erreur. Elle
montre ensuite le déchaînement contre une femme auteur
et en peint les suites.
Quand il voit le besoin de distraire nos âmes.
Le porter malgré nous sur de coupables flammes.
Quand * il voit ses transports que réclamaient les arts.
Dans un monde pervers offenser ses regards.
Et sur un front terni la licence funeste.
Remplacer les lauriers du mérite modeste.
Ensuite elle détruit l'objection qu'on fait aux femmes auteurs
à cause de leurs rapports comme mère de famille.
Elle peint ensuite le bonheur d'épouse et une femme instruite
oui dit-elle.
Ne vaut-il pas bien mieux d'une ardente jeunesse.
Charmer par les talens la dangereuse ivresse.
Que de la condamner au plaisir dégradant.
D'inventer ou proscrire en vain[?]
viennent d'autres épîtres où il y a de fort jolies vers mais
qui sont bien inférieurs à l'épître aux femmes.
Épître à un jeune auteur
Épître à sophie sur les inconvéniens de la campagne
Il y a de fort jolis traits mais le sujet n'est pas joli. Cependant
les idées sont fort bien amenées. Mais qu'est-ce que c'est qu'un
poète qui n'aime pas la campagne.
Trois épîtres à Sophie sur le choix d'un époux. Il y a de
bonnes choses. L'auteur décide enfin qu'il faut épouser
un mari de trente ans.
*l'honnête homme
Discours sur les dissentions des gens de lettres
L'idée en est fort belle.
Étrange aveuglement de la délicatesse.
On rougirait d'aller,même dans la détresse.
Dérober à l'auteur un or peu précieux.
Et le prix attendu d'un travail glorieux.
Ses succès, son bonheur, son trésor véritable.
On vient les lui ravir sans se croire coupable.
Scène héroïque à l'occasion du mariage de Napoléon
Pièce de flatterie délayée dans d'assez bons vers.
Les Poésies diverses ne me plaisent pas tant que les épîtres.
Il y en a beaucoup qui ressemblent à des couplets à refreins
ou des ariettes. La coquette est une des plus jolies. Il y a aussi
un traduction de Métastase.
Sappho trag. lyrique
Sappho est à Leucade où elle gémit du Pharon qui l'a abandonnée
avec Cleis, une de ses élèves. Damaphile qui se dit l'amie de cette
amante malheureuse veut la perdre excitée par la jalousie.
Cleis revient elle implore le pardon de Sappho... Bientôt
Phaon qui la poursuivit arrive. Sappho croit que son amant
revient à elle mais il s'est déjà réconcilié avec Cleis. L'oracle
parle.
Les tourmens de Sappho sont cessés en ce jour.
Phaon doit par l'hymen couronner son amour.
Phaon se croit alors obligé d'épouser Sappho. Il veut avoir
une dernière entrevue avec Cleis. Cependant Damophile a
fait apporter des gens qui les entraînent dans une barque.
Sappho apprend son malheur, elle se précipite du rocher.
Le temple est consumé par la foudre. La barque qui conduit
les fugitifs est abymée.
Voilà le sujet de cet opéra dont l'invention et le style sont
beaux.
Justinus
Cet auteur a un beau style et comme dit la Harpe il narre
bien. Il n'a pas tant de discours oratoires que dans les autres
historiens anciens. On ne trouve chez lui
que l'exhortation de Methudati à ses soldats pour combattre
les Romains. Au reste Justin adapte presque toutes les fables
au sujet de la monarchie assyrienne. Ce qui est assez intéressant
chez lui c'est l'hist. ant: des Carths et Siciliens.
Salzmann Gesch: van Ligthoofd
Cet auteur a écrit plusieurs ouvrages qui servent tous
à prouver quelque maxime, p.e. dans Karl van Karelsbergen
il prouve que souvent nous sommes la cause de nos propres mal-
heurs, dans Harreveld qu'on peut être libre dans quelque état qu'on soit,
dans Zwartmantel que tout ce que Dieu fait est bien fait
etc. Enfin cet ouvrage-ci doit prouver que souvent les mal-
heurs servent à nous corriger.
Ligthoofd jeune homme dissolu et paresseux est enlevé de force pour
devenir soldat et aller en Amérique. Dans son régiment il
reçoit premièrement les conseils d'un honnête capitaine puis
d'un bon Feldprediger mais il n'en profite pas déserte et prend
service comme matelot. Il fait naufrage et est sauvé tout
seul sur une île déserte où il est pendant quelque tems. Là
sa conversion commence. Il trouve un petit
garçon qu'il adopte. Un vaisseau américain les prend à bord
et les conduit en Amérique. Là il se met au service d'un [onl.]
qui reconnaît l'enfant trouvé par Ligthoofd pour son neveu.
Ligthoofd se conduit bien épouse à la fin une esclave et
devient un négociant bien estimé.
Cet ouvrage est je crois destiné par le traducteur à consoler ceux
qui tombent dans la conscription mais en ce cas là son but ne
sera pas rempli. Il n'est pas si bien écrit que les autres ouvrages
de Salzmann. Il y a aussi quelque conformité avec Robinson
et de ses idées disparates qu'on trouve chez tous les auteurs
Allemands. Cependant le style en est attachant.
Annales du Lundi
∙Prof. Kemper, J. Kops et sa famille assistaient à la réunion qui eut
lieu chez nous dans le grand sallon. On raconta des aventures de squelettes
confisqués pour l'usage des médecine. Dylius raconta qu'il avait mangé
de la [- viande] [onl.] humaine nommément les fesses d'une frisonne. À table
D. commença par attaquer le prof. sur le jour de la mort de Haller.
Celui-ci qui avait oublié l'affaire fit bonne mine à mauvais jeu
et terrifia son adversaire. On résolut d'aller chercher de la
glace mais c'était trop tard. D. tira un livre
fort sale de sa poche c'était le journal de Médecine de blum-
bach. Il y avait un portrait de Haller. On [onl.] l'universalité de
ce savant on dit qu'il était le seul qui pouvait être comparé
à Grotius. Kemp soutient[?] l'assertion contraire et montra que
Haller avait été fautif dans divers genres. D. raconta l'embarras
de M. van Lennep pour faire l'oraison de De Bosch. On blâma la
manière de vendre de M. den Hengst. Nous répondîmes aux
demandes de Dylius. Je racontai l'origine du mot Lummel.
P. de C. cita à l'appui de son étymologie de Plychinelle[?] en petit livre
intitulé ombre chinois. Kemper expliqua d'une manière
fort savante le mot Mannequin. J. de V. raconta que le peintre
Breugel avait fait un tableau du sacrifice d'Abraham où
ce patriarche ajuste son fusil tandis qu'un ange passe dedans.
Un des nombreux monumens que l'empereur fait construire déplai-
sait au public. C'était l'emp. lui même qui en avait
fourni le plan. Il dit à ce propos à l'architecte Il n'y a que
vous et moi qui le trouvent beau.
[Pagina] 145
Il est dans cette ville un certain de Bré peintre qui doit peindre
deux tableaux avec des figures de grandeur naturelle. L'un
doit représenter le moment où il reçoit les clefs de la ville
et l'autre celui où il traverse le Kalverstraat.
Nous avons pris hier congé de M. Koopmans. P. de C. a remercie
au nom de tous. C'était très touchant. En vérité il a pris beaucoup
de peine mais pourtant nous aurions pu apprendre encore plus.
Littérature
Youngs Night Thougts 2 Vol.
Je n'ai lu dans longtems un ouvrage avec tant de plaisir. Celui-
ci enseigne les vérités de la morale et de la religion revetues
de l'attract brillant de la poésie. Chaque langue a dans sa
poésie une qualité particulière comme le français l'élégance,
le Hollandais la richesse d'expression. On peut regarder
comme la propriété de la langue Anglaise une énergie d'idées
et une breveté qui ne peut être trouvée dans la poésie d'aucune
autre nation. Les nuits de Young en offrent un exemple frappant.
Quelle richesse d'idées, quelle énergie! On ne peut cependant
pas disconvenir qu'il ne règne dans ces nuits une certaine
monotonie qui fatigue le lecteur et en rend la lecture difficile.
Mais cela pouvait difficilement être évité dans un ouvrage
si irrégulier roulant toujours sur le même objet. J'ai connais
deux traductions une de Lublink en Holl. qui est très
correcte et élégante et qui est enrichée de bonnes remarques.
L'autre est en Français de Mr. Letourneur. Celui-ci à la
manière française a tout à fait mutilé son auteur. Des
9 nuits de l'original il en a fabriqué douze en
transportant les morceaux d'une nuit à l'autre et en faisant
d'autres classifications. Il rejète même beaucoup de belles idées
et tout ce qui y entre par rapport à la révélation ce qu'il
rejète à la fin de chaque nuit. Voici leur titre
The complaint
Night | 1 on life death and immortality | |
2 on Time Death and Friendship | ||
3 Narcissa | ||
4 The christian triumph | ||
5 The relapse | ||
6 The infidel reclaimed | The nature of immorality | |
The proof of immortality | ||
7 | ||
8 The man of world reclaimed | ||
9 The consolation | A moral essay of the nocturnal heavens | |
A night address to the deity |
Les nuits qui m'ont le plus plu sont la 6.7e et 9e. La 7e surtout.
Il a un morceau sur les effets d'un système de l'anéantissement.
Annihilation qui est superbe. J'en ai copié la fin. La description
du jugement dernier et les méditations sur le firmament
sont aussi très belles.
Les trois personnes pleurées par Young sous le nom de Lucia,
Philandri et Narcissa étaient la première sa femme, les
deux autres deux enfans qu'elle avait eu d'un mariage
antérieur et qu'il chérissait tendrement. Dans la 8e nuit
il pleure particulière la mort de Philandri, dans la 3e
celle de Narcise et à la fin de la 5e.
Voici quelques preuves de l'immortalité:
Les révolutions continuelle de la nature
La progression continuelle de la nature
La grandeur et l'élégance des travaux de l'homme
L'insuffisance (ongenoegzaamheid de l'homme
Les talens et passions
L'augmentation progressive de ses talens
Sa crainte pour la mort
La nature de l'espérance
La nature de la vérité
La science et le génie de l'homme
L'ordre dans la création
L'ambition
L'avarice
Le plaisir
A paraphrase of the book of Job
C'est à dire une libre traduction en vers des derniers chapitres
de Job où le tout puissant lui parle. La version est assez élégante
mais je trouve notre traduction en prose beaucoup plus
énergique. Par ce qu'il y a plusieurs traits qu'on pouvait employer
dans la poésie orientale et non dans la nôtre et qui cependant
quand on les suppriment ôtent au poème beaucoup de
force.
Bilderdijk Mengelingen Deel 3 en 4
Encore des traductions d'Ossian De slag van Lora, De dood van
Kuthullijn.
Au reste des poésies légères qui ne m'ont pas beaucoup plu.
∙Deux morceaux Aan mijne vrienden et Uitboezeming dans
lesquels il décrit largement tous ses malheurs et puis
des vers sur les anniversaires de son épouse.
∙Ceux qui je préfère sont:
Eens grijzaarts waarneming
Hercules in de wieg d'après Theocrite
Ensuite des fables en prose parmi lesquelles il y en a d'assez
jolies et dont plusieurs ont des allusions aux circonstances
politiques lors de la rev.
4e Deel
Je trouve dans ce volume-ci peu de morceaux dignes de
Bilderdijk . Ce sont des jérémiades depuis le commencement
jusqu'a la fin des flatteries à Louis Nap. etc. etc.
∙Ce qu'il y de plus joli est
1. Leyden in verwoesting. Lierzang
2. Memoires 1812
∙Il y a de belles idées
Ja 't aardrijk beeft. - o God genade
Mijn kind omarming mij, gij mijn gade
'T is jezus regtstoel, hij genaak
Hoe boet na derdhalf honderd jaren
De schim van Valdes hier zijn wrok
Mij dunkt ik zie, ik zie hem waren
Hij schudt uw tempels en pilaren
Hij dreigt u nog met spanjes jok
Cependant il a fait de meilleurs odes.
Le touchant épisode de Camoens, Ines de Castro, traduit libre
Grootmoeders klacht trad. libre du frison de Gijsbert Japix
Minerva.
Les lignes suivantes peuvent prouver avec quelle bonté il
traite les Allemands.
Wreekt, wreekt de dichtkunst van den waan dier dwingelanden
Die 't ware dichtersvuur van uit onze eeuw verbanden
Wien vreemdelingen met de Grieksche Zanggodes
Geen Schillers drekhoop walgt bij 't goud van Sofokles
Die Klopstoks droomgebulk voor ware godenzangen
En Hallers laf gezwets voor godentaal ontfangen
∙...
In duitschen bastaartklap belachbren onzin kwaken
∙...
En 't hollandsch steeds gezond steeds ongewraakt verstand
Verruilen voor den waan van 't domst en geestloost land
Samedi 18 Avril
Il n'y a rien de nouveau. L'objet qui m'a le plus occupé cette
semaine a été la vente des livres de Mr. de Bosch. Les petits ouvrages
se sont vendu assez chers mais les grands pas trop. Le prof.
van Lennep achetait beaucoup. Les éditions grecques d'[onl.]
étaient vendus depuis 20-40. Les orateurs grecs de Reiske
valurent f 70. Hier on vendait les Poetae Minores ceux-ci
valurent fort peu d'argent aussi la foule qu'il y en avait
devait faire baisser la marchandise. Il faut aussi avouer qu'en
général les livres sont fort bien conditionnés. Il y en a
qui ont des reliures superbes en marroquin.
Les prix du Colzad qui avaient baissé énormément ont repris
quelque faveur. Gr. on 55 Lv. Oost 53. 5 à Z.
Le froment a monté tant soit peu mais le seigle
a pris de faveur 117 H. 296 gl. On dit qu'il dura monter absolument
à cause de la hauteur où en sont les prix ainsi que des autres
grains dans Paris et dans toute la France.
J'ai fait cette semaine avec J.B. une pièce pour parodier
les Mélodrames. Nous travaillons également à [onl.]
à notre Annibal. Le 2 acte sera bientôt fini.
Lundi 20 Avril 1812
J'ai été samedi passé au Théâtre français. On donnait
Le vieux célibataire. C'est vraiment une très jolie pièce on voit un
pauvre célibataire bon homme tout à fait qui se laisse duper par une
femme de ménage intrigante et par un intendant frippon qui ont
su noircir à ses yeux son neveu Armand. Cependant cet Armand
le sert sous le nom de Charles et sa femme sous celui de Laure. À la fin
tout se reconnaît le neveu est embrassé et les frippons chassé. Il
règne beaucoup de bonhomie dans cette pièce et il y a des morceaux
touchans. Aussi Garnier remplit-il supérieurement bien le rôle
du célibataire et Mad. Dauteuil celui de Mad. Evrard.
Les habitans des Landes C'est une farce. On va célébrer une noce.
Une dame américaine égarée vient avec une domestique noire.
Un voyageur pareillement égaré laisse son valet poltron tout seul.
Celui-ci lit dans un livre de son maître une description de l'Afrique
et croit en effet être dans le pays des Hottentots. La négresse qui
l'aborde et des paysans montés sur leurs échasses ne servent qu'à
constater son opinion. Tout ceci donne lieu à des scènes comiques.
Joli remplissait le rôle du valet.
Mardi 21 Avril 1812
Annales du Lundi chez l'oncle.
Premièrement les discours roulèrent sur la vente de de Bosch. Dylius
acheta les débris de la vente. On commença à table par deux anecdotes
de M. Kuiper qui avait un bâton s'appellant Lijdzaamheid et un autre
s'appellant lieflijkheid qui dit au commencement une prière Laat
ons met de steenen des geloofs de glazen des hemels indonderen. Il dit en
priant pour le bourguemaître Wij bidden u voor den groot achtbare
zondaar. D. qui avait à chaque moment des phrases latines dit le
vers latin suivant:
Fistula dulce canet voluorem dum decipit anceps
On en fit des traductions en vers dont aucune ne réussit. D. cita une
prétendue traduction de Cats réfutée par Kemper.
D. raconta une anecdote de Boscha qui selon lui avait essuyé de
fort mauvais traitemens de la port du Paradys. Jamais on ne lui
avait laissé raconter si paisiblement. Mais lorsqu'il eut fini Kemper
dit qu'il n'avait récité qu'un cas de mensonges et il exposa le véritable
état de l'affaire à laquelle il avait été intéressé lui même.
On prit la résolution d'aller chez Kemper cet été pourvu qu'il en
fit premièrement prévenir le jour de famille par une circulaire. Le
grand-père le refusa mais on resolut de l'y forcer puis qu'une société
a droit de disposer de tous ses membres.
L'affaire de Haller fut remise sur le tapis. Dyl. avait derechef un
livre très joliment relié de C. et P. de Cl. qu'il soutenait être le sien.
On met l'affaire aux voix. P. de C. s'érigea en président il déclara Kemper
coupable ainsi que G. de C., W. de C. Les trois enfans de de Vos avec
leur père voulaient conserver la neutralité. Jg. se déclara contre D.
Kemper devant parler il fit un franc aveu de ses fautes et dit
qu'au moment de l'assertion il ignorait complètement l'époque
de la mort de Haller mais qu'il avait payé d'imposture et qu'il n'avait
pas un que le médecin aimait en tant de vigilance qu'ainsi il
devait payer la glace puisqu'il avait perdu la gageure mais que
D. devait aussi en payer parce qu'il avait négligé de se rendre le marché
suivant chez De Bosch pour vérifier l'affaire.
On parla de woordenstrijd. Je paré de la [onl.] dit D. que vous ne savez pas
le mot en Grec. J.d.V. lui serrant la main dit: Je tiens le pore.
Logomachia. D. fut atténué. Il s'écria Dit koud ijs ligt mij
dwars in de maag. Il chercha en vain divers prétextes pour éluder
l'effet de sa gageure. Ainsi voilà trois portions de glace à venir car
on n'en a plus.
D. fit voir un bezoar. K. dit que c'était un oeuf pétrifié. D. avait peine
qu'il le cassât avec son couteau parce que alors en voyant les masses
de cheveux qui étaient deans il en aurait eu trop d'envie.
Kemper fut élu du consentement général membre honoraire du
jour de famille.
Mecredi 33 Avril 1812
Plaçons ici quelques anecdotes car pour des nouvelles politiques on
est bien assuré de n'en rien savoir. Car notre ignorance à cet égard
est si complète que nous ne savons pour ainsi dire que ce qu'on
veut que nous sachions. On a rempli quelques gazettes des détails
de la trahison d'un certain Michel employé au bureau de guerre
qui avait donné à l'envoyé Russe des copies de l'organisation
des armées.
Je fus hier à une vente des livres du feu Mr. Ameshof. C'est une collection
immense et cependant il ne s'y trouve que quelques livres
latins et le reste est hollandais. Le nombre des volumes théologiques
en 4o est 750 et en 8o 2400. On vendait les livres assez chers.
Il y avait un petit bouguineau qui avait en possession une édition
d'un ouvrage de Potter dont il avait déjà vendu avec profit une
centaine d'exemplaires. Voilà qu'on trouve dans ce livre un passage
où ce voyageur dit en parlant d'un village qu'il avait fort
souffert du passage des troupes français. Voilà qu'on ôte aussitôt
au libraire toute son édition sans lui rembourser une dute.
Un honnête bourgeois retournant avec un de ses amis d'une société
lui raconte l'émeute de la Haye. Un agent de police qui passe
près de là l'entend le saisit au collet et le conduit aux corps de garde.
Le prisonnier demande la permission d'aller avertir sa femme ou
de lui écrire un billet. Envain, il passe là toute la nuit. Le matin
il est conduit devant le comp. de police qui lui donne un verte
réprimande. Il répond: "M. je ne croyais point commettre un crime
en racontant une chose que toute la ville sait. Cependant vous
auriez pu m'envoyer chez moi pour me prier de me rendre chez
vous. Est il bien fait de faire saisir un honnête homme au collet
et de le reléguer une nuit entière parmi des goujats tandis
que son épouse est en proie à des transes mortelles." Pour toute
réponse le comm. lui indique silence et le fait
mettre à la porte par ses gens.
Voilà le despotisme!
A. Waarma se voyait menacé de tomber l'année suivante dans
la conscription. Sa mère ne pouvait lui fournir un remplaçant.
Il a donc pris service comme secrétaire à bord d'un vaisseau
commandé par le cap. Arents qui le chérit comme son fils. Il est
sur un schoeier. Leurs plus longs. voyages seront au Tessel et
l'hiver ils reviennent à Amsterdam. Ils sont maintenant au
lac de Haarlem. Ce garçon apprendra là [onl.] du pilote lt.
Losqu'il sera avancé il devient lieutenant. Ainsi ce garçon a
vraiment un heureux sort.
Par contre tout le monde plaint pauvre Stultjes. Ce garçon
au comptoir de Mr. Langhorst soutenait par ses profits ses
parens. Il tomba cette année dans la conscription. Des amis et
bienfaiteurs lui achetèrent à ce que je crois pour f 1600 un haut
Numéro. La garde nat. est décrétée. Il doit marcher. On lui fait
encore une bourse. Mais les rempl. sont fort chers il en a eu
plusieurs qui ont été désapprouvés. Il a obtenu un nouveau
délai mais il est dans une situation bien triste. Et quand même
il peut se sauver qu'il n'est pas désagréable de contracter tant d'obligations.
Un des coups des vicissitudes de la fortune est un certain M. Hooi.
Il avait eu des années où il gagnait f 150000 dont il en donnait
70 aux pauvres. Il avait fondé un institut où il faisait instruire
des jeunes gens. Maintenant il est réduit au point de demeurer sur des chambres.
Littérature
Histoire des Wahalis 1 vol. Paris 1812 par L.A.
C'est vraiment un ouvrage intéressant puisqu'il nous retrace
la naissance et les progrès d'un peuple entièrement inconnu
jusqu'ici. Le style est correct sans être brillant ni enflé.
(Vide Ext.)
Heriadan, Barbarossa groot admiraal van Soliman
Encore une pièce des boulevards. Elle vaut un peu mieux que
les pièces de Cramer mais encore les mêmes caractères la
même intrigue que dans toutes ces pièces pareilles. Le rôle de
Barbarossa seul est quelquefois beau.
Laudatio Jani Dousae par Siegenbeek
Je ne saurais juger du style latin quant à la Laudatio
elle ne m'a pas excessivement frappée.
Il fut privé de ses parens à l'age de 5 ans et fut élevé par son oncle
qui le traita comme fils. Il étudia à l'école de Junius à Delft et
fit ensuite ses études à Louvain et à Driacum. Il vint ensuite
à Paris où il perdit son ami Fruitiers. Il se retira ensuite à Leyde
où il se maria. Ce fut comme commandant de cette ville qu'il
soutint le siège fameux. Il fut ensuite pendant vingt sept
ans curateur de l'académie de Leyde et fut là avec Heinsius,
Lipsius, Scaliger et autres savans de son tems. Il fut aussi plusieurs
fois ambassadeur en Angleterre. Ses poésies sont estimées de
tous les gens de lettres. Il avait une vaste érudition et une
mémoire prodigieuse. Plusieurs auteurs Latins ont été
enrichi par lui de commentaires. Il eut douze enfans dont
plusieurs périent avant lui entr'autres un qui s'appellait
Janus comme son père dont on a publié une volume de poésies
et qui mourut à l'age de 25 ans.
Cet ouvrage est enrichi d'une multitude de notes parmi lesquels
se trouvent des morceaux intéressans. On y trouve beaucoup
de vers latins tant de lui que de ses contemporains et même un
vers hollandais de lui en honneur de Janus Secundus dont il
chérissait beaucoup les ouvrages au point que dans sa jeunesse
il les avait toujours en poche.
Les deux morceaux les plus curieux sont un tableau de l'érudition
de Dousa par Heinsius et un récit de sa mort par Bertus dans un
discours qu'il fit sur lui.
À la suite de tout ceci se trouve un vers latin misérable de Mar-
ron où il commence par Dousa et finit par Napoléon.
Lundi 27 Avril 1812
J'ai encore été la semaine passé au théâtre français. On donnait
Amphitrion. C'est une pièce de Molière fort gaie mais bien indécente.
Elle fut fort bien jouée. Garn. Amphitryon, La Gardère Jupiter, Calland.
Sosie et Joly Mercure, Mad. Dacit[?] Momène, mad. Dang. Cléanthis.
Cependant il faut convenir que plusieurs choses m'ont rebutées qui
n'étaient pas répréhensibles du tems de Molière p.e là où Sosie
reçoit une rouée de coups de bâton et là où il insulte Mercure
d'être un fils de catin.
Les mineurs de Beaujoing. Ceci a rapport à un triste événement
arrivé il y a peu à Liège. J'aurais cru que cette pièce aurait
brillé par les décorations mais le fait se passe hors de la scène.
On y a joint une petite intrigue amoureuse et un Mr. Trinquile
pour égayer la pièce. À la fin des couplets en l'honneur de l'emp.
et de l'imp. avec le refrein
C'est un modèle à suivre (on n'applaudissait pas)
Enfin tout en règles.
J'ai été à Harlem chez mon cousin Walré pour assister à une
représentation de Leerzaam Vermaak. Je partis Samedi. À Halfweg
on construit à tort et à travers de nouvelles batteries et fortifications.
La barque emmena en passant la moitié d'un pont construit à
la hâte pour faciliter les ouvriers.
Le soir nous fûmes à Leerzaam Vermaak. On donnait Le zilveren Bruid[?]
de Kotzebue. La pièce fut très bien exécutée. M. Walré Welling, Mad.
Kops son épouse, Mad.lle van der Hugt (qui jouait pour la seconde fois)
et C. Walré ses filles, W. Walré son fils, J. Enschedé le Houtvester. W. van
der Vlugt Lodewijk, J. van der Vlugt le lieutenant Huygens, l'adjoint
Kops le vieux comte, Just. Enschedé le secret de cabinet.
Il faut convenir que c'est une pièce touchante quoique comme
toutes les pièces de Kotzebue ce soit une bigarrure. Aussi la pièce fut-
elle supérieurement bien jouée excepté le rôle de comte qui était
insupportable. C'est une jolie société qui a subsisté plus de 25 années
mais ils craignent que faute de membres elle ne périsse. L'accessit
de deux nouvelles actrices y a donné beaucoup de Relief. M. Walré
est un homme universel il remplit toutes sortes de rôles depuis
un valet jusqu'à Agamemnon.
Après la représentation on soupa à de petites tables et l'on
dansa jusqu'à cinq heures. Il y avait de jeunes filles fort aimables.
La musique était abominable. La société était fort gaie.
Je passai pareillement le jour de hier à Harlem mais je ne
m'amusai pas trop.
Mardi 28 Avril 1812
Annales du Lundi
D. commença par une description exacte de la guillotine qu'il avait
vue.
À table il osa imprudemment déclarer à J. de Vos que c'était une fort
mauvaise coutume d'encadrer des dessins qu'il n'avait vu cela chez
aucun autre. Alors les deux de Vos l'attaquèrent violemment. Ignace
lui dit qu'il tenait de sots raisonnemens. D. lit à présent le traité
de mon grand-père sur le mariage.
Au dessert J. de Vos proposa au grand-père de nous inviter dîner chez
lui le dimanche suivant le jour de la fête. Le grand-père fit beaucoup
de difficultés. L'oncle était excessivement généreux. Il proposa premiè-
rement d'avoir cette fête chez lui ensuite de la donner soit au sallon
de J. de Vos soit de G. de C. Enfin il proposa de donner une collation
chez le grand-père. On applaudit. D. se mêla au discours on lui dit
qu'il devait se taire puisque ce n'était pas de lui qu'il agissait. Ignace
le reprit pour la seconde fois sur un subterfuge qu'il fit. On dit
l'oncle inviter qui que vous voudrez quand même il y en aurait 25.
Il invita lui-même D. et on résolut d'inviter J. Kops.
Commerce
Les prix des grains sont montés considérablement
130 H. o.R.470 gd.
126.127 H. 450.455
120.125 H. Vries 402.425 gd.
124 H. Norder 401.402 gd.
114.117.120 H. Drent. R.308.316.323.325.
121 H.O.3. 348
On n'a presque jamais eu un exemple de pareils prix. Aussi la
plupart des vieux négocians n'ont-ils pas osé spéculer. Mon grand-
père assis devant son speculatie boek où les prix sont notés depuis
une quarantaine d'années se récrie sur la folie de ceux qui
doivent s'engager dans des achats où ils peuvent gagner 20 et...
perdre 200 florins d'or. Mais les tems sont changés. Cependant je crois
que si cela continuait le peuple ne souffrirait pas partout
patiemment un pareil renchérissement dans le prix du
pain.
Le soleil commence tant soit peu à faire sentir sa chaleur
bienfaisante mais la verdure ne [onl.] couvre aucunement
encore les arbres. Il ne paraît pas que les gelées ont eu
aucun effet, du moins de Colzad ne prend aucune faveur.
Orge
98.100 H. Vr. wint 164.170 gd.
Avoine[?]
89 H. Dikke 96 gd.
∙Blé noir
∙121 H. Am. 48 1/2 L.
Littérature
Hulde aan G. Hesselink door R. Koopmans 1 v.
La première partie contient l'oraison funèbre dont on a
déjà parlé au long.
La seconde partie un discours tenu dans Felix où Hesselink est
considéré comme philosophe, physicien et ami des belles-
lettres.
Comme philosophe il suivit premièrement le système de Leibniz
mais en revint ensuite il n'adoptait point toutes les idées de
Kant quoiquil les mit à prix.
Comme physicien il répandit un jour pur sur diverses parties
de la Physique. Il aimait à être convaincu par des preuves. Il
s'éleva entr'autres contre le positif et le négatif dans le système
de l'électricité de Franklin, disait que c'était pour distinguer
(aanduiding) et non pour expliquer (verklaring) ainsi que
contre l'expérience de Boyle que les fluides pèsent dans
les fluides.
Quant aux belles-lettres. Il était grand amateur de la poésie
comme le prouve entr'autres son discours sur la prosodie. Poot
était un de ses poètes favoris.
Suivent trois vers qui ne me plaisent pas trop.
Un de M. Kleyn où je trouve trop d'enflure et d'expressions
forcées.
Un du Ministre Brouwer qui est dans la style de B. de Bosch ou
L. Pater.
Un de Yntema où il y a de jolies idées mais que je trouve
un peu prosaïque.
Jeudi 30. Avril 1811 [1812]
Il y a longtems que je n'ai été si agréablement frappé que je le fus
hier. J'étais chez De Ruiter qui je grondais de ne m'avoir pas envoyé
les livres que j'avais achetés quand tout à coup j'entends un Monsieur
qui prononce mon nom et qui m'invite à entrer dans sa bibliothèque.
J'ignorais ce que ce propos signifiait et je monte les escaliers.
Je croyais entrer sur un grenier quand tout à coup une port s'ouvrit
et j'entre dans une chambre fort bien meublée. Tout à coup les murs
de toutes parts disparaissent et je vois partout des armoires
rempliés de livres tous superbement reliés. J'entre dans une
seconde chambre. Nouvel étonnement. Je vois entr'autres des
armoires toutes plaines de voyages pittoresques, des ouvrages
à estampes. Une table entière couverte de portefeuilles. Des
dessins de Schouman de Cats négligemment épars, une édition
de Rousseau en 4o Wiland en 4o avec des lettres latines
tous reliés en maroquin partout les meilleurs ouvrages. Gibbon
Shakespear Spenser. J'étais stupéfait d'étonnenment et perdu
dans l'immensité de la collection. Des chef-d'oeuvres partout. C'était
la bibliothèque de M. Ameshof homme fort riche qui
m'accabla de civilités et m'invita à venir considérer plus
à mon aise ces nombreuses richesses.
Vendredi 1 may 1812
Littérature
Young Works vol. 3
Encore un volume de Young qui ne m'a pas moins plu que les
volumes précédens.
The last day in three books
C'est un fort joli poème on reconnaît le poète des nuits. Les plus
beaux morceaux en sont à mon avis Le moment
de l'anéantissement de la terre, la prière à dieu, et les paroles
que le pêcheur damné adresse à l'auteur de l'univers voici quelques
vers qui m'ont frappés
The most magnificent and costly dome
Is but an upper chamber to a tomb
No spot on earth, but has supply'd a grave
And human skuls the spacious oceans pave
The wise
The planets drop their thougts are fix'd above
The centire shakes their heart disdains to move
An earth dissolving and a head n't thrown wide
A yawning gulphand fiends on ev'ry side
Serene this view, impatient of delay
And blesses the dawn of everlasting day
How greatness prostrate falls, there strength gives place
Here lazars[?] smile there beauty hides her face
On ne tarirait pas de citations voici la fin
Thus glad all heav'n and please that bounteous God
Who to light Uru to pleasures hung on high
You radiant orb, proud regent of the sky
That service done its beams shall fade away
And God shine forth in an eternal day
Triumph of Religion or love vanquish'd 2. books
Voilà un poème charmant sur la mort de la malheureuse J.
Gray et Guilfort. Des tableaux charmants. Un style plus doux
que celui de Young ne l'est ordinairement. La pureté, l'innocence
de Gray, sa piété sublime tout est mis dans le plus beau jour.
The love of fame in 7 satires
Si l'on en excepte celles de Boileau et d'Horace je ne connais pas de
plus jolies satires que celles-ci puisque le sel n'y tombe pas tant
sur des particularités inconnues ou des sujets de Politique mais
que l'auteur nous trace des portraits propres à charmer tous les
lecteurs. Ce sont proprement un assemblage de portraits quelquefois
d'epigrammes composé par un homme d'esprit. Les deux satires
on women m'ont surtout.
∙Deux lettres à Pope sur les auteurs de son tems ont aussi beau
coup d'agrémens et renferment de bons préceptes.
Mais les odes n'étaient aucunement le genre de l'auteur
et ne paraît même pas être celui de la langue anglaise et
[onl.] pièce me paraît être la plus jolie
Vide Tome 13.17.18.19.20.21.22.23.24.25.26.27.28.
Addison
Je croyais lire un volume rempli tout entier des poésies de cet auteur.
Mais du moins les trois quarts sont des imitations d'Ovide qui ne
m'intéressent nullement. Celui-ci encense Guill. 3 comme Dryden
Charles 2 et Young Anne on doit pardonner ce défaut naturel
à tout poète.
Les plus beaux morceaux que j'y trouve sont
An account of the greatest English poets
Là se trouvent de fort jolis portraits de Chaucer, Spenser, Cowley
Waller Milton, Roscommon, Denham, Dryden, Congreve.
A Letter from Italy
C'est une fort jolie description d'Italie.
The Campaign
Ce poème contient de fort jolies idées. La bataille de Hochstat et tous
les événemens de cette campagne y sont décrites. C'est du moins
un meilleur poème que le historical poem de M. Dryden. Il dit
en parlant du bombardement de St. Malo.
Now does the sailor from the neighbouring main
Look after Gallic towns and forts in vain
No more his wanted marks he can descry
But sees a long immeasur'd ruin lie
Whilst, pointing to the naked coast he shows
His wondring mates where towns and steepl's rose
Where crowded Citizens he lately view'd
And singles out the place where once St. Malo stood
Les autres pieces sontTo Mr. Dryden To the King. Quelques pro-
logues et épilogues. Des trad. d'Horace et le 4 Livre des Georgiques.
Vide Tome 13 No. 29
Lundi 4 mai 1812
Le jour de hier mérite d'être décrit plus particulièrement.
L'église était remplie. Celui qui pendant cinquante ans avait
fait retentir cette enceinte des paroles de l'Évan-
gile monta en chaire.
Il prit pour texte Hand.26 v.22Hulpe dan van God
verkregen hebbende sta ik tot op dezen dag passage tiré du
discours de St. Paul à Festus. Il expliqua premièrement rapidement
l'occasion qui avait donné lieu à ce discours. Ensuite venant à
lui-même il parla des considérations qui l'avaient engagé
à célébrer ce jour. Il fit un court exposé de sa vie et effleura
tout sans rien omettre ou sans trop appuyer sur quelque
chose. Les circonstances politiques les médailles reçues
deux épouses perdues, tout fut traité avec la plus grande délicatesse.
On chanta deux couplets du cantique zoude aan den stroom des tijds.
∙Ayant recommandé par une superbe comparaison des
figures il s'adressa plus particulièrement à ces vieillards
ainsi que lui héritiers d'une autre génération. Il leur
montra les obligations qu'ils avaient à remplir, les devoirs qui leur
étaient imposés envers Dieu et les hommes. Se tournant ensuite
vers les jeunes gens il leur conseilla d'honorer la vieillesse et d'user
envers elle de la même condescendance dont ils désireraient
jouir s'ils parvenaient à un âge aussi avancée. Puis après avoir
encore discuté les causes qui l'avaient engagé à continuer sa
fonction. Il répandit sur tous les classes d'auditeurs ses souhaits
en implorant pour eux la bénédiction du créateur. Ce fut surtout
l'adresse à tous les membres de la communauté qui me plut le
plus. Là il leur représenta les efforts qu'il avait toujours fait
pour leur plaire et les édifier qu'ils daignassent excuser le
vieillard qui n'avait que si peu de temps à vivre et supporter les
défauts suites de la vieillesse.
Après l'église nous allâmes chez le grand-père où
s'étaient assemblés beaucoup d'anciens amis. Tous étaient en-
chantés et ces bons vieillards parlèrent encore des temps
de leur jeunesse.
Le soir nous nous assemblâmes pour la collation. J. Kops et son épouse
ainsi que J. de Vries y étaient, on fut fort gai. À dix heures on alla
au sallon. La table était magnifiquement servie. Il y avait au milieu
une pièce quarrée garnie de 4 dessins faits par J. de Vos. De l'un côté
on voyait la reconnaissance sous la figure d'une femme
devant un autel au brille du feu. De l'autre côté
des génies soutenait un écriteau. [onl.] peignait le buste du
grand-père et enfin une belle peinture de la vieillesse.
Sur cette machine était posé un vase où brilait une flamme.
La collation était très brillante. D. fit venir quelques bouteilles
de vin de la fête dont il distribua amplement. Au commencement
du dessert où il avait de belles glaces on proposa des conditions et
l'on vint à l'ordre du jour. J. de Vos récita un vers qu'il dit être
très mauvais. Dylius suivit disant que les grands hommes ne
se laissent pas décourager par des chutes fréquentes. C'était
un des meilleurs vers qu'il ait fait. Après lui je vins et enfin
de Vries. Les quatre premières lignes étaient superbes mais le
on s'apercevait que le reste y avait été ajouté depuis. J. Kops
fit un compliment en prose et le grand-père répondit ce toutes
nos félicitations. L'oncle était excessivement gai. Je lus après
que le premier attendrissement fut passé mon vers de félicitation
à Dylius qui eut assez de succès. Kato chanta
les couplets à l'oncle. Ensuite la gaieté augmenta à chaque moment.
Dylius se permit des réflexions satyriques sur les dessins
on entonna à la ronde la chanson. Onze Willem oom is jarig.
J. Kops chanta diverses chansons de Walré, de Loosjes ainsi que
la conversation du paysan et de sa maîtresse dans le Donquichot
de Langendijk. J. de Vries récita un morceau d'Anacreon. On
finit par la ronde de Hoe zoet is 't daar de vriendschap woont
et après cela tous bien égayés par les vapeurs du vin
de la fête nous nous en retournâmes chez nous.
Samedi 9 Mai 1812
Peu d'événement importans se sont passés dans le cours
de cette semaine. Le tems qui encore Jeudi était si froid
qu'on devait se promener dans une bonne redingotte a maintenant
changé au point qu'il fait un chaud presque insupportable.
[onl.] qui a déménagé vient à présent trois fois la
semaine chez moi me chasser de mon lit à
7 heures. Nous causons. Nous traduisons du latin du grec. Nous
avons eu controverse. Premièrement il voulut nier l'existence
de J.C. Mais plus pressé cependant il se jeta sur quelques
objections connues la discordance des Év., le sil de Jaepht., quelques
lois du Moise le baptême etc. Il y a dans Kotz. un passage
La misantropie est dans sa tête et non dans son coeur.
C. en est de même, de cet ami-là. Je lui lus ensuite un morceau
de Bilderdijk sur l'immortalité de l'âme il était charmé.
Papa m'a confié cette semaine ce que c'était passé entre lui
et monsieur P.P. C'était affreuse. C'était un ami intime et
il le vola. Dieu me préserve d'un pareil malheur.
Un décret foudrayant vient d'anéantir toute spéculation
en grains. J'en ferai mention, lorsque j'en saurai plus.
Les prix avaient tant soit peu baissé 129 H. Fr. VI.335
Littérature
Poot. Gedichten 3 vol.
J'ai parcouru ces poésies.
L'on doit pourtant convenir que Poot est un de nos meilleurs
poètes. On remarque à chaque page des tournures, des expres-
sions dont il a enrichi notre langue. On trouve chez lui
V.1. Bijbelgedichten.
Je crois que sont là les matières les plus difficiles à
traiter puisque ce sont des choses tellement rebattues de toutes
manières et que souvent le systématique y joue un si grand
rôle. Il y a des poètes qui ont mieux réussi dans ce genre
que Poot. Les meilleurs vers en ce genre sont
Uitgang van Gods zoon
's Heilants hemelvaert
Mozes' Kindscheit
Aan Godt (c'est un très beau vers
Pourquoi l'Héroide. Vaste [onl.] est rangé sous cette
nomenclature, c'est ce que je ne comprends pas.
Brieven
Ces lettres ne m'ont pas beaucoup plu. Les meilleurs sont
Reisbrief où il décrit sa vie d'une manière allégorique.
Algemeene brief où il raconte ce que lui arriva depuis sa naissance.
Velt en Zeezangen
Ces pastorales sont charmantes. Il y a des détails fort jolis
que Poot seul pouvait bien peindre. Les noms Allégoriques
de Duinman, Peiling etc. me déplaisent fort.
Minnedichten
C'est là proprement la partie où Poot a excellé toutes ces
morceaux sont charmans. Aan Galaté. Wachten Goelijke
wangen Rozemonts Toverij De maan bij Endimion Vliegende
min Mor.Ch.
Et non moins. 'T bedrog der droomen et le vers superbe intitulé
De verliefde Venus commençant
Ja Triomf Kupido draeit
De diamante spil
Des werelts na zijn wil
C'est selon moi cette vingtaine où le génie de Poot brille le
plus. C'est dommage qu'il n'en ait pas fait plus encore.
Il se trouve aussi de fort jolies pièces dans ses Mengeldichten
Glorie der deught | Rijke armoede |
Het nut der vrede | Snelheit en woede des tijds |
Rechte weg | Akkerleven |
Arme Rijkdom | Morgenzang |
Op den watervloedt | Vrolijk leven |
Winter | Bloemhof |
Broekbergen | De eerdieven |
Lantvermaek | Mei |
Zomer | Zomeronweer |
En schone dag | Nacht |
Geboortedichten Lofdichten Bijschriften
ne m'ont pas singulièrement frappés.
Bruiloftdichten
On y trouve beaucoup plus d'élégance et de variété que l'on ne
trouve autrement dans de pareilles productions. Il y a des idées
charmantes.
Lijk en grafdichten
L'élégie sur sa mère m'a paru la plus jolie.
On n'a besoin que d'ouvrir Poot pour trouver une foule d'expressions
neuves et justes par ex. j'ouvre au hazard
Maan.
Zij meet het blauw met elpen schreen
En scheurt in koelen moedt, met haere zilvre horens
De donkerheit van een
Der starren eindeloos getal
Speelt met een flonkerenden val
En glooiende muzijk van kringen
Lucht
Daarin schrijft nu geen vogelvlugt
Haar schaterende wemelsporen
Het levend kristallijn bij 't schubbig vee verkoren
Glijt zacht langs rand en kil
Gij mest den os en 't lam in 't groen
Als hen de dagen hinder doen
In oogstmaend zwart van vliegende anglen
Gij vult des visschers ruime fuik
Met spartlend stroomgeluk
Avond
Hierop volgt de avont ras die aen de westerkimmen
Zich met een tulbant van gelooke roozen hult
On en trouverait des milliers de pareils.
Vendredi 16 Mai 1812
Voilà toute une semaine que j'ai passé sans porter rien en
écrit, en effet soit paresse soit manque de sujet on oublierait
jusqu'aux meilleures choses.
Dimanche j'étais déjà avant sept heures en campagne
pour aller prendre un déjeuner chez Mr. Tissot. Il me rigola
fort bien, on a de chez lui une fort belle vue sur le Weterings-
poort.
On aurait cru que le décret de S.M. qui défend les spéculations
et qui donne diverses ordonnances sur les grains qui
généraient infiniment le commerce, aurait fait beaucoup
plus de sensation ici. Au contraire les prix n'en ont point
ressenti d'influence considérable. On dit que le Préfet a envoyé
à ce sujet ses remontrances à Paris. Cependant je n'ai aucune
confidence dans cette feinte sécurité puisqu'il y a expressément
dans le décret tous nos sujets.
J'ai été Mecredi passé au spectacle hollandais on donnaitde
vrouw na de waereld. C'est une fort bonne pièce. Mad. Kamphuizen
qui est une excellente actrice jouait fort bien le rôle de
la femme. Le sujet est d'un homme qui aime éperdument
sa femme entraînée dans le tourbillon du grand monde
désespérant de la ramener par la douceur la réduit
au désespoir par des malheurs qu'il accumule sur elle.
Elle perd son argent au jeu. Il la fait accroire qu'il est ruiné
qu'il doit des sommes considérables qu'elle a perdu son procès sur
lequel reposait toutes ses espérances que son père a été
englouti par la mer avec tous les trésors qu'il rapportait. En
fin elle est réduite à un tel excès de désespoir qu'elle est sur
le point de s'ôter la vie cependant tout se rétablit elle est rendue
à son mari à sa famille. Les autres acteurs jouaient plus
ou moins bien. Rombach et mad. Snoeck remplissaient
bien les rôles d'un libertin et d'une fausse dévote.
On joua après une pantomine fort jolie de Van Wal.
On y voyait entr'autres une Pantalonne. Il y avait
de fort jolies décorations et coups de théâtre p.e. un où
une assemblée de juges après que leurs perruques sont
volées au plancher est transformée en une compagnie de bêtes[?].
Annales du Lundi
Peu de nouvelles intéressantes. D. a vu guillotiner un chien.
Il fit deux fois un récit extrêmement long sur la mort
d'une femme entretenue.
Mardi 19 Mai 1812
Je viens de passer quelques journées charmantes dans mon
séjour chéri de Rupelmonde. Vendredi le jour du départ il faisait
beau temps. La foule se pressait dans les barques qui partaient
pour tous les villages qu'arrose le Vecht. J'entrai enfin dans le
second Roef d'une barque où se trouvaient P. Warnars, Jut,
la fille du ministre Van Eyke et une monsieur avec son
épouse qui avait un petit enfant. Les caresses qu'on faisait à
cet enfant et le gentillesses qu'il 'exerçait avec le chapeau
de son père n'étaient interrompus que lorsqu'il mangeait ou que
sa mère lui donnait la mamelle. Sans cela c'étaient des personnes
très polies qui contribuèrent à perpétuer la conversation. À Abkou
nous 4 messieurs nous sortîmes de la barque courûmes à
travers champs et arrivâmes longtemps avant la barque à
Loenersloot. Enfin l'heure de la délivrance sonna et je me
trouvai à Rupelmonde où logeaient mon oncle Bosch
la famille de mon oncle de Clercq et ma cousine M. ten Cate.
Samedi fut un jour bien triste. De la pluie, du vent, de la froidure
enfin c'était tout ce qu'on pouvait désirer. La lecture des voyageurs
Suisses de Lantier que j'avais trouvé à Rupelmonde et que je dévorai
avec avidité, ainsi que des parties de billard avec mon Grand-père
et mes deux oncles et une vingtaine de vers pour mon
Annibal et une partie de Boston furent les consolations de ce
jour. Le lendemain un voile funèbre non moins triste couvrit
la face du soleil. Nous allâmes au Nieuwersluis où nous
trouvâmes le commandant de la forteresse jouant au jeu d'assaut
qu'il croyait savoir fort bien quoique mon oncle l'assurât qu'il n'en
savait pas trop. Ce commandant est un homme fort aimable
il n'avait pas un seul homme sous ses ordres. La partie la
plus importante de son poste consiste à composer des rapports
lorsqu'il passe quelques transports de prisonniers ou d'espagnols.
Nous avions vu encore le même jour de ces malheureux. Il se trouvait
pareillement à l'auberge M. Hartmann gouverneur des enfans
de Mr. van den Berg. Il nous dit qu'un certain peintre était occupé
à peindre une enseigne pour le cordonnier du nieuwersluis qui
représentait un cordonnier prenant la mesure d'une
paire de souliers aux pieds de la statue de minerve. On chercherait
à y ajouter des vers en autant de langues qu'il serait possible P.E.
en latin ces vers d'Ovide
Nec quisquam invita bene faciat vincula plantae
Pallade Tycho sit doctior ille licet
F. L'ouvrir qui fabrique une utile chaussure
Sans l'aveu de Pallas prendra mal sa mesure
A. Schlecht wird der Schuster den Schuh zu schmeiden
Wird Pallas ihm nicht Hände Leiten
H. Geen schoen word na de kunst bereid
Zoo Pallas 's meester hand niet leid
Il avait encore la même inscription en Hébreu Grec et Italien.
Je promis de lui procurer l'anglais et mon oncle de Clercq l'espa-
gnol. Le même jour une promenade à breukelen eut lieu.
∙Le second jour de pentecôte il faisait un tems divin mais
diablement chaud. Nous revînmes fort fatigués d'une course
à Vreeland. L'après-dîné nous allâmes dans la campagne
charmante de Sterrenschans. Je revins en barque avec une
troupe de musiciens un paysan et sa femme qui ne pouvaient
point faire d'enfans enfin avec une troupe confuse.
J'ai voulu m'exercer ici composant une nouvelle description
de Rupelmonde. Dans le second vol. des journaux il y en a une
mais fort courte et défectueuse. D'ailleurs il y a si longtems
de là.
Le tems qui change tout change aussi nos humeurs.
Rupelmonde
Cette campagne est située près du Nieuwersluis et a une vue
magnifique sur le Vecht. Elle date déjà son existence d'une
époque assez reculée mais à sa fondation ce ne fut qu'un jardin
où on faisait de la corde (lijnbaanstuintje). La maison subit
pareillement divers changemens améliorations. La manière
dont mon grand-père fut porté à l'achat de cette campagne
est assez curieuse. Passant dans les environs ils apprirent
que cette campagne était à vendre ils voulurent la voir. Le
jardin était à cette époque d'une roideur insupportable. Mais
la vue qu'on a de deux côtés dans la grande chambre (koepelkamer)
les frappa tellement que ceci les détermina à acheter
la campagne. Aussitôt il fallut arranger la campagne
d'une manière élégante. Les vergers furent transformés
en jardins à l'anglaise les berceaux détruits une grande
alleé coupeé en partie un ruisseau creusé des bosquets furent
plantés et bientôt la campagne eut un air infiniment
plus gai. Le chemin d'Utrecht divise la campagne
en deux parties nommées vulgairement le voorstuk et
l'overstuk. Attachons-nous premièrement à la première partie.
Le palais est une des maisons de plaisance les plus avantageusement
situées qu'on trouve sur le Vecht. La vue du Koepelkamer
est superbe de l'un côté on découvre une foule de campagnes
charmantes et de l'autre le Nieuwersluis avec ses toits
rustiques. Quant à la maison elle est irrégulièrement
bâtie puisque la dernière partie a été ajoutée depuis. La
maison est surmontée d'une tour d'où on a une vue
charmante sur les environs. Les sites de ce voorstuk n'ont rien
de bien remarquable le sentier qui suit le cours du Vecht
est sans contredit le plus joli. On trouve cependant encore divers
bâtimens dans cette enceinte. On y voit le fameux Tuinkamer
bâtiment carré dont le plus grand avantage est d'avoir une
bonne perspective sur le chemin et sur de vastes prairies ou
l'on voit le coucher du soleil. C'est une espèce de prison d'état pour
les enfans et pour ceux qui n'aiment point au milieu de l'été
les vapeurs du thé joints à la fumée de tabac et à un air
excessivement chaud. On y voit une écurie capable d'entretenir
beaucoup plus de chevaux que le seigneur de la campagne
n'en a[?] une espèce de grange qui sert de repaire à tous les chiffons
les vieux morceaux de bois pourris, une chambre à billard
avec un billard d'une grandeur énorme, un bâtiment fort vaste
pour contenir une barque dont la pesanteur a bien souvent fait
couler mes soeurs et enfin sans parler d'un petit cabinet
pavé en mosaïque reste du mauvais goût de nos ancêtres, l'habi-
tation du dertumné[?] de cette contrée qui après avoir perdu sa
vieille femme a épousé une moderne Pomène qui bientôt a
donné le jour à une petite Dryade charmante. Près delà
est la demeure du terrible cerbère qui défend l'entrée de
ce nouveau jardin des hespérides.
Entrés dans l'overstuk on remarque d'abord un grand défaut
savoir qu'on trouve une belle allée de châtaigniers belle
à la vérité mais par laquelle il faut toujours aller et revenir
au risque d'être consumé par l'ardeur du soleil dans un potager
remplis des légumes les plus nourrissans et des fruits les
plus délicieux. L'allée contenait jadis un pareil nombre de
beaux platanes mais un cruel hyver les a vu tous périr. Tel
est le sort des hommes et des arbres. À la fin de cette allée on
trouve un banc fort grand qui a reçu le nom de familie-
banc. Jadis encore les bancs étaient infiniment plus
nombreux et on y avait au moins une vingtaine. Un petit
pont qui vous mène de l'autre côté d'un vivier vous conduit
à un enclos décoré du nom pompeux de Ménagerie tandis
qu'on devait tout au plus l'honorer de celui de basse cour. Car
malgré un joli pavillon construit pour donner de la
nourriture aux timides colombes et une alleé de sapins
on ne trouve guère que quelques canards quelques pigeons et
des poules. J'y ai connu plusieurs paons. Les premiers se
pavanaient d'une manière fort brillante mais ce talent
décroissait de paon en paon. Cependant j'étais toujours grand
amateur de leurs précieuses dépouilles. Au sortir de cette
ménagerie on entre dans la partie nommé par excellence
le bois. Deux sentiers vous mènent en suivant les
replis tortueux du vivier nommée le ruisseau. Le plus grand
défaut du terrain est son peu de largeur puisque on peut
voir en même tems les bornes de la campagne à l'est
et à l'ouest et c'est une chose que Delille défend absolument
dans ses préceptes sur les jardins. Le ruisseau se
perd un instant dans un large bassin d'eau. Jadis
nommé le bassin des carpes de la multitude des poissons
de cette espèce qui vivaient dans ces parages et dont la
gueule avide disputait avec avidité les morceaux de pain
que notre bonté leur jetait un hiver rigoureux les a détruit.
Au milieu de cette nappe d'eau s'élève une petite île où
croissent quelques beaux arbres mais il n'y a que les
oiseaux du ciel qui puissent l'approcher. Enfin à la fin
de toute la promenade l'on découvre la tente chinoise d'où
l'on a une vue superbe. Cependant la tente elle-même ne me
plaît pas trop. Pourquoi un ornement aussi bizarre. Il est
fort difficile dans la chaleur de se reposer dans son enceinte
tapisseé d'un papier où sont peint en dépit de toutes les
règles de la perspective une foule de chinois enfin qui ressemble
beaucoup à une serre chaude. Le dessous de la tente est une
grotte humide où l'on trouve un réduit pour satisfaire
aux besoins de la nature et dessous la pente douce qui conduit
au faîte de cet édifice il y a un réduit fort malpropre où les
ronces et les épines croissent à plaisir et qui fut jadis le
séjour de dindons.
M. Étant promené un jours vers la tente j'y trouvai les vers suivans
écrits avec du crayon sur la balustrade
Heureux si le reste de ma vie
Pouvait se passer en ces lieux
O que mon sort serait digne d'envie
Je le comparerais même à celui des dieux
Je répliquai par les vers abominables qui suivent
Je suis avec vous du même avis
Que ces beaux lieux nous ont ravis
Mais votre aimable compagnie
Surpasse encore cette prairie
Ayant un nouvel vers emphatique nous trouvâmes l'année
suivante le couplet suivant
Ces beaux vers furent écrits quand vous étiez aimée
Vous ne l'êtes plus à la[?] chère infortunée
Toute cette belle amitié n'était que du néant.
C'étaient des vers Mme Cochard on ne sut jamais à quels
propos elle les avait mis là. Papa répliqua
Je vois trop dans ces vers que la mélancolie
Empoisonné hélas les beaux jours de ta vie
Et l'amitié. Madame est un présent des cieux
Il faut s'en rendre digne pour pouvoir vivre heureux
Elle fut fort mortifiée de cette réponse. Enfin j'y écrivis
les vers qui suivent d'une manière si illisible que
je crois que personne ne sera jamais tenté de les lire
Le voici donc
Jadis si l'on en croit les traditions antiques
La Grèce fourmillait de rochers poétiques
Sur le sommet du Pinde un poète élevé
Dans son génie étroit n'était plus captive
Mais le feu des neuf soeurs inspirait son délyre
Il charmait les humains par les sons de son lyre
Ce prodige éclatant par les grecs célébré
Semble aux rives du Vecht s'être renouvellé
Car miracle étonnant, une simple prairie
D'un saint enthousiasme a dicté la furie
Elle a dicté des vers célébrant l'amitié
D'autres disant ce lieu n'a jamais subsisté
Du fratras inspiré par la mélancolie
Et du bon sens enfin vainqueur de la folie
O mont prodigue nous de nouvelles douceurs
Que le Parnasse cède à tes adorateurs
Il se trouve un lieu charmant près de la tente nommé l'église.
Il y a de charmant châtaigniers c'est là que l'onde qui baigne
ces champs, finit ou commence son cours car il ne fait
ni l'un ni l'autre.
Papa se promenant un jour vit sur un des bancs le vers suivant
de Mr. Cochard
Assisé sur ce banc avec ma chère marie
J'éprouve mille plaisirs mille sentimens divers
Ah pourquoi cette enfant me doit-elle être ravie
Pour la chercher je courrerais l'univers.
Il avait Boileau à la main dont il copia aussitôt les lignes
suivantes
Le vers le mieux rempli la plus noble pensée
Ne peut plaire à l'esprit quand l'oreille est blessé
Les amusements de Rupelmonde sont
La promenade en voiture. Elle diminue de plus en plus. Maarsen
est maintenant le terme de toutes les courses.
Les promenades à pied. Il y en a charmantes quoique le chemin
revienne toujours au même. Nous parlerons ensuite des environs.
La promenade. C'est ainsi que j'appelle l'action de parcourir
les allées du Rupelmonde.
La promenade en bateau. C'est un exercice très amusant
et qui est ordinairement réservé pour l'après-dîné.
La pêche. Mon plaisir pour cette branche a beaucoup diminué
depuis que je n'ai rien pu attraper dans ce malheureux
Vecht.
Le billard. Je le trouve le plus beau des jeux de la campagne
excepté celui de la crosse que je désirerais beaucoup connaître.
La lecture. Dans le mauvais tems cela s'entend ou le
matin. Car autrement ce serait un péché.
Le volant. C'est un bon amusement dans les jours pluvieux.
Le dîner qui est toujours excellent.
Un drilplank n'est bon qu'a sous moudre les fesses.
Le boston c'est l'exercice du soir puisque les possesseurs de
Rupelmonde désapprouvent toute promenade après le coucher
du soleil et sont grand ennemis de Delille dans ce point-là.
Annales du Lundi
Rédigés par G. d. C.
Di. commença par dire qu'il avait vu la maison des fous
et avait eu beaucoup de conversations avec la reine qui
s'était parfaitement mocquée de lui puisque Vollenhoven
était fort à son aise à Paris et qu'il y avait beaucoup à faire
- mais que lui Dylius avait trop de probité pour pouvoir
y faire des avancemens rapides, que les juristes étaient seuls
en ce cas - on parla beaucoup de la lecture de Test de
la cousine Kops. Dyl. après avoir confessé son ignorance
dans la peinture et le dessin qui lui avait été prouvé
si décisivement par Ignace lui même eut beaucoup de
réflexions sans nombre sur le tableau de de Bré qui furent
refutées victorieusement par J. de Vos qui lui dit que
plusieurs personnes avaient appris avec indignation qu'il
avait pu voir guillotiner de sang froid un pauvre chien.
Oui reprit Dylius je le pus car j'ai une aversion décidée
contre les chiens mais quant à un agneau ce serait
autre chose. L'assemblée ne put s'empêcher de rire de
la prédilection qu'il accordait au timide agneau.
J. de V. raconta ensuite de quelle manière il avait fait
la connaissance avec D. le bien qu'il avait entendu
dire de ses études etc. (D. sans rougir car cela lui est
impossible s'est couvert de sa serviette pendant ce discours
Littérature
Waller Poems 1 vol
Il y a de ces auteurs jolis dans toutes les langues qu'on lit et
relit toujours avec plaisir. De ce nombre est Waller. Non que
chez lui il n'y aurait Rien à retrancher. Nous en sommes
bien loin. Nous avons déjà vu plusieurs poètes anglais flatteurs.
Celui-ci ne l'est pas moins. Il commence pas les louanges de
Charles 2. C'est surtout à la reine qu'il chante sous le nom
de Gloriana qu'il prodigue son encens
Mighty queen
In whom th'extremis of beauty and power move
The queen of Brittain and the queen of love
Aussi les vers adressés à elle doivent être comptés parmi les
plus jolis de la collection.
Mais bientôt après il loue Cromwel dans un panégyrique superbe
ou il le peint comme le prince le plus grand le plus clément
le plus vertueux qui eut jamais existé oui même dit-il
You grieve
You can not make the dead again to live
Et nonobstant tout cela il a l'impudence de faire encore des
vers sur l'arrivée de Charles 2. Si comme l'on dit il se repentait
sur la fin de sa vie de ses chansons amoureuses il aurait
plutôt du se repentir de sa flatterie.
Ses vers sont rimés. Ses poésies amoureuses sont les plus
jolies.
The battle of the summer's land in 3 cantos contenant
un combat contre les insulaires est un fort joli petit poème.
Parmi les vers qu'il adresse à ses amis sur leurs ouvrages il
y en a de fort jolis.
Des poésies religieuses savoir Of divine love 6 cantos of the
fear of God 2 C. of Divine Poesy 2 C. ne respirent point le feu
des ouvrages de sa jeunesse.
Les épigrammes sont en trop petit nombre pour pouvoir
en juger.
J. Delille La Conversation 1 v.
C'est un malheur. Hélas trop commun que souvent les
derniers ouvrages d'un auteur sont bien loin d'égaler les premiers.
Tel est le cas de ce poème. Ce n'est point l'auteur de l'imagination
des trois règnes, des jardins. Je crois qu'une des raisons du peu
de plaisir que fait ce poème est la coupe des vers car si l'on a
accusé l'alexandrin de monotonie que dire de cet ouvrage-ci
où l'auteur a employé une mesure infiniment plus lâche
et plus monotone. C'est un recueil de portraits parmi lesquels
il y en a d'assez bien tracé c'est l'essai d'un homme qui a
beaucoup fréquenté la société mais ce n'est pas un ouvrage
digne de Delille.
Un seconde lecture me fait rétracter en grande partie
ce jugement.
Bilderdijk Winterbloemen 2e deel
Encore des vers du patriarche de notre Parnasse.
Le vers De Schilderkunst m'avait premièrement fort déplu
mais à la seconde lecture il m'a fait plus de plaisir.
L'imitation du genre de Helmers par Bilderdijk me déplaît.
On est ennuyé d'entendre toujours faire des rodomontades
de cet idéal dans les arts. Ce sont encore toujours des vers
dignes de Bilderdijk.
Onmenselijkheid est un vers furieux. Il finit
Neen zet uw voet op gloende koolen
Vertrouw op de adder onder 't gras
Betrouw de toegevroren plasch
Omhels den woudosch en zijn holen
Maar vriendschap menschlijkheid op aard
De Godheid riep ze hemelwaart
Dans la consolation à Brugmans il dit en parlant de la mort
de ses propres enfans
Neen o mijn Gade gij noch ik
Verduurden sints een oogenblik
of 't was door tranen onderscheiden
Door tranen die geen ooglid sprengt
Maar daar zich 't leven in verplengt
Die niet dan radelozen schreidden
Bede. Jolie imitation d'une ode d'Horace.
De Scheldbewoner. C'est une fort belle ode au sujet de l'espoir
de la paix.
Lotbetreuring c'est encore des plaintes en beaux vers.
Treurzang
Wintervreugd De drie lessen et plusieurs autres sont de
fort jolies pièces.
De drie vijanden est une fort belle romance allégorique
imitée de l'Indien.
Afscheid ce sont encore des plaintes sans fin.
Nero aan de nakomelingschap. C'est un fort beaux vers
mais il établit une singulière hypothèse c.à.d. il faut regarder
Neron comme un parfait honête homme qui n'a été entraîné
à tous ses crimes que par son aversion contre la méchanceté
des Romains et le mépris d'eux.
Mardi 26. Mai 1812.
Jamais nous ne goûtons de parfaite allégresse
Nos plus heureux succès sont mělés de tristesse
Toujours quelque souci en ces événemens
Trouble la pureté de nos contentemens
En voici bien la preuve. J'avais été à la campagne chez Bruin
où comme l'on verra plus loin je m'étais parfaitement bien
amusé. J'étais gai et dispos lorsqu à la bourse je vois C. Hartsen.
Je vais à sa rencontre en lui disant. Quel hasard vous amène
ici, il me répond en parlant en même temps de P. Bel. J'ai deux
mots à vous dire. Croyant qu'il s'agissait d'une invitation ou
de quelque chose de pareil j'attends qu'il s'adresse à moi et me
dit Savez-vous quelque chose de M. Tissot. Car il avait manqué
deux leçons chez nous, Je lui dis. Est-ce qu'il serait malade.
Pis que cela me répond il. Je m'écrie Mon Dieu est
ce qu'il est mort et bientôt je reçois la triste confirmation de
cette affreuse nouvelle. J'étais terriblement frappé. Je m'adresse
à mon Papa en ce moment occupé et je lui mords dans
l'oreille M. Tissot est mort. Taisez-vous me dit-il et voyant
mon trouble il me prend aussitôt le bras et m'en mène
tandis que je versais des torrens de larmes et faisais la plus
sotte figure du monde. Nous courâmes avec une vélocité
extraordinaire. Mon Papa pleurait presqu'autant que moi.
Mon oncle de Vos qui nous vit passer fut tout à fait
pétrifié et même deux français se dirent entr'eux. Comme
ce jeune homme pleure. Bientôt nous vînmes verser la
désolation dans le sein de notre famille et ce dîner qui
par la présence de C. et G. Walré devait être réjouissant
ne fut signalé que par la douleur.
Aussitôt après-dîner je fus à la maison du défunt et
là j'appris les détails de l'accident malheureux qui l'a
précipité au tombeau et qu'il a raconté lui-même au hôte chez
qui il était logé.
Il sortait chez C. Hartsen où il avait fait une partie
de jassen. Il faisait assez sombre cette soir. C'était onze heures.
Comme il avait la vue fort basse Hartsen proposa de le
faire conduire par un crocheteur. Mais il refusa disant
qu'il se confiait sur son bâton. En passant le pont du Leidsche-
gracht sur le Keizersgracht j'oublie mon guide dit-il et je
tombe dans le canal. Je me tins assez longtems au dessus
de l'eau et criai de toutes mes forces. Mais comme il n'y
avait personne je me dus laisser enfin tomber au fond où je
me souviens d'avoir gratté dans la boue. Je me sentis enfin
tirer hors de l'eau mais au moment que j'en sortis, je
perdis connaissance. La police s'empara aussitôt de lui. Au
premier cabaret on le refusa au second on dut enfoncer la porte.
Là on lui administra la cure ordinaire et il fut conduit dans
un traîneau à sa maison où il arriva comme un mort.
On le mit dans son lit. Il ouvrit les yeux et paraissait
être content de ce voir chez lui. Les personnes de cette maison
le vullèrent[?] et l'obligèrent à prendre la médecine ce qu'il
faisait avec beaucoup de répugnance. Il vécut de cette manière
le vendredi entier en paraissant souffrir des douleurs
aiguës et ne prononçant que des mots entrecoupés. Il eut
la visité de deux médecins et reçut une saignée qui n'eut
aucun effet. Il voulait absolument beaucoup boire et surtout
du vin dont on ne lui donnait que fort peu delayé dans de
l'eau. Il prononça encore une fois le nom de ses enfans.
Le samedi matin il paraissait se porter infiniment mieux
de manière que l'hôte lui ayant dit M. Tissot j'espère que vous
en reviendrez encore il répondit oui je l'espère avec l'aide de
Dieu. Peu après le médecin étant venu il dit aux personnes
de la maison Mes amis si cet homme là a encore quelques
dispositions à faire il doit se dépêcher car il n'a plus longtems
à vivre. Ces gens concluant d'après l'apparence ne pouvaient
pas comprendre ceci. Cependant la femme courut chez sa belle
soeur. Mad. Petit femme bigote avare et rusée qui jusque
là avait paru vivement partager sont sort mais qui dévoila
son véritable caractère disant que ce n'étaient
pas ses affaires et qu'elle ne voulait pas s'en mêler. La femme
revenue auprès de Tissot lui fit boire de la tisanne qui paraissait
adoucir la douleur qu'il souffrait à la poitrine. Émue par
les paroles du médecin elle s'avisa de lancer un mot
par rapport à ses pratiques mais il lui dit aussitôt Avez-
vous besoin d'argent sur quoi elle répondit non monsieur.
Le mari descendit un moment pour payer un des hommes
qui avaient donné du secours l'avant-hier. Le petit de Tissot accourt
en ce moment et lui dit que son père est devenu froid tout
à coup. Il remonte et lui frotte les tempes d'une liqueur
spiritueuse mais c'était envain. Obiit.
Il s'appelait Louis George François Joseph Tissot mais il
ne se servait que du nom George. Son père était professeur de
l'école de Lausanne. Il était de la famille du fameux
Tissot le médecin. Il avait plusieurs frères et avait une
aptitude inconcevable pour apprendre dans toutes les branches
excepté dans la métaphysique et les sciences exactes. Il
avait un goût décidé pour tous les arts la musique le dessin etc.
Mais son père n'avait point de tems pour s'occuper de l'éducation
de ses enfans qu'il négligeait entièrement. C'était un homme
de bien qui travaillait beaucoup gratis pour des gens pauvres.
Aussi était il généralement adoré et sa mort causa-t-elle
une désolation générale. Il voulut forcer Tissot à devenir
ministre mais celui-ci n'en avait nulle envie et avait beaucoup
de plaisir à devenir médecin. Un ami de son père lui promit
des lettres de recommandation pour la fameuse académie
de médecine et chirurgie à Montpellier. Mais un malheureux
différent survenu entre lui et son père et cet ami le prive
de cet avantage et il reste à Lausanne. Il est nommé précepteur
d'une des écoles latines mais la résolution ayant été prise d'abolir
deux de ces écoles le sort tomba sur la sienne. Dans ce tems
de ses études il avait fait divers voyages à pied notamment
un à Florence un en Suisse et un à Paris en 1789 où il fut
forcé de servir quelques semaines dans la garde nationale
lors du retour du roi de Versailles. Il avait un cousin à
Triconomale qui écrivit à sa famille de lui envoyer
un de ses cousins dont il ferait la fortune. Il partit pour la
Hollande. Là on lui annonça que s'il voulait partir pour
les Indes il devait s'engager comme soldat pour la forme.
Il demanda un certificat qui lui assurerait sa délivrance
le terme du voyage échu. On le lui refusa. Enfin il était
résolu d'acquiescer à ces conditions quand dans la maison
des indes il s'apperçut qu'on voulait lui faire violence et
saisissant un encrier énorme il menaca tous ceux
qui s'opposaient à sa retraite. Peu après il fit connaisance
d'un capitaine de navire des Indes qui moyennant une
rétribution de deux cents florins promit de l'emmener
comme secrétaire. Il alla à son bord au Tessel mais au
moment de partir une tempête violente détacha le vaisseaux
de ses ancres et le bâtiment souffrit de tels dommages
que son voyage fut retardé. Le capitaine présenta alors
à Tissot un ami qui voulait entrer dans le même arrange-
ment. Mais au moment de conclure le marché
celui-ci déclara n'avoir point d'ordre pour relâcher à Tricono-
male. Que faire alors il se plaisait assez en Hollande et
son amour-propre aurait trop souffert de revenir en suisse
sans aucun succès après avoir fait à tous ses amis et
connaissances les adieux d'un homme qui part pour les
Indes. Il fut consécutivement instituteur chez M. Jolles
Graafland, Bruyn et Hartsen. Enfin il épousa une fille.
Catholique qui l'aimait beaucoup. Il avait tantôt beau-
coup et tantôt peu à faire. Il perdit une petite fille charmante.
Il avait employé le fruit de ses épargnes dans des papiers
sur l'état et lorsqu'ils furent tiercés il éprouva une diminution
considérable dans sa petite fortuné pour remédier à cet
inconvénient il résolut de faire établir à sa femme une
petite école et loua à cet effet dans le Leidsche straat
une maison de six cent florins et acheta plusieurs meubles.
Mais son école n'avait point de succès et dans l'espèce de
plus d'une année personne ne vint. Enfin elle commençait
à prendre il y avait déjà quelques enfans lorsque sa
femme tombe malade et meurt. Il fut dans le plus
grand embarras. Il se voit voler par une frippone de servante. Il
dut payer son louage vendre à bas prix ses meubles nouvellement
achetés et il se retira dans une maison au coin du Weterings-
poort. Là il espérait jouer d'un calme philosophique. Il
s'était formé des idées charmantes voulait faire un voyage
a vus ses parens[?] en Gueldre commencer une traduction ou plutôt imitation
d'Apulee. Jeudi passé il m'accompagnait. Nous parlâmes
de diverses choses des Juifs etc. Enfin il me dit vous allez
chez M. Bosscha. Adieu Guillaume. C'était un adieu
éternel.
C'était un homme extrêmement laid noir et couvert de
boutons. Il avait la vue extrêmement basse. Il avait
beaucoup lu et beaucoup vu il pouvait soutenir une
conversation sur toutes sortes de sujets était toujours gai
et avait une mémoire prodigieuse. Il avait la plus grande
douceur envers les petites enfans comme aussi envers
les siens qu'il aimait passionnément. Il était ennemi déclaré
de tout ce que ressemblait au pédantisme et savait le
tourner en ridicule d'une manière fort satyrique. Il
avait une imagination extrêmement féconde qui lui
faisait embrasser des plans ou des systèmes dont il
ne comprenait pas les conséquences. Amant passioné
de la nature il ne pouvait comprendre comment on pouvait
méconnaître le créateur. Égaré dans sa jeunesse par les
écrits d'un Volney d'un Dupuis, il doutait de la vérité
de la bible mais il en admirait la morale. Il était strict
observateur de la morale et abhorrait le vice. Enfin c'était
un homme à qui j'étais sincèrement attaché et dont
la mort me cause bien de regrets.
Jeudi 28 Mai 1812
Enfin après tant d'interruptions reprenons le fil de
mes expéditions de la semaine passée.
Vendredi matin accompagné de J. B. nous nous abon-
donnâmes gaiement à la merci des voiles à plutôt
à la ligne du chasseur sur le navet côtoyant les bords
fertiles de l'Amstel dans une compagnie qui ne signifiait pas
trop excepté pourtant un Mr. de Witt jeune homme fort
aimable, nous arrivâmes au misérable Voetangel où nous
étant munis d'une ration de pain nous nous laissâmes
traîner jusqu'au fameux villages de Baambrug où nous entrâmes
la campagne. Patientée dans un tems abominable. Cette campagne
a une vue sur le chemin et sur le charmant village. La
maison n'a rien de bien remarquable c'est un bâtiment composé
de différentes chambres ainsi cela ne vaut pas la peine de
s'y arrêter. Quant à la campagne elle est fort petite mais
assez jolie il y a un verger un jardin anglais un bosquet un
réservoir de poissons dorés un petit fossé large de quatre pieds
qui doit représenter un ruisseau pour qu'on ait le plaisir d'y
mettre des ponts etc. etc. Parmi les curiosités de la campagne
on doit compter une misérable coupole délabrée qui donne
sur le fosse un réduit abominablement noir et triste
consistant dans une cabane de branches entrelacées que
le habile jeune homme W. a fabriqué de ses propres mains
et qu'il nomme hermitage quoique je croye qu'on trouvera
difficilement un hermite pour un pareil réduit. Enfin à la
fin de la campagne il y a un morceau carré de prairie
coupé par des sentiers où nul arbrisseau ne pare les
fureurs de la canicule et qui doit être parcouru. Cependant
raillerie à part la campagne est assez jolie on a tiré un
fort bon partie de la petitesse du terrain . Feu M. Bruin était
grand amateur du jardinage. Cependant on ne pouvait pas
dire un amateur du jardinage.
Demi bourgeois demi manant.
Car c'était un grand seigneur puisqu'il était Wethouder de la
ville d'Amsterdam. Il parcourait ses vastes domaines la
serpe à la main.
Nous avions formé le projet d'aller Samedi à Schraveland.
J'en avait le coeur joyé mais malheureusement j'entendais
les vents gronder en mugissant. Cependant à 6 heures je me
levai du mal édredon que j'abhorre et j'étais devant le lit de mon
ami. Mais je pouvais lui crier
Lève-toi cher objet d'horreur et de tendresse.
Nous ne fûmes pas longtems à nous résoudre. La positive
l'emporta et bientôt nous voilà en campagne dans la
prairie qui avoisine la campagne au milieu des vents et
de la bise lui la pipe à la bouche moi tout par la belle
casquette dont j'étais coiffe et la canne à la main.
Nous foulâmes l'herbe fleurie jusqu'à que nous arrivâmes
sur le vecht. À peine arrivés le nocher vient à notre
rencontre. Ms. dit-il j'espère que vous n'aurez pas peur.
Je n'ai qu'un frêle esquif pour vous conduire et bientôt
nous vîmes en effet une machine si petite qu'elle pouvait
tout au plus contenir deux hommes. Je pesais les avantages et
les dangers du passage lorsqu'un terrible cerbère fit.
entendre des cris menaçans. À cette vue terrible je dis à
mon ami Affrontez cette bête je vais affronter les orages. Heu-
reusement j'arrivai de l'autre côté et pendant que je faisais
un rêve philosophique sur le parti que je prendrais en cas que
mon ami fit naufrage il était déjà dans mes bras.
Après avoir payé le tribut ordinaire nous continuâmes notre
chemin par une petite allée fort jolie nommée le Muggen-
laantje. J'ignore parfaitement la dérivation de ce mot bizarre.
Enfin nous longeâmes Korthoef. C'est une suite de maisons on doit
passer vers chacune d'elles par un petit vert pont. Ici le vent
soufflait avec encore plus d'intensité et je craignis ma casquette que
ce maudit vent ôtait de ma tête à tous les diables. Enfin nous
arrivâmes dans l'auberge de 's Graveland où l'on sortait à
peine des bras de Morphée. Après avoir avalé dans cette triste
maison un mauvais verre de lait et d'eau de vie que nous dûmes
payer au poids de l'or nous nous acheminâmes vers la campagne
de Boekenstein de M. Alewijn en parcourant une grande partie de
's Graveland. Cet village est situé de deux cotés d'une rivière. De
beaux arbres l'ombragent et trois campagnes en rendent le séjour
recherché. La campagne de M. Alewijn est grande de 70 arpens on
y remarque la variété la plus étonnante de là vous voyez un bassin
superbe entouré de beaux hêtres et presque impénétrable à l'ardeur
du soleil, là vous voyez des champs de blé au milieu de la campagne
là une superbe prairie élevé au milieu des forêts tandis que d'un
autre part un sapin pleureur frappe l'oeil par sa majesté et inspire
une douce mélancolie. Après avoir fait le tour de ce jour en chanteur[?]
nous nous promenâmes sous les beaux arbres de 's Graveland
chacun muni d'un morceau de pain pour assouvir une faim dévorante.
Nous poursuivîmes tranquilement notre chemin et passant
par le leeuwenlaan où l'on voit à sa gauche la belle
campagne de M. Meulmann. Nous arrivâmes enfin a l'humble toit
qui cachait les beautés et les grâces c'est à dire chez Mad. Roochusse.
Reçus cordialement nous jouîmes du repos après tant de fatigues
J.B. dut[?] lire deux fois sont triste vers sur la noce d'argent de son oncle.
On me pria de dire celui que j'avais fait à la partie de comédie mais
un génie malfaisant me l'ôta de la mémoire dans ce fatal moment
car je l'avais retrouvé en sortant de la porte. Nous traversâmes cette
campagne si l'on peut donner ce nom à une allée entourée d'un
potager. Cependant nous trouvâmes cette retraite charmante.
Les pauvres humaines veulent être flattés. Enfin nous prîmes
congé de cette campagne délicieuse après nous être fortifiés.
Ensuite le coeur gros nous passâmes le Klapbrug et marchâmes
toujours droit en avant jusqu'à ce que nous rencontrâmes enfin
la tour d'Ankeveen petit village qui a assez bonne apparence.
Mais de là nous eûmes une traversée abominable jusqu'à den berg.
Figurez vous un sentier sabloneux environné des deux
côtés par de lacs et s'étendant à perte de vue. Je croyais
y succomber. Nous atteignâmes enfin Den berg, village fort
joliment situé. L'église est sur une montagne. Une branche
du Vecht l'arrose. Enfin après un quart d'heure de marche nous
fûmes encore arrêtés par le vecht et une beauté mistique nous conduisit
à l`autre bord. Elle eut la charité de nous avertir que l'istme
qui joignait la prairie que nous devions passer au [onl.]
était coupée qu'ainsi il faudrait sauter. Cette nouvelle nous
[onl.] de pareux[?] cependant nous passâmes par les domaines
d'un agriculteur et nous finîmes notre course en traversant
une vaste étendue d'herbe.
Après-dîner nous fîmes une excursion dans la campagne de
M. Ketwich. Ce n'était pas la déesse du goût qui avait présidé
lors de sa fondation. Ce monsieur qui était très riche dépensait
des sommes énormes à bâtir pour employer les ouvriers. Ceci
a donné naissance à ses belles écuries et à un temple carré
avec des colonnes peintes et décorés des neuf muses qu'on dit
avoir coûté des milliers de florins. Il y a aussi une maison
avec un souterrain. Mais sans goût. Le nouveau possesseur
adorait les allées droites et l'amélioration qu'il avait faite
faisait invoquer le ciel pour qu'il n'améliorât plus rien.
Le lendemain matin nous allâmes à Vreeland village charmant
dont on fera une mention plus ample dans la descr. des environs
de Rupelmonde. Nous y allâmes par Loenersloot. Le long d'un chemin
fabriqué il y a quelques années et qui n'est pas désagréable en
cas qu'il ne fait pas trop chaud. Nous retournâmes par la campagne
de M. van Keulen. Elle est extrêmement vaste mais il n'y a
pas du (du moins dans ce voorstuk) assez de variété et les arbres sont
encore tout à fait nains. Nous vîmes les dehors de l'hermitage
peint avec beaucoup de goût et orné par des inscriptions
latines et françaises.
Après-dîner je vis la campagne de M. Bassé qui est très jolie. Il
y a toutes les variétés possibles un bosquet une île une superbe
rangée de sapins. Toute la famille de ma cousine de Clercq
vint chez nous. Il y avait une jeune demoiselle Frise qui
montait sur les échasses avec une agilité surprenante.
Nous parcourûmes pas à pas la campagne. Je pensais à
Gresset.
On ne vous fera pas grâce d'une laitue.
En voilà vraiment assez.
Vendredi 29 Mai
Enfin après avoir pris haleine après cette énorme description
retournons aux autres particularités de cette semaine-ci.
∙Premièrement parlons encore de Tissot.
∙Il y a chez quelques gens d'Amsterdam une pente singulière
à voir partout du crime. P.E. on a eu l'infamie de raconter
que Tissot s'était noyé lui-même. Quelle atrocité. Et on a
fait la dessus les contes les plus étranges. En attendant le
médecin et l'apothicaire se disputent à qui aura la
médaille pour lui avoir sauvé la vie.
Une chose que j'entendais dire et qui est vraie c'est que
lorsqu'un malheureux est tiré de l'eau chacun le
saisit et l'empoigne et ne démord pas pour avoir la récompense
promise peu lui importe que le patient fait déchiré en
lambeaux. Et voilà des hommes civilisés.
Les enfans furent chez nous leur aspect était touchant.
Encore dans l'âge de l'innocence ils ne se doutaient de rien.
Papa fit chez Me. Petit qui lui parut beaucoup moins
dure[?] qu'il n'avait été informé. Elle fit de très bonnes promesses.
Mais que ne peut-elle pas s'il est vrai que ce fut une femme
hypocrite.
Ce M. Martinet qui connaissait très bien la
famille de Tissot assura que cette femme tirée
par lui du sein de la misère s'était conduite d'une manière
scandaleuse non seulement avait reçue dans ses bras d'autres
messieurs mais le laissait courir sans argent et n'avait
aucun soin du ménage. Si cela est vrai j'en plains d'avantage
le pauvre Tissot et je l'admire de n'avoir jamais proféré une
plainte. Il était toujours gai. Quels que puissent avoir été
ses sentiments sa morale était pure. Il était doué par la
nature d'une imagination souvent déréglée mais son
coeur était bon. Il était honête jusqu'au fond de l'âme
mais sauvage à la première vue. C'était de ces hommes
qu'il fallait connaître pour apprécier. Souvent un seul
objet occupait entièrement ses idées. Je l'ai vu épris des
Géorgiques de Virgile devant pour ainsi dire Apulée dans le plus
grand enthousiasme pour Rousseau. Deux exemples
pourront prouver sa mémoire prodigieuse. Lorsqu'il
m'apprit le latin il y avait une quinzaine données qu'il
n'avait fait aucune étude en cette langue et cependant
très peu de phrases l'embarassaient et je n'ai presque
jamais rencontré un mot qu'il ne sut pas. Depuis ses
leçons du collège où il avait étudié le grec il n'avait presque
jamais jeté les yeux dans un livre de cette langue et
cependant il ne me manque presque pas un mot lorsque
je lui fis réciter les verbes. Il n'avait pas la moindre rouille
de pédantisme ou d'affection. Il savait parfaitement le
Français la Géographie L'histoire lisait avec le plus grand
plaisir des livres hollandais connaissait l'Italien
le latin et entendait assez l'Allemand et l'Anglais.
Il avait même commencé à faire des études en Espagnol
et même à son âge il aurait pu faire encore des progrès
étonnans surtout puisque il était tout entier appliqué
à ce qu'il faisait. Il avait toujours eu le plus grand
penchant pour tous les arts mécaniques. Il jouait de quelques
instrumens et surtout du corde de chasse mais la
difficulté de lire la musique à cause de sa vue si basse
l'empêchait de faire des progrès. Il avait beaucoup de
génie pour le dessin et j'ai vu un fort joli petit dessin qu'il
avait fait. Il n'était pas fort versé dans les mathématiques
mais en savait pourtant les élémens. Mais quant à la
Physique il y était très avancé et même il avait composé
un ouvrage sur la physique dont on lui avait volé
une partie de manière qu'il ne conservait que quelques
fragmens mais c'était un ouvrage fort bien écrit qui
n'était ni trop long ni trop court. Il aimait beaucoup l'histoire
disant qu'il n'y avait point de livre d'histoire où l'on ne
pût trouver quelque chose d'intéressant. Il aimait
singulièrement Tacite ainsi que le style de Quinte Curce.
Quant à la poésie c'était surtout les descriptions de
la nature telles que les Géorgiques de Virgile les élégies
de Tibulle les ouvrages de Delille etc. Il avait quelque
prévention contre les tragédies disant qu'elles étaient
trop exagérés mais quant aux comédies il les aimait
beaucoup et nous rîmes bien en lisant ensemble les
Aulularia et Menechmes de Plaute. Il aimait les Holland[ais]
quoiqu'il y eut beaucoup de chose en eux qu'il ne pouvait
souffrir. Il était retiré et on devait souvent lui extorquer
les choses. Avec moi cependant il devenait plus franc
de tems en tems et je crois que notre union se serait
raffermie encore mais le ciel l'a voulu autrement.
Dans les premiers tems que je le connus il était
enthousiasmé pour N. mais dans la suite il le détestait.
Voilà encore deux pages qui pour ainsi dire sont
coulées de ma plume. Si jamais je pouvais oublier cet
homme cher je n'ai qu'à relire ce que j'ai écrit cette
semaine et tout me rentrera dans l'idée. Je lui dois aussi
le talent inappréciable de m'être formé un style
français ce que peu de personnes ont et j'espère que
les mémoires continueront les excercises en français
interrompus par sa mort.
Je me souviens ici d'un de ses étranges paradoxes
c'était le mépris qu'il avait pour les femmes. Il disait
qu'elles devaient être soumises aux hommes et tâcher seulement
à les amuser et à leur plaire. Parmi les exemples qu'il
citait était surtout celui qu'il avait vu dans deux
ours à la ménagerie de Berne.
Je me souviens ici de la bêtise du ministre de Baambrug.
Il avait soutenu qu'il était impossible que le St. Esprit
fut descendre du ciel et voici pourquoi. Il ne s'est écoulé
que quelques semaines depuis l'ascension et la pentecôte.
[onl.] une boule de canon tiré de l'étoile la plus proche de Sirius
p.e. aurait besoin de je ne sais combien d'années pour arriver
à nous. Et le St. Esprit qui devait arriver du ciel a une bien plus
grande distance que Sirius ne pouvait pas aller plus vite
qu'un boulet de canon.
Belle conclusion et digne de l'exorde.
Quelles pitoyables idées que cela.
Revenons à d'autres sujets p.e. au marché. Sans cette mal-
heureuse affaire nous serions assez calmes du moins l'on
n'entend pas parler dans ce moment de conscription ou
de garde nationale. Enfin pour aller court Son excell.
le préfet a mis un maximum et nul négoce ne peut
être fait sans un permis exprès de Son exc. Quelle
sotte chose rien de plus propre à gêner le commerce. Hormis
cela les négocians des autres départemens seraient
bien fous de nous envoyer des grains pour y perdre
tandis que sans ce maximum, non seulement une
quantité suffisante de grains pour remplir notre
déficit de 2000 L. aurait reflué sur notre marché mais même
nous aurions pu approvisionner d'autres départemens.
Nous avons expliqué que tout cela au long dans un
placet dédie à Mr. le préfet qui me paraît cependant
trop long mais que pourrait-il faire même avec les
meilleurs intentions du monde. En attendant tout est
dans une stagnation complète. On a vendu un peu de
seigle mais pas un last de froment. Je ne comprends
pas à quoi tout cela doit aboutir. Les voilà Messieurs
les courtiers toujours empressés à courir après leurs
escalins occupés à regarder gravement le bout de leur nez
et à se promener au soleil 120 H. N. R. 295 gd.
Mon pauvre Papa est bien malheureux dans tous les
achats qu il a fait comme aussi avec le Colzad qui
baisse avec une rapidité violente on peut acheter
le plus beau Colzad pour 490 g. L. L'huile vaut 49 fl.
Orge sans négoce.
Avoine 88 H. f. 88 gd. on ne présume pas que cet article
aura un maximum puisque il n'a pas surpassé beaucoup
sa valeur ordinaire.
Tout promet une récolte abondante.
On a ici beaucoup parlé de la décision de notre jury sur
l'affaire de ce macquereau qui avait tué sa maîtresse. On
a généralement désapprouvé le jury qui a déclaré le
meurtre fait sans préméditation sur une distinction frivole.
Aussi le président avait-il dit à l'accusé qu'il ne devait sa
vu qu'à une pitié mal placée des jures ce que plusieurs ont
pris entres mauvaise part.
Annales du Lundi chez l'oncle
Il faisait dans la chambre un chaud épouvantable à cause
que mon oncle de Vos avait fait allumer du feu. On parla
premièrement beaucoup de la mort de Tissot et de Lublink
sur la décision du jury et sur différentes choses. C. Walré y
était à table ce furent les sottises qu'elle fit avec M. D. les
baisers que lui donna qui étaient l'objet de l'attention
publique. Dyl. était devenue membre de la société de sciences
de Harlem. Nous avions résolu de ne pas lui en parler avant
le dessert quand nous le felicitâmes chacun avec un vers
mon oncle de Vos et moi.
À[?] part car ceci ne convient pas aux annales les vieux
papa avaient fait la remarque que [- onl.] s'était conduite
d'une manière un peu trop libre en effet je ne trouve pas
qu'ils avait tort. La décence est pourtant l'ornement des filles
p.e. une chose seulement elle se couchait sur les genoux
de mon oncle de Clercq disant qu'elle trouvait cela fort
agréable. C'était un peu trop fort.
Littérature
Lantier Les voyageurs en Suisse 3 v. 8o
Un Roman qui n'est pas un roman un voyage qui n'est
pas un voyage.
M. Bortaut épris d'une roturière veut marier sa fille promis
à Delmont au frère de cette intrigante Lamant et le Blanchi
et ils ont rien de mieux à faire que de faire en atten-
dant un voyage en Suisse. Bortaut inexorable épouse sa
belle Philippine enfin cependant à son lit de mort on lui
dessille les yeux et les fugitifs deviennent heureux. Voilà
l'intrigue du Roman.
C'est un livre instructif et amusant non seulement on y trouve la description d'une
grande partie de la Suisse et surtout du Valais mais
on y trouve des details interessans concernant plusieurs
hommes célèbres qui ont habité la Suisse tels que Voltaire
et Ferney. Rousseau et son île Lavater Gibbon Haller
Tissot etc. On y a la description de plusieurs lieux renommés
même un extrait de l'histoire Suisse des détails sur
Genève, l'escalade etc. C'est un livre fort bien écrit.
Quant aux sentimens religieux de l'auteur je ne
suis pas de son avis car il suppose que le déisme peut
compléter la félicité humaine. Même il va souvent
trop loin. Car quoique mon opinion est que le meurtre
de Servet par Calvin est une action qui ne peut être
défendue, cependant je suis loin encore de juger que si
Luther et Calvin étaient nés de nos jours on les aurait
du les mettre aux petites maisons.
Hoffham Theorie der Ned. Poezy 1 v.
C'est un ouvrage écrit avec beaucoup d'esprit. C'est en gran-
de partie une satire contre ces faiseurs de vers dans le
dernier siècle qui croyaient qu'on était le plus grand
poète du monde lorsqu'on rimait bien et que les vers
étaient bien polis et rabotés enfin qui croyaient qu'il
avait plus de mérite poétique
à composer la traduction de Feitama que l'original de
Fénelon. Ce qu'il y a de plus joli c'est que Hoffham appuye
tout ce qu'il dit par des vers tirés de nos meilleurs poètes. C'est
un ouvrage à relire.
De nuptiis Thetis et Pélède trad. p. Guinguené
J'ai lu et j'espère relire encore souvent cet ouvrage enchan-
teur. Tout y est joli. Ariane les Parques le tout. J'avais
commencé à traduire ce poème auprès de M. Tissot. L'objection
que l'épisode d'Ariane est trop long ne me paraît avoir
aucun fondement. Si un morceau est beau qu'importe
qu'il sont long surtout dans un genre de poème aussi
irrégulier que l'est celui-ci. Je trouve la traduction
par M. Guinguené fort jolie.
Jeudi 4 Juin 1812
Déjà Samedi passé à 7 heures je me promenai vers la barque et
j'arrivai fort tôt à mon cher Rupelmonde. Bientôt je m'apperçus
qu'on était troublé par de fâcheuses nouvelles dont la plus
triste était celle qui concernait la formation du nouveau chemin
qui aurait pour suite qu'on éléverait une digue plus haute de
71/2 pieds que le niveau du Vecht. Cette digue entr'autres inconvénient
empêcherait toute la vue depuis le Tuinkamer si chéri
des dames. En outre la chemin devant être élargi. Fosses ponts,
barrières beaux arbres tout ce qui se rencontre dans
sa nouvelle enceinte doit être coupé ou abattu. Enfin pour
former cette digue on prend les matériaux à droite et à
gauche sans égard aux plaintes du possesseur.
Nous passâmes à Rupelmonde des journées fort agréables
surtout la matinée du Mardi. Après que le soleil qui
s'était dérobé le matin entier à nos yeux eut enfin percé
le voile épais qui le couvrait nous nous embarquâmes dans
un frêle esquif muni des provisions nécessaires. Quatre
vigilans rameurs C. Tencate, M. d. C. la servante et moi
revêtis d'une culotte de matelot nous nous embarquâmes
sur la plage liquide est entrâmes dans le canal qui mène
à Ter Aa village que nous laissâmes à notre droite. Tout
allait au gré de nos souhaits, l'onde blanchissait sous
nos rames. Nous passions quelquefois sous des ponts si bas
que nous devions tous nous coucher ventre à terre pour
passer en sûreté. Après avoir traversé une eau pittoresque nous
vîmes enfin quelques arbres touffus. Là nous jetâmes l'ancre
et sous ce frais ombrage nous consumâmes nos provisions
consistant en un pain du beurre de la viande une bouteille
de vin et une cruche à eau. Renforcés par ce repas
nous reprîmes gaiment notre chemin. Nous mîmes cependant
encore une fois à terre près du lieu nommé Ruell à cause
d'une ruine ou plutôt un amas de pierre qui y subsiste encore.
On y voit encore les barres de fer d'une fenêtre. Près de là est
une verte colline où se trouvait une épine superbe en fleurs.
Après nous être abandonnés aux délices de ce lieu nous
retournâmes à bord et traversâmes une rivière charmante
où tantôt de beaux arbres, des vues pittoresques ou un
forme charmante s'offrait à nos yeux. Enfin nous arrivâmes
à Breukelen. Ce fut avec le pic que nous dûmes passer ce
village et pour comble de malheur nous dûmes souffrir
les avarices d'un homme qui était propriétaire d'une
chaîne étendue au milieu du fossé. Après être revenus
dans le vecht un moment de désordre mais tout se rétablit
par les efforts réunis des rameurs et nous retournâmes
triomphans dans le port.
Lundi nous avions fait une visite à la campagne de Boomwijk
qui avait été vendue. Les meubles étaient fort peu de chose
et j'avais cru la campagne plus belle. Ce qu'il y a de
plus beau ce sont quatre superbes tilleules qui
sans doute ont vu déjà des siècles. Le jardinier raconta que
plusieurs vieillards passant par ce village s'étaient informées
si ces arbres existaient encore et qu'une tradition rapportait
qu'un général Espagnol avait jadis établi sa
tente sous l'ombrage.
En outre les plaisirs ordinaires de Rupelmonde. Une promenade
à Breukelen, une autre à Vreeland, de petits tours en bateau. Le
jeu du billard celui de l'oie les échasses la promenade à Rupelmon-
de et sterrenschans la lecture le dîner le souper une machine
à sauter et le soir la partie du Boston.
Les trois règnes de la nature p. Delille 2 v.
Je dois avouer que j'ai relu cet ouvrage avec plaisir. Il faut convenir
qu'il y a de l'aridité quelquefois, souvent trop d'antithèses des
tournures deplaisantes de la lâcheté de l'imitation mais ceci est trop compensé
par la description de toutes les merveilles de la nature dans de
beaux vers. En général je préférais le 2 vol. au premier. L'epi-
sode d'Elvire. Les hymens des plantes. Quelques tableaux et
le règne animal me semblent ce qu'il y a de plus joli.
Hier au marché il n'y a avait presque rien à faire. Les négocians
convoqués chez le maire furent grondés au nom du préfet de ce
qu'ils ne vendaient pas d'assez bonnes qualités. On fit bonne mine
∙O lâcheté o tyrannie!
127 H. Nor. Ah. 365 gd.
120 N. Ro. 270 gd.
122 H. O. Br. 297
Lundi 8 Juin 1812
Encore Rupelmonde. Une promenade Charmante à Maarsse
avec P. Ten Cate.
On est informé pourquoi on ne vendait point les meilleurs
qualités de grains du Maxim - Réponse parce qu'on n'en
demandait point - Eh bien c'est une preuve que les prix
sont encore trop hauts et il faudra que Mr. le préfet basse
le maximum.
Voilà comment on gouverne.
129 H. Rhin pour le maximum revenant a 378 g.
120 H. Rogge 260 gd.
82 H. Haver 68
Coolzaad Gron. 44 L. Oly f 44
Tout est encore calme l'on n'entend parler de rien. Je pense
souvent à la fable du torrent et de la rivière du bon
la fontaine.
On n'a point eu d'annales du Lundi la semaine passée
puisque ni mon papa ni moi n'ont été en ville. J. de Vos n'y
assistait non plus mais ce soir nous verrons.
Littérature
Akenside. Poems
Voilà encore un fort joli poète Anglais. Son poèmethe pleasu-
res of imagination quoiqu'il sort par-ci par-là un peu
difficile à entendre renferme de très beaux morceaux. Le
premier chant renferme la définition métaphysique des
plaisirs de l'imagination. Il décrit le plaisir que nous
fait le beau le sublime etc. Dans le 2 et 3 livre l'auteur
représente la connection de la philosophie et de l'imagina-
tion les plaisirs de esprit le degré de plaisir que nous
procurent toutes les passions l'état de l'homme décrit par
une allégorie. Ensuite la peinture du ridicule de l'imitation
etc. Parmi les odes il y en a à la vérité de charmantes
ou il y a beaucoup de goût et dont plupart roulent sur des
sujets forts intéressant. Il y en a une on leaving Holland.
mais ce n'est qu'une apologie de l'angleterre. Les plus jolis
sont Mor. ch. T. [onl.] no 47.48.49.50.51.52
On the winter solstice
Suspicion
Hymn to cheerfulness.
on the use of Poetry
To curio
On lyric poetry
To the earl of Huntingdon
The remonstrance of shakespeare
To sleep
To the country gentleman
Il y a de jolis vers pour servir d'inscriptions surtout un
pour la statue de Chaucer.
Mardi 9 Juni 1812
Annales du Lundi
De grands débats eurent lieu à cette séance. Après
qu'on eut raconté les difficultés de l'oncle de Vos à transporter
son vin et de M. Koster pour un certificat de séjour D. entra
tout parfumé de l'eau de mille fleurs par ce que disait-il
il avait travaillé. Il s'opposa à ce qu'on irait le dimanche
chez Kemper parce que disait-il un homme de bonne compagnie
ne voyage pas le dimanche. Ensuite il raconta la consternation
qui avait régné chez les deux Juives maîtresses de l'amiral
de Winter à la nouvelle de sa mort. Il tenait l'une pour tous
les jours et l'autre pour le dimanche. Il raconta ensuite
tous les détails de la mort du chirurgien Albesing avec
qui disait-il il aurait voulu vivre et mourir. De Vos ensuite l'at-
taqua de ce qu'ayant été chez lui comme médecin il lui
avait donné une emplâtre qui n'avait aucun effet
qu'il l'avait quitté en disant qu'il fallait tout
abandonner tout à la nature. Que cependant ses douleurs
continuaient et qu'il avait reçu un remède pour les
guérir dans 24 heures. Dylius dit que s'il ne suivait pas
les préceptes il tomberait dans les maladies les plus
horribles. Il se plaignait ensuite que le diplôme de la société
de Harlem n'était point du tout brillant ni bien conditionné.
W. de V. alla chercher le sien qui était tout autre et que
J. de V. lut en se plaignant des nombreuses fautes d'ortographie
qui s'y trouvaient. On lut ensuite plusieurs pièces relatives et
trois vieilles gazettes. D. disait que le vieux et nouveau style
différaient de 30 jours et il dit que l'ère julienne avait
pris son origine de Julien l'apostat. Il parla ensuite d'une
sermon de Klinkenberg qu'il avait entendu il y avait entr'autres
une réfutation de Voltaire qu'il raconta mais dans ce récit
il fixa le nombre des chrétiens à 5 et ensuite à 15 millions
Klinkenberg avait aussi parlé d'un règne de nulle ans mais
il n'y avait compris goutte il pria le grand-papa de lui
donner des explications là-dessus mais celui-ci ne donna
que des réponses évasives. Il alla chercher le Nouv. Test. en
grec ce qui ne produisait pas beaucoup d'effet. Il se plaignait
souvent à M. Koster de ce qu'il devait souffrir. À table il reçut
de vives réprimandes à cause du mot Gastheer qu'il employait.
Il raconta que le M. Suchet après la prise de Valence ayant
demandé son congé à cause d'une fistule l'empereur fit venir
M. Dubois et lui dit Ik heb daar een brief van Suchet gekregen.
Enfin il devait partir pour l'espagne. Celui-ci qui n'avait
nulle envie de ce voyage recommanda son gendre. L'empereur
dit c'est bon et aussitôt tous deux durent partir mais il leur
donna 100 000 fr. avec les fraix de voyage. D. déraisonna sur les
conciles il disait que le concile de Trente avait eu lieu dans
le 3ème siècle que l'hist eccl. était la plus belle des histoires
tandis que J. de Vos soutenait le contraire. Il se récria sur
les beautés de Venema et déprécia Mosheim suivant les
sentimens de Klinkenberg. Il croyait que la division de
la bible en vers avait été faite dans le 2e siècle tandis que
mon grand-père assura que cette division avait été faite
par l'empereur Stephanus dans des promenades à cheval.
La controverse recommença sur le mal de dos. Ma tante de Vos
fatigué du mystère qui mettait son mari à cacher le
secret du nouveau remède le découvrit c'était une friction
avec du sel ammoniac. D. dit que si quelqu'un de la famille
ayant le mal au dos était guéri par ce remède dans
deux fois vingt-quatre heures qu'alors il s'engageait à
payer deux tasses de glace. J. de V. raconta ce qu'il croyait
être son mal. D. dit que dans tous les systèmes qui avait
été imaginés depuis Hippocrate jusqu'en 1812 on n'avait
jamais soutenu une pareille absurdité.
Une anecdote assez curieuse puisqu'elle marque du moins
quelque trait de courage dans nos tems est la suivante.
La moitié d'un cimetière près de Diemen serait consacré
pour les catholiques qui se préparaient à y faire une
procession depuis Diemen. Le pasteur Cramer et d'autres curés
y assistaient revêtus de leurs habits pontificaux et se préparaient
à marcher, accompagnés du M. le préfect du Zuiderzee, du
maire d'Amsterdam etc. Les cierges tout était près
quand tout à coup le maire de Diemen s'avance et dit Messieurs
les instructions et mon devoir comme Maire me défendent
de souffrir des processions sur les chemins publics et malgré
tout ce que ces messieurs dirent il leur disait qu'ils
pouvaient partir mais qu'il employerait tous les moyens
possibles pour les en empêcher. Ces messieurs durent épuller[?]
leurs beaux accoutremens et s'habiller dans une grange [onder regel toegevoegd: le préfect n'y fut pas]
situé dans l'enceinte du cimetière.
Littérature
Loosjes. Ebba Niels
Une femme qui a perdu son amant et le trouve après
30 ans changé en bronze est un sujet bien drôle pour une
tragédie. Il n'y a point d'intérêt pour des amours passés
il y a si longtems. Le rôle d'Ebba Niels renferme quelques
morceaux écrits avec verve. Les trois autres rôles servent
de remplissages. On ne sait pas trop comment ce jeune homme
en bronze a été lancé hors de la terre.
Mardi
Il faut avouer que la semaine passée a été bien triste.
Deux pauvres enfans malades à Rupelmonde. Papa Maman
la grandmère tout était au désespoir.
Jeudi 18 Juin 1812
Oui il faut convenir que cet état était déchirant ma
pauvre maman assisse près du lit de son fils ne voyait
pour ainsi dire que lui dans [onl.] elle avalait toutes
ses paroles ses soupirs ses plaintes. Ajoutez encore à cela
que cet enfant était toujours doux comme un ange
avait les égards les plus enchanteurs ne se plaignait
point et c'est alors qu'on peut comprendre quelle douleur
c'eût été de perdre un enfant pareil. D'un autre coté
la pauvre Marie ayant la fièvre était dans une
autre chambre et ne souffrait pas moins. Mon pauvre père
ne versait pas moins de larmes sur le sort de ces pauvres
enfans. Enfin Rupelmonde dans d'autres tems le
séjour du plaisir était devenu celui de la plus
morne tristesse. Depuis le matin jusque au soir on
n'entendait parler que des maladies ce qu'ils disaient,
ce qu'ils voulaient, ce que disait le médecin qui venait
trois fois par jour. Dimanche M. Rauenhof vint et il
fut reçu comme un ange venu du ciel. Maman était trans-
porté de joie. Grâce au ciel ils sont maintenant beaucoup
mieux.
Lundi passé l'exécution eut lieu des trois condamnés Mad.
Brummelkamp Verkerk et la servante. La guillotine était
érigée sur le Nieuwmarkt. Le monde affluait sur ce Nieuwmarkt
pour voir un si beau spectacle. Les fenêtres étaient partout
bordées de dames et c'étaient surtout les femmes qui affluaient
parmi la populace. L'exécution fut heureusement
achevée. La servante était à moitié évanouie Verkerk
recommanda son âme à Dieu et à Jésus Christ et Mad.
Brummelkamp ne dit mot. Un coup et la vie d'un homme
n'existe plus.
Annales du Lundi
∙Dylius had de executie gezien doch zeide er de gantsche
dag melancolicq van te zijn. Ik moest midden onder het
jassen en het geschreeuw der aanhoorders eene allegorie
op de heer Dighen uit le journal de l'empire voorlezen.
De heer Dylius was met docter Munting bekend geraakt
en verhaalde eenige staaltjens van zijn buikspreken.
Hij nam Gerrit de Vos als aankomend dokter onder zijne
protectie.
Littérature
Vellejus Paterculus
C'est une histoire Romaine en deux volumes J. il y règne une
grande lacune. La première partie ne commence qu'avec
les Graches et va jusqu'au règne de Tibère. Le style est succinct
et quelquefois beau et entremêlé d'observations judicieuses.
L'auteur trace ça et là de fort beaux portraits en quelques
lignes. Ce que j'y trouve le plus répréhensible c'est sa
flatterie envers tous les Césars et surtout envers ce
maussade Tibère qu'il ne considère que comme le
plus parfait des hommes. La description des Campagnes
de Tibère est assez étendue. Enfin c'est un auteur qui
mérite bien d'être lu. La mort de Cicéron la défaite
d'Antoine et plusieurs autres morceaux sont écrits
avec verve. Il a dédié cet ouvrage à M. Vinicius à
qui il adresse souvent la parole. L'auteur lui-même
a été tribun militaire ainsi que son frère et il
a été témoin oculaire de tout ce qu'il raconte des
expéditions faites sous Auguste et sous Tibère. Il
avait suivi l'armée dans différentes parties du
monde.
Gray and Lyttelton Poems 1 v.
Gray
Voilà encore un étranger dont j'ai été charmé de faire
la connaissance. Ses vers dans ce volume sont en petit nombre
mais méritent bien d'être lues on trouve premièrement
une jolie Ode on the spring, puis on the death of a cat
si joliment imitée par Bilderdijk.
On Eton collège c'est aussi une jolie pièce en parlant des
écoliers.
To each his suffrings: all are man
Condemned alike to groan
The tender for anothers pain
The unfeeling for his own
Yet ah, why should they know their fate
Since sorrow never comes too late
And happiness to swiftly flies
Thought would destroy their paradise
No more while ignorance is bliss
T'is folly to be wise
On reconnaît déjà dans ces lignes la douce mélancolie
d'un poète anglais sensibles. J'aime mieux de pareils vers
que les flatteries de Dryden ou de Waller.
Ode on adversity jolie pièce
The progress of poetry. A pindaric ode
Ode for music
[accolade achter de vorige twee regels] Quoi qu'il y ait de
belles strophes cependant la seule idée d'une ode pindarique
dans une langue qui a si peu d'harmonie que la langue
anglaise fait pitié.
The fatal sisters [accolade] traduites des anciens patois. Il
The descent of Odin [accolade] y a beaucoup d'énergie et elles
The triumph of Owen [accolade] mériteraient de passer sur la
Death of Abel
Lyre du traducteur de Fingal
Elegy on a church yard. Quoique ce petit poème ne contienne
pas cent cinquante vers on peut le compter à mon avis parmi
une des productions qui font honneur à la littérature quoique
les Français veulent le déprécier en faveur de leur
M. Fontanes avec son jour des morts que je ne connais cependant
pas et dont je ne puis juger.
Trois jolies épigraphes. Celle sur Mist. - s. Clarke commence
ainsi
Lo where this silent marble weeps
A friend a wife a mother sleeps
A heart within whose sacred cell
The peaceful virtues loved to dwell
Lyttelton
Sans qu'il ait les talents de Gray on peut voir que ce
Littelton a été un homme d'un goût élégant formé
par la lecture des anciens et qui avait de fort bonnes
dispositions pour la poésie. En un mot c'est un poète
fort estimable.
Son plus grand ouvrage est The progress of Love en quatre
eclogues appellées Uncertainty Hope Jealousy et Possession.
Il y a de jolis morceaux mais je trouve que la marche
des quatre éclogues est beaucoup trop uniforme.
Ce qui m'a plu beaucoup ce sont quatre épîtres dont
deux sont écrites l'une de Rome l'autre de Paris et donnent
une fort jolie description de l'Angleterre et de la France. Les
deux autres roulent sur des sujets philosophiques
voici ensuite ce qui m'a plu le plus.
Advice to a lady contient de très bonnes maximes pour la
conduite d'une femme.
Song written in 1732
Part of the El. of Tibul (Divitias alius sibi fulvo congerat auro)
∙To a lady with a new watch
To the memory of the same lady. Cette élégie est un peu
longue mais contient de belles idées.
To Mr. Glover on his Leonidas. C'est une belle apostrophe aux
Anglais.
Cato's speech to Labienius
Bilderdijk Nieuwe Mengelingen. Ynt. 1806 2 v.
C'est une chose singulière qu'il y a si peu de poètes qui ont
pu tirer des vers énergiques de sujets religieux. Le decretum
horrible plusieurs morceaux de Racine le fils plusieurs
de nos cantiques sont vraiment une exception. P.E. voici
le grand Bilderdijk si grand comme poète épique érotique
tragique didactique philosophique
qui donne ici des vers religieux qui ne
signifient pas trop.
De ongodisten. Ceci commence bien mais bientôt ce
n'est qu'un sermon en vers. Ce n'est pas ainsi que Bilderdijk
chante la peinture. C'est comme si c'était de Feitama de
De Haas ou d'un auteur pareil.
De christen in 't lijden tout de même
Levenslust
Aan Europa voilà l'auteur rentré dans son domaine
une peinture exagérée de nos vices, c'est une superbe imitation
d'Horace.
Gerustheid in God. C'est un bon vers mais qui n'a rien de sublime.
Echtheil
Aan mijne gade met een rooze gegroeid op 't graf van mijn zoontje
Ce sont deux morceaux charmans.
Zielzucht celui-ci est assez poétique mais il ne contient
que des jérémiades.
Berusting. Joli vers.
Lisons les plus jolis de ce qui suit sont
De heiland
Tranen
Morgen
Juliaan
Pligt
Vol. 4
Sans doute Bilderdijk brille dans plusieurs genres mais
il n'y en a aucun où il ne laisse tant après lui non
seulement tous nos poètes mais aussi ceux des étrangers
que dans la Romance. Il y en a ici de superbes. P.E. Assenede
qui roule sur l'hist. de Joseph. C'est une des plus belles Romances
que j'ai lu dans ma vie.
Lucretia. Het slot van Damiate. Achilles in Scyros sont plutôt des contes sérieux
comme Eschenburg les nomme et[?] ils ne sont pas moins beaux.
∙De Marokkane est une jolie romance en dialogue contenant
la conversion d'une Mahomédaine.
Yrwin et Vreedenburg ne m'a pas fait tant de plaisir.
Robbert de Vries
Eleonoor
[achter de 2 vorige regels een accolade en] dans le genre burlesque.
Lofzang aan Apollo
,,, Diana.
[achter de 2 vorige regels een accolade en] imitée de Callimaque.
Deux belles odes surDichtkunst et Geweten
Messias imité de Pope.
Aan een roosjen on y trouve exprimé l'idée que l'abeille
produit l'accouplement dans les roses.
'S Levensbeker
De drie wenschen. Petit vers qui contient une vérité immuable.
De visschers
Ouderdom
[achter de 2 vorige regels een accolade en] des jolis vers le dernier est une allégorie.
Holland en Engeland
Aan een engelsch meisje
De nachtmeer en de dekbedden
De duitsche kachels
[achter de vorige vier regels een accolade en]ne contiennent que des malédicti-
ions contre les Allemands.
Puis de jolies pièces fugitives
Aan Barine. De eed der meisjens. Beginsel De filosoofen
∙Garth Poems 1 v.
Ces poèmes ne m'ont pas singulièrement plu. Le Dispensary
est un poème en 6 chants qui traite de la dispute survenue
entre les médecins et les apothicaires par ce rapport l'érection
d'une boutique d'apothicaire pour les pauvres. Quoique l'auteur
assure dans sa préface n'avoir copié que quatre vers du lutrin
à pendant il en a pris les idées entr'autres. p.e. l'épisode de la mollesse
l'idée d'une furie allant trouver un médecin.
Quand la discorde enfer toute noire de crimes
Sortant des cordeliers pour aller aux minimes
Ensuite d'une furie ou je ne sais que qui prend la forme d'un
fameux apothicaire comme la discorde celle de Sidrac.
Puis le combat où ils se jètent avec des pillules des drogues
et des vases de pharmacie ainsi que chez Boileau avec des
livres. Les détails de ce combat sont assez comiques il y a
de belles idées mais cependant le poète Anglais est bien inférieur
au français. La conclusion du premier est meilleures
c'est une joli idée de représenter les médecins en enfer livrés
à la brutalité de ceux de leurs pratiques qu'ils ont
dépêchés vers l'autre monde.
Claremont. Ce doit être je crois un pendant au Coopers
Hill et Windsor forest mais ce n'est qu'une description
des Druides et un conte de la mort d'un certain
amant dont la maîtresse insensible fut changée en Écho
et enfin l'apologie de Guill 3 et Georges 1.
Il n'y a ensuite d'original que quelques envois et prologues
et puis une traduction de plusieurs fables d'Ovides que je
n'ai point lues car si l'on voulait lire toutes les traductions
des anciens dans les langues modernes on ne finirait jamais.
Vendredi 19 Juin 1812
Par les achats d'une certaine quantité de grains pour compte
du gouvernement les prix sont montés extraordinairement
120 H. Nord T. 364. 116 H. Vr. 300 gd.
114 H. N. Rogge 456. 120 H. 180 gd.
∙Mais aujourd'hui il y avait une stagnation complète
on dit que le maximum des grains sera ôté.
J'ai été ce matin au jury. Il s'agissait d'un pauvre diable
qui dans désirant d'avoir de quoi vêtir ses frères avait dérobé
pendant la nuit quelque linge et vêtemens. Il en avait caché
une grande partie mais avait confessé tout de suite et
déclaré où il avait caché les effets. Son père avait assisté
mais n'était pas à bord en ce moment. Le père fut absous et
le jeune homme condamné à deux années de détention.
Voici les formalités et le cours du jury.
On prend date du nom et de l'age des accusés
Les jurés font leur serment
Le président déclare de quoi il s'agit
On lit l'acte par lequel la cour de la haye a transféré le
jugement à la cour de première instance
On lit l'acte d'accusation
Le proc. imp. produit ses preuves
Les témoins sont amenés
Ceux-ci après avoir fait leur serment sont interrogés
Les accusés sont interrogés s'ils ont quelque réflexion
sur la déposition du témoin.
Les accusés sont interrogés et doivent raconter leurs
motifs et ce qu'ils ont fait.
L'avocat de l'accusé plaide en sa défense
On prononce les questions aux jurés qui rentrent
pour délibérer.
Les jurés reviennent et leur président dit la réponse des
jurés.
Le proc. impérial déclare la punition qu'il voudrait qu'on
infligeât au coupable.
L'avocat fait tout son possible pour produire des arguments
propres à mitiger cette punition.
La cour délibère et donne la sentence.
Mecredi 24 Juin 1812
Nous fûmes plus gais à Rupelmonde à cause du
bon tour qu'a pris la maladie des enfans. Nous fîmes Diman-
che une promenade à Marsen. La pluie nous assaillit et
nous fûmes bien aisé de pouvoir retourner dans un fourgeon
de louage que nous rencontrâmes.
Vita
Depuis longtems j'avais formé l'idée d'écrire en abrège ce
qui m'arriva de plus remarquable depuis ma naissance
jusqu'à l'époque du commencement de ces mémoires.
∙Je naquis le 15 Janvier 1795 ce que fit dire que j'étais né a l'au-
rore de la liberté puisque ce fut justement alors l'époque
de l'arrivée des Français. L'hyver était fort rigoureux et
j'étais si faible que l'on ne me donnait que fort peu de tems
à vivre. La première époque dont j'aie souvenance fut
mon troisième anniversaire. Ma première institutrice fut
une certaine Mad. Dinger qui m'enseigna les élémens de
la lecture et je fis de rapides progrès dans cet art de manière
qu'à cinq ans je lisais couramment non seulement des
livres inprimés mais aussi l'écriture. À cette époque on me
mit à l'école chez une certaine Mad. Anzio et je montrai
premièrement fort peu de dispositions à cet effet et moitié
par menace, moitié par promesses on dut pour ainsi dire
m'entraîner à l'école. C'était un misérable institut où j'apprenais
quatre ou cinq mots de Français par jour. Je passais le reste
du tems à lire dans des livres que j'amenais. Le fatal perroquet
de cet école restera encore longtems dans ma mémoire. Enfin
je fus ôté de cette école et je reçus les leçons de M. van Wijk,
homme que j'ai toujours beaucoup estimé. Il savait beaucoup et
enseignait d'une manière fort agréable. Je me souviendrai
toujours de la manière dont il m'enseignait la géographie
qui était tout à fait jolie. Ce fut chez lui que je puisai le
premier désir de m'instruire tandis que les progrès que je
faisais chez M. Waller dans l'écriture étaient beaucoup
moindres. Je [onl.] maintenant réduire sous une époque générale
tout ce qui m'arriva chez M. Byrde. J'arrangerai ceci plutôt
par Anecdotes que pour en faire une histoire suivie.
M. Byrde était un homme de trente à quarante ans colère
et pédant quoique néanmoins il ne possédât quelques qualités
propres à le faire chérir. Il ne pouvait souffrir la moindre
contradiction. Il me prit tout de suite en amitié. Et je
ne me souviens d'avoir été brouillé avec lui que deux
fois. Il avait des victimes journelles et sa règle
terrible faisait une justice violente.
Le cours des études était fort agréable. p.e. à la première
classe.
Lundi Le matin une demi-heure pour apprendre les leçons qui
étaient à la première classe. Une leçon de Restant une de led.
compl. une des Lec. de Phys. de Cotte. Pour le Mardi Jeudi
et Vendredi. Lundi on apprenait une fable de la fontaine.
Mecredi de l'abrégé des sciences. Samedi de Mythologique.
Puis une heure de lecture. Les princ. ouvrages étaient Abr. de
l'hist. un par Formey. Petit abr. de L'hist. un Disc. sur l'hist.
Table de l'hist. Lec. de Phys. Une fort belle grammaire Lycée
de la jeunesse. Mecredi et Samedi on lisait en holl. Wage.
vad. gesch. verkort. Kleine kat. der natuur.
Ebert. Knigge werk. Jungst kennis der hem. ligch. etc. Puis
après un petit intervalle suivait la lec. de géograph. Quelques
garçons lisaient la disc. des pays dans des cah. géogr. Les autres
suivaient sur la carte. M. Byrde après nous avoir interrogé
lisait quelques détails sur ces pays et nous nous servions
alors de superbes atlas qu'il avait. Lundi il nous dictait un
thème en français puis deux pages d'écriture les leçons
étaient récitées. Mardi nous faisions un extrait en franc.
Jeudi en holl. Vendredi des parties du discours. Nous dînions
ensuite et avions une demi-heure de recréation. Après-dîné on
faisait encore une écriture corrigé et mis au net. Vendredi
on faisait un thème en hollandais et le reste du tems
était consacré à l'aritmétique.
En effet en cas que je dusse jamais former une école je
suivrais plusieurs des institutions de M. Byrde parmi
lesquelles il y en avait beaucoup des excellentes.
∙Le reste à l'occasion sous le titre V.
Mecredi 1 Juillet 1812
Puisque je n'ai rien mandé depuis Mecredi il y a une semaine
il faut reprendre les choses de là. Jeudi matin mon oncle Van
Heukelom me fait dire de me rendre chez lui avec la plus
grande célérité possible. Je m'habille à la hâte et me rends chez
lui. Il me dit qu'il lui serait impossible de venir le jour suivant
à Rupelmonde et qu'il désirerait beaucoup que Papa en
fut informé avant son départ de Rupelmonde qui aurait
lieu le même jour à midi. Que faire. Je dis à la fin que
je n'avais rien de mieux à faire que d'entrer en campagne
et de chercher à rencontrer mon père. Ce fut aussitôt fait que dit.
Je rentre chez nous m'empare d'un gros bâton et comme
le fils du Vicar of Wakefield je me mets en chemin. J'avais
le coeur gai 1 à cause du beau tems 2 à cause de la singularité
de l'entreprise. Tout allait bien. Déjà j'étais passé d'un air
triomphant devant de Horn. Il me demanda où j'allais; à
Rupelmonde répondis-je en m'éloignant aussitôt fièrement
et à grand pas. Cependant à peine sorti de la ville une
douce pluie commence. Que faire retourner sans achever
une entreprise une fois formée me répugnait et d'autre
part me faire percer par la pluie sur ce misérable chemin
d'Abcou c'était encore pis. Je m'adresse dans deux
auberges mais point de paraplui. Déjà le beau tems renaissait
et je continuai mon chemin sans penser plus à la pluie.
Venu près du Schulpbrug et réfléchissant enfin je me
procure chez le père de ce pêcheur, bon vieillard un vieux
paraplui dévalisé. Je laisse mon bâton en gage et je
vais toujours en avant en doublant le pas de sorte que
j'arrivai au pont de Duivendregt après une heure et cinq
minutes de marche. Mais alors tout l'horison semblait
se déchaîner contre moi. Un vent terrible amenait de
torrens de pluie et à peine mon pauvre paraplui pouvait-
il résister aux efforts réunis de ces deux puissances. Ces
circonstances m'ennuyaient quand tout à coup j'entends
le roulement d'une voiture. Me voilà sauvé dis-je en
moi-même je verrai peut-être des coeurs généreux. Une
berline fermée passe devant moi. Plus d'espoir. Mais tout à
coup une seconde voiture suit où il n'y avait personne.
Je la laisse passer mais réfléchissant sur mon étourderie
je cours après elle pour deux zeshalv. Le marché se
conclut et j'entrai dans cette voiture qui me roula jusqu'à
Abkou et me transporta à sec au milieu d'une bourasque
violente. À Abkou je descends paye mon conducteur et
je me remets en promenade à la douce chaleur du soleil
qui avait percé les nuages. Après avoir remercié les offres
obligeantes d'un paysan qui voulait m'emmener sur
son chariot je rencontrai une voiture où il n'y avait qu'un
monsieur. Après qu'elle eut passé je crus avoir reconnu
mon papa et je courus après elle. Le monsieur et le
conducteur me fixèrent avec surprise mais voyant ma
méprise je retournai sur mes pas. Près de Loenersloot
je rencontrai enfin mon papa avec sa famille qui ne
pouvait en croire ses yeux et était tout ébahi de me
voir arriver là, le paraplui à la main. J'entrai en
voiture et lui fis part de la commission dont j'étais chargé
mais je ne pus lui persuader de rebrousser chemin. Enfin
ne voulant pas avoir le dépit d'avoir fait
tant de chemin pour retourner dans une voiture
fermée où déjà l'oxygène avait de la peine à circuler,
je continuais le chemin vers Rupelmonde après avoir
pris quelques rafraîchissemens. J'eus encore une belle
peur en rencontrant près de Loenen trois gendarmes car
malheureusement je n'avais pas de passeport sur moi.
Après avoir échappé à ce danger j'arrivais à Rupelmonde
où l'on fut tout à fait étonné de me voir. J'y passai un
après-dîné et une soirée fort agréables. Le lendemain
il pleuvait à verse et je fus aisé d'avoir atteint la barque.
Malheureusement les trois roefs étaient loués et je dus
prendre place dans la barque qui était fort sombre
puisqu'on l'avait fermée de l'un coté à cause de la pluie.
Il y avait une bien triste compagnie. Je pris le voyage
de Risbeck que je ne quittai plus. Des gens qui se plaignaient
de la cherté du tabac, qui félicitaient les dames sur ce
qu'elles avaient toujours quelque chose à faire, quelques
histoires d'avantures en bateau, la manière dont quelques
gens se noyent, des complaintes sur le mauvais tems,
des femmes qui tricotaient, des juifs qui dormaient enfin
ce qu'il y a ordinairement dans une barque. L'autre jour
allant à Rupelmonde p. barque j'y rencontrai M. Warin
je m'entretins fort au large avec lui sur la noblesse
sur l'origine de plusieurs châteaux dans les environs du Vecht
sur les maisons de Ruuel, Nyenhorst, Oudaan, dont il me
raconta beaucoup de particularités. Nous parlâmes des
révolutions de ce pays-ci. Samedi je fus encore au Blaauwhoofd
c'est pourtant une superbe promenade. Dimanche j'entendis
M. van der Ploeg sur Job xx. De mensch uit eene vrouwe
geboren is Kort van dagen en zat van onrusten. Une consta-
tion germanique trop d'emphase trop de métaphores des
passages qui sonnent bien mais qui ne disent rien de grands
mots.
Annales du Lundi
De oude heer de Vos was volgens zijne gewoonte vrij druk. Pro-
fessor Tewater was bij hem geweest. Zij hadden over alderhande
zaken gekeuveld. Een brief van invitatie door Kemper
wegens de volgende week wierd voorgelezen. D. de Vos
weigerde. Oom manqueerde. Papa en Mama manqueerden
en dus wierd bij de presenten geconcludeerd van uit te stellen
en J. de Vos gechargeerd uit naam van 't gezelschap dezen
brief te beantwoorden. D. verklaarde dat hij niet
wilde gaan zo De. de Vos niet ging. Men zeide dat hij
geen wil had. Hij antwoorde dan den gantschen dag
trist te zullen zijn. Men zeide weest dan trist.
De roggebroodsbakkers moeten hunne brooden merken.
Toen kwam G. en J. Walré instuiven. De eerste verhaalde
hoe hij met Klaas mabé een dag en twee nachten op
de schoener de Cachelot had moeten blijven zonder
er af te kunnen komen en las een vaersje hierop
toepasselijk voor.
Men ging over het maleisch spreken 't geen tot aan
den avond duurde. bv.
Kassi karossi kakki. |
Geef een stoeltje voor de beenen. |
Kassi api. | Geef vuur. |
Kassi anjer. | Geef water. |
Kassi angor. | Geef wijn. |
Touto pakkian. |
Ik ga mij uitkleeden. |
En zoo voorts. Hij verhaalde veel van de levenswijze in Batavia
en sprak ook japansch. Hij schreef Doctor in 't maleisch
een conversatie van eenen doctor met eenen zieken
op. Aan tafel sneed hij een vaers over het ter zee
varen op en verhaalde zijn wedervaren op het kweekschool.
Dyl. werd vrij wat wijs gemaakt: bv. dat de linie een
brug van water was waarover het schip heen moet zeilen
wegens het doopen etc.
Hij zeide zijn maleische conversatie aan Whilet te zullen
laten zien dat die het wel kennen zoude. Die is in de
West geweest. O dat komt er niet op aan het is toch beide
in verre landen.
Hij wist niet wat of verder was Batavia of de Kaap.
On raconte avec certitude qu'il ne manque que l'approbation
de l'empereur pour déclarer que ces sept départemens-ci ne
sont pas soumis au maximum. Ceci fait monter les grains.
Les meilleures qualités ne se vendent pas puisqu'on espère
recouvrer bientôt la liberté des prix.
120 H. Gron. 360 g. 122 H. Nord. max. 378 à 382.
Rogge 120 H. 170 à 172 gd.
Gerst 99 H. v.n. 146 gd.
Haver 70 H. 60 gd.
Coolzaad Vries 47 L. Oly f 47
Vendredi 3 Juillet 1812
Je crois n'avoir jamais eu un été aussi froid que celui-ci.
Il fait un tems à mettre une bonne redingotte.
Littérature
Les déjeuners de mon cher oncle p. Ducray Duminil. 2 v.
C'est comme presque toujours dans les ouvrages de cet auteur
un assemblage de contes qui ne sont pas propres aux enfants
pour qui ils sont faits. Les meurtres, les empoisonnemens y
jouent toujours un grand rôle. Il y a des caractères affreux.
Cependant la lecture en est assez attachante. L'idée de l'auteur
en disant qu'une huitaine de pareils contes suffisait à l'édu-
cation de ces neveux donne une grande opinion de la
perfection des jeunes gens en ce genre. Les livres de l'auteur que
j'ai lus hormis ceux-ci sont
Les journées au village 8 v.
Les soirées de la chaumière 8 v.
Emilio 4 v.
Petit Jacques et Georgette 4 v.
Les deux premiers ouvrages m'ont beaucoup plus. Il y a de très
jolies choses comme dans le 1 la châtelaine voilée, le plaidoyer des
jeunes gens etc. dans le 2 La chapelle de St. Leonard. L'homme
invisible. Emilie est moins joli je crois en avoir déjà parlé. Petit
Jaques et Georgette est le moindre de tout c'est un triste ouvrage.
Il y entre un certain Bonnet qui lit des chapitres entiers
d'un ouvrage qu'il a fait sur l'antichrist.
Leven van Juffrouw Brummelkamp door M. Broes
C'est intéressant de connaître la vie de fameux criminels
qui offrent quelques aventures comme de Cartouche de Schinderhan-
nes etc. mais dans ce livre-ci on trouve une histoire que tout le
monde connaissait et qui n'intéresse pas trop. Voici le sommaire
de l'histoire tant p. Broes que par des rapports avérés.
Hester avait reçu une bonne éducation de parens religieux.
Elle se maria à 17 ans à Brummelkamp. Ils établirent une
boutique de tabac sur le breestraat et tout allait fort bien
lorsque le mari s'adonna à la boisson. La femme pour tenir
en bon ordre les affaires qui dépérissaient et lui proposa de
prendre son frère dans la boutique et de lui enseigner le
commerce. Mais celui-ci lorsqu'il en fut instruit établit une
boutique dans le voisinage et presque toute les pratiques de
Brummelkamp passèrent chez lui. Les deux époux passèrent
à Hilversum où ils établirent un petit commerce qui alla
bien quelque tems mais bientôt le mari retomba dans son
ancien défaut. Ils passèrent encore quelques années dans une
ville de Gueldre et vinrent enfin à Wijk te duurstede où ils
avaient à recueillir une petite succession. Là ils s'établirent.
Le mari s'enivra à son ordinaire et la femme pour lui rendre
la pareille coucha premièrement avec un Monsieur... et puis avec
Verkerk pour qui elle avait un attachement réel. Un vieux
couple M. et M. Beerenburg demeuraient chez eux et avaient
eu l'imprudence de leur céder tous leurs biens pourvu qu'ils
les entretinssent jusqu'à leur mort. Pour hâter ce moment
fortuné Mad. B. et la servante dépêchèrent cette vieille femme
Beerenburg avec de l'arsenic. Cela réussit si bien qu'on prit
bientôt la résolution conjointement avec M. Verkerk de traiter
le cher époux de la même manière. La première potion ne
suffit pas pour le faire crever ainsi malgré ses souffrances sa chère
épouse lui en donna une seconde et enfin il en mourut sur ces
entrefaites. Le père de Mad. mourut aussi d'arsenic. Le public
en accusa sa chère fille mais M. Broes jeta des scoupçons sur la
servante.
Enfin pourtant les scoupçons de la mag. se réveillèrent en voyant
ces trois morts consécutives. On arrêta les coupables et le crime se découvrit.
M. Broes entre ensuite dans de très grands détails sur les idées
religieuses de cette femme. Mais cependant je ne crois pas qu'il
faille trop s'y fier car faire deux meurtres à tête réfléchie
sans nécessité sans passion de présenter à un mari
souffrant les plus horribles douleurs une nouvelle portion
d'arsenic c'est là le comble de la dépravité humaine.
Lorsqu'elle vint ici les ministres orthodoxes d'Amersfoort l'avaient
montée à un tel point que se fiant sur la satisfaction continuelle
de J.C. elle ne craignait rien dans l'éternité. Ce n'est pas
là le but de l'évangile de donner à un meurtrier la confiance
d'un honnête homme.
Beautés et tableaux pittoresques de la nature p. L. A. Martin
Ce ne sont que des fragmens à la suite d'une nouvelle intitulée
Raymond et que je n'ai point lue. L'auteur a aussi écrit les lettres
à Sophie sur la physique ouvrage dont je n'ai jamais pu achever
la lecture. Ces fragmens contiennent de fort belles remarques
sur la nature, des observations curieux, un grand respect pour
l'auteur de la nature, des preuves de l'existence du Dieu et de
l'immortalité. Les fragmens sont
Du mirage Mer lumineuse coquillages etc.
Des insectes
Des fleurs (Hymens des plantes. Influence des
végétaux sur la terre)
Des animaux (Loi de la nature de la tendresse mater-
nelle armes[?] de défense des animaux)
Des singes (ne ressemblent pas aux hommes sont inférieurs
aux chiens et ainsi ce n'est pas les organes de l'homme
qui lui donnent le génie.
∙Moeurs des singes
Hume History of England 12 v.
Je n'ai lu dans longtems un ouvrage qui m'a fait tant de
plaisir. Ce que me plait surtout dans Hume c'est son impartialité
tant à l'égard des troubles de sa patrie qu'envers les peuples
étrangers. Il rend la plus grande justice à plusieurs de nos
grands hommes comme à Tromp De Ruiter De Wit. Il faut aussi
convenir que l'histoire d'Angleterre est fort intéressante.
Il y a des époques qui sont intéressantes à lire comme
p.e. Le règne d'Edouard 3, de Henri 5, la guerre des deux Roses,
le règne de Henri 8, de Elisabeth, de Charles 1. Il ne fait pas un
triste narre mais vous présente tout sur des points de
vue intéressans. Voici le contenu des volumes
V. 1 dép. les Bretons jusq. William the conqueror.
V. 2 William Rufus, Henry 1, Stephen Henry 2 Richard John Henry 3.
V. 3 Edward 1.2.3.Richard 2.
" 4 Henry 4.5.6, Edward 4.5, Richard 3, Henry 7.
" 5 Henry 8
" 6 Edward 6, Mary Part of Elizabeth
" 7 Elizabeth
" 8 James 1. Part of Charles 1
" 9 Charles 1
" 10 End of Ch. 1. Commonwealth
" 11 Charles 2
" 12 End of Ch. 2, James 2. till the revolution in 1688
Lundi le 6 Juillet 1812
Nous avons passé une semaine bien tranquille. Mietje reste
toujours indisposée et Maman et Eetje à la campagne. Ils
reviennent cependant aujourd'hui ce que me fait beaucoup
de plaisir. Samedi je fus avec Kato à Welna campagne fameuse
en 1652 maintenant érigée en auberge. Le jardin a très joli
et c'est une jolie promenade depuis la ville. Hier
il fallut chercher d'autres promenades encore et je me
promenai le long des Buitensingels où il y avait une foule
comme celle du Botermarkt pendant la foire. On ne voyait
de tous côtés que des servantes. Toutes les auberges situées
sur le chemin en étaient remplies. Ah je regrette souvent
Hogermeer.
Auguste avait parlé à un de ses amis engagés fautivement
dans la conscription et qui avait été à Boulogne et à Toulon.
Il se plaignait fort de la mauvaise nourriture. Exerçant un
jour hors de Toulon il reçurent l'ordre de retourner instam-
ment dans la ville pour appaiser une sédition qui s'était
élevé dans leur absence. Ils virent bientôt une troupe de
paysans et gens armés de bâtons et de couteaux qui
volaient partout du pain. On fut obligé de tirer sur eux
une trentaine furent pris et exécutés le jour suivant. C'est
ce qu'on ne met pas dans la feuille politique mais bien
que les Anglais crient la paix ou du sang ce que je crois bien moins.
∙Une commission a été choisie pour régler le culte conjointement
avec M. Alphonse M. Te Water, Stuart et Mollerus en sont
membres. Koopmans y vient aussi je ne sais pas pourquoi
mais je sais bien que c'est à cause de lui que j'ai été mis
en réquisition par mon grand-père pour copier un article
énorme de l'encyclopédie appellé Anabaptistes qui était
de plus de 16 colonnes en 4o.
Koopmans a été nommé Professeur mais on ne sait pas encore
s'il acceptera.
Peut-être notre petite église sera changée en cour d'assise.
Le prince ayant appris que beaucoup de mennonites
visitaient les églises Wallones, Remonstrantes et autres deman-
da à cet effet à Kops Apostasient-ils donc le Mennonisme.
∙Après un tems triste et pluvieux qui a duré quelques
semaines de suite il paraît enfin que le tems s'éclairera.
Dumoins hier et aujourd'hui il est tant soit peu mieux.
∙Mon grand-père de vos est entièrement rétabli de son
fièvre.
Mais il est tems de céder la place à quelques malheureux
auteurs qui désireraient tant d'avoir encore le
plaisir de dire quelques mots.
Littérature
Cats Ext.
Depuis longtems je me l'étais reproché comme une honte que
puisque je faisais quelque prétension d'aimer la littérature
hollandaise je n'avais encore jamais jeté les yeux dans les
écrits de ce patriarche. Sept fort volumes m'avaient toujours effrayé.
Mais me dis-je à moi-même l'on a pas besoin de les lire d'un
bout à l'autre. On peut voyager et glaner. Lorsqu'un on voyage dans
un pays on va droit à la capitale sans s'arrêter à tous les
petits villages et bourgs. Voici le fruit de mon voyage
∙1. viennent les sinne et minne beelden l'amour de
ces tems là quoiqu'ils soyent maintenant tellement hors
de mode, qu'on ne sait presque plus ce que c'est. Il y en a de jolies
quoiqu'il soit impossible d'en lire plusieurs de suite. Mais à qu'il
y a de plus singulier et en même tems approprié à l'esprit
de cet âge c'est que de la même allégorie dont on donne
une explication galante pour en tempérer l'effet on ajoute
tout de suite une explication spirituelle quelquefois
tirée par les cheveux. Cats dit ou Lisez tout ou ne lisez rien
mais comment peut on lire des
vers amoureux et des vers pieux entremêlés les uns aux
autres.
Zelfstrijd
Pour en définir la nature il y a ici p.e. trois histoires dans la-
quelle ce zelfstrijd est employé.
1. Un zelfstrijd en vers d'un jeune homme qui est en barque avec
deux demoiselles. La barque est menacée de naufrage si l'on
ne jète l'une d'elles en mer. Or l'une l'aime beaucoup sans qu'il l'aime
et celle qu'il aime en aime un autre. Donc il ne sait choisir.
2. de cette femme qui un gouverneur en Zeland força dans le tems
du duc de Bourgogne à coucher avec lui pour sauver son mari.
3. de Scipio rendant la jeune Espagnole.
Il y a de jolies idées maisle zelfstrijd du 1. qui se met dans de
tels dangers à réciter des pages entières divers est un peu
invraisemblable.
Mais toutes celles-ci ne signifient rien du tout en comparai-
son de celui de Josef représenté dans un discours entre Josef
et mad. Selima. Ce dialogue n'a pas moins que 3000 vers la
longueur de deux tragédies. Aussi raisonnent-ils comme deux
docteurs et je doute fort que dans notre tems une mad. Selima
ou un jeune Josef ayent le courage de dévorer tous ces argumens.
J. dit après une apostrophe véhémente de la belle
Nadien het u belieft met afgerichte streken
Als voor het dertel vleesch tot mijnen geest te spreken
So laet mij weder toe behoudens u ontsag
Dat ik, als in den geest u antwoord geven mag.
∙S. lui répond avec raison
Neen Joseph dit geval en is maer tijdt verloren
La peinture qu'elle lui fait ce que lui arrivera s'il la
méprise est une chose affreuse. Il y a des traits de génie dans
les morceaux que j'ai eu la patience de lire mais c'est fort
prosaïque.
Enfin quelle différence avec l'Assenede de Bilderdijk.
L'histoire connue de Vasti qui refusa de joindre le roi et de
se faire voir des grands de Perse est connue. Elle est racontée ici
et les sept princes forment un conseil à ce sujet.
∙Charsena prend la défence des femmes en général et cite
l'histoire de Gyges.
Menuchon a attaqué les femmes et cite Semeramis.
Après ces plaidoyers qui sont énormément longs Menuchon
triomphe la princesse est condamnée et une sentence de
la cour adjuge la supériorité aux hommes.
Puis l'histoire d'Athenais avec la pomme racontée assez brièvement
Galatea
C'est une pastorale mais jolie. Il y règne une naïveté charmante
aussi l'ai je lu avec le plus grand plaisir d'un bout à
l'autre ainsi que quelques chansons et vers pastoreux qui
suivent et qui ont des drôles de titres.
De maegt in de borst getroffen
De vrijster geraakt in haar maegdekransjen
De vrijster met de pijl in 't oir
De jongeling met de pijl in 't oog
Puis il y a des élégies d'Agar, de Dina, de Thamar, de Abirag,
de la fille d'Jephta de Susanne de la fille de Marc Aurèle tuée
par une aiguille et plusieurs différens vers parmi lesquels
en vis
Matroosen etc. copié par De Vries.
His. de Mlles de St. Janvier 1 v.
Ces deux jeunes filles étaient filles de M. de st. Janvier, négociant
aisé à St. Dominique. Les noirs se rendent maîtres du Cap. français.
M. est massacré. La femme et les enfans se réunissent à une
famille qui demeure dans le même logis. Ils se cachent
dans un grenier mais sont trahis par une servante. La
mère est massacrée et en mourant recommande ses enfans à
un général qui les emmène chez lui sous prétexte de les
y tuer mais il les sauve et les cache. Ils y restent cachés
et après beaucoup de dangers osent enfin se montrer. Dessalin
apprenant que des blancs ont échappé s'avance furieux
vers la ville. La femme chez qui ils étaient n'ose pas les retenir
et les met à la porte. Mais le chef est assassiné en chemin.
Le général Christophe, la veuve de Dessalines s'intéressent à eux
on les fait transporter en Amérique sous la conduite d'une
femme qu'on croit honnête mais qui est une intrigante
et qui après leur arrivé à New York par un artifice les
rend ses esclaves et les accable de mauvais traitemens.
Par le secours de quelques personnes officieuses elles
réclament en justice et gagnent leur cause et enfin
après tant de danger elles arrivent en France et
se voient sauvées.
Cras ad Bosschuum 1 v.
Cras voulait dire quelque chose à la louange de De Bosch.
Ceci l'engage à publier une lettre qu'il lui avait écrite
il y avait deux ans. C'est pour la plupart des complimens
à Bosch sur son érudition sa vertu et mille autres bonnes
qualités. La lettre est autrement bien écrite.
À la fin on trouve un joli vers de Nieuwland sur De Bosch.
Atala 1 v.
J'avais lu l'itinéraire de Chateaubriand et ses martyrs et
j'avais tant lu de cette Attale que j'étais fort curieux de lire
cet ouvrage. Voici premier l'histoire.
Chactas le Natche raconte à René l'européen ses avantures.
Après une bataille perdue il se retira dans une ville espagnole
où un certain Lopez fut son bienfaiteur. Il le quitta pour
rejoindre ses compatriotes mais fait prisonnier par les ennemis
il est condamné au feu. Cette cérémonie devait se faire mais
Atala, la fille du chef devient amoureux de lui le
délivre et ils se sauvent ensemble et traversent de vastes
déserts. Attala qui est chrétienne est cependant toujours
mélancolique et refuse de se rendre à ses désirs. Un jour il
survient un orage terrible et vaincue par l'effroi il est un
moment de triompher de la résistance d'Attala lorsque le
père Aubry vieux solitaire vient à eux et les reçoit dans sa grotte.
Le lendemain il va avec Chactas visiter une colonie d'Indiens
chrétiens. À leur retour ils trouvent Atala mourante. Elle
raconte que sa mère avait fait pour elle le voeu
de la virginité qu'elle était la fille de l'espagnol Lopez
qui elle avait toujours résisté à sa passion mais que le
jour passé, se voyant au moment de succomber elle avait
pris un poison. Chactas est inconsolable. Le missionaire
administre l'hostie sacrée à Atala elle se meurt et est
enterré par le père Aubry (nom du solitaire) et Chactas.
L'auteur dit avoir appris cette histoire des Indiens. Peu
après il rencontre une famille Indienne descendante de ce
Natche qui lui raconte que toute cette colonie a été ravagée
et le père Aubry Chactas et René massacrés.
Voilà pour le roman. Je ne puis nier que je n'aie lu
la dernière partie avec du plaisir. Elle est vraiment pathé-
tique surtout la mort et l'enterrement, mais le style
est insupportablement outré. Que p.e. un indien dise il
y aura des neiges, à la bonne heure mais qu'il n'aille
pas me citer et à tort et à travers de ces belles phrases. Je
vais en citer quelques-unes, car il s'en trouve par centaines
∙"Atala était dans mon coeur, comme le souvenir de la
"couche de mes pères.
"comme un faon semble perdre aux fleurs de lianes roses qu'il
"saisit de sa langue délicate d'une l'escarpement de la
"montagne ainsi je demeurai suspendu aux lèvres de
"ma bien aimée.
"Dois-je donc pleurer tout mon coeur.
"la rosée du soir séchait en tombant sur ma peau brûlée
"je désirais que cette divinité se fut anéantie pourvu que
"serrée dans tes bras j'eusse coulé d'abyme en abyme avec les
"débris de Dieu et du monde.
"Si en abordant les rivages de l'Europe votre oreille eut été
"frappé de ce long cri de douleur qui s'élève de cette vieille
"terre.
"Ce cercueil lit nuptial que vous vous étes choisi ne sera
"point trompé par votre céleste époux et ses embrassemens
"ne finiront jamais.
"Philippe était son nom parmi les anges et les hommes le
"nomment Lopez.
"Les vierges sont des fleurs mystérieuses qu'on trouve dans
"les lieux solitaires.
Mardi 7 Janvier 1812
Annales du Lundi
De vergadering was gisteren ten huize van W. de Vos.
De vertellingen van 't ongeluk te Naarden, van de groen-
man Potzie die M. Bosch gekust had waarbij aangemerkt
wierd dat zij er nog nooit zulk eene declaratie gekregen had. D.
pronkte zeer op de brief van Cras aan de Bosch, hij zeide dat geleerden
alleen zulke geschenken ontvingen. J. de Vos beweerde deszelfs
inhoud te kennen. Hij hield het tegendeel staande het had
hem bijna een kom ijs gekost. De professors te Leyden
zijn [onl.] verminderd. Aan tafel maalde D. zeer veel van perzikken
van Bergera die nooit hoog opgroeiden en aan de boom op tafel gebragt. Hij
wilde zoo'n perzik hebben. Men zeijde dat juffr. Wilet niet met
die perzikken te doen wilde hebben. Eindelijk ging men
over tot den order van den dag. W. de Vos verhaalde kortelijk aan
de leden die absent geweest waren hetgeen op vorige vergadering
besloten was geweest, de brief van Kemper en het antwoord van
hem. Ieder ging vervolgens aan 't proponeeren. Deze wilde
overmorgen deze toekomende zondag deze op een maandag die
op een woensdag gaan. De President had veel moeite om de
gemoederen tot bedaren te brengen. D. wilde in zijn koets gaan
dees in een schuit, dees in een roef etc. Deze had zwarigheden
tegen den eenen die tegen den anderen dag. In 't eind besloot de
president in omvraag te brengen of Woensdag over agt dagen
goedgekeurd zou worden en of men ingevolge van dien aan
Kemper schrijven zoude. Dit voorstel wierd aangenomen, sommige
leden waaronder M. de Vos zich egter nog eenige restricties
voorbehoudende. Dylius zeide. Le medicin propose, les malades
disposent. J. de Vos kreeg de commissie om te schrijven en
P. de Clercq om zich wegens de schuit te informeeren. Men besloot
den volgenden maandag te confereeren hoe men gaan zoude
en de vergadering wierd gescheiden.
Je veux insérer ici le récit d'un témoin oculaire de la
catastrophe de Naarden. Celui-ci se trouvant dans cette ville
avait voulu faire une visite à un officier de ses amis. Il
le trouva dans une prairie où il surveillait quelques ouvriers
qui étaient occupés, selon les uns à faire une nouvelle espèce de
mèches, selon d'autres à faire des bombes. Mais enfin
c'était fort dangereux aussi l'avait-on établie en plain champ.
Une douzaine de personnes étaient occupés à travailler entr'autres
celui qui avait fait le dernier feu d'artifice d'Amsterdam
un conscrit qui dénonçait beaucoup de génie et le fils de l'officier.
L'ami s'en retournant l'officier lui dit qu'il le reconduirait
un bout de chemin. Chemin faisant ils entendent un
coup terrible. Ils retournent sur leurs pas et y voient un
spectacle affreux. Le chaudron qui contenait de la poudre
du vitriole du salpêtre et encore d'autres matières était
volé en éclats de manière qu'on n'en trouvait pas la moindre
trace. Ceux qui y assistaient étaient renversés à terre griève-
ment blessés et tout en feu. Trois en sont déjà morts parmi
lesquels l'homme qui avait fait le feu d'artifice et le conscrit.
Littérature
Temple lettres 2 v.
J'ai lu avec beaucoup de plaisir le premier volume entièrement
et le second en partie. Ces lettres pour la plupart écrites chez M. Arlingh
au Garde des seaux à J. Trevor à J. de Wit à J. Temple au duc
d'ormond[?] etc. sont en général bien écrites et donnent beaucoup
d'éclairissemens sur l'histoire de ces tems- là. Les faits les plus
intéressans de ce volume sont la négociation de Temple avec l'évêque
de Munster, toutes les circonstances de la triple alliance et
la manière donc on força la France et l'espagne à faire la paix
à Aix.
Le second volume est beaucoup moins intéressant puisque il
roule principalement sur les différens avec la Hollande à l'égard
de l'affaire de Surinam et d'une dispute avec la compagnie
des Indes ainsi que la chicane concernant le payement des
troupes suédoises par l'Espagne.
Mecredi 8 Juillet 1812
Je n'ai rien entendu hier qui mérite d'être cité. On attend encore
toujours l'annihilation du maximum. On compte que de 1700.
C'est de froment qui étaient ici à l'époque des décrets il y a
déjà 700. C'est achetés par le gouvernement.
On croit que la guerre avec la Russie est positivement déclarée.
Il y a maintenant une diligence à l'eau c'est à dire une barque
tirée par deux chevaux.
Jeudi 9 juillet 1812
Littérature
Florus
∙C'est bon abréviateur. Mais son style est souvent un
peu trop recherché. On trouve dans cet ouvrage une narration
fort succincte de toutes les guerres étrangères et civiles des Romains.
Mardi 14 juillet
Je fus occupé tout le samedi à mon cher Hannibal.
Dimanche nous fûmes le matin chez Stuart qui prêchait
sur l'hist. de la pécheresse aux pieds de Jesus. C'était un
beau sermon.
L'après-dîné nous fûmes à Nabij Buiten où il y avait
une soi-disant fête champêtre. Il y avait beaucoup de
monde. Un pavillon chinois où l'on fit ensuite de la musique.
Il y avait aussi une illumination et un bal. Malgré le
froid cuisant, des centaines de personnes se croisaient
dans le jardin. Il y avait des gens de toutes classes et
ceux qui avaient le moins à dépenser faisaient le plus
de bagage. L'entrée était cependant D. f 1,-.
∙Annales du lundi
Eerst verscheidene vertellingen. D. kwam laat en had
allerhand kwakzalveragtige galanteries, hij wilde
niet rooken. Aan tafel verhaalde hij dat hij op een der
glazen van 't lat. school gelezen had J. de Vos windbuil.
J. de Vos zogt dit op allerhande manieren te
verdraaien doch 't reusseerde niet D. triompheerde. Een
lat. vers van Bosscha, op den keizer wierd naar gevonden
en van van Ommeren. Er wierd veel gepraat over het
feest van woensdag. Oom geeft twee koetsen. D. gaat
met grootp. De Vos en niet met Juffr. Koster, 't geen hij
zoo volstrekt wilde.
Mardi 21 Juillet
Mecredi passé nous fûmes tous chez Kemper. Déjà à 8
heures du matin la caravane se mit en mouvement dans un
carosse et une voiture ouverte. On descendit à Harlem au
faucon noir et après quelque restauration nous
nous promenâmes dans le Hout, guidés par Ignace qui
n'approuvait aucun des plans de promenade que nous
proposions et nous fit courir à travers des chemins non frayés.
Eindenhout étant entré dans nos voitures nous
fîmes le chemin au Geleerde Man avec une rapidité terrible
et nous arrivâmes presque au Galop chez Kemper. Mais on
ne nous attendait pas encore. Mad. était à la toilette et
Mr. à la promenade. On nous conduit à la coupole et
bientôt l'hôte et sa famille accoururent. Nous eûmes
le plaisir de voir arriver la cavalcade composée de
Mr. Dylius, ma tante de Clercq et mon grand-père. Nous allâmes
nous promener en famille sur Bijweg, campagne assez jolie.
D. prenait beaucoup de libertés avec Cato. Ensuite nous allâmes
faire un tour sur les hauteurs vis à vis de Mr. van Lennep.
Loy[?] désapprouvait cette promenade. Après que nous eûmes
fait un fort joli tour nous le vîmes sur les dunes où ils s'étaient
égaré. Nous atteignîmes enfin ce tombeau de Rousseau.
L'urne] avait été abattue à coupes de haches par des
mauvais sujets et jeté à l'eau. Dans ce lieu délicieux nous
nous couchâmes sur le gazon et nous nous acheminâmes
vers le séjour du professeur nommé thuis ter rust. Nous nous
mîmes à table. Le dîner fut fort gai et fort bruant. D. perdit
de la glace d'une manière malheureuse en disant qu'il
gageait qu'on ne pouvait pas lui dire la dérivation du
mot Motto on lui dit que cela venait du mot français mot,
avec la termination Italienne to. Il raconta une histoire
fort longue de Berend de Kiekendief où il assura entr'autres
que wo bist du hergekommen était le langue de
l'overijssel et que Delden est aux portes de Deventer. Au dessert
on eut deux vers, un de M. Dylius qui était sans rime ni
raison quoique l'oncle en approuvait fort les idées et le
prisa d'une manière qui nous piqua. J'avais aussi un
vers. Après-dîner on vola à Dylius son vers mais
après qu'on l'eut restitué il le donna à mon oncle de
Vos avec ces mots Puiser-y le poison. De nouvelles disputes
éclatèrent lors du départ. La voiture fut prise d'assaut.
D. et moi nous y entrâmes de force et il y avait 5 personnes
et dans les autres 3. Enfin nous arrivâmes en bonne
santé à Amsterdam.
Au reste j'ai peu à noter. Lundi et Vendredi furent des jours
fort tranquiles pendant lesquels je m'occupai à finir quelque
lectures et quelques petites affaires et à penser à mon
voyage d'Almelo qui à ce que j'appris à ma grande douleur
a été différé jusqu'à samedi. Tout est encore incertain.
Dimanche je fus au sermon de mon grand-père sur les
mots de St. Paul en partant pour Jérusalem. La première
partie remplie de citations était fort obscure.
Annales du Lundi
La réunion était fort brillante. Elle eut lieu dans
le beau sallon M. Koster son fils et Cato. Kemper et son
épouse y étaient. Kemper n'avait pas eu de tems
pour faire des vers mais remplit des bouts-rimés difficiles.
On fut fort gai mais point d'histoires dyliennes. Il était
trop occupé à baiser. Nous vîmes arriver la glace qui fut
reçue avec de grandes applaudissemens. Après cela je lus une
Romance intitulée Apollon et Dylius, un critique en vers de mon oncle
de Vos au sujet du vers de Dylius, les Bouts-rimés de Kemper
et enfin mon vers par laquelle je rendais à J. de Vos le
verre où était écrit De Vos windbuil. Ceci fut extrêmement
applaudi. Je dus répéter mon vers et nous sortîmes tous
dans une espèce d'ivresse de contentement.
22
Littérature
Swift works
Il y a différens genres de poésie comme dans toute autre art. Il
y a des ouvrages de poésie qui plairont toujours chez toutes les
nations et dans tous les âges. Tels sont en Français L'Henriade,
Racine Boileau Delille etc. en latin Les Géorgiques L'Énéide,
Les odes d'horace etc., en Allem.: Hagedorn Gleim Burger etc. en
Hollandais le Gijsbregt de Vondel, Les poésies de Bilderdijk, de Feith. etc.
et en Anglais l'Essay on man Young Denham etc. Parmi ce nombre
ne sont point celle de Swift. Il n'y a point de vol hardi point
d'élégance mais il y a une nervosité et des tableaux Satyriques
fort jolis quoique je n'ai pu saisir toutes les allusions. Ce
sont toutes des pièces détachées. Les plus jolies sont:
Baucis and Philemon
Description of a city shower
,,of a morning
Horace imitated
In a lady's stable look
Phyllis or the progress of love
To Stella
Journal of a modern lady
On dreams
The author upon himself
Furniture of a woman's mind
Lady's dressing room
Beautiful nymph going to bed
Place of the damned
Stephen[?] and Cloe
on poetry
Progress of marriage
Millevoye Charlemagne
C'est un fort joli poème. L'expédition de Charlemagne en Lombardie.
Sa prise de Pavie. En général Charlemagne ne fait pas trop
dans ce poème quoiqu'il se montre toujours digne de
son rang et sa renommées Les héros sont après lui Isambert.
Samedi 25 Juillet 1812
Nous partîmes avec la barque d'Utrecht et après de bien tendres adieux
la ligne fut attachée et nous entamâmes le chemin dans
le 2 roef entourés des provisions. Tout alla fort bien nous
consumâmes les bienfaits de nos amis et nous longeâmes
ces côtes si connues. À Nieuwersluis prîmes congé de
ma tante De Clercq et de sa familles et nous reprîmes
gaiement notre chemin. À peine fûmes nous dépassés Maarsen
que je sentis mon coeur palpiter de joie et je pensai me voilà
en voyage. On arrive à Utrecht premièrement au Roode Brug
où commencent les faux bourgs. Là le cheval est détalé et
c'est un homme qui tire le bateau. Une grande quantité de
monde remplissait les faux bourgs. Nous débarquâmes à la
fin dans un lieu où l'on monte à la rue par un escalier
en pierre. Nous entrâmes par le Weerdepoort et traversâmes une
infinité de rues et arrivâmes enfin à la maison de M. Gobius.
Pour y venir on doit passer sous les murailles ce qu'est
fort curieux. La maison de M. Gobius à laquelle est jointe
une raffinerie renferme plusieurs bâtimens entourés d'un
fort beau jardin et séparée du reste de la ville par un
pont-levis. Ainsi c'était comme une forteresse séparée. Le vieux
Gobius voulut à toute force trouver le nom de De Cl. dans la généalogie
des Van Heiningen mais le bon homme n'y put réussir.
Cependant nous voulûmes voir quelque chose de la foire et
nous nous acheminâmes vers Vreeburg une fort grande
place entourée de belles maisons et auberges. Nous entrâmes
chez l'éléphant qui en effet méritait cet honneur. Il
faisait le métier de charpentier, il buvait une bouteille de vin
en un mot mille tours. Il y avait à côté une espèce de
ménagerie mais hormis un jeune lion et un loup bâtard
il n'y avait rien de fort remarquables. Enfin nous retournâmes
à l'auberge De Arend, située hors de la ville près du
Witte Vrouwenpoort où nous fîmes un fort bon repas
et couchâmes fort mal à cause de la populace d'Utrecht
qui, comme c'était un jour de foire fit un bruit violent.
C'étaient des chants pareils au coassement d'une grenouille
qui nous tinrent réveillés toute la nuit. À l'aube du
jour 4 heures du matin nous étions déjà en campagne
et passâmes sous les arches du Dom vieux monument
Gothique et j'eus beaucoup de peine lorsque je lus tout
près à voire qu'il fut trois fois plus grand que le
Westertoren. Nous vînmes aussi sur le Neu, autre grande
place on voit dans les rues encore beaucoup de
maisons antiques. Il y a des grandes pompes au milieu de la ville.
Je vis aussi le palais qui n'est que d'un étage mais d'une
fort jolie apparence en dehors. Il y a beaucoup de maisons
peintes.
Dimanche 26 Juillet 1812
Nous montâmes dans la diligence voiture fort commode et
traversâmes premièrement le Bilt chemin qui n'est pas fort
ravissant jusqu'à ce que nous arrivâmes enfin sur cette
chaussée admirable qui va jusq'à Apeldoorn. Nous passâmes
la campagne de M. de Smet et eûmes des deux côtés les
vues les plus ravissantes sur le seigle et le blé noir qui
était en fleurs. Nous vîmes du côté droit une petite éminence
nommée le Tafelberg où jadis il y eut une poterie. Le chemin
monte par une pente douce et lorsqu'on est enfin arrivé
au sommet l'on voit la ville de Amersfoort fort joliment
située dans un vallon. Nous entrâmes Amersfoort ville
ancienne avec de rues plus larges que jolies. Ainsi ne
passâmes nous pas par les plus jolis endroits de la ville.
Nous vîmes de beaux jardins. Descendus à l'auberge Le Doelen
j'y remarquai l'écurie formée d'une ancienne église et
qui conserve encore la même forme. Lorsqu'on pénètre plus
loin on arrive aux remparts où l'on à une vue charmante.
Sortis de la ville nous traversâmes un fort joli chemin
bordé par des plantations de tabac et de blé noir jusqu'au
joli village Hoeflaken où nous vîmes tous les habitans
qui revenaient de l'église. Après cela nous entrâmes
dans une bruyère immense seulement interrompue par
le joli village de Voorthuizen et une maison de paysan où
la diligence s'arrêta et où il y avait une puits d'une
vaste profondeur. Dans ce moment on ne voit rien que
une bruyère plus ou moins sablonneuse qui s'étend
à perte de vue et ne fait rien de couvrir à l'oeil curieux.
Dans cette solitude immense l'on demande si l'on
parcourt les landes de Bordeaux ou les déserts de
l'afrique car on ne voit aucune trace d'habitation
ni de civilisation et l'on se doute fort d'être dans
une partie de ce pays si vanté pas sa population
et la fertilité de son sol. Enfin l'oeil se repose avec
plaisir sur le bois de Souren reste des immenses forets
qui couvraient jadis cette partie du globe. Ce ne sont
pas les allées allignées du Hout, tout respire ici
la nature. Les arbres sont plantés confusément et
en désordre: on y trouve divers animaux et même
j'y vis prendre un héron. Une des productions est
une espèce de groseille sauvage [onl.] et fort petite
nommée Everbeeren que les enfans des paysans receuillent
pour les vendre aux passagers. Après un bout de
bruyère on entre dans la seconde partie de la forêt
plus majestueuse encore puisque les arbres y sont des
deux côtés. Au sortir de cette forêt on a une perspecti-
ve fort étendue et l'on voit dans l'éloignement l'auberge
du Loo bâtie il y a peu d'années et qui se montre dans
le lointain comme un nouveau palais, deux églises
bâties par ordre du Roi et qu'on était maintenant
occupé à démolir. On remarque dans le lointain les
arbres du Loo et plus près le parc immense
qui servit aux plaisirs du prince d'Orange et en-
suite à ceux du roi. On entre dans une jolie allée dans
laquelle se montre d'une manière pittoresque la
tour d'Apeldoorn. On voit ensuite une allée qui mène
en droite ligné au palais du Loo. Comme c'est à Apeldoorn
que la chaussée finit, nous y descendîmes de
voiture et nous allâmes un fort joli sentier qui menait
tantôt par des bosquets agréables tantôt par
des champs couverts de grains. On y avait les vues
les plus jolies. Nous passâmes par le joli village de
Twello, mais dont les habitans étaient si sots
qu'ils refusèrent de nous dire le chemin de Deventer
croyant que nous nous moquions d'eux et qu'ils
rentrèrent bien vite dans leur maisons. Nous trouvâmes
cependant le chemin arrivâmes sur le Dijk d'où l'on
a une fort belle vue et arrivâmes enfin au plantage
de Deventer nommé le Worp et formé par des allées
de fort beaux arbres où l'on voyait devant soi Deventer
et le pont de bateau de l'IJssel qui forme une
vue ravissante que je n'oublierai jamais. Nous entrâmes
dans Deventer et allâmes à l'auberge nommé
les armes d'Overijssel où tout est monté sur le grand
ton. Cette auberge a un balcon d'où l'on jouit d'une
vue ravissante sur l'IJssel. Le soir nous nous promenâmes
encore sur les remparts dont une partie est ombragée
de beaux arbres et d'où l'on voit l'IJssel se perdre
dans le lointain. Il y a dans quelques lieux
des Murailles fort épaisses, les portes sont des espèces
de forteresses. La ville est fort antique et la structure
des maisons est fort ancienne. Il y a quelques jolies
maisons mais elle ne produisent point d'effet à cause
des tristes réduits qu'on voit à côté d'elles. Surtout quelques
maisons sont si délabrées qu'elles paraissent presque
tomber en ruines. Dans une de ces rues il y a une maison
de fort peu d'apparence où demeure l'homme le plus
renommé dans la fabrique de ces gâteaux de Deventer.
Il a gagné tant d'argent avec ce négoce qu'il a acheté
une campagne. En tems de paix on envoyait jusqu'aux Indes
de ces gâteaux qu'on envelopait tout chaud de fer blanc.
La seule place publique que l'on y voie excepté celle
où est l'église et où l'on voit vis à vis la mairie est
ici[?] le Brink où il y a une espèce de poids. C'est le bâtiment
le plus gothique de ce gendre que je connaisse. L'avenue
est formée par un large escalier de pierre. On voit
à [onl.] des grands pots de métal dont la tradition
rapporte qu'ils ont servis à cuire jadis des hérétiques.
Je vis attaché à une des portes un ostéophage
provenant certainement de quelque monstre malin
mais j'ignore l'origine de ce morceau. Plusieurs maisons
sont entièrement peintes surtout en rouge ce que paraît
être la couleur chérie des Deventeriens. Le soir nous
soupâmes à table d'hôte avec des allemands qui avaient
beaucoup de prétentions et je fis bien aisé de me coucher
après une nuit si orageuse et un jour si fatiguant.
Lundi 27 Juillet 1812
Nous étions déjà bientôt en campagne occupé à parcourir
encore Deventer où nous ne vîmes rien que nous attacha
beaucoup. Nous montâmes sur la tour de l'église, bâtiment
que je crois beaucoup postérieur à celle d'Utrecht et
autres. Nous montâmes toujours en rond pendant plus
de 230 marches. Au sommet on avait une fort jolie vue
sur Deventer et ses environs. On nous montra ensuite des
cloches extrêmement grandes qui avaient une résonance
énorme ainsi que l'horloge qui sonnait dans ce moment
nous fit entendre un tintammare horrible. Nous
vîmes l'église qui était fort nette mais n'offrait rien
de bien remarquable et qui offrait de nouvelles traces
d'une bâtisse moderne. Il y a une autre
église avec une petite tour mais que nous ne
vîmes pas de près. Nous vîmes en sortant le Schipbeek,
petit ruisseau. Près de Deventer il y a la prairie
de la ville où chacun peut librement
mener ces troupeaux. Elle en était couverte. Le
chemin de Almelo à Deventer n'est pas fort amusant.
Près de chaque petit village il y a unEs qui est le lieu
où les paysans sèment leurs grains qui consistent pour
la plupart en seigle et blé noir. On voit dans quelques
endroits un peu d'avoine et de pommes de terre. Le Broek
est une espèce de bruyère dont on tire encore quelque
avantage comme pâturage soit pour les vaches soit
pour les oies qui composent ici une grande partie du
profit des paysans et que l'on voit brouter
en fort grandes troupes. Il y a quelque fois des
plages d'une bruyère fort étendue et qui ne sert presque
à rien. De tems en tems on voit quelques campagnes
mais dont le nombre est fort petit. Dans ces bruyères
on va souvent à travers champs sans suivre les ornières.
Il y a beaucoup de partis marécageuses où même
couvertes d'eau qui sont impraticables dans toute
autre saison que l'été. Dans un lieu nommé à ce que
je crois Bathmermühle on voit une petite chaumière
enfumée renommés par les stoetes (espèce de pain énorme
qu'on y fait. Ce sont des morceaux terribles qu'on mange
tout chaud. Holten est un petit village irrégulier
qui ressemble un peu à Hilversum. L'église est une des plus jolis
que j'en ai vu dans aucun village. Près de ce Holten
est un chemin entièrement composé d'une terre
propre à faire des tourbes. Ce chemin s'est quelquefois
entièrement enflammée, on n'exploite point ces tourbes
dans aucun ordre mais chaque paysan vient
en tirer autant de tourbes qu'il lui en faut pour l'hyver
de sorte que ce chemin est tout à fait criblé de petits
lacs. Le terrain est si mobile que lorsqu'on en passe en voiture
sur le chemin, on voit des deux côtés l'eau dans les fossés
et même dans les autres petits lacs plus éloignés éprouve
un mouvement considérable. On arrive ensuite à Rijssen
ce village le plus misérable que je connaisse. Les maisons
y sont presque toutes construites de la même manière savoir
de deux parties. Un lieu nommé de Welle où la famille
est pêle-mêle avec les instrumens du labourage, les animaux
et tout, enfin qui offre le plus triste désordre qu'on puisse
s'imaginer. Après cela est une petite cuisine. Les Almeloiens
fiers de leur village qu'on nomme le bouquet de la Overijssel
appellent ce Rijssen par dérision les faux bourgs d'Almelo.
Plus loin on passe le Regge près d'une auberge où les
étrangers seuls doivent payer un droit de passage qui y est
établi. On passe le Grimberg jolie campagne et on
arrive par un Broek à Almelo. Là tout d'un coup la scène
change ce ne sont plus les tristes maisons de Rijssen mais c'est
une fort jolie petite ville avec des maisons fort
nettes et des environs charmans. Nous fûmes fort bien reçus
et encore le même soir nous vîmes la réunion de toute
la famille qui venait complimenter les nouveaux-venus.
∙J'ai oublié de mander 1o que près d'Apeldoorn il y a une
prairie que M. Kinsbergen a fait construire à ses propres
frais pour faciliter dans ces contrées la culture du bétail
2 qu'en allant à Almelo nous dûmes passer une rivière en
voiture.
Mardi 28 Juillet 1812
Ma chambre est charmante elle donne premièrement sur
le petit jardin de mon hôte aimable et ensuite sur le
Hagen, une fort jolie allée où aboutissent toutes les
maisons de ce côté à de la ville. On vit ici comme à la campagne.
Chaque habitant aisé à un petit cabinet Tunhusken à quelque
distance de la ville près d'un paysan pour y passer
la matinée ou y prendre le thé et puis un hofken où
il cueille lui-même ses légumes et qui ne sont qu'à un
saut de leurs maisons. Les environs sont charmans et
beaucoup plus jolis que je ne le croyais. Tantôt on marche
le long de petits sentiers au milieu des blés qu'on
fauche maintenant (steegen) tantôt on passe des
maisons de paysans ombragées d'arbres touffus et tantôt
l'on se promène dans les bois qui avoisinent ce charme et
en droit tel que le Rodenhof OlberingBosch et plusieurs
autres. Près du château on a une fort jolie promenade
et une allée qui s'étend à perte de vue et qu'on nomme
le Dik. C'est la promenade favorite des habitans.
Après-diné nous fîmes une promenade vers le Storck
campagne du grand-père Koster. Le chemin mène premièrement
encore à travers le Broek et ensuite à travers une immense
étendue de sable non cultivée qui s'étend de plus
en plus d'année en année. Les seuls animaux que l'on
voit ici sont des oies et des chiens énormes qui vous
effrayent à chaque demeure de paysan. Le hof lui-
même ne signifiait pas trop. Ce que m'y frappa le plus
fut un énorme cerisier tout plein de cerises
délicieuses. Il y avait aussi des blanke kersen espèce
inconnue à Amsterdam et qui n'est pas à mépriser
l'Acantia kers est la plus renommée de toutes.
Revenu à la maison j'y mangeai des cerises douces ce
qui est le fruit le plus délicieux qu'on puisse s'imaginer.
Une des choses les plus désagréables dans les promenades
qu'on fait ici est la puanteur du lin que les paysans
font pourrir dans les fossés pour le rendre ensuite plus
propre à être pelé. Ils le jettent dans l'eau et mettent
ensuite du garon par dessus pour le faire enfoncer.
C'est ce qu'ils nommentVlas in de rötte.
Mecredi 29 Juillet 1812
Je me rendis à Vriessenvenne. Tienne le village le plus singulier
qu'on puisse s'imaginer. La première partie du chemin
est fort jolie mais pour la seconde encore des prairies. Le village
s'étend de plus d'une heure depuis le commencement jusqu'à
la fin comme Loosdregt et autres. Mais on ne
voit pas ici la netteté hollandaise. Chaque maison de
paysan est séparée de ses voisins par des fossés et une
grande partie de terrain dans la même direction derrière
la maison y appartient. La plus grande partie des maisons
sont fort vilaines mais souvent pittoresques à quelques-
unes il n'y a pas de cheminée et la fumée sort par dessus
la porte tandis que des nombreux cochons et chiens l'entourent.
La tour de l'église n'a aucune proportion avec elle. Cependant
on y voit quelques maisons fort jolies, il y a eu des marchands
en linge qui marchaient jusqu'à petersbourg et ont acquis
une fortune considérable. Partout il y a des arbres: ce
que présente de fort jolis tableaux il y a des moulins
possédés en commun par quelques familles qui sont conduites
par des chevaux. En retournant je me plongeai les pieds
dans un marais et je dus m'en retourner à pied nus.
Nous dînâmes et soupâmes chez le grand-père Coster et fîmes de nouvelles
promenades car on peut en faire ici de toutes manières.
Les habitans aiment fort les repas car voici l'ordre du jour.
L'on se lève à 7 heures déjeune à 8 prend souvent du café à midi,
dîne à 11 heures prend ensuite du thé souvent un goûte
nommé Vesper à 6 heures et l'on soupe à 9. On y dîne
fort bien. Le plus grand régal consiste dans des poules
qu'on apprête d'une manière délicieuses. Le veau n'y vaut
rien.
Jeudi 30 Juillet 1812
Nous allâmes se matin à unhofken de mes chers hôtes
situé près d'un paysan nommé Bovendam. En voyage
nous vîmes des sites charmans le long d'une branche
de l'Aar que traversent les vaisseaux en allant de
Zwol jusqu'ici. La petite coupole a une jolie vue et des
environs sauvages qui ne sont pas sans agrément. Les
paysans qui en sont les gardiens étaient assis dans une
étable énorme et mangeaient pour leur déjeuner une espèce
de bouillie au lieu de café. Nous nous amusâmes fort bien
dans cet endroit y déjeunâmes et retournâmes fort contens
de notre excursion. Je ne dois pas manquer de faire mention
de la jolie traversée que nous fîmes de l'Aa premièrement
nous sautâmes dans l'eau et la traversâmes de cette manière
et là secondement sur un morceau de Bois nommé Vondel
et qui n'a pas deux pouces d'épaisseur.
J'ai oublié de dire que nous vîmes à Vriesseveen une procession
de femmes dans des chariots qui conduisaient eux-mêmes
les chevaux et allaient travailler aux champs.
Nous soupâmes ce soir chez Mr. Van Lennep. Voici les
personnes qui y étaient. Le Grand-Papa et la Grand-maman toutes
deux bonnes personnes quoique la dernière aît de la bigotterie
et des préjugés. Elle favorise aussi beaucoup les enfans de l'autre
M. Koster et cette famille-ci leur témoigne bien des égards mais
puis on les plante au haut de la table sans beaucoup
s'embarasser d'eux. Puis l'oncle Henri c'est un fort bon
homme aussi généreux et moins emporté que l'oncle de Vos.
M. van Lennep et son épouse toutes deux des personnes fort
aimables ainsi que M. Coster et son épouse. Puis Mad. Thiele que
sa passion pour avoir un mari officier a déjà deux fois rendue
veuve. Enfin Mad. V. Lennep Coster avec sa petite fille qu'on dit
être singulièrement pédante. Le ministre Van Lennep qui est
très considéré ici et enfin M. Hollerman frère d'un grand fabriquant
à Zutphen pour le compte duquel il voyage. Cet homme a
parcouru presque toute l'Europe. Voici ce que j'ai pu trouver
de remarquable. Les messieurs et les Dames s'assemblèrent
à part et à souper on se réunit. En attendant l'on présente
des oublis fort minces dont il faut toujours prendre une
paire ou du gâteau de Deventer. La coutume est que les épouses
soient toujours à table l'un à côté de l'autre. L'on se souhaite
encore bon appétit à la fin de la prière et l'on établit
des conditions. Le boeuf est fort délicat ici mais le veau
ne vaut pas la peine qu'on le mange. La coutume de présenter
à chacun un demi poulet est généralement établie. L'on
verse du vin à outrance et l'on ne boit pas presque point de
bière. L'eau est bonne. Une singulière coutume dans
ce pays c'est que la nouvelle mariée donne à l'époux un
habit de matin. On resta ce jour là à table jusqu'à
minuit et demi.
Vendredi 31 Juillet 1812
Le matin je fus avec van Lennep chez deux marchands en
grains. Le premier qui était le plus riche était assis fort simple-
ment dans sa cuisine et quoiqu'il eût gagné si considérablement
de l'argent il n'avait rien changé à sa maison ni à ses manières.
L'autre faisait beaucoup plus de redondance. À midi nous
fûmes boire du chocolat chez le ministre Van Lennep. Il s'y
trouvait plusieurs personnes de la veille et aussi sa mère. Il
a encore un troisième frère qui a beaucoup d'esprit et fait
de joli vers mais dont la conduite est fort déréglée. La bibliothèque
du ministre n'est ni fort grande ni fort bien conditionnée et
je m'en étais fait une plus grande idée. Il jouit aussi d'une
jolie vue sur le Hagen. Après-dîné nous nous rendîmes à Stork
sur un chariot ouverte c'est le nom qu'on donne ici à une voiture
de paysans. À Stork nous pillâmes derechef le cerisier. Il n'y a
là qu'une fort petit pavillon. Mais cependant vingt quatre
personnes peuvent s'y asseoir à une table formée en cercle.
Mais alors la chaleur doit y être insupportable. Le reste
de la promenade se compose de viviers, entouré d'allées droites.
La cause en est que ces espèces de jardins sont faits en
grande partie pour la pêche dans ces viviers. Nous nous
retournâmes par le Weleveld où il y a un château maintenant
démoli et où l'on a les vues les plus jolies. En revenant
on passa une jolie petite église catholique au milieu de la bruyère
et l'on passe devant une maison où il y a un inscription des
plus comiques. le plus souvent dans ces chemins-ci qui
sont couverts de sable les chevaux ne vont qu'en pas et
ceci fait que souvent on peut se rendre dans un lieu
aussi vite à pied qu'en voiture.
Samedi 1 Août 1812
Nous sortîmes de fort bon matin. La première partie du
chemin conduisit premièrement à travers de la grande
bruyère et de l'énorme mer de sable qu'on trouve
ici dans les environs. Quelquefois elle est joliment interrompue
par quelques bouquets d'arbres qui entourent des habitations
de paysan. Enfin on arrive à ce bois du comte de Twikkel. C'est
ici que la scène change et l'on passe par des allées superbes
où il y a des arbres et surtout des chênes énormes tels que
l'on n'en voit point dans ces environs-ci. Le château est
à moitié modernisé. On rapproche à travers ce bois de Delden
on voit à sa gauche des maisons de paysan construites par
les ordres du comte où tout était arrangé à la manière
frisonne. On y remarquait des maisons plus nettes des
étables de bois pour les moutons. C'est aussi ici que l'on
fait du fromage ce que ne se pratique point ailleurs ici.
Delden est un des plus jolis lieux ici cependant.
on ne peut pas le comparer à Almelo. Il y a il est vrai
de fort jolies maisons ici surtout celle de M. Kramer situé
hors du village mais en général il y avait aussi des maisons
fort mal bâties. On était occupé selon
les ordres du préfet à ôter le tas de fumier de devant quelques
maisons. Il y avait une foule d'auberges. Celle où nous
entrâmes était tapissée d'une foule d'estampes et je reconnus
avec plaisir le portrait de Grotius. L'église de Delden ne se
se fait pas appercevoir dans le lointain. La tour est petite
et fort basse. Nous rendâmes visite au percepteur d'Osy qui
nous avions vu à la diligence mais il avait à expédier des
paysans qui étaient si lents à payer. Ils entraient et
lorsqu'on leur disaient que le tems du payement était passée
ils s'en retournaient fort tranquillement en disant eh bien
nous attendrons. Oui diable disait Osy attendez seulement
mais premièrement vous payerez les fraix et ils s'en retournent
de sang froid... Enfin nous retournâmes passâmes encore
une partie du bois de Twikkel et vîmes une fort joli
bassin ombragé de beaux arbres. Je vis aussi une charrue
à laquelle on avait attelé des boeufs. Après que nous
fûmes sortis du bois nous entrâmes encore dans une vaste
bruyère. Il y a encore une différence ici entre bruyère (hei)
et à qu'on nomme broek. Ce dernier terrain est plus bas
et ordinairement couvert d'eau. On trouve dans une pareille
bruyère de distance en distance des lieux où la couleur
de l'herbe est plus claire où le terrain est marécageux
et où l'on peut s'enfoncer aisément. Je vis ici des chevaux occupés
à fouler de la tourbe. À mesure qu'on s'approche de Borne
la vue en est fort jolie car la tour se présente pittoresque-
ment au milieu des champs de grains et de petits bosquets.
Borne est le village le plus irrégulier que j'ai jamais vu.
Les maisons sont moins laides que dans plusieurs autres
villages mais elle sont semées pèle-et-mêle dans le
plus grand désordre de manière que ce village présente
une espèce de Labyrinthe. Le chemin de là par
le Weeleveld est fort joli. Beaucoup d'habitants étaient occupés
aux travaux champêtres. On voit aussi par-ci, par-là
des champs couverts de lin. La dernière moitié du
voyage fut le même chemin que l'on passe pour aller au
Stork. En buvant un verre de Malaga chez J. Coster je vis
passer un convoi funèbre parmi lequel les femmes suivaient
aussi rangées en paires tout comme les hommes. Le après-dîné je
fus chez van Lennep qui me montra beaucoup de curiosités
commerciales et plusieurs monoyes russes. Nous allâmes
nous promener le soir vers le Riet, jolie promenade
où se trouve une colline. Une preuve de la sécurité des
habitans, c'est que nous entrâmes dans une maison
de paysans où toutes les portes étaient ouvertes et où il
n'y avait qu'un petit chien pour la garder.
Dimanche 2 Août 1812
Nous fûmes le matin à l'église. Celle-ci est fort jolie. La chaire
fort élégante est décorée par des colonnes. Les diacres
sont assis de l'un côté et les anciens de l'autre côté de l'église.
Il y a un président diacre et trois autres qui cependant paraissent
sans chapeaux pointus ou habits noirs. Le ministre lit un
sermon sur (Joan Ep. 1.v. 12-14) qui ne me plut pas singulièrement
quoique ce fut un bon sermon. La paroissiens ûont enchantés
de lui car ils n'aiment pas les peintures morales. Le service est
comme le nôtre on s'y sert des psaumes et des cantiques d'Horli.
Ce qui me frappa le plus fut de voir une femme d'un certain
âge qu'on dit avoir de l'esprit et qui même a fait de vers mais
dont l'habillement consiste dans une coiffure abominable
avec un chapeau et une redingotte d'homme coutume qu'elle
ne voudrait pas quitter pour tout l'argent du monde. La famille
fut ici à dîner et resta l'après-dîner lorsqu'on fit encore
une petite promenade sur le Dick. Le souper il y eut un énorme
pâté nommé Zuster qui doit toujours être divisé en autant
de portions qu'il y a des personnes. Chacun emmène ce qu'il
ne peut manger.
Lundi 3 Août 1812
Déjà à 5 heures nous montâmes en voiture pour faire un
petit voyage dans les environs. Le chemin à Ootmersum mène
premièrement par le Krommen Dick où se trouvent les de-
meures des blanchisseurs. Le chemin mène par des hameaux
dont le plus joli est albergent. C'est ici que l'on voit
parfaitement les modèles de dessins de van Drielst. Ces
huttes rustiques ces maisons délabrées offrent un
aspect bien plus pittoresques que les petits palais de
nos paysans hollandais. À mesure que l'on s'approche
d'Ootmersum le chemin devient plus joli, les terres
labourées plus nombreuses et le chemin plus montueux.
Nous descendîmes de voiture à quelque distance d'Ootmersum
et grimpâmes sur une hauteur d'où l'on pouvait découvrir
le château de Bentheim et Steinfurt. On voyait à ses pieds
Ootmersum qu'on n'avait point remarqué jusqu'alors.
Je remarquai distinctivement dans cette montagne deux
couches différentes, une de sable pur et l'autre d'un
terrain rempli de pierres qu'on trouve ici en
plusieurs endroits. Ootmersum fut je crois jadis une
ville fortifiée. Lors du voyage du Roi les réformés dont
le nombre était fort petit ont cédé la grande église et
le roi leur en a fait bâtir une petite très
nette. Ootmersum est une petite ville n'est pas joli.
Il a trois portes et est entouré d'un fort petit fossé et d'un
sentier qu'on nomme le Buitensingel et dont l'on voit le [onl.]
des maisons fort irrégulièrement bâtis. Nous nous promenâmes
dans la belle bois qui l'environne où il y a des chênes superbes.
Le château va être démoli il était fort vaste et avait une
chapelle gothique mais tout y présentait l'image de la
destruction et Arion sur un dolphin n'offrait plus que la
faible trace d'une fontaine dont la construction doit être
facile dans ce lieu montueux. Le chemin d'ici à Noordhorn
est fort joli. Nous passâmes le Dinkel qui sert de frontière entre
le département des bouches de l'IJssel et celui de la Lippe.
Ensuite nous passâmes une branche du Vecht. L'avenue de
Noordhoorn est fort jolie. Une petite cascade causée par un
moulin d'eau offre avec quelques habitations et arbres
qui l'entourent un grouppe charmant. Cette ville est
composé en grande partie d'une seule rue. On y a gagné beaucoup
avec la contrabande. Plusieurs habitans bâtissent de
nouvelles maisons. Il y en avait une fort jolie surmontée
des statues de Mars Minerve et Mercure. Cependant il
s'y trouve aussi des maisons dignes de Rijssen et en général
il y règne un certain désordre qui fait voir qu'on est
dans un pays étranger. On voit déjà ici les affiches en
allemand, quoique les habitants parlent très bien le Hollandais.
Dans toute la ville on n'avait pu faire du pain frais
puis qu'il n'y avait point de levain. L'église est située hors
des portes de la ville. D'ici on arrive bientôt au monastère
de Fientswegen vaste bâtiment quarré jadis habité par
quarante moines et où il n'y avait pas plus de quatre
maintenant qui vendent tout jusqu'aux cheminées. Nous
entrâmes personnes ne se présenta et nous parcourûmes
seuls tout les cellules où il n'y avait plus rien que les
tableaux et autres objets de dévotion et les énormes galeries
bordées de vitres dont quelques princes firent présent au
couvert et sur lesquels ils ont fait peindre pompeusement
leurs armes et leurs titres. L'église était magnifiquement
décoré. On y voyait les cierges l'eau bénite les chaises
de confession les habits de cérémonie et un grand nombre
de tableaux et des sculptures en pierre dont une
représentant N. S. portant son crucifix était fort jolie.
Le monastère était dédié à St. Augustin dont la statue
était devant la porte. Un tableau représentait ce St.
aux pieds du sauveur. À ce convent était annexé un
jardin assez grand mais sans élégance à la fin duquel
on avait une vue sur le vecht. Les avenues qui mènent
au couvent sont des belles allés d'arbres. Enfin
après avoir encore traversé des landes on arrive à
Nienhuis: sans s'en appercevoir puisque nous croyions
être encore dans les fauxbourgs lorsque nous étions
déjà entrés dans la ville puisque il n'y avait qu'une porte.
Je n'ai jamais vu de ville si triste et si maussade. Il
y a un tribunal et l'on voit les malfaiteurs dans une
maison grillée et au dessus de la porte. Cette ville était
bien plus laide que Noordhoorn. C'est ici que l'on voyait
partout les Delle et par-ci par-là les tas de fumier
devant les maisons. Nous nous informâmes envain si
l'on connaissait ici le nom de Dylius. Le chemin d'ici à Ulsen
est superbe et l'on voit des deux côtés les grains dont
quelques arpens était déjà en gerbes qui offraient des
vues superbes à cause des hauteurs qui s'élevaient des
deux côtés. À Ulsen nous descendîmes de voiture et nous
grimpâmes sur une hauteur d'où l'on jouissait du spectacle
le plus ravissant. On voyait à ses pieds une contrée fertile
où les fleurs blanches du blé noir s'entremêlaient aux
épis dorés du seigle ou aux tiges vertes du lin. D'un autre
côté on voyait le grand village d'Ulsen et la vue s'étendait
immensément loin de tous côtés. Ulsen est un grand village.
Les habitans jouissent d'une fortune aisée et sont renommés
au loin par leur honnêtteté. Il y a beaucoup de catholiques.
On traverse ensuite encore une vaste bruière et arrive
à Geesteren fort grand hameau (boerschap) où l'on a de
fort jolies vues et où les maisons sont pittoresquement
enfoncés dans des groupe d'arbres. Alors Phébus nous abandonnait
et à 10 heures nous rentrâmes à Almelo. I. H. Coster nous
avait accompagné.
Mardi 4 août 1812
Ce jour-là il plut continuellement depuis le matin
au soir. Nous fûmes à dîner chez I. Coster où hormis
la compagnie déjà citée il y avait les deux soeurs Bet et Mina.
Je vis ses dessins qui étaient fort jolis vers le soir notre
plaisir fut troublé par la convulsion qu'eut sa petite
fille. Le trouble et la convulsion régnaient partout et
on se sépara sans souper.
Mercredi 5 Août 1812
Rien de bien extraordinaire. Le soir nous allâmes
encore cueillir des cerises à Stork lieu déjà
souvent cité. Le matin j'entendis un plaidoyer au
sujet de la possession de la seigneurie d'Almelo.
Jeudi 6 Août 1812
Le matin nous fîmes encore une promenade charmante
dans les environs on va toujours des chemins inconnus
jusqu'ailleurs et l'on voit partout des tableaux
pittoresques.
L'après-dîner nous allâmes à un lieu nommé Le
Krommen Dick. Là nous visitâmes
une blanchisserie et nous remontâmes beau en
bateau. Nous montâmes sur une petite colline d'où
on avait une fort jolie vue tant sur les blanchisseries
qui étaient fort étendues que sur une campagne
voisine de Mr. Schimmelpennink. Le chemin qui menait
là conduisait à travers les champs de blé. Les grains
que j'ai vus sont principalement le seigle et le blé noir,
un peu d'orge et d'Avoine et beaucoup de lin. C'est des boutons
de cette plante que vient ce qu'on nomme Graine de lin.
Ces boutons sont séparés du lin après qu'il a été pourri.
Cette graine qu'on cultive ici ne vaut pas beaucoup
car on ne la laisse jamais ici mûrir puisqu'on ne
sème que pour le profit de la plante. On sème en même
tems que le lin des carottes et quand le lin
est fauché ces carottes paraissent. Quand le seigle
est fauché on voit croître une espèce d'herbe nommé Spurrie
et lorsqu'elle est parvenue à une certaine hauteur on
y fait paître les vaches. On fait alors de leur lait une
espèce de beurre qu'on nomme Spurrieboter. Souvent après que
le seigle a été fauché les paysans sèment encore sur
les mêmes terrains des navets. Puis je vis encore un
peu de graine de choux pour la provision des paysans,
de la graine de canari et de la graine de moutarde qui
à l'égard de la fleur ressemble un peu à la graine de
choux. Le blé noir fleurit deux fois. On en envoie peu
dans d'autres provinces. On fait ici différentes sortes de
pain. Celui qu'on nommé Stoett fait de farine
de seigle épurée et sans les pelures on en
fait des pains énormes.
On cultive ici presque tous les légumes qu'on a à
Amsterdam les sèves sont plus grandes. Le choux-fleurs
seul doit être acheté.
Le boeuf est excellent mais le veau ne signifie pas trop.
Sur la fin de l'année chaque famille
tue un boeuf dont on mange presque toute l'année.
On s'invite réciproquement pour manger les grands
morceaux. Dans l'hiver c'est aussi la saison pour
manger le porc les perdrix les lièvres les canards
et les chapons. J'ai mangé une espèce de coqs fort
petits qu'on nomme crabbedine.
On boit presque toujours de l'eau et du vin. La bière
n'est pas du tout recherchée et aussi ne la fait on
jamais émousser.
Les maisons de paysan qui sont à l'ordinaire fort
délabrées sont fort vastes. À l'un côté on a une
espèce de trou en terre dans lequel on fait du feu
pour faire bouillir la marmite. Autour de ce feu
presque toute la famille est rangée. Plus loin est
l'étable aux vaches. Les paysans
déjeunaient jadis avec du café mais maintenant
ils prennent de la bouillie de lait de beurre karnemelkse-
pap.
Les voitures dont on se sert ici sont fort légères et
pareils un halvekap avec un voorkap de bois. On
peut fermer de tous côtés avec de petits rideaux. Deux
chevaux tirent cette voiture si loin qu'on le veut.
Lorsque la compagnie est plus nombreuses on se sert
de ce qu'on nomme une voiture ouverte. Ce n'est qu'une
voiture de paysan.
On ne fait pas de fromage ici on met le foin dans
des granges au lieu de l'entasser comme en hollande on
le vend ici par charriot tandis que là on le vend
p. 100 Livres.
Lorsqu'on parle ici des fabriques il ne faut
pas se figurer des vastes établissemens où les ouvriers
se réunissent. Chaque fabriqueur a des tisserands qui
travaillent pour lui il leur fournit le fil ou le coton
et c'est à leur maisons qu'ils travaillent et ils apportent
ensuite ce qu'ils ont fait et reçoivent une paye
fort modique. Vers la fin de l'année chaque fabriqueur
va avec des tisserands à Ootmarsum pour le marché du
fil. C'est là que chaque paysan apporte sa provision.
Les fabriqueurs emportent avec eux un grand
sac dans lequel ils jètent tout le fil à mesure
qu'ils l'achètent, on paye toujours argent comptant.
Almelo a acquis beaucoup plus de considération depuis
quelque tems. Elle fut toujours nommée Stede mais
Oldenzaal était effectivement la capitale de ce quartier.
Mais par la session du tribunal dans cette ville elle
est en quelque sorte devenue la capitale au grand
dépit des Enschedeens et Oldensaaliens. Ces derniers
après avoir fait une collecte avait envoyé une
députation à la Haye avec cet argent pour faire
décider la choix en leur faveur. Il toujours règne
une certaine émulation entre ceux d'Enschedé et
d'Almelo. Les premiers ont des moeurs beaucoup plus
libres et vont tous les jours à la société (societeit), mais
ceux d'Almelo n'y vont qu'une fois par semaine
le samedi. On projette maintenant d'ériger un
nouveau bâtiment. Ceux d'Almelo sont en général
fort religieux tant les mennonites que les protestans.
Il y a beaucoup de juifs ici qui ont une synagoge.
Les écoles des paysans ici dans les environs sont
des petites tours quarrées situées sous les arbres.
Il y a une ici école où l'on apprend les langues
savantes et aussi les langues modernes sous un
Rector.
Pour en revenir à notre promenade nous nous en
retournâmes par un joli chemin nous nous rendâmes
au Dick car outre la longue allée que nous avons
déjà mentionné ce Dick est entouré par de fort jolis
chemins. Il y avait une colline dont la beauté était
diminuée par les arbres qu'on y avait abattus. De fort
jolis sentiers conduisent à travers les bosquets.
Quant aux bateaux je dois encore remarquer qu'on
les conduit ici avec de longs bâtons comme dans
les canaux d'Amsterdam et pas avec des rames à
cause du peu de profondeur et de la largeur des petits
fossés ou rivières qu'on traverse.
C'était ici une coutume jadis dont on n'osait déroger
d'instituer des conditions à table pour chaque classe de
personnes et chaque rang et malheur à ceux qui
oubliaient de donner à quelqu'un son rang accoutumé.
Mais cette mode commence à passer.
La vie est beaucoup moins chère ici qu'à Amsterdam.
Pour f 2000 on peut très bien vivre. Aussi les petites
dépenses sont-elles moindres. Mais les habitans calculent
les habitans calculent que les légumes qu'ils
cultivent eux-mêmes coûtent plus que comme
on les achète à Amsterdam. Étant dans l'auberge à
Vriesseveen nous eûmes 7 verres de lait, 3 bièrres
3 morceaux de pain de seigle et 3 biscuits pour un
Zesthalf. Ce n'est pas [onl.] dispendieux pour avoir ci une
voiture on en est quitte pour quelques centaines de
florins. Les habitans ont des campagnes mais qui
ne leur coûtent rien car ce ne sont que des petits pavillons
bâtis près de la maison d'un paysan qui en a la surveillance
et où il ne se trouve qu'une table des tasses et
quelques méchantes chaises.
Quant aux médecins on n'a pas trop d'estime pour eux
et on aime assez à se traiter soi-même il n'y pas
beaucoup de malades. Je vis encore l'autre jour un
paysan ramassant des cerises et qui avait
encore fort bonne mine. Cependant il comptait déjà 82 ans
et ce n'était rien de fort extraordinaire. On donne pour
chaque visite d'un médecin 6 sous et d'un chirurgien
3 sous.
Une autre coutume nationale ici c'est qu'à table
après la prière chaque cavalier donne un baiser à
la dame qui est à ses côtés.
De grande crimes tels que le vol le meurtre etc. se
commettent fort rarement ici.
enc. des pommes de terre.
Vendredi 6 Août 1812
Ce matin nous fîmes une très jolie promenade au
Vissschers Dijk. Elle était fort variée. Après-dîner nous allâmes
dans une voiture ouverte sous la direction du paysan
Theof. Premièrement nous traversâmes le chemin qui
mène à Beverdam et ensuite une partie de la bruyère
jusqu'à Wyrden. Ce village est souvent comparé avec Rijssen.
Cependant j'y trouve les maisons plus jolies, plus vitrées
et plus ressemblantes enfin aux chaumières hollandaises.
Après ce village nous eûmes encore de très jolies vues
sur de beaux champs de blé et nous arrivâmes au
Hekrel. Là se trouvent plusieurs maisons de paysans.
En passant nous vîmes une hauteur qu'on me dit être
un de ces fameux Hunnebedden si connus en Drenthe.
Nous vîmes aussi dans le lointain des contrées composées
de terre de tourbe qu'on à brûlées et sur lesquelles
on a ensuite semé avec succès du blé noir. Je remarquai
que l'avoine fauchée et rassemblée dans de petits tas
nommé knoppen tandis que le seigle est entassé en
grandes gerbes. Une autre chose remarquable du Hekrel
c'est le nombre infini de pierres de toute espèce qu'on y
trouve et qu'on suppose être les restes d'une ancienne
révolution du globe. Près de la maison du paysan il
y avait un puits immensément profond. Ces paysans
ici, contre l'ordinaire ont des très grands troupeaux
de moutons. Autour de ce Hekrel il y a quelques allées
d'arbres et deux beaux hêtres qui se font remarquer à
une grande distance mais en outre c'est situé entièrement
au milieu de la Bruyère. Nous nous retrouvâmes par
Vriesseveen, village dont j'ai donné la description plus
haut. Nous y vîmes des chariots tirés par des boeufs et
même un moulin où un cheval et un boeuf tiraient
ensemble. L'église de Vriesseveen est très jolie
et construite en 1801 mais on n'eut pas alors l'argent
pour refaire une tour mesquine et grossièrement faite
de bois qui dépare l'église. Les habitans de Vriesseveen c'est
à dire les communs car il y a plusieurs personnes très
riches diffèrent non seulement de leurs voisins
par la langue mais aussi par les moeurs. Ils sont
amateurs passionnés du genièvre et en boivent à
outrance. Aussi les voit-on presque toujours ivres.
Revenus chez nous nous entendîmes dans l'église
musique funèbre et l'enterrement de Mad.
Bruins. Il y avait beaucoup de monde mais
la cérémonie ne fît aucun effet du tout.
Samedi 7 Août 1812
Nous allâmes hier en bateau premièrement à Hidschel
où nous communiâmes notre pêche dans les viviers
droits qui entouraient cette petit domaine de Mr. v. Lennep
mais nous ne prîmes que des petits poissons. Nous continuâmes
notre route vers Beverdam. Le chemin est assez joli. On voit
la campagne de Beeklust en passant. Arrivés à Beverdam
nous continuâmes notre pêche qui ne fut guerre plus productive
et nous passâmes ce jour là fort gais et retournâmes vers le
soir.
Une singulière coutume était établie ici il y aune vingtaine
d'années. C'étaient les repas funéraires. À peine quelqu'un était-
il mort que toute la famille était invitée. Les dames prenaient
tout de suite place à une table sur laquelle était sept grandes
cafetières à trois robinets. Les messieurs mangeaient des pains
énormes avec du fromage mais sans beurre. On faisait ensuite
un dîner où tout était présenté avec la plus grande profusion
et dont le aanspreker avait la direction. La plus proches
parens assis au haut de la table ne s'occupaient aucunement
du reste de la compagnie qui ne s'attachait qu'à bien manger
et boire. On versait du vin blanc en abondance.
Dimanche Août 1812. Lundi. Mardi.
Le matin nous fûmes à l'église où nous entendîmes le
ministre Rustburg de Hengelo qui prêcha très bien quoiqu'il
eût un accent désagréable et une élocution difficile.
Nous dînâmes chez le grand papa. Les jours
suivans furent employés à des visites et à des promenades
dans les environs et à une partie à Strokke.
Jeudi 13 Vendredi 14 Samedi 15 Dimanche 16 Juillet
1812
Déjà longtems on avait médité le plan du voyage à
Bentheim et Steinford enfin il fut mis à exécution. À 5
heures du matin nous sortîmes pleins de courage de
la ville d'Almelo où tout était encore plongé dans
les bras de Morphée. Nous étions trois Van Lennep Gerard
et moi. Nous passâmes premièrement une partie du
chemin qui mène à Storck mais bientôt tournant
à gauche nous vîmes le délicieux Weleveld nous passâmes
par des champs de blé où croissait le Huttentot espèce
de graine dont on fait aussi de l'huile. Nous atteignîmes
enfin le lac de Saasveld plage d'eau assez étendue
et poisonneuse. Nous vîmes dans le lointain l'ancien
château de Saasveld célèbre par son antiquité et l'épaisseur
de ses murailles. Enfin après avoir côtoyé le lac
nous arrivâmes sur un chemin ouvert qui menait
tout droit à Oldenzaal dont on peut distinguer déjà la
tour à une distance de deux heures et ceci fait croire
qu'on est plus près de la tour qu'on n'est en effet.
Nous arrivâmes à Oldenzaal. Cette ville est petite comme
celle d'Ootmersum a pareillement des portes misérables
mais il s'y trouve pourtant plus de jolies maisons.
Elle compte parmi ses habitans des gens fort riches.
Après nous avoir restauré à une auberge qui ne
valait pas trop nous allâmes voir l'église cathédrale.
Cet énorme bâtiment gothique surprend la vue. Premièrement
c'était en avant la révolution, les réformés à qui la desservait,
mais comme elle était beaucoup trop grande pour le
petit nombre de cette secte qu'il y avait ici, ils l'ont cédé
aux catholiques lors du voyage du roi. Cette église est
très vaste et était à présent très bien décorée à la
manière catholique. Il y avait trois grands autels dont
un de marbre. C'est peut-être la plus belle église catholique
qu'il y a dans les 7 provinces. L'église réformée est bâtie
avec beaucoup de goût et est charmante. Au reste il
n'y a pas plus de chose remarquables dans cette ville
à moins qu'on ne veuille ranger dans ce nombre une
énorme pierre (keisteen placée au milieu du marché
creuse en haut et dont on raconte qu'elle a
servi pour des baptêmes. En sortant à Oldenzaal nous
traversâmes un très beau bois et passâmes le Dinkel
sur le pont près du quel notre compagnon de
voyage avait failli se noyer l'année passée. Nous
entrâmes dans le Poppen la plus misérable auberge
que j'aie vu de ma vie et dans laquelle l'oncle de
Vos fut si mal régalé. Après cela on va un chemin
souvent fort joli jusqu'à Gilhuys. Ce village
assez grand est divisé en deux parties. Nous nous
arrêtâmes sur une colline près du
moulin de Gilhuys et de là on avait la vue
la plus superbe et la plus étendue. D'un côté on
voyait le village lui-même, d'un autre côté de vastes
champs de blé dont une partie était déjà liée en
gerbes. Là on voyait le château de Bentheim là dans le
lointain des bois, enfin c'était une vue ravissante.
Près de Gilhuys nous parvîmes aux carrières de pierres
de taille, connues sous le nom de Bentheimer steen.
Tout ce sol est du rocher et on a déjà creusé jusqu'à
une très grande profondeur. Descendus dans un de
ces gouffres de pierre nous ne voyions rien autour
de nous que des pierres et les sommets de quelques arbres
de manière qu'on n'aurait pas cru se trouver alors dans
les campagnes de la Hollande mais dans de vastes déserts.
Cette pierre est plus fine dans quelques endroits que
dans d'autres. Nous y vîmes travailler des gens. Ils font
premièrement une ouverture sous le morceau de
pierre qu'ils veulent arracher. Là ils posent leur coin
qu'ils frappent avec des lourds marteaux de pierre avec
des manches consistant en un petit bâton fort élastique.
Je n'ai jamais vu une vue aussi singulière. Après
être remonté les rochers nous arrivâmes par un chemin
fort joli et fort diversifié à Bentheim dont je m'étais
formé une idée plus brillante. Cette ville n'est pas plus
jolie que plusieurs villages d'Overijssel mais située d'une
manière fort singulière. Premièrement lorsqu'on entre
dans la ville il faut faire une grande montée et
l'on arrive aux pieds du château. De là on voit
les maisons situées à quatre hauteurs différentes
de manière que le toit d'une maison correspond souvent
au rez-de-chaussée de l'autre. Toutes les maisons sont
posées sans fondemens sur la pierre car toute cette
ville n'est située que sur un rocher. C'est sur la partie
la plus élevée de ce rocher que le château a été bâti. C'est un
bâtiment dont les tours élevées et les énormes
murailles annoncent d'abord l'antiquité. Mais
on voit tout de suite qu'il a été renouvellé plusieurs
fois et ce n'est que le côté gauche occidental qu'on
pourrait regarder comme le plus ancien et dont
on veut faire remonter l'origine jusqu'à Drusus.
On y voit aussi une inscription latine mais effacée
et dont on ne peut lire que quelques mots. C'est aussi
là que l'on voit cette énorme compilation de
rochers et cette vaste quartier de pierre qu'on nomme
(het duivels oorkussen). Nous entrâmes dans la cour
du château sous l'égide d'un vieux soldat
prussien en uniforme rouge. Nous vîmes d'abord les
ravages suites du siège que les français ont fait
essuyer à cette place. Quelques ailes étaient tombées
en lambeaux et notre guide nous disait avec ostentation:
da war die fürstliche Küche da das Concert tandis
que nous n'y vîmes rien que des morceaux de ruine. Une
partie du château est restée intacte mais comme
il n'y avait rien de remarquable à voir nous n'y en-
trâmes pas. Une des tours n'avait pareillement rien
souffert. L'autre tour ravagée par le feu des ennemis
avait été maintenant couvert d'un toit ressemblant
à celui du Panorama d'Amsterdam pour empêcher
sa destruction totale. Il nous fit entrer dans une
cave jadis le séjour des prisonniers d'où s'exhalait un
miasme infect. C'était là dit-il que les officiers se
retiraient lors du siège. Il nous fit voir ensuite un
puits énormément profond car il fallait un très
long espace de tems pour faire remonter l'eau puisée.
Après cela nous montâmes sur la tour d'où nous
avions une vue superbe sur Bentheim et ses environs
à cause de l'élévation du rocher sur lequel le château
est situé. Enfin ce château présente en effet une
vue imposante et est digne de l'admiration des voyageurs.
Sur la pente du rocher de l'autre côté se trouve un
joli bosquet. On voit pareillement sur le roc un vivier.
Nous allâmes ensuite nous promener dans le bois. J'en
ai vu de plus jolis. Il y a de beaux arbres mais la
plupart n'étaient pas fort élevés. Ajoutez à cela la
difficulté d'y marcher car le terrain avait été amolli
par les pluies et l'on s'y enfonçait à chaque moment.
Nous vîmes la source d'eau minérale qui se trouve
au milieu du bois. Déjà à quelque distance on sent
une odeur insupportable qui ressemble à celles d'oeufs
pourries. La source dont le goût est détestable est entourée
d'un petit bâtiment en pierre couvert d'inscriptions
latines qui attestent l'effet miraculeux de cette eau
surtout contre le scorbut. Il y a aussi encore dans ce
bois une pyramide mais je n'ai pu remarquer
en honneur de quoi elle fut érigée. Voilà les principales
particularités de Bentheim. Après cela nous rentrâmes
dans l'auberge appellée le cheval blanc où nous
eûmes un souper et un coucher excellens.
Le lendemain nous recommençâmes de bonne heure
notre course et marchâmes vers Olme. Premièrement
nous eûmes un chemin où l'on avait des
vues fort jolies sur la ville de Bentheim. Ensuite
on descend et on arrive par un chemin ouvert à Ohne.
La position d'Ohne est assez jolie mais la ville elle-
même est très laide et on y voit des maisons détestables.
Lorsqu'on a passé les environs cultivés on entre dans
une énorme bruyère où l'on ne voit que quelques
troupeaux de moutons et une maison de paysan où
l'on nous indiqua le chemin que nous devions suivre
pour nous rendre à la saline de Rheine. On trouve
en chemin un petit bois charmant. Nous nous arrêtâmes
dans une auberge où tout respirait la malpropreté.
Enfin nous atteignîmes la saline. On nous fit voir
premièrement la fabrique elle-même on y voyait leur
salée mise dans des cuves énormes qu'on chauffait jusqu'à
ce qu'enfin toutes les parties aqueuses fussent évaporées
et qu'il ne restait plus rien que le sel crystallisé. On
a ici quatre espèces de sel. C'est avec les charbons de
pierre d'Ebenbukner qu'on allume les grands feux
qui doivent toujours être entretenus. Le sel doit être
trois ou quatre jours dans ces cuves avant d'être crystallisé.
On voit le sel se condenser sur la surface de l'eau et
enfin devenu plus pesant à enfoncer au fond. Toutes
ces cuves sont de fer. Déjà on nous conduisit à une énorme
bâtiment long de 1100 pieds. Là l'eau premièrement
conduite au pied de ce bâtiment est pompée en haut et
là elle retombe en filtrant entre du bois (takkenboschen).
Dans cette chute les parties d'eau douce s'évaporent et
on répète cette opération jusqu'à ce que cette eau soit
enfin assez purifiée pour être mise dans les cuves. De là
nous allâmes au puits d'où on pompe cette eau et qui
est très profond. Deux hommes qu'on fait descendre au
fond du puits y sont continuellement occupés à travailler
pour débarasser le cours de l'eau salée. Ils n' y
restent jamais plus que quelques heures. On leur
fait parvenir de air frais par un énorme soufflet.
Le soufflet ainsi que toutes les pompes sont mises
en mouvement par une roue énorme. L'eau qui met
cette roue en mouvement est un petit canal fort
calme mais là on le réserve et il se précipite
avec une force violente et fait tourner la roue.
Après avoir visité ceci qui est vraiment intéressant
nous côtoyâmes le petit canal et arrivâmes bientôt
à Rheine. Cette ville est arrosée par l'Eems, rivière
qui a beaucoup de courant: on a construit une espèce
de digue au milieu de la rivière mais lorsque l'eau
est haute elle la dépasse ce qui forme une chute de
quelques pieds. Cette même eau fait tourner alors
des deux côtés de la rivière un moulin d'eau.
Cette vue en effet était charmante et me frappa
beaucoup. On trouve ici aussi des rochers mais d'une
tout autre pierre qui tient plus de l'ardoise. Après
avoir suffisament admiré ce spectacle nous
entrâmes dans Rheine petite ville assez jolie en
comparaison des autres que nous avions vues. Nous
nous arrêtâmes dans une auberge fort joliment décoré
d'où l'on regardait une espèce de place et une maison
de ville le plus misérable réduit qu'on puisse voir.
Après nous y être rafraîchis et avoir bu une bouteille
d'un vin qu'on nomme ici vin du rhin et qui est très
bon pour calmer la soif nous continuâmes notre
marche. Le chemin d'ici à Nijkerk est ravissant on
va sur des hauteurs d'où l'on a une vue superbe
sur des champs magnifiques. Une des singularités que
je remarquai ici et qui me fit reconnaître que j'étais
dans un pays étranger furent les crucifix que je rencontrai
partout sur le chemin aussi qu'une petite chapelle
de pierre où l'on pouvait entrer pour prier. Il y avait
une autel et une statue de la vierge. Nijkerk quoique
ce ne soit qu'un village renferme pourtant de plus
jolies maisons que la plupart de ces petites villes.
Elle est principalement habitée par des marchands
en toile et linge. Après être entré dans une maison
dont la puanteur nous fit sortir. Nous entrâmes dans
une auberge où tout était fort à notre gré. Nous
dûmes cependant traverser une bruyère fort vaste
jusqu'à Steinfort. On avait cependant de tems en tems
de fort jolies vues sur une montagne cultivée, située
près de Steinfort. Enfin nous vîmes cette ville devant
nous dans une vallée. La première difficulté qui s'y
présenta fut le choix d'une auberge pour la nuit.
Nous étions déjà entrés dans l'éléphant mais une
apparence de malpropreté nous en fit sortir et
un mauvais génie nous inspira l'idée d'entrer dans le
Soleil. La vue depuis l'auberge était rien moins
qu'agréable ainsi malgré nos fatigues nous résolûmes
d'aller encore nous promener au [onl.] qui nous
frappa extrêmement par la beauté des sites. Surtout
la majestueuse nappe d'eau qui entoure les charmantes
îles de cette campagne nous ravit.
Nous eûmes un mauvais souper rendu encore plus
désagréable par la compagnie de quelques français et allemands[?]
et nous couchâmes dans une chambre où la crasse était
jusques sur les murailles. Ce fut surtout le lendemain
que l'extrême malpropreté de ce lieu nous frappa et
nous fûmes bien aisés d'en être sorti. Nous entrâmes
dans le [onl.] dont nous fîmes le tour sous la conduite
d'un [onl.] de son excellence. Tout était fort bien
entretenu excepté les fontaines. Nous vîmes premièrement
deux bâtimens entièrement bâtis dans un goût chinois
ensuite la salle du concert qui est décorée avec beaucoup
de goût. L'église ornée d'une inscription tirée de Feith.
La chaire est soutenue par un ange. Après cela nous
fîmes le tour des îles dans une petite barque et
nous traversâmes cette nappe charmante d'eau. Il avait
une île on se trouvait une petite maison avec tout
l'attirail d'un pêcheur un rocher sur lequel se trouve
un vaisseau d'où jaillissait jadis une cascade enfin
des choses charmantes. Outre cela le bois rempli de
beaux arbres était partout arrangé avec goût et
on avait des vues superbes. Sur la fin on voit une roue encore
dont le diamètre est de 104 pieds elle servait jadis pour
faire monter l'eau jusque dans une tour qui occasionnait
une fontaine superbe. On voyait aussi un part de chaînes
comme il y en a en Suisse. Une grotte charmante
dans le milieu de laquelle était un bassin d'eau.
C'était un lieu charmant pour s'y retirer dans
la chaleur de l'été. Après avoir examiné à loisir
les beautés de ce lieu enchanteur nous nous arrêtâmes
à une auberge située au milieu du bois où nous
eûmes un déjeuner délicieux. Après cela nous retournâmes
vers la ville construite assez régulièrement. Le château
n'a pas beaucoup d'apparence et je ne crois qu'il
compte une haute antiquité. Après cela nous vîmes
le museum du comte et je n'ai jamais vu rien de
si misérable. Il y avait de tout et il n'y avait rien.
Des collections de misérables tableaux de médailles,
de coquilles et de diverses singularités, mais rien
qui eût aucune valeur. Les coquilles étaient encore
ce qu'il y avait de plus beau. Et il y avait [onl.] chambres
remples du haut en bas. Ajoutez à cela qu'il s'y trouvait
des cochonneries en grand nombre et que tout était
bien mal conservé. C'était un petite garçon qui nous
étalaient avec beaucoup de pédanterie ces prétendus
trésor.
C'était ce jour-là la fête de St. Napoléon. Nous voyions
de tous côtés les femmes se rendre à l'église avec leurs
bonnets brodés, leurs manches larges et leurs deux
jupes rouges dont celle de dessus était élégamment
relevée. Après deux heures de marche nous atteignîmes
Metelen petite ville assez jolie. Nous entrâmes dans
une auberge nommée l'aigle. Ce n'était que de chez des paysans
mais tout y respirait la propriété hollandaise et je n'oublie
jamais le bon accueil que nous y reçûmes. Après cela
nous eûmes à traverser dans une chaleur ardente un
chemin de trois grandes heures depuis ici jusqu'à Gronau.
C'était une vaste bruyère quelquefois interrompue par
des maisons de paysans cachés entre des arbres touffus.
On voyait toujours dans le lointain quelques arbres
mais lorsqu'on les avait atteints on voyait devant soi une
nouvelle lande. Je remarquai ici beaucoup de bouleaux
et même des bouleaux pleureurs. La seule plante qui
croisse dans ces bruyères est la baie dont on fait
le genièvre. À moitié chemin nous nous reposâmes
dans une chaumière de paysan. Tout y respirait le
contentement et l'aisance. La famille à dîner autour
de la table mangeait une soupe au lait avec des légumes.
Il y avait une jeune paysanne assez jolie en corset vert
et jupe rouge. Ce costume ne lui allait pas si mal.
Nous ne fîmes que traverser Gronau à cause de l'impa-
tience que nous avions à atteindre enfin un lieu de repos.
Nous le trouvâmes au Glanerbrug. Le pont n'est qu'un
passage sur un fossé qu'on pourrait presque franchir
d'un saut. L'auberge de deux étages est un joli bâtiment
et le verre à la main nous y prîmes congé du département
de la Lippe. Ensuite nous allâmes vers Enschede à travers
de la plus vaste des bruyères que j'aie vu jusqu'ici. Enschede
est en effet une petite ville très jolie mais il n'y a point
d'environs du tout et les habitans ne peuvent
faire un pas hors de la ville sans être au milieu d'une
lande aride. Enschede s'est beaucoup accru depuis quelques
années aussi y a-t-il de maisons situées hors
des portes comme la jolie maison de Mr. Flok à qui
je rendis visite. Une des portes a été construite il y a
peu d'années et a coûté beaucoup d'argent. Ce sont
deux colonnes de pierres rondes et on y lit l'inscription
orgueilleuse S.P.Q.E. Enschede m'a beaucoup plu. Il
y a de très belles maisons entr'autres celle de M.
Blijdenstein qui ne déparerait pas la plus jolie
partie du Keizers où Heeregracht. Enschede est
beaucoup plus bâtie dans le dessein d'en faire une
ville qu'Almelo. Le soir nous entrâmes dans le sociteit.
C'est un bâtiment que les Enschedeens ont fait construire
à leur fraix et qui est bâti avec beaucoup de goût
et fait un fort joli effet quoiqu'il ne soit que d'un étage.
Il y a deux chambres fort grandes et bien meublées
l'une pour jouer au billard l'autre pour faire des
parties ou lire des papiers publics. Les habitans s'y rendent
toutes les soirs et leurs épouses ont leurs cercles à part
ce qui détruit tout commerce amiable entre les deux
sexes. C'est aussi la cause que ceux d'Enschede sont
encore bien moins avancés dans la civilisation que ceux
d'Almelo et même leur accent est beaucoup plus grossier
et plus plat. Ce soir tout Enschede était en combustion
pour une misérable illumination de la maison de
ville et les rues étaient pleines de bruit. Le lendemain
après avoir fort bien soupés et dormis dans le Roskam
nous atteignîmes Hengelo après deux heures de marche.
C'est un joli village. La rue est fort large et présente
un aspect agréable. L'église réformée est située hors du
village. Après cela laissant Borne à notre droite
nous retournâmes dans des contrées plus connues
et revîmes enfin les amis à Almelo où nous arrivâmes
avant le dîner.
Nous nous étions amusés supérieurement bien dans
ce petit voyage et chacun après qu'on eut calculé tous
les frais avait dépensé f 7.10.
Lundi 17 Août 1812
Ce fut un jour de repos. J'écrivais mon journal et je
fis le soir deux promenades charmantes. Je fus chez
Mr. Hofkens. C'est un vieux métromane mais pourtant
homme d'esprit. Il me cita des vers à tort et à travers
j'en fis autant ce qui donnait un conflit fort
comique. Il citait surtout Voltaire et le roi de Prusse.
Mecredi 19 Août 1812.
Depuis longtems j'avais nourri le désir de voir le berceau
de la bonne Geertrude de Goor que j'avais tant de fois entendu
citer et que je m'étais toujours figuré comme un lieu
très remarquable. On remplit mes désirs et à 7 heures
nous montâmes en voiture et traversâmes encore le hei
ou broek espérant de pouvoir aller le chemin dicté.
Mais il était beaucoup trop rempli d'eau
et nous dûmes prendre celui d'hyver qui était beaucoup
plus long. Nous continuâmes toujours notre chemin
quoique nous nous fussions apperçus que notre cocher n'y
entendait pas grand chose quand tout à coup un paysan
à qui nous demandâmes de nous indiquer le chemin nous
dit que nous n'étions pas sur celui de Goor et nous
remit sur le bon chemin. On ne voyait partout aucune
habitation. Enfin nous arrivâmes à une misérable
cabane. Les dames qui avaient soif demandèrent du lait
mais la vue du verre qui peut-être n'avait pas été rincé
dans quelques mois les dégoûta bientôt. Nous traversâmes
enfin quelques bosquets ce qui nous consola un peu de
la longueur du chemin et à force d'interroger les paysans
nous vîmes enfin Goor dont nous traversâmes la moitié.
Quoiqu'on en puisse dire je n'ai pas trouvé Goor si laid
que Rijssen où d'autres villages. Il y a des maisons assez
jolies mais il faut aussi confesser qu'il y en a d'autres
qui tombent entièrement en ruines et où il n'y a
plus ni portes ni fenêtres. Le village consiste dans une
rue extrêmement longue. On voyait bien que ce
village ne recevait pas souvent des visites d'étrangers
car tous les gens ouvraient leurs portes pour nous regarder
et nous saluèrent profondément. Mais c'était au Renkum
que nous voulions être et nous tournâmes à gauche
et passâmes à travers de fort belles allées d'arbres. Le
cocher n'était pas orienté dans ces lieux là et nous
croyions ne jamais arriver au but de notre voyage
quand nous vîmes enfin le Molleken. C'était le nom
d'une petite auberge de paysans fort agréablement située
près d'un petit moulin à eau. Nous descendîmes de voiture
et marchâmes droit vers le Nienhuis pour voir du moins
quelque chose. C'est la campagne du comte Schimmelpenninck.
Nous y errâmes quelque tems car le garçon
paysan qui devait nous servir de guide nous
abandonna tout à coup. Je ne puis pas dire que dans
la partie de la campagne où nous nous promenâmes
il y eût rien bien frappant. Une très grande
avenue d'arbres mène au château bâtiment
moderne qui ne présente rien de fort brillant. À 6
heures nous étions arrivés à 7 heures nous remontâmes
en voiture et nous nous retournâmes par le
Werdam aussi un château noble comme il y en a ici
plusieurs qui servent à embellir les environs de
Goor. Ce ne fut qu'à onze heures et demie que nous vîmes
mettre fin à l'inquiétude de nos amis d'Almelo.
Jeudi 29 Août.
Je veux donner une description de la partie que nous
eûmes à fin qu'on puisse juger de là quelques coutumes d'Almelo.
C'était au Meulerie campagne de Mr. J. Coster que nous
fûmes invités. L'on sait assez par les descriptions précédentes
ce qu'on entend d'ici par une campagne. Celle-ci est composée
d'un grand nombre de viviers entourés de sentiers droits.
Après que nous eûmes satisfait aux besoins de la
nature on se mit à pêcher c'est à dire l'on met de l'un
côté du vivier une toile en l'eau et l'on tire jusqu'à ce
que l'on soit arrivé à l'autre côté. Là on tire à soi
et l'on recueille les poissons. Ceux qu'on veut pêcher sont
des brochets qu'on a premièrement jeté dedans. Notre
pêche fut très modique quoiqu'on pêcha jusqu'à quatre
ou cinq fois. Cette besogne fait les messieurs lavent
et coupent eux-mêmes le poisson et même chez quelques-
uns ce sont eux qui le cuisent. Ensuite l'on se met
à table et mange ce poisson ou un morceau de schenkel (jambe).
L'après-dîner nous fûmes fort gais.
J'ai oublié de parler du mecredi avant notre voyage nous
fûmes au Stork tout le jour. Mr. L. Koster y était avec
ses deux filles. Julie est fort aimable. Nous
mangeâmes des cerises à tort et à travers et nous dînâmes
pressés dans cette coupole dont j'ai parlé plus haut.
Je veux à présent rassembler encore quelques remarques
générales sur Almelo.
Quoi qu'on puisse dire, je n'ai point vu depuis mon départ
de lieu où je demeurerais plus volontiers qu'ici. Cette petite
ville a des maisons dignes d'une ville et des environs dignes
d'un village. Elle consiste principalement dans un longue
rue à l'entrée de laquelle se trouvent quelques
maisons vieilles et laides mais qui à mesure que l'on
s'avance devient plus large et plus belle. Plusieurs
maisons ne sont que d'une étage et ont des façades de bois
ce qui ne produit pas un fort joli effet. Les plus hautes
sont de deux étages, telle est celle de mon hôte une
des plus jolies maisons d'Almelo. Toutes les maisons ont
derrière elles un jardin plus ou moins grand. P.E.
M.J. Koster en a un qui est fort grand et qui renferme
beaucoup d'arbres fruitiers. Outre cette grande rue
qui est très longue il y a encore beaucoup de rues
de traverse tels que le Plas le Doelen le Schalderooi,
Charles Roi et puis un assemblage de quelques
maisons fort laides où l'on trouve des juifs des
filoux et des catins.
Tout les jardins des maisons situées de l'un des côtés de la grande rue
aboutissent à une fort jolie allée nommé le Hagen. Ils en
sont séparés par une petite rivière qu'ils traversent tous
par des pont-levis. Ceux de l'autre côté de la ville ont
depuis leurs jardins des vues assez jolies sur des blan-
chisseries.
L'église est un joli bâtiment ainsi que la tour. En outre
il y a une maison de ville. C'est un bâtiment qui ne
signifie pas trop. Un des côtés est approprié pour une
prison et on a bouché grossièrement les fenêtres avec des planches.
Sur le chemin du Diek il y a un bâtiment qui a déjà
servi d'hôpital et de salle de spectacle.
Almelo compte environ 2300 à 2400 âmes.
On bâtira incessamment un bâtiment pour les sessions du
tribunal.
Lundi 24 Août 1812
Hier je fus ici dans l'église reformée. Le ministre Lulofs prêchait
dans une manière tout à fait populaire quoique non dépourvue
de bon sens. Comme après le sermon plusieurs gens se retiraient
il dit 'Ik heb zoo lang niet gepreekt menschen of gij kunt
nog wel eenige minuten in de kerk blijven.' Personne n'osa
sortir.
L'église est un joli bâtiment. Elle est bâtie en croix (kruiskerk)
sans aucune colonne. Il y a un mausolée des comtes de Rechteren.
Avant la révolution de 1795 ces comtes de Regteren avaient
ici des privilèges excessifs. Ils avaient autorité souveraine
et le droit de vie et de mort. Ils étaient seigneurs
comme l'on disait, de l'eau et du vent ce que veut dire que
personne n'osait moudre ou pêcher sans leur permission.
Ils avaient aussi seuls droit de chasse ce qui faisait que
les lièvres se multipliaient d'une telle manière qu'on
les voyait souvent dans les rues d'Almelo. Et si quelque
pauvre paysan tuait quelqu'un de ces animaux qui
ravageaient ses terres il était fouetté ou marqué.
En 1795 tous ces privilèges ont été abolis. Cependant ces
seigneurs de Rechteren possèdent encore ici de grand
biens de terre où se trouvent des paysans
fort aisés puisque la ferme qui est établie depuis beaucoup
d'années est beaucoup plus basse que celles d'autres
fermiers. Il y a beaucoup plus de maisons à Almelo qui
leur doivent un hommage p.e. l'une trois sous et demi
l'autre un cent d'oeufs etc. Le testament de la derrière comtesse portait
que l'aîné de ses fils posséderait la seigneurie d'Almelo
et de Vrieseveen pourvu qu'il cédât à ce cadet le somme
de 100.000 et qu'en cas qu'il refusait de payer cette somme il
pourrait céder cette seigneurie au cadet qui lui donnerait
les f 100.000. L'aîné ne veut point le céder, ni peut se procurer
l'argent et le cadet veut qu'il se décide et donne
ou l'argent ou la seigneurie. Ces comtes avaient
aussi le droit pour que
lorsque un habitant d'Almelo achetait une maison
d'un autre il devait toujours offrir premièrement
l'achat au comte qui, lorsqu'il y trouvait son profit pouvait
le retenir pour la même somme.
Hier nous fîmes un fort joli tour premièrement à
Seldam (hameau) et de là à Delden. Le premier chemin
est joli et quoiqu'on y passe aussi par la bruyère on arrive
souvent à des bosquets ou à des fermes cachées agréablement
dans la verdure et dont plusieurs ont une situation charmante.
Nous passâmes un canal qui mène à Delden et que le
comte de Twikkel a fait creuser à ses propres fraix.
Je vis aussi près de là dans un lieu nommé Bornerbroek
une jolie église catholique bâtie après la révolution
où les catholiques de tous les villages voisins se réunissent.
Seldam est un hameau où il y avait plusieurs paysans
qui demeurent les uns auprès des autres d'une manière
fort pittoresque entourés de l'un côté de leurs champs
de blé, de l'autre de leur prairie et de leurs bosquets.
Ces paysans autour d'Almelo sont pour la plupart
de fort bonnes gens mais fort ignorans. De là il n'y a qu'une
demi heure à Delden dont j'ai déjà parlé plus haut. Nous
nous arrêtâmes dans le Posthuis chez van Heek où est
la meilleure auberge. C'est par Delden que passe la
grande route pour l'Allemagne. C'est aussi par ici
que passa le Roi lors de son évasion et plusieurs personnes
ici le virent et le reconnurent. Parmi les nombreuses
épitaphes qu'on trouve dans cette auberge sur les vitres
je trouvai celle ci de M. Bongaard qui fit retenu ici
par la maladie de son épouse.
Gij die door tegenspoed hier opgehouden word
Gaat in het Twikkelsch bosch ligt vind gij tijd te kort
Le château Twikkel n'a pas beaucoup d'apparence
quoique ce soit un bon bâtiment mais on me dit
qu'il y avait des salles superbes. Le comte qui possède
de grands biens et une très belle maison à la Haye
est de la famille des Wassenaar Obdam. Son père fut
pendant plusieurs années ambassadeur des états à Vienne.
Il compte parmi ses aïeux ce Wassenaar qui sauta
en l'air en 1666 dans la bataille entre les Anglais et
les Hollandais. L'entrée du parc par l'orangerie est
assez mesquine mais ensuite on a de très belles vues
sur l'eau qui arrose le château et depuis une espèce
de montagne qui s'y élève. Ce parc n'est pas touffu
comme nos campagnes et construit plus à la manière
anglaise. Le père de ce comte avait beaucoup de
plaisir à embellir ces jardins mais celui-ci
permet que tout soit négligé et ne donne des
soins qu'à ses fleurs. Ce que faisaient une très
joli effet c'étaient une soixantaine de daims qui
surtout lorsqu'on les chassait, traversait ces jardins
d'un bout à l'autre avec la plus grande vélocité. Après
avoir donné un coup d'oeil rapide aux fleurs nous nous
avançâmes dans le bois. Les années précédentes un
jardinier avait tenu ici une espèce d'auberge où l'on
venait pour y boire du vin ou du thé. Mais le comte
l'ayant chassé tout était pour ainsi dire rentré dans
le chaos. La petite maison où il avait demeuré la [onl.]
que tout était désert et avait déjà souffert des
ravages du tems. Les eaux coulantes étaient devenus
croupissantes les sentiers était couverts de ronces
et d'herbes enfin tout était ravage. Cependant il
y avait dans ce bois des aspects majestueux et des
arbres énormes. À propos d'arbres. Nous vîmes en chemin
les débris d'un hêtre terriblement grand. Il avait été
vendu pour f 70. Un homme avait été occupé 200 jours
à le couper et ses dépouilles avaient fournis 600 charges
de cheval. Après avoir ainsi parcouru les particularités
de Delden nous rentrâmes en voiture et voyageâmes
avec grand plaisir puisque la lune qui
était dans son plein répandait sur la campagne une
lumière charmante.
Combien l'oeil fatiguée des pompes du soleil
aime à voir de la nuit la modeste courrière etc.
Une chose singulière ici à Almelo c'est comme
dans les grandes villes on connaît les villages ou
hameaux situés en dehors. Il y a ici une quantité de
fermes qui passent de père en fils qui sont connues par
le nom de leur possesseurs qui servent aux promeneurs
pour diriger leur course et qui ne sont inconnus à
personne. Tels sont p.e. Joosteman Schuitteman Alberink
Beverdam, Bruggink 's graven lambert et plusieurs
autres. Quand le fermier n'a pas de descendants males
le mari de la fille aînée reçoit la ferme et prend le
nom de son épouse.
Ce matin revenant de Beverdam je vis une singulière
manière de pêcher. Un garçon se promène dans une
rivière dont l'eau lui vient jusqu'aux genoux. Il a
en main une corbeille pyramidale ouverte par dessous
il la fiche sur terre et voit s'il y a quelque poisson
qui soit enfermé dedans. S'il en prend il
les enfile avec une aiguille à une corde qu'il traîne
après soi. C'est cette petite rivière qui coule près de
Beverdam dont on se sert pour transporter les marchan-
dises à Zwol souvent dans l'été elle est desséchée.
Le roi lors de son voyage en Overijssel avait
promis de faire creuser un canal droit d'ici à Zwol. [onl.]
Dans les maisons des paysans on voit tout [onl.] jusqu'aux
plus petits enfans. Je vis aujourd'hui plusieurs femmes [onl.]
à briser le lin c'est ce qu'on nomme braaken.
Je veux dire encore un mot sur la société à Almelo. La
grandeur énorme des familles empêche qu'on ait quelque
liaison intime avec des étrangers. L'été chacun va son
chemin et on ne converse qu'avec ses plus proches parens
mais dans l'hyver les parens éloignés se rapprochent. Rien
n'est plus ordinaire que des soupers de famille de 25 à
30 personnes. Souvent on sert presque toute la semaine.
Le retour fréquent de ces soupers, la rencontre des mêmes personnes
des mêmes mets introduit une uniformité désagréable.
Ajoutez à cela que comme il y a peu de circulation de
nouvelles, peu de littérature et qu'on joue peu, les
mêmes sujets de conversation reviennent souvent et
inspirent souvent du dégoût
pour ces parties. On parle de politique qu'on n'entend pas
on se plaint des mauvais tems on dispute quelquefois
sur la religion et chacun parle de ses légumes de
ses chapons etc. Exceptés de ces réunions ordinaires de
famille il y a des parties extraordinaires. P.E. dans le
mois de novembre chacun achète un boeuf
et un porc et c'est un de ces morceaux du boeuf qui
donne occasion au Brasmaal qui fait alors le tour
de toute la famille. Après quelque tems vient le
Pekelmaal et enfin plusieurs parties de l'animal donnent
occasion à des repas pareils. Ànoël on ne mange que
du brochet et des pommes de terre. En hyver l'on fait
beaucoup de parties en patins, exercise qu'on aime
ici à la folie.
En général on a ici beaucoup plus de goût pour la
lecture qu'à Enschede où se trouvent pourtant quelques
personnes qui sortent de la règle générale. Il y a ici
trois sociétés de lecture. On paraît en général
aimer beaucoup les voyages. L'hyver il y a un concert,
mais on doutait s'il serait renouvellé cette année.
Quant aux moeurs je crois (et je suis fort mauvais
juge en ce point qu'elles sont ici assez pures non que
plusieurs des jeunes gens soient beaucoup meilleurs
que les nôtres mais là où la tentation manque souvent la
vice manque aussi. La conversation entre les jeunes
gens des sexes n'est pas très fréquente aussi manque
tel toujours dans les petites villes d'un nombre convenable
de garçons et de filles. La population d'Almelo a beaucoup
augmenté à cause de tous ceux qui dépendent
du tribunal et de tous les rats de cave gendarmes
et autres. Les Almeloiens sont scrupuleux
à leur société avec eux.
Mecredi 26 Août 1812
Nous fîmes hier avec Mons. G. J. Coster le même tour au Heksel
dont j'ai déjà parlé. Une singularité c'est l'attelage des
paysans de Vriesseveen car ils ont des petits chariots fort
étroits tirés par un cheval mais qui n'est qu'attelé qu'avec des
cordes. Ainsi lorsque p.e. ils doivent faire place à une autre
voiture le paysan est obligé de sortir de son chariot
pour diriger son cheval ou son boeuf.
Nous prîmes le thé au Heksel dans un fort joli Hofhuisken
de M. Hofkens. Il est placé au milieu d'un groupe d'arbres
et a une vue fort gaie.
Une chose qui font pour leur profit les paysans qui
ont des bosquets c'est d'entasser leur bois et de le brûler
en charbons.
Hier il était marché de grains. Ces marchés ont lieu deux
fois dans la semaine, le mardi et le jeudi. C'est une jolie
vue de voir arriver de tout côté les paysans avec leurs
chariots chargés de blé souvent toute la rue d'Almelo
est occupée par ces chariots. La première heure il n'y a
que les bourgeois qui osent acheter, mais après que midi
a sonné ce sont les négocians. Ils n'apportent que du
seigle ou du blé noir.
Dimanche 30 Août 1812
Ce [onl.] matin nous fîmes une promenade au château de Saasveld
que j'avais apperçu dans le lointain lors de ma promenade
à Oldenzaal. C'est le même chemin que celui de cette dernière
ville. Mais lorsqu'on vient au lac de Saasveld on
tourne à gauche et on arrive au château par une
très belle allée. Là on voit quelques maisons de paysans
et une église catholique enfin on passe par une porte
et on arrive dans la cour du château. Le bâtiment
surmonté de tourelles ne présente point l'aspect imposant
de quelques autres vieux châteaux. On entre par la grande
porte dans une vaste salle où peut-être jadis les braves
chevaliers d'Overijssel le verre à la main avaient fait
retenter leurs chants. On voyait à présent partout
le froment et les tourbes du curé. Les murs étaient
épais mais non d'une manière extraordinaire. De l'un
côté demeure un paysan de l'autre côté nous montâmes
des escaliers et nous vîmes plusieurs dont
le plancher était ébranlé et menaçait de s'enfoncer.
Nous ne voulûmes pas monter plus haut. Nous entrâmes
ensuite dans les vastes souterrains où l'on pouvait
très facilement s'égarer. Une méchante dame habita
il y a une quarantaine d'années ce château et
pour les moindres fautes elle faisait enfermer des domesti-
ques dans ce souterrain que le soleil n'éclaire que d'une
pale lueur, qui entre par des petits trous qui représentent
des fenêtres. Il y avait une puits mais il faisait si
sombre que nous eûmes de la peine à le trouver.
Mardi 1 septembre 1812
Je fus Dimanche après-dîner au Stork avec M. Coster.
Nous allâmes de là à Delden par un fort joli chemin longeant
le canal de Twikkel mentionné plus haut et qui
a coûté cent mille florins. On le voit depuis le chemin comme
dans un gouffre. Nous passâmes par le Nibbel ferme
appartenante au grand-père et entouré d'un
joli bosquet. De là on va à Delden par un chemin
charmant tantôt par une allée de sapins tantôt
par une allée qui ressemble beaucoup à celle du
Haarlemmerhout nommée le Manège.
Enfin je pars aujourd'hui d'Almelo et je ne partirai
pas sans regrette d'un lieu où j'ai goûté tant de plaisir
où j'ai connu tant de personnes qui ont fait leur
possible pour augmenter mes jouissances. Adieu
ville charmante j'espère encore retourner dans votre
sein.
Je joindrai ici la liste de toutes les personnes que j'ai
connus à Almelo.
Le grand-père Coster et son épouse
H. Coster et son épouse. Cato. Gerard et Jean
Van Lennep et son épouse
J.H. Coster et son épouse
J. Coster du plus et son épouse Bet et Mina
G. Coster et son épouse Manes et Cato
Le vieux Hofkens
L'oncle Henri
G.J. Coster et son épouse
N. Coster et son épouse
L. Coster et son épouse ses deux filles Julie et Betsi
L. Hofkens et son épouse. Henri et Herman
M. Dul M. Vonk M. Clignet M. Quyre[?] M. Westendorp
Mad. Van Lennep Mad. Thiele Mad. v. Lennep Coster
Herman Coster et son épouse
Le Rector Erler et son épouse
G. Bruins Ten Brake Bruggenkate
H. Coster et son épouse
Voici les derniers lignes que j'écrirai dans Almelo.
La foire est venue. Quelques boutiques ont été dressées
et toute la rue est couverte d'une innombrable
quantité de paysans et de paysannes à grands chapeaux.
Tout nos amis donnent à dîner à ces paysans
et aux marchands de vriesseveen qui mangent
comme quatre.
J'ai fait ce matin mes adieux à nos amis d'Almelo
maintenant je salue la ville hospitalière à qui
j'ai consacré quelques pages.
Adieu Almelo.
Mecredi 2 septembre
Enfin nous partîmes d'Almelo et ce fut avec des
sentimens de douleur et de regrets. J'avais eu tant de
plaisir dans cet endroit charmant. Nous vînmes premier
à Rijssen et ensuite à Holten où il faisait un froid
insupportable. De là nous allâmes tout droit à travers
un des broeks au (huis te Dort). Cette campagne est très
joliment située. On y voit un châtaigner superbe.
Une eau l'arrosait. Là nous descendîmes de voiture
et entrâmes dans un joli bois appartenant à cette
campagne. De là on va par de jolies allées ombragées
souvent de peupliers jusqu'à Zutphen. L'avenue de
Zutphen est fort jolie. On voit le Berckel avec son pont
et de l'autre côté une ruine, la poste, une église
et une partie du rempart ce qui présentait le
plus joli effet. Zutphen est une très jolie petite ville.
Les maisons sont infiniment plus gaies que
celles de Deventer et les rues beaucoup plus larges
et plus aérées. J'y vis premièrement les remparts qui
sont fort jolis et où l'on a de très belle vue. Il y a deux
remparts, un en dedans et un en dehors. J'y vis
la coupole d'où Martinet avait regardé le paysage
dessiné devant son 1. volume d'hist. naturelle. Je vis
la grande église vaste bâtiment. On m'y montra
premièrement un boulet attaché à l'une colonne ainsi
que le carreau de vitre par lequel il était passé. Il était
entré dans l'église dans le siège pendant le service et s'il
avait rasé le nez du prédicateur. Puis j'y vis un énorme
baptistère 1514 qu'il faut ouvrir avec un levier, surmonté d'une
infinité de figures en cuivre mais qui étaient été
tellement transposées qu'on ne pouvait plus reconnaître
quel sujet ils avaient représentés. Puis on entre dans
une espèce de bibliothèque où tous les livres sont
attachés avec des chaînes et où il se trouve plusieurs
manuscrits. On rencontre ici une espèce de patte
gravée dans la pierre dont on raconte qu'elle est celle du
diable qui fit une visite ici lors de l'inauguration
de l'église par les catholiques. On voit aussi une béguine
qu'on dit avoir trouvé vivant sur l'église. On y voit
aussi une statue de la vierge à qui les catholiques
attribuent encore aujourd'hui un pouvoir miraculeux
et puis la chaise où le président s'était assis lorsqu'on
avait tenu cour féodale ici il y a quarante sous un
chêne situé près de l'église qui maintenant était
mort et avait été remplacé par un jeune
successeur. Nous continuâmes notre promenade sur
les remparts tantôt arrosé par l'IJssel et tantôt
par le Berckel et même j'y vis le confluent des
deux rivières. Là l'eau du Berkel se distingue même après
la réunion par sa noirceur. On vient ensuite sur le
contrefort aussi une espèce de rempart ombragé de
fort beaux tilleuls et ensuite dans un petit bosquet très
agréable. Nous vîmes le Drogenaps toren magasin de poudre.
Le ducdalfsgat mine par laquelle les espagnols s'emparèrent
de la ville. On voit la ruine d'une porte autour de laquelle on se combattit
et qui est criblée de balles de fusil. Puis des arcades
sur la Berkel qui produisent un effet supérieurement
joli. Dans l'intérieur de la ville la Berkel fait tourner
plusieurs moulins d'eau. Toutes ces particularités rendent
Zutphen fort curieux pour les étrangers. Sur le
grand marché on voit un poids surmonté d'une tour.
Nous eûmes un fort bon logis au Hollandsche tuin.
Le lendemain nous montâmes fort tôt dans la diligence
passâmes par une belle allée et là nous vîmes le
lever majestueux du soleil. La première partie du chemin
d'ici à Appeldoorn est fort joli jusqu'au village de Voorst.
On va souvent par de fort belles allées. Le gouvernement
de Zutphen paraît être très actif, car non seulement
je vis des promenades qui avaient été
construites et étaient fort bien entretenue aux dépens
de la ville mais ils avaient des fabriques de diverses
étoffes entr'autres de tapis grossières auxquels ils
employaient tous les mendians qui se présentaient
dans la ville. Ainsi n'en voyait-on aucun. D'Apeldoorn
nous nous rendîmes à Utrecht par le chemin déjà
décrit plus haut et qui me ravit tout autant
que la première fois. Les environs de Voorthuizen sont
fort jolis. À Amersfoort nous vîmes un vaste bâtiment
érigé il y a une vingtaine d'années pour servir d'école
de marine et dont on ne tirait plus aucun service.
La tour d'Amersfoort est très grande.
∙Arrivés à Utrecht nous nous transportâmes à la porte
où partent les barques. Enfin après un peu de promenade
nous vîmes arriver le moment où la barque de
nuit partait. C'est une bien triste manière de
voyager et hormis la plus grande nécessité je ne
désire jamais de la répéter. Enfin après quelques
heures nous arrivâmes à Rupelmonde. Là nous débarquâmes,
y couchâmes et allâmes le jour suivant à
Amsterdam où nous étions vivement attendus
par l'impatience de nos amis et parens et pour moi
je n'oublierai jamais le plaisir dont j'ai joui
dans ces six dernières semaines.
Littérature
Voss. Luise
C'est avec beaucoup de plaisir que j'ai lu ce charmant ouvrage
que je ne connaissais que de réputation. C'est une idylle
dans un genre moderne des tableaux simples sans intrigue.
L'ouvrage est divisé en trois parties. Der Geburtsfest, Der
Besuch und die Brautabent. Quoique je ne sois pas
grand amateur des hexamètres je conviens que cet ouvrage
est fort joli et que je préfère de pareilles idylles à ces éternelles
répétitions de deux bergers qui se disputent le prix de
ces damon de ces phyllis personnages feintes qu'on s'est plus
à copier les uns des autres. Toutes les petites circonstances
sont peintes ici d'une manière charmante.
Reinbeck reize 2 v.
∙L'auteur a décoré son ouvrage du titre modeste de Vlugtige
Aanmerkingen. Telles sont presque toujours les remarques
d'un homme qui voyage p. extra post. C'est toujours des détails
sur les postes, sur les postillons etc. Cependant cet ouvrage-
ci contient de fort bonnes remarques. Moscou est la seule
ville sur laquelle il s'étend et il dit à ce sujet des choses fort
judicieuses intéressantes. Il part de St. Petersburg, de là à Moscou et
de là à Varsovie.
Dupaty Lettres sur l'Italie 3 v.
∙C'est un ouvrage que j'avais beaucoup entendu vanter et
d'un autre côté j'avais entendu que l'auteur n'avait jamais été
en Italie. J'ai jugé premièrement cette dernière assertion
impossible mais à la lecture j'ai été convaincue de
la possibilité. Je conviens que le style est superbe mais
il faut aussi convenir qu'il sent le travail qu'on voit
que l'auteur s'est efforcé de tourner sa pensée en antithèse
et en épigramme et qu'on reconnaît plus l'écrivain
qui veut plaire que l'observateur et le voyageur. Ses
lettres ne parlent que des grandes villes et de quelques
environs comme Avignon Gênes Florence Lucques Rome
Naples et je trouve que ses lettres ne sont pas propres
pour donner pour ainsi dire une idée juste de l'italie.
Voici p.e. quelques phrases pour prouver mon assertion.
∙Le gouvernement est tel dans ce royaume qu'il n'y est
souvent qu'un désordre de plus.
Le roi à force de parler ne se fait plus entendre et n'exécute
plus rien à force de commander.
L'autorité ne laisse guère finir un procès car qui
peut tout ne veut jamais rien.
Rien ne se fait de tout ce qui ne peut se faire sans un
certain degré de tension dans la [onl.] comme il y a des
voix qui n'arrivent point à l'octave.
La probité paraît aux Napolitain une duperie d'esprit la
franchise une vivacité de tempérament l'esprit
est de tâcher de tromper l'habilité de réussir les vertus
sont des impuissances, les vices naissent du climat.
Le corrège travaillait de coeur. Il ne composait pas il
exprimait. Peindre pour lui était aimer.
Il est des sujets qu'il ne faut presque pas penser pour les
bien rendre il faut les rêver.
Ces médailles sont comme des petits points dans le tems
sur lesquels ma mémoire se repose.
Chacun de ces tableaux n'est qu'une pensée comme chaque
ode d'Anacréon n'est qu'un sentiment.
De pareilles phrases fourmillent.
Legouvé. Mérite des femmes.
∙Charmant ouvrage qui éternise les femmes françaises du
18 siècle.
Levensbeschrijving van Ned. Mannen en vrouwen 1ste Deel
Cet ouvrage a souvent le défaut de toutes les Biographies
c'est ou d'être trop chargés de détails prolixes ou de ne
contenir que des généralités que personne n'ignore. Ces vies-
ci sont de différentes mains et aussi l'une est-elle beaucoup
mieux écrite que l'autre.
Celles de Calvin et Luther ne m'ont pas fort plues celle
d'Erasme est mieux écrites.
Celles qui m'ont les plus intéressés sont de David Joris
de Brouwer de Vondel qui renferme plusieurs particularités
et de Beronicius et de Johanna Koerten et de Crabeth.
Les mieux écrites sont celles de Heemskerk Piet hein Cats
Brakel et Kenau Hasselaar.
On trouve encore celle de J. Steen A.M. Schuurman Groote
Pier Van Dijk Menno Simons Laurens Coster Rembrand
Dathenus Jan van Leiden Arminius, Paus Adriaan
Lescaille Rubbens J.S. de Rijk.
Mardi 8 septembre 1812
Me voilà de retour enfin dans le sein de notre famille
gai et content. Le journal a été lu. Tout ce qui se
rapporta à Almelo a été raconté et tout est comme
au tems jadis. Voilà la vie de l'homme. Heureux celui
qui peut avec le plus de calme s'approcher de ce moment
terrible où commence l'éternité.
L'éternité quel mot consolant et terrible.
Non il faut avouer que sans une éternité consolante
notre vie serait misérable. Mais que penser des mystères
de la religion comment enfoncer là où nous cessons
de comprendre. Je crois en Dieu en Jésus christ mais
comment se former une idée de ce dernier. Là notre
entendement s'arrête. Je suis curieux de savoir ce
que les catécumènes en ont dit. Je gage que
plusieurs n'auront pas compris ce qu'ils ont posé.
Je dois avouer que c'est avec beaucoup de plaisir que
j'ai repris mes occupations accoutumées. Le grec me
plaît de plus en plus à mesure que j'y fais des progrès.
J'aime beaucoup le commerce. Je voudrais pourtant
reprendre les mathématiques et la Physique. Je dois
aussi lire sur la religion. L'histoire Eclésiastique me
plaît beaucoup. Je lis aussi Quinte curce en latin.
Encore une description de décrétie. Enfin le tour viendra
à nous. Songeons que
Les traits les plus cruels de l'aveugle fortune etc.
∙Il s'est passé très peu d'intéressant pendant mon absence.
Kolff que j'avais toujours regardé comme un fou est
maintenant devenu tout à fait un débauché il
se promène publiquement avec des catins. Le misérable
il s'en fait gloire.
Il est foire je ne m'en suis encore guères apperçu. Voici
justement donc l'anniversaire de l'époque à laquelle
j'ai commencé ces mémoires.
Je choisirai un autre jour pour détailler tout ce qu'il
y a de remarquable à cette foire-ci.
Annales du lundi
D. ne vint que tard. Il avait dîné avec Logger chez Ippos.
On voulut lui faire cadeau d'une prétendue
pierre de gravelle mais il reconnut la ruse à table.
Il fit là premièrement le détail de la fête des
chirurgiens et raconta d'un d'eux qui avait cousu les
boyaux d'un de ses patiens. Il fit ensuite le détail
du dîné d'Ippos. Il fit une longue description de
la manière dont Brugmans suppose que les poissons
nagent. Il parla de Bordes et se récria qu'on ne
connaissait point ses ouvrages. On lui demanda
s'il connaissait ceux de Bartjes. L'oncle de Vos se fâcha
et dit qu'on devait le laisser parler et ensuite il
continua pendant si longtems qu'il y manqua
peu que nous fussions tout à fait endormis.
Mardi 15 Septembre 1812
Annales du Lundi
On complimenta D. sur la mort de Paradijs. Il dit qu'un
Brabançon ignorant prendrait sa place. Il se récria sur
Hippocrate et gagea premièrement qu'il était né
2000 et ensuite 200 ans avant J.C. C'était à 68. Il fit
subir un examen médicinal et chirurgical à W. de
Vos qui s'en tira très bien. Il dit que l'art du médecin
consistait principalement à savoir si le malade
mourrait ou non. Il déploya beaucoup d'érudition dans
l'histoire d'Hippocrate, etc[?]. À table il parla du ministre
qui avait fait son sermon après un ministère de
50 ans sans en rien dire à ses amis ou parens. On regarda
ceci comme une insulte faite au grand-père. Il dit ensuite
que Binnevest parlait le Hollandais plus purement que
Siegenbeek. Il dit que Binnevest avait travaillé à la traduction
des pseaumes connue sous le nom de Laus deo. D. raconta
que les Espagnols étaient à Madrid et que Smolensk
était assiégé par les Russes.
Mardi 15 Septembre 1812
Voilà deux Annales du Lundi qui se suivent et l'intervale
n'est marqué par rien d'intéressant et n'occupe pas une
ligne d'écriture je vais remplir cette lacune.
Les loix sont souvent injustes. En voici une preuve. Un paysan
de Nordhollande forcé de servir dans la garde nationale avait
été porté par la misère et le besoin à voler une chemise
d'un de ses camarades qu'il mit au lombard pour 10 sous. Bientôt
navré de remords, il écrit à ses parens de lui envoyer de l'argent.
En ayant reçu il retire la chemise la rend à son camarade
et lui avoue sa faute dont il demande pardon. Ce
misérable le dénonce et le pauvre homme, malgré la
compassion qu'on avait de lui fut condamné
quelques années à des travaux forcés (galères). Haec est justitia.
∙La police continue toujours à épier les Amsterdammois
avec des yeux d'Argus quoique j'entendis dire hier à deux
hommes qui passaient. On ne sait pas encore ici ce que
c'est que la police. Mr. Stuart avait entendu dire que
les Anglais avaient fait une descente à Bayonne. Il
avait raconté cette nouvelle à d'autres. Voilà que le
ministre est mandé à la police et on le tance voilément
d'avoir raconté une pareille nouvelle.
Il est avéré que les Espagnols (Ins.) et les Anglais réunis sont
entrés à Madrid et qu'avant l'arrivée de ces derniers on
avait fait un terrible massacre des Français. Mais nous
n'en savons rien et malheur à celui qui regarde
la feuille politique comme son oracle.
Quant à la ville point de nouvelles. Une nouvelle
Conscription vient d'être décrétée. Personne n'en parle.
La foire est prolongée jusqu'à la fin du
mois.
Pour dire encore deux mots de politique. Il faut avouer
que maintenant tous les ressorts sont forcés et qu'en cas
que les français récussent un échec en Russie on verrait
beau jeu. Il n'est pas encore décidé quel train les
affaires prendront là. Car ce diable d'homme ne
pourra pas toujours vaincre. En tout cas abandonnons
à la providence le soin de nos destinées et
disons avec Le Franc de Pompignan.
Dieu sait ce qu'il nous faut beaucoup mieux que
nous-mêmes.
voy. plus en avant
∙Ogier le Danois, Didier, Ulda et son valeureux époux et
surtout la tendre Ophélie. La fée Morgane répand un joli merveilleux.
Le poème est écrit dans le même mètre que l'enfant
prodigue de campenon mais je crois que le style de ce dernier
est plus brillant et plus poétique.
La Cretelles vol. 5
Ce volume m'a autant plu que les premiers. Il contient l'état
des moeurs et sciences à la fin du règne de Louis 15 et le prélude
de la révolution. Plut au dieu que nous eussions une pareille
histoire de ce qui est arrivé ici depuis 1712-1812.
Mémoires de Temple
Ces mem. sont beaucoup plus intéressans que les lettres par
ce qu'ils ont beaucoup de suite et qu'ils apprennent tout à
qui soit passé tant dans ces campagnes de 1673-1678 que dans
les négociations de Nimègue et qu'ils donnent une juste
idée des pointilleries et veulleris auxquelles ces assemblées
sont soumises. Ce livre est fort bien écrit et contient même
quelquefois des anecdotes et des particularités sur des
discours avec le prince d'Orange, le Roi d'Angleterre etc.
Mecredi 16 Septembre 1812
J'ai parlé assez de politique hier. Je ne puis pourtant pas
omettre que hier on répandait la nouvelle que les Français
avaient remporté une victoire décisive étaient maîtres de
Moscou et qu'on parlait de paix. Les oblig. Russes étaient
montées de 37 à 44 %.
J'ai été la fin de la semaine passée à Kennemeroord où j'ai
déjà passé plusieurs jours dont le souvenir ne s'effacera jamais
de ma mémoire. À Halfweg divers changemens avaient
eu lieu. On était déjà fort avancée à la grande tour qu'on
avait commencé de bâtir. De toutes parts s'élevaient des
batteries. L'istme était changé en un pont tournant.
Et même à quelque distance on voyait partout des
barrières des sentinelles des ponts-levis. Pauvres Anglais
gardez-vous de nous approcher.
Je me suis étendu au large sur Rupelmonde, il serait injuste
de ne pas dire deux mots de Kennemeroord.
Cette campagne est située sur le Heerenweg. Elle
est charmante. Derrière la maison on trouve trois
énormes tilleuls qui ombragent un gazon souvent
le théatre des nos Jeux puis un petit ruisseau surmonté
d'un pont qui coule entre des Dunes fort hautes
et d'où l'on a des vues délicieuses. Enfin à la fin de la
campagne consite en une coupole située sur une
dune très haute où l'on monte par une pente douce et
d'où l'on a une vue charmante sur les blanchisseries
situées plus loin. Ajoutez encore à cela un joli bosquet
et vous aurez la description d'une campagne très jolie et
que je préférerais à celle de Rupelmonde quoique cette
dernière soit beaucoup plus grande. La vue depuis
la maison n'est pas très jolie. Cette campagne fut jadis
une auberge. M. van Keulen a fait défricher les dunes
et en a formé une jolie campagne. J'espère avoir encore
occasion un autre jour de parler de ses environs.
Dimanche nous fîmes une promenade à Overveen. Le chemin
mène par l'allée de Hodson jusqu'à l'aardenhout dont on
traverse une partie. On passe devant Oosterduin campagne
de M. Hasselgreen qui a une vue très jolie et devant
le superbe Elswoud et l'on arrive par plusieurs jolies allées
à une espèce de petit lac nommé le Brouwerskolkje.
C'est un endroit charmant. De l'un côté des hautes dunes
de l'autre des gazons des troupeaux des bosquets c'est
ravissant. Nous montâmes ensuite sur les dunes
d'où l'on a une superbe vue d'un côté sur Harlem et
ses environs de l'autre côté sur la mer. Overveen est
un joli village. Le clocher consiste en une tour de bois.
Le Zeilweg est un chemin ouvert. Les jolis buitensingels
de Harlem sont ombragés de beaux arbres.
Nous nous arrêtâmes ensuite dans les auberges du hout
et retournâmes par une partie de ce joli bois.
Adieu à la campagne revenons en à la foire. Celle-ci
est du moins plus animée que la précédente et même
tous les lieux publics de récréation sont toujours
remplis d'une quantité prodigieuse de monde. Mais en
vérité soit dit entre nous la foire signifie bien peu.
Au Westermarkt on va pour voir et être vu et sur une
centaine de visages laids ou ordinaires on est bien
aisé de rencontrer un joli minois.
Ensuite vient le Botermarkt. Je veux citer en un mot
ce qu'il y a de remarquable.
Le cirque ambulant de voltège. Je compte y aller ainsi
j'en donnerai alors la description.
Le jeu des chevaux de Kingsbergen.
Deux nouveaux Hercules. J'ai vu l'un d'eux à Harlem et
en effet c'était assez remarquable.
Un homme sans bras qui fait tout avec les pieds. C'est un autre
que celui que j'ai vu il y a deux années. Celui fait encore beaucoup
de nouveaux tours p.e. Il a encore un petit bout du
bras auquel on lui attache une fleurette et alors
il peut faire les armes avec la plus grande habilité.
∙Un homme qui va dans une petite voiture qu'il fait
aller lui-même en tournant une roue pendant
qu'il est assis dedans.
L'Éléphant et la ménagerie (V. Voyart Utrecht).
Une particularité cependant de cette éléphante est la
suivante. Mon oncle de clercq y étant dit à la vue de
tous les tours qu'il faisait que c'était la coutume
qui les lui apprenait mais dit-il p.e. j'ai en poche un
pacquet de riz qu'il vienne l'y prendre. Le maître
dit aussitôt Ba Ba prenez de la poche gauche de ce
monsieur un pacquet de riz et il le fit en effet avec
sa trompe. Une autre fois il avait entouré mon oncle
de sa trompe celui-ci dit au maître. Il me serre et le
maître s'adressait aussitôt à son industrieux élève
lui dit Ba Ba serrez donc pas tant monsieur.
Aussitôt l'éléphant retira doucement sa trompe.
Les deux éléphans du Loo avaient été conduits ici sous
la direction du capitaine van Braam. Celui-ci les voyant
au Loo quelques années ces animaux le
reconnurent tout de suite.
La fille Merveilleuse chez Beni. J'y fus. L'artiste fait
entrer dans une colonne une jeune fille. Il fait jeter des dés
à des spectateurs et aussitôt la fille qui est invisible
dit le nombre des yeux. Elle dit aussi la carte qu'on tire le
proverbe qu'on tire parmi une trentaine. Deux
têtes de bois font les mêmes tour. C'est en effet surprenant.
À mon avis c'est dans ce qu'il dit que consistent les signes
qu'il donne à ses aides et à la petite fille. Mais quand on
voit le peu de variation qu'il met dans ses réponses on
admire le génie de l'inventeur.
Nous fûmes aux pantagoniens petite espèce de marionnettes
assez gentilles qui jouaient Don Juan. Les intermèdes pendant
lesquels se font les métamorphoses est ce qu'il y a de
plus joli. P.E. une femme arrive sur le théâtre et jette
un de ses bras qui se change en un petit enfant. L'autre bras
subit le même sort. La femme se change en
ballon et les enfans après avoir dansé quelque tems
autour du bateau sautent dedans et le ballon
monte pendant un adagio. Il vient un procureur et
de son corps sautent une douzaine de procureurs qui
dansent avec lui. C'est assez drôle et les mouvemens
des marionnettes sont fort naturels.
Un certain drôle ayant vu (problablement chez Bienvenu)
des fontaines qui sautent autour de chandelles sans
les éteindre, qui soulèvent un oeuf etc. ont conçu l'idée
d'en faire un jeu où l'on voit ces fontaines d'eau de
différentes couleurs dans un grand bac rempli de
roseaux. Ce feu se nomme L'eau et le feu.
Puis on voit des jeux de fantasmagorie et quelques
personnages corpulens.
J'ai entendu encore plusieurs particularités concernant
l'éléphant. On dit qu'il a été vendu à l'empereur pour
120.000 francs. Il a une intelligence extrême. Ses maîtres
possèdent plusieurs chevaux et des cavaliers montés dessus
traversent toute la ville et y portent leurs affiches.
Ils tiennent des étendards où l'éléphant est peint.
Il faut avouer que l'ordre dans le quel les jeux sont
rangés maintenant est infiniment meilleur que
dans les années précédentes.
Jeudi
Hier j'ai vu le tableau de M. van Bré représentant le
départ des jeunes Athéniens et Athéniennes qui doivent
servir de repas au terrible Minotaure. Ce tableau est
superbe. Les figures sont de grandeur naturelle. Dans
le groupe principal Egée tire le dernier billet fatal.
Tous les yeux sont fixés sur lui. De l'un côté de l'autel une
jeune fille choisie par le sort fatal revient à elle peu à peu. Même on
voit son sein se gonfler sous l'étoffe légère. Une autre témoigne une[?] joie
ouverte en voyant qu'elle a échappé. Un grouppe d'enfans
charmans entoure l'autel. Une jeune fille
tombe évanouie sur les marches de l'autel. La pâleur de
la mort couvre son visage charmant. Son père la tient
dans ses bras et sa mère échevelée accourt avec transport
un jeune homme dans l'accès du désespoir est étendu à terre.
Sa soeur ou sa mère le tient dans ses bras et les yeux
humides de larmes regarde d'un oeil suppliant Thésée
qui seul peut les sauver. Thésée lui-même le regard fier
d'une statue colossale, se voit entouré par deux jeunes
vierges l'une lui jète un regard suppliant. L'autre fond
en larmes mais est encouragé par son père qui
lui montre quel sera son défenseur puis encore divers
groupes trois secrétairs qui assis à une table écrivent
les noms dictés par le sort. Un énorme buste de mercure
qui dénonce encore l'enfance de la sculpture. Deux
hommes du parti des Pallantides opposés à Egée qui
voient avec indifférence et avec une joie maligne
les malheurs de la patrie. Dans le lointain on voit
un temple sur une montagne avec une foule de gens
qui y montent pour supplier les Dieux.
In toto. Ce tableau m'a fort frappé et ce serait avec
beaucoup de plaisir que je le verrais une seconde fois.
Tout est noble et beau. Il est toujours facile de faire
des remarques sur des compositions pareilles. Une des
remarques les plus importantes qu'on a faites a été
la froideur de Thésée mais il l'excuse par différentes
raisons. 1. par ce qu'il ne voulait point détacher sur
Thésée l'intérêt du grouppe principal. 2. par ce que
Thésée doit cacher son projet pour son père qui
n'y consentait pas. 3. par ce qu'il vit un jour Napoléon
méditant un grand projet dans la même situation.
Jeudi 17 Septembre 1812
Ce matin a été fort désagréable. Mess. Hope ont signifié
qu'ils n'avaient pas de fonds pour payer ni les capitaux,
ni les intérêts. Les russes lors de cette fausse nouvelle qu'on
avait fait circuler étaient montés de 37 à 44 1/2 et sont
maintenant à 32 1/2.
Mardi 22 Septembre 1812
Jeudi passé je fus au cirque olympique quoique je sois d'idée
que le véritable cirque d'olympie ait eu quelque chose
de plus imposant. L'on entre dans une grande tente ronde
avec des bancs autour qui montent en Amphithéâtre.
Premièrement les cavaliers entrèrent et firent diverses
évolutions. On fit beaucoup de tours à cheval qui furent
répétés jusqu'à l'infini. On eut divers entremets comiques
on sauta. Il y eut un cheval qui apporta qui contrefit
le mort. Enfin il vint un petit cerf fort joli. Il dut
sauter se tenir tranquile pendant qu'on tirait des
pistolets à son oreille et qu'on faisait sauter autour
de lui un feu d'artifice. C'est ce qu'il y avait de plus
joli. On avait vu souvent de pareils tours et c'est une
chose pour voir une fois.
Je fus à Outover où je m'amusai fort bien dans la
compagnie de plusieurs de mes amis. C'est une petite campagne
assez jolie située sur le vecht à Loenen. Nous fûmes à la
ruine du Huis ter haar. Elle est encore assez considérable
mais déchoit d'année en année. Le chemin qui y mène
depuis Breukelen est à travers des prairies ou le long
d'un petit hameau nommé Kortrijk. C'est dans la grande
salle de ce Huis ter Haar que Janus Dousa s'est marié.
Cette maison doit avoir eu beaucoup de puissance dans
l'ancien tems. On peut encore y entrer. Il y a aussi
encore une chapelle debout. Le lendemain nos fûmes
à 's Graveland par Vreeland et Kortehoef. J'en ai déjà fait
mention plus haut. Nous nous promenâmes sur les
Dunes qui sont situées derrière ou pour mieux dire
quelques petites élévations de sable. Nous retournâmes premièrement
par une petite partie de 's Graveland et passâmes la campagne
de Trompenburg dont la maison a la forme d'un vaisseau.
Puis le long d'un canal jusqu'au Loosdregt assez connu
les tristes Turfschuuren et le triste Bloklaan.
À cause de la construction d'un nouveau chemin on en va
un autre à Loenen prem. le Diemer Meer, Diemerbrug Le Gasep l'un
côté du Gein. Le Velterslaan un chemin à Vreeland
le chemin de là à Loenen. Ce chemin offre sans
contredit des vues beaucoup plus jolies que l'autre.
Près du Gasep surtout on a une très jolie vue
sur cette grande plage d'eau.
On est occupé de vive force à faire le chemin près du
Nieuwersluis ce qui produit de grands désagrémens. Le chemin
devant la campagne mon grand-père doit être haussé de quelques pieds et
non seulement on prend à cet effet la terre de mon grand-père
mais même on s'en sert pour hausser la partie du chemin
qui passe par le Nieuwersluis. Tout ceci produit un grand désert.
On craint de s'enforcer si l'on doit passer à pied par ce
chemin. Là le chemin a été conduit au milieu d'une
campagne. Là on abattu des arbres etc. etc. etc.
Le lundi n'a offert rien de remarquable.
Grains
Le froment reste presque à la même hauteur
mais baisse un peu de tems en tems 128: 876 gd.
Le seigle 122 H. 237 g. Hier il monta 10 gl. par les achats de
quelques Schiedammois.
Orge 95 H. v.n. 128 gd.
Le Colzad est beaucoup monté quoique la récolte a été prodigeu-
se et qu'on juge en avoir une provision suffisante pour deux
années et que la quantité d'huile emmagasinée à Zaandam
est très considérable tandis qu'il y a peu de commissions
sur cet article. Cependant on est si accoutumé à en voir
les prix plus hauts qu'on veut à toute force y faire des
spéculations. Premièrement lors du tems pluvieux on
a dit qu'un certain insecte (aardvlo) avait détruit les
tiges qui venaient de pousser et que le tems pour semer
de nouveau était passé. Mais pourtant ces bruits ne se
confirmant pas on continue de spéculer. En général les
capitalistes dégoûtés des pertes continuelles qu'on fait
dans les papiers ne savent employer leur argent avec profit
et sont tombés avec furie sur le Colzad. On se l'arrache.
Le même esprit de spéculation règne dans les autres
provinces. À Groningue on avait apporté dans deux marchés
consécutifs 1000 Last chaque fois ce que n'était point
arrivé de mémoire d'homme. Toutes ces spéculations ont
fait monter les prix du meilleur colzad depuis 48 jusqu'à
54 et peut-être ils monteront encore bien d'avantage.
Mardi 29 Septembre 1812
J'ai encore été à Oudover. Nous fûmes très volages, Une promena-
de à Vreeland. Un tour en bateau à Nieuwersluis. Une
nouvelle expédition en bateau dans les environs de
Loosdregt et plusieurs combats telles furent nos principales
occupations. Je m'amusai fort bien.
Annales du Lundi
Kemper y était. Il força D. à répondre s'il accepterait le
professorat oui ou non. Il dit que l'histoire du Brabançon était
controuvée. Il dit que Bijnkershoek avait été professeur
on eut un vers pour féliciter les exécuteurs. D. se défendit
fort mal sur un gulden et mei et Muntinghe
promit une nouvelle fête blâma les collègues de Binnevest.
L'homme qui a inventé la voiture qui va sans chevaux
a été remplacé par un autre sur le drilveld qui
faisait monter d'autres personnes dans sa voiture. Mon cousin
G. de Clercq voulant faire de tours avec cette machine
se renversa entièrement.
J'ai compté diviser ces mémoires dans les articles suivans
1. Politique
2. Nouvelles de ville
3. Nouvelles domestiques
4. Annales du Lundi
5. Vie
6. Caractères
7. Annales du marché
8. Description d'Amsterdam
9. Littérature
10. Desc. des env. de Rup. 11. Études 12. Mélanges anecdotiques
7. Les prix montent encore continuellement et même le
froment a pris faveur. 130 H. 395 gd.
Mardi 6 octobre
1 Rien d'important dans les affaires domestiques mais
en fait de nouvelles politiques la semaine passée
a été signalée par la nouvelle de la prise de Moscou.
Les commissaires de police ont annoncé cette
conquête accompagnés d'un brillant cortège et au
bruit des instrumens. Quelles seront les conséquences
d'une pareille conquête. Il serait difficile de le juger et
il faut laisser faire au temps.
2. La semaine passée un spectacle nouveau a amusé
nos citoyens, c'est à dire l'éléphant a fait ses exercises
en plein air. Il a jeté des boulles, est monté et descendu
de sa voiture a témoigné l'aversion qu'il avait pour le
porc, a montré le plaisir que lui faisait la musique
a caressé sa maîtresse etc. etc.
Quelques danseurs sous le nom de la famille Kobler
ont joué ici différents ballets. Ils se font remarquer
par la beauté de leurs danses et par l'extrême souplesse
de l'un d'eux, qui tourne dans l'air ainsi qu'une
toupie.
3. À Rupelmonde où je fus tout était en combustion
à cause du chemin qui était construit à force de bras.
À peine le chemin était-il en état d'être traversé. Des
gens allaient et venaient continuellement. On devait
traverser le vecht en barque pour aller à la ville
Enfin tout ceci est bien désagréable pour tous
ceux qui ont des campagnes de ce côté là.
Je fus à Demmerick et Vinkeveen. Ces villages sont situés
au delà de Terra.
Les maisons en sont dispensées comme dans plusieurs
autres villages de ces contrées-là. À la fin de Demmerick
commence Vinkeveen. Ces villages sont assez considérables.
La distance de là à Rupelmonde est 1 1/2 à 1 3/4.
Mélanges.
Il y eut l'autre jour un français au théâtre qui aimait
beaucoup à réciter. Il savait par coeur 14000 vers et entr'autres
l'Athalie. Quoiqu'il ne sût pas un mot d'hollandais, il avait
été ravi de la manière dont Madm. Wattier Ziesenis avait
rempli le rôle de Sémiramis.
Un de mes amis a été logé chez M. Messchert Vollenhoven.
C'est un homme qui est devenue poète à la fin de ses jours
et qui a traduit une partie d'ovide et le livre de Job. Il a
pareillement fait la traduction d'un autre prophète
juif, mais il n'ose la publier. En conséquence il l'a copié pour
chacun de ses 6 enfans et est occupé de ce travail
du matin jusqu'au soir presque sans interruption. Mon
ami le vit travailler à une de ses copies et il était
déjà à la page 132 encore en fo.
M. Bilderdijk dut l'autre jour comparaître à l'institut. Il
s'en excusa. On s'informa la raison son habit d'Institut
était au lombard. Pourquoi toujours ces disparates dans
des grands hommes. Il dit qu'il mourrait s'il devait compter
un sac de florins.
À maarssen il arriva une aventure assez singulière. Un
pauvre juif qui débitait des billets de loterie avait un fils
qui tombait dans la conscription. Quelques jours avant son
départ il avait envoyé son fils à Utrecht avec un billet
qu'il avait gardé puisqu'il n'avait pu le débiter. Il apprend
qu'un pris est tombé sur ce billet, vole à Utrecht où il en
tira 20000 put assurer à ses parens un état honnête
et payer un remplaçant.
À propos de loterie tout parle maintenant, de la loterie française
où l'on peut mettre de très petites sommes partout on
voit des maisons destinées pour recueillir les offrandes
de ceux qui sacrifient à la déesse de la loterie. On voit
des tableaux allégoriques dont plusieurs sont l'ouvrage
du célèbre Bianchi des cornes d'abondance etc. etc. etc.
on peut dire avec sosie.
Le seigneur Jupiter sait dorer la pillule.
Marché
'T kan verkeeren zegt Bredero.
∙Rien de plus difficile à juger et rien dans lequel on soit
plus trompé par les apparences ou circonstances momentanées
que le commerce surtout de ces articles où il entre quelque
spéculation. La semaine passée le Colzad sans raison
pressante a fait une chute de quelques livres et maintenant
tout remonte. Les grains malgré la quantité qu'on
a encore à attendre montent toujours.
T. 126. 127. 1280 M. 382. 385. 388c. 130 H. N.B. 372. 375 gd.
R 120. 122 N. O.V. 262. 267 gd. 121 H.O.Tr. Vl.276 gd.
H. 87 H.87 gd.
Cz. Gr. 48 Lvs. Vr.51 à 52 Lvs, Alt: 53 1/2 Lvs. R.O. 52
Annales du Lundi
D. vroeg aan Ign. of hij een zekere plaat kon. Vraag liever
antwoorde deze wat ik niet ken. D. maakte Satyrike
aanmerkingen op J.d.V. Daarop zei Ign. D. Gij maakt U
gehaat. D. verklaarde dat hij nooit beter sliep als dat
hij eene kom ijs verloren had, voorts dat geen geluid
hem meer hinderde als 't uitgooien van zijnen kamerpot
door Jan in het zoo enorm sekreet. K. verhaalde hoe hij
J. Kops zoekend in de Raapenburgerstraat bij een
smous was geweest en hoe H. Nahuis eenen zekeren
Steenkamer door het uitspreken van zijne naam
aan 't weenen gemaakt had. Men sprak van een Apotheek
en D. zeide dat of 12000 te veel zoude weezen voor de
apotheek van zijnen broeder. Hij is verkogt antwoordde
hem J. de Vos en g.d.C. Veel wierd over en weeder gesproken.
D. wierd benaauwd en bood een kom ijs rouwkoop.
Doch men bewees in 't eind dat er geen wezentlijke
verkoop plaats had gehad. D. liet zijne verschrikkelijke
stem horen in een aria uit de
Mariage secret. Hij had zijne gulzigheid getoond door
appelen te vragen terwijl zijn bord vol met salade
en vleesch lag. Hij had een der vorige weken tegen
't gezelschap aan staande gehouden, dat de kippen
nieren hebben.
Littérature
Je n'ai encore rien noté de ce genre-ci après mon
retour d'Almelo ainsi il en devient temps.
Blumauer Gedichten
Une versification élégante et des idées originales
voilà sans doute des mérites et c'en est un bien plus
grand dans la poésie légère [onl.] des redondances
ou des lieux communs traités par plusieurs autres
poètes. Et quoi qu'ici les vers soient souvent plus
burlesques que poétiques ces petits volumes et
surtout le premier offrent les traces d'être l'ouvrage
d'un poète sensible et Agréable. L'auteur était
Autrichien.
Ein[?] Glaubensbekenntniss eines nach Wahrheit ringenden
ne me plaît pas parce que je trouve qu'un chrétien peut
très bien concilier la raison avec la foi.
Die Donaufahrt dans un genre assez élevé est très jolie.
Otahiti est un joli vers contre ceux qui font continuelement
l'apologie de l'homme de la nature.
Comme vers burlesque j'ai fort goûté An den Tierde[?], an
den Mond, an den Morgen, An den [onl.], an
den Teufel.
Le 2 volume ne m'a pas tant plu quoiqu'il y ait de
jolis morceaux anacréontiques et de jolies petite
pièces comme la plainte eines Landmädchens et la
louange de divers animaux surtout celle du coq qui
est fort caustique ainsi que l'ode. An dem Laibstufe.
Comme ça aucun poète ne pouvait se passer de flatter
les monarques on a ici encore de louanges en grand
nombre de Pies 6 et Joseph 2.
Outre ceux-ci v.T. 2. 4. 8. 9. 10. 11. 12.
Oeuvres de Piron Tome 2.
Piron était bien loin d'être un grand poète. Cependant sa
Métromanie qui fait partie de ce volume est un ouvrage
charmant. Le rôle de Dames de Francalen[?] sont très bien
peintes et l'intrigue est assez attachante et surtout
on y trouve de très beaux vers. C'est un ouvrage qu'on
relit toujours avec plaisir.
Ses petits poésies contenues dans ce volume ne méritent
presque pas la peine qu'on les lise. Une ode sur la paresse
et surtout: une romance. Tout est bien comme il est
quoique trop indécente et jolie. Cette dernière est la
représentation de tous les maux qui s'en suivraient
si pour prévenir les infidélités, notre petite machine
pouvait être démontée et confiée à l'objet chéri.
La plupart des épigrammes sont contre Voltaire, Laharpe
et Maupertus et des personnalités ne plaisent
jamais longtems.
Les chansons signifient bien peu.
V.T. 14. No 13. 14. 15.
De Lannoy. Dichtwerken 1v.
Nagelaten dichtwerken 1v.
Sans doute les reproches d'user de pièces d'occasion est[?]
de lieux communs n'est pas applicable aux
ouvrages de cette femme illustre quoique de tems en tems le
goût de son siècle perce.
Il y a de jolies Lettres surtout celle où elle défend les
femmes auteurs.
Le gastmaal est une satire fort gaie.
Les odes sont La reconaisance. L'éloge des défenseurs de
Leyde. L'influence de la poésie sur la religion et l'amour
de la patrie. Il y a de très belles strophes dans ces odes.
La seconde me plaît le moins. Cependant le nom d'ode
ne peut pas s'appliquer à de pareils morceaux qui sont
souvent si énormément longs.
Puis on trouve des monologues d'Auguste près du tombeau
de César, de Regulus, de Curies assez jolis quoiqu'un peu
longs. Des imitations de Jupiter et des sujets d'occasion.
Les oeuvres posthumes me plaisent moins. Cato à César
et la belle ode sur la bataille de doggersbank
sont les plus jolies pièces.
Schermer gedichten 1 Deel
On reconnaît dans ce poète beaucoup de génie une
lecture profonde des anciens et surtout une
grande richesse d'expression.
Meleager et Atalante la partie de ce recueil qui me
frappa le plus renferme un plan sage et des vers
superbes.
Les Heldendichten sans doute qui contiennent le récit
des opérations de chaque campagne de la succession
d'Espagne devaient offrir une grande monotonie
mais ce disciple d'Antonides sait embellir jusqu'à
d'arides détails.
Quant aux pastorales elles renferment de bons vers
mais je n'ai pas eu la patience de les lire.
Le Haarlemmer Hout et le Spaarne contiennent peu
de bons [onl.] mais ce n'est qu'une apologie ampoulée
où l'on a voulu traîner les métaphores à force
ouverte.
Les Mengeldichten ne sont pas fort intéressans.
Mardi 11 Octobre 1812
Polit.
Rien de nouveau la funeste catastrophe de Moscou
a rempli chacun d'horreur et à juste titre. Voilà les
fruits de la guerre.
∙Nouvelles de ville
Le premier tirage de la loterie a eu lieu. Je veux en
donner la description que je tiens d'un témoin oculaire.
Le lieu de la scène était le théâtre Allemand dans l'Amstel-
straat. On avait fait une grande chambre du théâtre et des
parterres. Devant le théâtre était une estrade où se rendirent
Mr. le Préfet, Mr. le Maire, le sous-procureur. Sur le théâtre était
une grande table et sur laquelle il se trouvait nonante étuis de
bois parfaitement égaux. Il y avait aussi deux
roues avec des manivelles et des clapets. Les personnes qui
avaient des billets se trouvaient aux loges et le peuple
là où fut le parterre et en haut de la salle. Quand le
préfet fut arrivé la musique commença. À un certain signal
le contrôleur se lève et lit un décret sur l'établissement
de la loterie dans les 7 nouveaux départemens. Après cela
on jeta les étuis dans des balances pour montre qu'ils
avaient le même poids et après on les mit tous dans une
des roue. Vint ensuite un autre garçon qui en tira les
étuis et les donna au substitut-procureur qui les présenta
au préfet. Celui-ci prit une feuille de papier où était écrit
un numéro et le mit dans l'étui après qu'un homme
qui était debout derrière lui eut crié le numéro en
hollandais et français avec une voix de stentor. On en fit
ainsi des 90 numéro.
Le préfet donnait l'étui au Maire qui
le fermait et puis le contrôleur voyait s'il était bien fermé.
À chaque dixaine les numéros qui étaient mis dans
l'autre roue étaient bien secoués. Après cela un autre garçon
habillé lestement et ayant un long gant à l'un de
ses bras vient et est bandé. Après que la roue a été
tournée on ouvre l'un des clapets et un étui est tiré
on le donne au contrôleur celui-ci au maire qui l'ouvre à
moitié. Le préfet l'ouvre entièrement et lit le numéro
qui est répété par l'homme à la grosse voix et au même
moment on voit paraître le numéro au bout de la
salle et en dehors et après que cinq ont été tirés la
cérémonie qui ne dure pas plus qu'une heure est finie.
Il n'est pas incompréhensibles que cette loterie quoiqu'elle
soit en effet très désavantageuse attire tant le peuple
on voit le gain et non les pertes. J'entendais dire en
passant près d'un bureau de loterie. Il vient de
sortir une pauvre femme qui a emporté trente
six florins.
Nouv. Dom.
Je fis chez mon oncle Rahusen un très beau tour en
voiture. Nous allâmes premièrement le Kleverlaan d'où
l'on a de fort jolies vues sur les dunes. Le chemin de là
par Bloemendaal à Velsen est fort beau. Tantôt on va à
côté des hautes dunes tantôt dans de belles allées
enfin partout à travers d'un chemin ravissant. Le chemin
de Velsen à de wijk que nous allâmes à pied est superbe.
Partout on voit une infinité de chemins où l'on peut
se promener et de très belles campagnes avec des allées
superbes comme celle p.e. de Mad. Hoeuft. De Wijk est une
rue très belle et large et le village auquel je
pourrais le mieux comparer Almelo. En passant nous
vîmes la ruine du château de Brederode qui était
bien diminuée de puisque je la vis la dernière fois.
Marché
Point de changement considérable. On répandit une bruit
que l'exportation des grains du Braband par terre mais
rien ne s'est encore constaté. Les prix ont un peu baissé
127.128 H. O. Marks. 378.380 gl. 129 H. N. Gr. 353 gl.
Le Colzad est dans la même situation Oostv. 50 à 50 1/2
Annales du Lundi
On raconta diverses choses. À table D. ne savait pas ce que
c'était qu'endosser une lettre de change. Il dit qu'il gageait
toujours impair. On se récria sur l'imprudence de ce mot.
Il répondit Je ne gagnerai plus de cette manière dans
vingt ans. P.d.C. dit qu'il lui démontrerait qu'il avait
perdu la boutique d'Apothicaire. J.d.V. dit à D. Je
parie un double sous qu'il ne l'ose pas. D. lutta longtems
mais enfin il tomba dans le piège Eh bien dit J.d.V. Pair
ou Impair. Impair. Vous avez manqué à votre
parole et outre cela vous payez un double sous. Au
dessert on vit arriver de la glace et on loua beaucoup
la générosité magnifique du bon médecin. Il raconta
qu'ayant ordonné à un Allemand qui avait vomi du
sang de prendre de l'eau de groseilles celui-ci avait
pris de l'eau de cologne.
D. avait raconté la semaine passée de M. Hugenholz qu'il
avait fait empailler un chien qu'il aimait excessivement
qu'il le baisait tous les matins et s'était brouillé
avec son meilleur ami pour avoir manqué de le
condoler à la mort de son chien. J.d.V. lui ayant
demandé quelque chose. Il dit J'aime mieux ne pas répondre que répondre mal.
Littérature
Mosheim kerkelijke Geschiedenis 10 vol.
∙C'est un ouvrage qui mérite d'être lu tant par l'impor-
tance du sujet que par la manière dont il est traité.
Le style est pur clair et correct sans s'élever au sublime.
Les remarques sont judicieuses et impartiales. On pourrait
appeler une grande partie de cette histoire Histoire des
folies et égaremens de l'esprit humain.
Vertot. Révolutions de Portugal 1v.
Ouvrage excellent qui présente dans un cadre élégant
et un tableau rapide une révolution peu connue. Je
connais peu de morceaux en ce genre qui m'ont tant
plus. Je le lis pour la seconde fois et je le relirai
toujours avec un grand plaisir.
Racine le fils. La religion
∙La raison dans mes vers conduit l'homme à la foi.
∙C'est le début et le sujet du poème.
J'ai lu une anecdote dans un ouvrage compilé par Kotzebue
dans lequel il était dit que la religion était un tissu de discours
froids et sensés mais où il n'y avait aucune verve que
le vomisseur de comédies me permette de révoquer
en doute son jugement. Car quoique il y ait des momens
où l'auteur se perd dans une prose rimée, cependant
il y a souvent des morceaux que M. Kotzebue avec toutes
ses comédies ne pourrait jamais égaler. Tels sont l'existence
de Dieu Les oiseaux Siècle d'Auguste et plusieurs autres.
La phrase de Voltaire me paraît plus juste.
Le bon versificateur Racine fils du grand poète racine
Une foule de belles pensées y abondent
p.e.
Je pense la pensée éclatante lumière
Ne peut sortir du sein de l'épaisse matière
J'entrevois ma grandeur.
Cependant les nuits de Young surtout The infidel reclaimed
sont plus poétiques plus convainquantes, j'en conviens.
Mais aussi quelle différence entre un Catholique français
et un chrétien et penseur Anglais.
Souvent aussi on reconnaît l'auteur catholique comme
dans l'apostrophe aux hérétiques et dans le tableau du
jour du jugement où il représente tous les grands
hommes de l'antiquité un Titus, un Socrate condamnés
à des peines éternelles!!!
Milton Poems 1 et 2
Paradise lost
Ubi plura nitent in carmine, non ego paucis
offendar maculis.
Voilà mon avis sur ce poème. J'en ai lu quelques parties
avec enthousiasme d'autres avec intérêt, d'autres avec
indifférence d'autres enfin avec de plaisir. Il y a sans doute
de choses superbes parmi lesquelles la description du
paradis, le ménage des premiers hommes, la séduction
la conduite après la chute, le caractère de satan la première
partie du 1 chant etc. etc. etc. car il y aurait trop d'ouvrage
à énumérer toutes les beautés. Mais d'un autre côté
je n'aime point ces descriptions de Dieu du ciel du Messie
ces idées Théologiques mises en vers puisque au lieu
d'agrandir l'idée de la divinité elles ne font que la
rétrécir. J'en conviens qu'il était difficile de priver un
pareil poème de tels accessoires mais c'est la partie
qui me plut le moins. Et au reste combien de choses
n'y a-t-il pas à admirer de jolis tableaux de belles
idées de superbes comparaisons. C'est l'ouvrage d'un grand
homme. Il y a des choses énergiques. Des pensées gigantesques
au dessus de l'imagination. Il serait ridicule de nier qu'il
s'y trouve beaucoup d'idées reprouvées par le goût tels
que cette histoire du péché et de la mort, cette salle où pour entrer
les diables doivent devenir plus petits; ces diables qui
disputent sur le péché originel, ces anges qui se jètent
avec tout ce qu'ils rencontrent ces blessures qui se ferment
tout de suite ce pont depuis l'enfer à la terre et
beaucoup d'autres choses mais ces tâches ne nuisent
point à la beauté de l'ouvrage. Le style de la Henriade
est plus beau plus soutenu que celui du Paradise
lost et cependant l'auteur de ce dernier ouvrage avait
sûrement la tête plus poétique son imagination
errait dans d'autres contrées et même sa langue si
propre pour les idées énergiques lui a été d'un
grand secours. L'obstination de Satan et son monologue
ont une espèce de sublime qui se rencontre peu. Quoique
il contienne de belles idées le récit prophétique de
l'Archange m'a plu le moins puisque je trouvais
qu'il était impossible à Adam de
comprendre tout ceci et surtout la rédemption.
Mardi 20 octobre 1812
Peu d'événemens de quelque importance, peu de rencontres
ont eu lieu dans la semaine passée. Chez mon grand-père
s'est passé une aventure assez remarquable.
Il est appellé en bas à cause d'un homme qui veut lui
parler. Cet homme mal habillé fondant en larmes témoigne
être dans des transes et dit à mon gr.père vous pouvez me
sauver la vie. Il le fait entrer dans l'antichambre et l'homme
lui raconte en sanglottant l'histoire suivante. Il était
fils d'un certain van Ooi qui avait une fabrique de
porcelaine à une lieue de Bentheim. Son père était absent
lorsqu'en may 1811 un officier fut logé chez eux. Celui-ci
s'informa chez la mère s'il pouvait s'occuper chez elle
la place de son mari. Il est refusé. Dans la nuit il
force la porte de sa chambre et veut de force coucher avec elle.
À ce bruit ses deux fils accourent. L'officier se met en
posture perce aussitôt l'aîné. Le second c'était notre
homme prend une chaise et la jète à la tête de l'officier
et le tue. Il est arrêté conduit devant la cour d'assises à
Munster et condamné à 24 ans de fer. Dans la prison il
reçoit une visite de son oncle qui était pasteur des
mennonites à Leipzig et qui le conseille de s'évader et d'aller
à Amsterdam où il devait s'adresser chez un pasteur Mennonite
pour partir de là à Altona où il avait une
tante. Il était parvenu à s'échapper et demandait que
mon gr.p. écrivit à Leipzig mais sur son refus il demanda
de l'argent pour satisfaire un voiturier qui voulait
le prendre avec lui à Altona comme valet. Les craintes qu'il
faisait paraître tout inspira à mon gr.p. l'idée de le
secourir et il lui donne f 20. L'homme après cela demande
et reçoit encore une chemise et une badine. Il part
avec les plus vives protestations de reconnaissance et
voulait tomber aux genoux de mon gr.p. La servante
avait observé qu'il avait sanglotté encore dans l'absence
de mon grand-père. Il parlait un patois Benthemien.
Après-dîner il revient encore disant qu'il le
voiturier était parti mais qu'il pouvait
partir avec un vaisseau que cependant le capitaine
exigeait plus d'argent. Mon gr.p. qui en attendant
avait fait ces réflexions lui dit qu'il ne pouvait lui
donner plus. L'autre dit qu'il reviendrait le
lendemain avec le batelier il n'est pas revenu. À l'église
on a vu ce jour là un pareil homme qui demandait
où demeurait le plus ancien des ministres mennonites.
Quid est veritas et si tout est mensonge quel
comble d'hypocrisie.
Bruilofts vaerzen qui sont tournés d'une manière
qu'on ne retrouve chez aucun auteur de son age puis
un vers sur l'honneur sur Leyden et un adresse à
Mr. le Francq.
Mercredi 4 Novembre 1812
Depuis l'époque de mes derniers annotations jusqu'à
Samedi Dernier, il s'est passé peu de choses qui fussent digne
d'être racontées.
Une conspiration avait éclaté à Paris. Le soin paternel
du gouvernement en fit avertir les négocians à la
bourse par deux commissaires de police pour qu'ils
ne fussent pas alarmés.
Ma grand mère était très malade.
Venons en à la petite excursions que j'ai faite.
À commencer de Samedi 31 Octobre.
Je partis Samedi matin avec la barque pour Harlem et
je traversai à Halfweg le chemin boueux qui menait à côté
des nouvelles curiosités qu'on a établis ici comme la nouvelle
tour les ponts-levis les batteries etc. Le soir nous allâmes
à[?] Leerzaam vermaak où nous vîmes représenter Natuur et
Pligt of de zoon regter over zijn vader et de oude Toneelspeler.
La première pièce est de Pelletier Volmeranges. En voici le
sujet.
Un général que nous nommerons Roger a réparé par ses
vertus les fautes de sa jeunesse. Il a vu traîner en prison
son père qui avait guarandé les dettes de son fils avec une
orpheline que son père avait élevé et qu'il aimait. Il a promis
dans un moment de séduction d'épouser la fille de Madm.
Volmanges. Celle-ci de son côté s'est appropriée les biens
de son mari qui appartenaient à une fille du premier
lit en la faisant exposer. On apprend qu'un traître qui
voulait livrer l'[onl.] aux Anglais a été arrêté. C'est le père
du général et il est élu son juge. Le père est condamné. Le
fils le fait évader et se met à sa place. Rosalie reconnue
par sa maraine est sauvée de sa fureur par le gouverneur.
Le père est rattrapé le fils trouvé en prison. On hésite
à exécuter la sentence. Mais l'innocence du père
est reconnue. Le général se marie avec Rosalie et tout le
monde est heureux.
Edmond le père |
Walré d'une manière énergique et attendrissant. |
le fils |
Van der Vlugt De belles positions beaucoup de feu c'est un très bon acteur. |
Mad. de Volmanges |
Mad. Kops elle joua ce rôle assez bien |
mais sa laideur son costume et ses cris
nuisaient à son jeu. Elle a un air
assez commun.
Rosalie |
fut très bien rempli par Mlle. Gerling mais cette personne n'intéresse pas beaucoup car le principal intérêt se porte sur le père et le fils |
|
∙Le gouverneur |
Loosjes le remplit avec dignité mais sa posture lui nuit dans les rôles sérieux |
|
Le cipier P. | Mabe cet acteur n'avance pas beaucoup | |
Un valet Le [onl.] |
W.van der Vlugt W. Walré |
c'étaient des rôles de quelques lignes |
Le vieux comédien est une fort jolie pièce de Picard. M. Walré
W. van der Vlugt et Loosjes y remplirent les premiers rôles.
M. Gerling fit d'une soubrette de théâtre qui ne signifiait
rien un rôle charmant.
∙Je soupai ce soir à Leerzaam Vermaak. C'est une société
très agréable et très joviale.
Dimanche au soir je fus à l'église mennonite où l'on baptisait.
L'église est bâtie d'une manière beaucoup plus jolie
que le n'est la nôtre à Amsterdam mais les galléries sont
fort petites. Elle est construite en ovale. D. de Vries parle
avec un peu trop d'emphase et veut trop embellir ses
sermons.
Je passai la plus grande partie du Lundi dans la bibli-
othèque de Mr. Walré. Il me lut plusieurs de ses vers
dont quelques-uns me plurent fort et nous épluchâmes
les défauts de mon Hannibal.
Hier je partis pour Leyde dans la barque de 6 heures. Je
sortis du Zeilpoort au milieu d'une obscurité profonde
et j'entrai dans la petite case faiblement illuminée
par une chandelle de nuit. Le chemin à Leide n'est
rien moins que divertissant. Nous en passâmes la plus
belle partie dans l'obscurité. À moitié chemin on
trouve une contrée aride et une auberge fort vaste
et d'une bien triste apparence. Après avoir passé dans
cette barque quatre heures mortelles nous arrivâmes
au Mare Poort et entrâmes dans une canal qui n'est
pas fort brillant. J'y débarquai et voyageai tout droit
au Pieters kerk, bâtiment fort vaste dans le goût de l'église
neuve à Amsterdam. Il y avait une foule de gens et
de dames. La chaire était couverte de velours rouge avec
des franges d'or. On avait fait pour le prince un trône
de soie bleu de ciel où se trouvait un siège pour lui.
Après que j'y eus erré quelque tems j'entendis une
concert de plusieurs instrumens détonna une musique
guerrière et on vit arriver le prince de Plaisance bigarré
de diverses couleurs chargé d'or et d'argent dont le virage
de chaîne ressemblait à celui d'un squelette. Il était
accompagné de M. Strassart du S. Préfet du Maire,
du sous-Maire et de quelques généraux. Après qu'il
eut pris place sur le siège que lui était destiné
une autre porte s'ouvrit et l'on vit entrer
1. les bedauds, portant des sceptres d'argent surmontés
d'un aigle
2. le recteur et les doyens de l'université
3. Les professeurs en théologie avec des toges noires
bordées de Bleu et des togues le prof. Tewater avec sa
grande perruque faisait parmi eux une figure
singulière
4. ceux en droit avec des toges rouges
∙5. ceux en médecines avec des toges d'écarlate
6. ceux en belles lettres parmi lesquels Siegenbeek,
Van der Palm etc. avec des toges couleur d'orange
7. Les députations d'Amsterdam, d'Utrecht dans des
toges ordinaires, une députation de l'institut
8. Les étudians en noir avec des claques au nombres
de 200 à 300
9. Les valets du jardin botanique de Leyde
On commença par un petit discours de Mr. Brugmans
contenant un exposé de l'objet de la cérémonie. C'était en
Français. Personne y comprit goutte. Kemper lut ensuite les
ordonnances concernant l'académie et un programme sur les
opérations et travaux. Enfin M. Brugmans monta en chaire
et fit un discours en latin de plus d'une heure. Le bruit
qu'on faisait dans l'église empêcha qu'on en entendit
beaucoup. Il donna entr'autres une histoire abrégé de
la littérature et des académies.
Après qu'il eut fini la musique recommença et le prince
sortit avec son cortège. Je vis encore deux fois passer
le cortège des professeurs.
Je fus aussi encore sur le Breestraat. C'est en effet la
plus belle rue que je connaisse surtout près de la maison
de ville elle est majestueuse. Il y avait une grande affluence
de monde.
Leyde est en effet une très belle ville. On y voit encore
d'autres églises De Hooglandsche De Marekerk et
plusieurs belles rues mais le Breestraat
surpasse tout.
La police paraissait fort mauvaise. Les soldats y exer-
çaient une espèce de jurisdiction violente.
Le Heeregragt sur lequel demeure Mr. van Goeuns
est fort joli mais il y règne un silence terrible.
∙Tous les ponts sont de bois et beaucoup
sont des pont-levis doubles comme on en voit ici
plusieurs du côté du port.
Je retournai le soir avec le prof. van Lennep. C'est un
homme d'une conversation fort agréable.
Il y aurait ce soir la illumination et une sérénade
que les étudians font aux portes des professeurs.
Mélanges
Mr. Walré me montra une édition du Speculum Salvationis
imprimée par Koster. C'était fort curieux il me prouva par
plusieurs raisons incontestables que ce ne pouvait avoir
été fait que par des lettres mobiles.
Il me montra aussi des anciennes éditions d'auteurs
allemands comme d'un certain Pertrarcha qui donne
des remèdes des conseils et des consolations pour tout
les cas qui peuvent arriver de l'homme depuis sa naissance
jusqu'à la mort, puis une très ancienne traduction de
Ciceron, un livre pieux imprimé à Cambrai en 1515. Une très
belle édition des Pastorales de Longin. Une superbe édition
anglaise de Virgile. Il possède les ouvrages de presque tous
les auteurs dramatiques en Français et en Hollandais. Je
vis aussi chez lui une ancienne édition italienne
d'Amadis de Gaule et un poème moral d'un très ancien
poète sicilien. Un ouvrage superbe sur les costumes grecs
sont requises dans les rôles des pièces des meilleurs auteurs
dramatiques français. Des caricatures par Leonard d'Avince,
de fort belles copies de médailles antiques. Des gravures
sur l'histoire d'Angleterre.
M. Koning qui publiera un ouvrage intéressant sur l'im-
primerie possède entre autres curiosités. Un album contenant
l'écriture d'une grande quantité de grands hommes avec
des vignettes emblématiques sur le caractère de
chacun d'eux.
M. van der Willigen doit posséder une belle collection de
nos anciens poètes.
M. Walré me lut aussi plusieurs de ses vers entr'autres ses
harangues à l'assemblée des chevaliers démocritains.
Un vers en hexamètres à Bilderdijk. Un vers à Arntzenius,
des idées sur une tempêté traduites de l'Anglais.
Un tableau de la résurrection de Lazare. etc. etc.
Le génie et l'érudition de cet homme sont étonnantes.
Annales du Marché
Lundi
Le seigle et le froment ont haussé considérablement par
le peu qui arrive.
127. 128 H. Marks à 410 gd.
120. 122 à Inl. Rogge. 300 gd. et hier 304 gd.
98 H. Vr. W. 186 gd.
100 H. Oude 173 gd.
Le colzad est aussi monté tant soit peu.
Voilà l'histoire de mon voyage de quelques jours
dans lequel je me suis fort bien amusé.
J'ai vu le cabinet de M. van Varik. Il est très beau
dans toutes les parties de la Physique surtout dans ce
qui se rapporte au microscope pour lequel il a des objets
superbes. Au reste il n'est pas libre de la pédanterie d'un
maître d'école.
Études
J'en suis à expliquer et traduire Homère ce que m'enchante.
Église
Je fus chez M. Koopmans.
Texte Maleachi 1 v. 15. Een zoon eert zijn vader en
een knecht vreest zijn heer. Ben ik dan een vader waar
is mijne eere. Ben ik een heer, waar is mijn vreze.
Ces mots se rapportent aux vices des Israélites dans le tems
de ce prophète qui servaient sur les autels de [onl.] non
saines ce qui était défendu par la loi. Ils fraudaient
les revenus des prêtres. Il nous dit que quoique nous ne
fussions point tellement pervertis que cependant nous
négligeons trop Dieu et son culte. Il traite
1. ce que signifiaient ces mots
2. La peinture d'un homme vraiment religieux dans toutes les actions
3. Si nous étions pareils à ce modèle -Non et
Les moyens d'y parvenir. S. ord.
Mélanges
Un jeune homme qui ici s'était mal conduit et qui avait
une délicatesse sybaritienne écrit maintenant de Russie
où il sert dans l'armée qu'il avait bivouaqué plusieurs
semaines de suites et jouissait d'une santé parfaite.
Annales du Lundi
D. apporta deux poules qu'il anatomisa ce que causa beaucoup
d'admiration. Il montra tout le manège occupa toute la
soirée. À table rien d'intéressant.
Annales du marché
À cause des commissions sur le Genièvre à Schied.
les prix sont encore montés de quelques florins.
122 H. N. Inl. R. 271 gd.
Le Froment 124 Vr. 355 gd.
Colzad sans changemens Oostv. 49. 50 51 52 Li.
Orge 99 H. Vr. W. 175 gd.
Avoine 84 H. 86 gl. 74 H. voor 66 gd.
blé noir 118 H. Br. 41 L.
Littérature
Curtius
Comme on exagère beaucoup je crois que l'on exagère
le peu de foi qu'on devait à cet historien. Car comme dit
la Harpe il écrivait la vie d'un homme extraordinaire.
Je crois p.e. que dans les descriptions des batailles etc.
il a donné un essort trop libre à son imagination.
C'est un auteur agréable à lire.
Milton. vol. 3
Paradise regained
J'avais regardé comme impossible malgré tout ce qu'on
racontait que l'auteur du Paradise lost eût fait un
mauvais ouvrage et cependant rien n'est plus vrai. C'est
en quatre chants un triste dialogue entre le sauveur
et le diable qui n'est aucunement comparable à l'autre
épopée de l'auteur.
Comus est une espèce de pièce allégorique sur la chasteté.
Les autres poésies signifient très peu de chose.
Koolaart
Puis que depuis quelque tems on fait tant de bruit de ces
poésies, j'avais été prévenu contre elles mais mon attente
a été trompée car j'ai été enchanté de ces poésies. Presque
toutes traitent des sujets intéressans et bien maniés. Il
n'y a aucun vers qu'on ne voudrait relire plusieurs fois.
Tous les vers sur les anniversaires du duc de Hesse
sont fort beaux, de schouwburg der verwoesting en Uitnodiging
aan mijne gespelen sont ce qu'on peut trouver de plus joli
dans le style sublime et léger. Elle faisait aussi très
bien des vers latins.
Mardi 27 Octobre 1812
Plusieurs nouvelles politiques mais qui ne méritent pas
qu'on y ajoute aucune foi. Celui-ci raconte que les
Français sont battus celui-là que l'Empereur revient
à Paris puisque le sénat a refusé de souscrire à une
nouvelle conscription et une levée de 60 millions.
Tous bruits vagues et indéterminés dans lesquels on ne
peut avoir aucune confiance.
Nouvelle de ville
La conscription continue. Mais on ne s'en apperçoit que
par les conscrits ou les remplaçans ivres qui font
un tapage affreux dans les rues. Quelques juifs avaient
essayé d'inoculer la galle mais cela a été
découvert et en suite de cela on a écrit à toutes
les communautés de s'informer chez tous les pauvres
qu'ils alimentaient s'ils avaient la gale ou non.
Les commis de la régie tourmentent d'une manière
terrible les marchands de vin pour les forcer à
devenir détailleurs. Cela occasionne des procès et des
disputes sans nombre. Mr. Duterrage avait même écrit
à Paris que si ces vexations occasionnaient des émeutes
il n'en était pas résponsable.
La loterie continue encore à être un sujet général
de conversation. L'un raconte des faits encore plus
extraordinaires que l'autre de numéros choisis justes
des ambes ou des ternes qu'on a manqué. Mais tout
le monde convient que c'est une loterie fort défavorable
et tout le monde joue. Voilà les hommes et surtout
les femmes qui en général aiment beaucoup plus
les jeux de hazard veulent absolument en profiter.
Mélanges anecdotiques
M. Kist, l'auteur de l'anneau de Gyges. C'était un jour
dans une société on parla de littérature et entr'autres
de ses ouvrages. Oh monsieur dit une dame à Mr. Kist. Je
donnerais vingt ducates pour en connaître l'auteur.
Un régiment prussien ayant montré beaucoup de
bravoure l'empereur lui fit cadeau d'une aigle. Cet régiment
fut battu une autre fois. Celui qui portait l'aigle dans
la fuite trouvant ce poids trop pesant le mit en poche
et jeta le bâton. Le régiment s'était rallié les officiers
lui firent de vifs reproches de sa lâcheté et entr'autres
de ce qu'ils avaient permis que cet aigle le gage précieux
de la bienveillance de S.M. fut enlevé. O! reprit alors le
porte enseigne der Lustück[?] den habe ich im Tasche
Annales du Lundi
D. fit voir des
estampes anatomiques de Cuvier, Il dit que Béarn et
Berne était le même. À table il raconta une histoire
très invraisemblable de quelqu'un qui avait dit qu'il
toucherait le sein de la reine. Il déclara que la faculté
d'Amsterdam employait le double de tems pour en dépêcher
quelqu'un que celle de Leyde. J.d.V. crut que les femmes seules
avaient la Plica polonica et que c'était une maladie
de cerveau. D. ne sut pas ce que c'était que peremptoir
on lui dit que cela venait de pèremère, il ignorait
disait-il, comment Van Huysen arrangeait ces
groupes de fleurs et de fruits pour les copier puisque
autrement ils devaient perdre bientôt le centre de gravité.
Il nous promit de l'anchois et avait envoyé un ananas
superbe.
Annales du marché
Le froment. Les mêmes prix environ 127. 128. V. 384. 386 gd.
Le seigle est monté de quelques florins par les commissions
de genièvre 122 H. 280 gd.
Orge est montée considérablement 103 H. N. Vr. W. 190 gd. prix
exorbitant.
Avoine est aussi montée.
Le Colzad les mêmes prix. Zeeuws 52. Cromh. 52 1/2.
Littérature
[volgende drie regels achter vorige drie regels met accolade]
Richter. Desc. de Moskou 1 v. | Trois brochures assez |
Voy. à la Val sainte 1 v. | intéressantes surtout |
Notice sur Horace Walpole | les deux premières |
J'en fait des extraits.
Marmontel les Incas. 1er v.
Le premier volume m'a supérieurement bien plu. La desc.
de la chute de l'empire du Mexique. La peinture des Indiens
réfugiés dans un coin du Panama qui trouvent Las Casas.
Molina qui veut sauver le Pérou le tableau de l'île de
Juan Fernandes les amours des deux sauvages le calme
au milieu de l'océan sont tous des morceaux
superbes. Je désire connaître le second volume.
Swift Travels of Gulliver
À travers le coloris ridicule on découvre beaucoup
de bon sens dans cet ouvrage p.e. la description qu'il fait
au roi du Brobignacques de la constitution d'Angleterre
les récits de nos guerres etc.[?] au bon Houynhums l'île
des mathématiciens l'académie des faiseurs de projets
les hommes immortels et l'île du sorcier.
De Kruif gedichten
C'est un bon poète mais non un homme de génie. Beaucoup
de ses vers ne peuvent s'appliquer maintenant. Il paraît
pourtant que ce fut un homme exempt des préjugés
poétiques d'alors lorsqu'on ne faisait que traduire
comme le prouve son morceau intitulé Eigenvinding.
Ses meilleurs poèmes sont sans contredit ses
Littérature
Lessing Trauerspielen
1. Sara Sampson
Miss Sara a été enlevée de chez son père par un certain
Mellefort. Celui-ci fut premièrement attaché à une
femme prostituée nommé Marwood. Elle veut rentrer dans
ses anciens droits mais Mellefort la fait enfin consentir
à se retirer. Cependant elle veut voir sa rivale. Elle la voit
se trouble et feint une indisposition. Elle revient achever sa
visite et dans l'absence de Mellefort elle empoisonne
Sara qui meurt pendant un acte entier. Son père qui a tout
pardonné revient enfin et trouve sa fille mourante. Mellefort
se perce sur le corps de son amante.
Lessing écrit bien mais cependant je n'aime pas de pareilles
tragédies. Les crimes même dans un rang plus haut ont
toujours un certain air de grandeur et conspirent une
forte horreur mais tous ces empoisonnemens dans des
conditions les plus basses n'inspirent que de dégoût.
2. Philotas
Ce jeune prince est fait prisonnier par un roi ennemi
de son père. Il apprend que le fils de ce prince est également
fait prisonnier et pour laisser à son père tout l'avantage
d'une pareille capture, il se tue.
Je ne puis trouver beaucoup d'héroïsme dans cette action.
3. Emilia Galotti
La belle Emilie est fiancée au comte Appiane. Le prince
l'a vu et l'aime. Pour remplir ses désirs le chambellan
a posté des assassins, le comte est assasiné et elle enlevée
dans ce palais du prince. Le père l'y voit et nouvelle
virginie elle préfère la mort à l'infamie et est tuée. C'est
sans doute le meilleur des trois drames. Il y a des beaux
caractères mais celui de ce père à la fin est incom-
préhensible.
Manlius
Manlius médite une conspiration. Malgré les avis de
Rutile il en fait confidence à son ami Servilius qui
a contracté un mariage clandestin avec Valérie fille
du consul. Dans un moment de faiblesse il confie ses
projets à son épouse. Elle découvre la conjuration
aux sénateurs. Servilius se repent il saute avec
Malius du sommet de la roche Tarpéjenne. Valérie se
perce.
C'est une belle pièce et de beaux vers. Le caractère
de Manlius est mâle. Mais il n'y a pas assez d'action
dans la pièce et je trouve qu'il règne trop de
langueur dans les derniers sites.
Regnard
Les Menechmes
Imitées de Plaute mais adoptées aux moeurs fran-
çaises. C'est une pièce très comique par les quiproquos
qui s'y rencontrent.
Le légataire universel
Cette pièce roule en grande partie sur un valet qui
premièrement par des déguisemens fait desgrader deux
héritiers et ensuite fait dresser un testament en
contrefaisant un oncle qu'on croit mort. Il règne
beaucoup de gaîté dans cette pièce.
La critique du Légataire. Une petite pièce pour remplir
la durée du spectacle mais qui n'égale pas la critique
de l'école des femmes.
Shakespear. Death of Cesar
Dans le goût de toutes les pièces de Shakespear on
y voit même la défaite et la mort de cassius et Brutus.
Cependant il s'y trouve des morceaux excellens
entr'autres Le discours de Brutus et d'Antoine la dispute
de Cassius et Brutus etc.
Wetsteen het gelukkig ongeval Bl. eind. Tr.
Une espèce de drame héroïque des imbroglios des
reconnaissances des enfans supposés. Walré me fit lire
cette pièce comme un exemple de ces pièces qui contient
beaucoup de peine et qui sont oubliées aussitôt
que faites.
De Venetiaansche drielingen
Une intrigue Italienne des quiproquos occasion-
nés par trois frères qui se ressemblent parfaitement.
[onl.] Volksmärchen Vol. 1er
Des histoires d'enchantemens du tems chevaleresque
qui sont assez amusans à lire le premier volume
contient: La foret enchantée la belle Ruhilde,
le miroir merveilleux et les écuyers de Roland.
Arnaud. Délassemens de l'homme sensible
Il y en a une foule de volumes mais je n'en ai lu que
quelques pièces. Il y a des peintures beaucoup trop horribles
et d'autres trop sentimentales. En général tout y
est exagéré. Il y règne aussi trop de monotonie. Cependant
de tems en tems on trouve des contes attachans etc.
des anecdotes historiques assez intéressantes,
Henneboo gedichten 1 vol.
Cet homme peut être regardé parmi les poètes comme
Jan Steen parmi les peintres quoique dans un
grade moins élevé on peut appliquer à sa vie le
proverbe hollandais. Twaalf ambachten, dertien
ongelukken.
L'élégie sur la mort d'un pinson serin chien et cheval
ne m'a pas singulièrement plue.
L'éloge du genièvre renferme des idées fort ingénieuses.
Il finit par ces vers:
In 't kort geen ambacht of hanteering
Geen kunst geen koopmanschap geen neering
Ter zee of land in 't groot of klein
Of voert Jenever in zijn trein
Le premier vers de noce consistant dans un playdoyer
devant la cour de Cypris en toutes formes est très
joli.
Le reste consistant en dédicaces la partie
d'une pièce de théâtre etc. ne signifie pas beaucoup.
Kuypers Dichtoefeningen
Un poète misérable qui se croit poète pastoral qui
vomit des injures contre les Anglais qui donne
une grande quantité de vers où il maudit les
ballons enfin qui pour son honneur n'aurait pas
du arracher ses vers au sommeil du portefeuille
Mercredi 11 Novembre 1812
Voilà une semaine que je suis retourné de Harlem
et rien ne s'est encore passé de remarquable. On n'entend
point de nouvelles politiques tout est calme excepté
ceux qui ont des papiers sur la Russie et comment
ceux-là feront reste encore à deviner.
On avait répandu un faux bruit que la trésaurie d'Amster-
dam payerait ses dettes. Il paraît qu'elle est dans un
état désastreux. S.M. lui a donné l'octroi et par ce
moyen toutes les contributions des ventes etc. que la
ville percevait toujours qu'on a même offertes et
qui seules formaient un revenu de 80 à f 100.000 ont été
annullées puisque le préfet disait que l'octroi remplaçait
tout. On a envain présenté des requêtes et lorsque
de quelque manière on est en fonds chez le
préfet s'en empare sous quelque prétexte.
Dimanche chez Koopmans. Un texte d'Jasie[?] appliqué
d'une manière singulière sur les circonstances présentes
avec des applications et des raisonnemens assez lieux
communs.
L'uniformité qui règne ici a été en quelque manière
interrompue par la fête qui a eu lieu à l'occasion que
la société Doctrina et Amicitia avait subsisté 25 ans.
M. Rawenhoff qui faisait un discours a très sagement
passé entièrement l'objet de la fête et a parlé de la femme
regardé sous les trois aspects de beautté, vertu, et sagesse.
On a eu une collation de la musique un bal enfin
tout ce qu'on pouvait désirer.
Point de jour de famille à cause de cette fête.
Annales du Marché
Tous ces vaisseaux qui avaient été retenus par les vents
dans les ports de la frise et la Groningue sont abordé
en grands nombre apportant 5 à 600 Last de froment. Ceci
a occasionné d'abord une grande stagnation dans la
montée extraordinaire de nos prix. 127 H. à [onl.] gd. c'étaient
les prix. Hier par une espèce de surprise on a vendu 6 last
127 H. à 395[?]. Aujourd'hui on voulait placer tout ce
froment qui était arrivé à la fois pour 127 H. 380 gd.
Nous avons refusé. On a encore vendu 130. 131 H. 210 gd.
On veut faire baisser le seigle dont il est arrivé
environ 100 lest.
Le Colzad est monté tant soit peu Vries 58 L. Oostv. 55. Ro. f 56
Les autres grains sont baissés.
Littérature
Rhulières Anarchie de Pologne 4 v.
C'est un ouvrage de mérite rempli de choses intéressantes
quoique peut-être et ça et là il y manque un peu d'exac-
titude et que l'auteur va souvent trop loin dans
ses dégressions comme dans celle sur les affaires
de la Russie et sur l'expédition en Grèce. C'est dommage
que l'ouvrage ne soit point achevé et que les derniers
chapitres ne soient que des précis.
On peut remarquer que l'auteur est porté contre les Russes
qu'il tâche à noircir.
Le style est en général fort beau.
∙Vide ext.
Je continue encore mes fouilles parmi les acquisitions
que ma bibliothèque a faites pendant les dernières années.
Gay Poems 2 vol.
C'est un auteur charmant et je me repens aucunement
d'en avoir donné tant d'argent.
Rural sports est un très joli essai sur la campagne.
The fan joli poème. J'aime beaucoup l'endroit où chacun
des Dieux dit ce qu'il veut qui y soit peint. Il y règne
beaucoup d'imagination et on y trouve de très belles
imitations des anciens.
Pastorals. Je ne suis pas grand amateur de pastorales.
Ceux-ci qui sont une espèce de medium entre le sérieux
et le comique, renferment quelques jolis traits mais j'aime
encore mieux celles de Pope. Il y a aussi beaucoup de
vieux mots.
Trivia. Un poème charmant en trois chants sur la manière
de se promener à Londres rempli d'épisodes analogues.
Epistles
Ces lettres sont jolies. Il y en a une où comme Horace
il fait la description d'un voyage.
Tales
Quoiqu'un peu gais ils sont fort jolis surtout celui
intitulé a true story of an apparition.
Les Eclogues et Miscellanies ne m'ont pas fort plus non
plus qu'une comédie et une pièce qu'on nomme
tragedie pastorale.
Spex. Gedichten 2 vol.
C'est un auteur du tems de nos poètes monotones. Ce n'était
pas un homme sans génie mais sans goût. Deux
volumes pleins de vers d'occasion de noce de naissances
de morts. etc. etc. etc. On trouve quelques jolies épigrammes
et Bijschriften dans la manière de De Dekker.
Spandau. Gedichten
C'est un poète dont je fais grand cas surtout dans le
génie érotique et Anacréontique, Son Hogefeest der liefde
est vraiment un chef d'oeuvre. Son vers Waarom ik
vrouwen bezinge respire une naiveté charmante.
Trajanus est un peu prosaïque.
Le meilleur vers après ceux-là sont Bilderdijk, Dichtren
loon Huislijk geluk Vriendschap en liefde et
plusieurs petits vers.
Mecredi 18 Novembre 1812
La nouvelle continue dans les bulletins de la retraite de
S.M. de Moscou a répandu ici le plus vif intérêt. Chacun
croit être bien informé des désastres de l'armée française. Celui-ci
dit que les Russes sont déjà à Wilna. Celui-là a lu le bulletin
du général Russe où il dit qu'à la vérité il a perdu 15000 hommes
à la bataille de la Moskwa, mais que les Français en avaient
perdu plus et qu'il avait dû se retirer puisque comme général
subalterne il ne pouvait pas risquer le tact en une fois. Les
prétextes dont les français se servent pour éluder les reproches
qu'on pourrait faire au sujet de l'abandon de Moscou sont
très faibles. On dit que le préfet a dit La campagne de l'empereur
n'a pas été heureuse. Il a déjà perdu deux cent mille hommes.
On dit que les Russes et les Suédois sont réunis, que l'empereur
n'a jamais possédé plus que la grande route de Wilna à Moscou,
que les cosaques lui font beaucoup de mal, que tout
n'est pas encore appaisé à Paris, que l'armée française
est accablée par les fatigues, que dans peu on entendra
des nouvelles plus importantes, qu'ils n'ont presque plus de
chevaux tandis que leurs ennemis sont montés sur des
chevaux tartares. Il y a même quelques-uns qui
vont jusqu'à dire que l'empereur lors de la retraite
de Moscou était déjà mort. Le tems enseignera tout...
Il paraît incontestable que l'émigration d'une foule de
personnes qui se vont établir à Campen en Gueldres a dimi-
nué le nombre de nos citoyens. Enfin n'est-ce pas le meilleur
parti car que faire ici plus longtems pour n'apprendre que des
nouvelles presque toujours désagréables sur quel bien
peut-on fonder quelque stabilité. Les maisons baissent de
prix en prix chaque jour. Les effets sur la Hollande sur la
ville la Suède la Russie tout est dans un état fort triste
et que pourrait dira-t-on la diminution des dépenses du
riche. Ce sont elles qui font fleurir le pauvre et l'artisan.
Tout se prépare ici à une diminution totale. On démolit
les maisons et bientôt Amsterdam ne sera plus qu'une
ombre de ce qu'elle a été et l'étranger surpris cherchera
peut-être un jour parmi des ruines à demi-inondées
où fut Amsterdam.
Une autre chose non moins triste c'est la démolition de
presque toutes les campagnes qui sont
mises en vente. Bientôt l'on ne verra là où s'élevaient
de superbes maisons de plaisance fruit des épargnes de
nos ancêtres et des jardins embellis par le goût de
leurs descendans que des prairies uniformes et des
tristes débris.
En voilà déjà 4 dans le voisinage de mon grand-père qui
sont exposés à ce sort affreux. Bereveld et Wallenstein ont
déjà entièrement ou en partie subi ce sort. Vijverhof et [onl.]
doivent le subir. Une quantité d'autres campagnes ont été
abattues en divers lieux. Cette diminution diminue aussi
le débit par conséquence la prospérité des villages près
desquels elles sont situés et en conséquence l'adversité
d'un seul particulier diminue la prospérité d'une
quantité d'autres.
Dimanche M. Muller a fait un très beau sermon sur
Jésus en prière. Il a démontré les avantages de la solitude
la nature et la nécessité de la prière l'excellence du carac-
tère de Jésus dans un style fort beau et pur et une déclamation
assez agréable quoique monotone.
On a lu au jour de famille un certain discours que
M. Kemper a prononcé dans une certaine société et où il
démontre l'influence de l'esprit du jour sur l'étude des
sciences. Ce discours est trop lié pour en faire l'analyse.
Il y a des traits d'une hardiesse étonnante. C'est encore un
langage digne d'un hollandais.
Annales du Lundi
Quoiqu'il y eut beaucoup de vivacité dans les discours cependant
peu de traits peuvent en être conservés. D. mange chez Walen
du hareng sec. Il apporta du tabac de feuilles de châtaigner avec de l'huile de [onl.]
qui coûte 1 sou et est revendue pour 6 sous. D. ne pouvait comprendre
combien cela faisait p. cent. Le gr.p. parla fort au long
sur l'origine du mot Pontifex.
Annales du marché
L'arrivement de tant de vaisseaux chargé de Grains avait
fait baisser considérablement les prix on avait vendu 100 H.
Mark T. pour 375. Mais bientôt les prix ont repris faveur.
Vendredi 128 H. 393 Lundi 130 H. 406 gd. 123. 124 H. N. gr.
355. 360 gd.
Le seigle qui premièrement baissait est monté par ce que
plusieurs qui s'étaient engagés a en livrer n'avait point
reçu leurs parties 122 H. 300.
Garst 100 H.N.V.W. 192 gd.
Haver 88 H. fijne vr. 101 gd. 76 H. voer 75 gd.
Le Colzad est monté quelque peu par le froid que
nous avons eu quoique de mémoire d'homme les magasins
de Zaandam n'aient jamais été si pleins.
Littérature
Jonker. Fransen Oorlog 1 v.
C'est un ouvrage très intéressant provenant des annotations
d'un prêtre qui pendant le siège et l'occupation de Rotter-
dam par Brederode. Cet ouvrage a été rédigé par un certain
van Alkemade. C'est une pièce très curieuse pour notre
histoire il serait à souhaiter que nous eussions des mémoires
pareils sur plusieurs autres événemens de notre histoire.
Stijl. Opkomst en bloei der Nederlanden 1 v.
C'est un ouvrage superbe. Un style éloquent de très beaux
portraits des réflexions judicieuses enfin le morceau le
plus philosophique que nous possédons sur notre histoire
C'est un ouvrage que je relirai toujours avec le plus grand
plaisir le vers qui le finit est très intéressant.
Michaux Printemps d'un proscrit 1 v.
C'est un ouvrage dont je m'étais formé une plus haute idée.
Il y a à la vérité quelques belles déscriptions surtout celle
de la fin d'une belle journée de printems mais beaucoup d'imi-
tations et des répétitions continuelles. C'est toujours le
printemps et toujours la proscription. C'est un ouvrage
où il y a des beaux vers mais qu'on ne relira pas.
De beer Poortugaal
[achter accolade achter vorige regel de twee volgende:]
Ledige uuren
Dichtpoogingen
C'est un poète qui renferme de très beaux morceaux. De onsterf-
lijkheid en contient quoique trop répétés. Puis bij de graven
Aan mijn meisje en Nemo ante mortem beatus.
Le second ouvrage renferme une espèce de poème didactique
De deugd où il y a de l'imagination de très beaux tableaux
et qui selon moi est le chef d'oeuvre de l'auteur.
Het geweten renferme de beaux morceaux mais est trop
long. Puis Aan mijn vaderland en lotverwisseling.
∙Ce qu'on peut reprocher justement à cet auteur c'est
des répétitions et le retour fréquent des mêmes images.
Dieu qui soigne le Chérubin et n'oublie pas le ver
De vorst die gelijk aan den slaaf is des diatribes contre
les rois et puis à tous momens kabblende beekjes
bloemen roozen en doornen et enfin une foule
de pareils lieux communs poétiques.
Mardi 1 Décembre 1812
Diverses causes m'ont empêché d'écrire la semaine passée.
Ma grand-mère a été dangereusement malade et elle l'est encore.
Déjà revenant de la campagne elle avait attrapé un Rhuma-
tisme. Elle était déjà sur le point d'être rétablie lorsque une
nouvelle attaque la mit aux portes du tombeau. Elle était
dans un état terrible. Les médecins même l'abandonnaient on
aurait dit qu'elle n'avait plus que quelques momens à
vivre et on attendait à chaque instant la nouvelle de sa
mort. Cependant au milieu des tourmens qui assiégeaient
son corps son âme était tranquille et son esprit aussi serein
qu'il pouvait être. Ceci faisait de ce lit de souffrances véritablement
un lit de mort tel qu'il nous est représenté par les poètes et
les romanciers. Elle était là avec la sérénité d'un ange
attendant avec résignation le moment qui devait l'enlever
de ce séjour de douleurs. Elle ne voyait devant elle qu'une
éternité consolante, la récompense du juste. O Religion que
tu es belle dans de pareils momens lorsque le faible mortel
près d'être livré à une destruction totale en apparence
s'abandonnant à ton flambeau tombe sans frémir dans
le sein de son Dieu. O de quel appui est alors une
conscience pure qui ne reproche aucun crime et qui laisse
voir à l'esprit un [onl.] et heureux qu'on a fait. Ces scènes
douloureuses et touchantes se multipliaient à l'infini et
rendait tous les assistans navré de douleur. Tantôt c'était
mon grand-père qui lui répétait des versets qu'elle
aimait. Elle prenait congé de tous ses enfans. Je n'oublierai
jamais le moment où je fus introduit auprès d'elle. Elle
me pressa la main me tirant à elle et me baisant
avec effort elle me dit Soyez le soutien de votre père et j'espère
que nous nous reverrons dans une autre vie. Non jamais
le souvenir n'en sortira de ma pensée et cette seule pensée
me sera toujours un encouragement pour suivre le sentier
de la vertu et puisse le ciel débonnaire m'accorder la
faveur qui sur mon lit de mort je puisse être aussi calme
aussi confiante et aussi glorieux d'une vie sans blâme
dans laquelle j'ai répandu autant de bien que j'ai pu.
Cependant sa crise est devenue moins dangereuse et quoique
mortellement affaiblie nous avons cependant encore
l'espérance d'une guérison qui comblerait nos voeux.
Ma tante Rahusen et ma mère ne quittent point le
chambre de la malade et remplissent tous les devoirs
si doux de la piété filiale.
La semaine passée on a distribué le baptême à plusieurs
de mes amis. M. Koopmans prêcha son sermon fut très bon
et sa harangue à ceux qui devaient être baptisés très
belle. Il faut pourtant convenir que c'est une cérémonie
très touchante et qu'elle doit servir efficacement à retenir
ceux qui en sont l'objet sur les sentiers de la vertu
et de la religion. Le Belijdenis-preek avait été fait par
M. van Gelder sans aucun goût ni onction.
Avant hier je fus chez M. Stuart qui prêcha Hebr. 4. v. 15 sur
les tentations sur la nature de celles que le sauveur dut
essuyer sur la nature des nôtres et sur la manière d'y résister.
La dernière partie surtout débitée avec son feu et son éloquence
naturelle était très belle.
Il y a eu un Allemand qui a ouvert un théâtre de
déclamation où l'on déclamait des pièces de vers Allemandes
à f 2 mais il n'a donné que deux représentations.
La troupe française donne assez de contentement ils
ont donné à plusieurs reprises le mariage secret.
J'entendis la semaine passée un discours de mon cousin Kops à
Felix.
Il commença par dire que parmi les hommes qui avaient
illustré notre patrie vers la fin du 17en siècle on pouvait
compter P. Francius connu par ses ouvrages en vers et en prose.
Qu'il avait entr'autres publié deux harangues de catilina avec
des annotations comme on devait les lire ou prononcer.
Qu'il ne savait pas qu'il existât en Hollandais un pareil
ouvrage mais qu'il voulait donner un essai dans ce genre.
Il analysa ensuite les morceaux suivant dans ce goût et
les lisait puis en observant toutes les remarques qu'il
avaient faites.
Engelberts. Le bonheur de deux époux Eelhart et Eusebia.
Stijl Douleur générale après la mort de Guillaume 1er.
Brandt Description d'un combat naval.
Heemskerk Une demoiselle conduite en mer par son galant.
Hooft Amour de Zanobie et Eleonore.
Cette société de Felix vient de perdre un membre
très utile dans la personne de Fokke Simonsz. C'était un homme
d'une vaste érudition d'un extérieur modeste et même assez
bête et d'une gaîté satirique mais qui était presque
entièrement perdue après qu'il avait été arrêté et confiné
quelques tems par les ordres de la police. Il a été magnifiquement
enterré par une société V.W. dont presque
tous les auteurs étaient membres. Ils ont jeté chacun
une [onl.] de terre sur son bière et Van Hulst a prononcé
un vers fait par Westerman.
On a publié une défense d'inhumer dans les tombeaux
après l'époque du 1. Janvier. Ces tombeaux valaient de
l'argent étaient une possession on les mure sans en
donner du dédommagement. Quelle bonté.
Le nommé Pasman vient de subir sa sentence avec beaucoup
d'humiliation selon les uns de courage selon les autres et selon
d'autres enfin avec beaucoup de brutalité.
mais il
faisait un tel brouillard que presque personne n'en a pu
voir quelque chose.
Annales du Lundi
La chose principale qui a été agitée fut celle de Mad. v. Strick
qui avait été chez Dylius et l'avait voulu engager à soussigner
sur son Virgile. Il disait que mon oncle ne pourrait y résister.
Celui-ci dit qu'oui mais voulait parier ce que Dylius
refusait il dit qu'il ferait alors défendre sa
porte à Mad. van strick. Cette contention fut longue et des
deux côtés surtout de celui de J.d.V. on répéta toujours la
même chose.
Annales du marché
À cause de la saison il règne une très grande stagnation
dans le commerce du froment. 127 H. Mark est noté. 195 gl. mais
on ne peut vendre à ce prix. Le seigle est encore baissé
122 H. 388 gl. Colzad est baissé d'une L. Norder 68.
Littérature
Marmontel les Incas Vol. 2.
Ce vol.-ci n'est pas moins intéressant que le premier surtout
par l'épisode intéressant de Cora. On voit ensuite la descente
des Espagnols l'attaque de Tumbes la mort d'Amarile enfin
la perfidie des espagnols l'emprisonnement
d'Ataliba la mort d'Alonzo. Celle d'Ataliba et enfin
la sujétion entière du Perou.
Le style est très beau et la fable assez suivant l'histoire
mais Pizarre est peint sous un jour trop favorable et les
choses sont tournées pour l'excuser de divers crimes. Le
caractère d'Ataliba est aussi trop beau.
En général c'est un bel ouvrage c'est plutôt un roman
historique qu'un poème en prose. Il y a de très beaux
morceaux et différens autres épisodes tels que las Casas
nourri à son lit de mort du lait d'une Indienne Pirore
voyant à Séville l'exécution sanguinaire d'un
Autodafé.
Shenstone works
C'est un fort joli poète avec beaucoup de sensibilité de goût
sans flatterie vers d'occasion.
Parmi ces Elegies il y en a de fort jolies sur les moeurs des
anciens bretons sur la vie agréable et paisible d'un campagnard
etc. mais dans quelques-unes les allusions sont trop forcées
et d'autres sont très difficiles à comprendre.
Odes songs renferment de jolies petites pièces
Levities or piece of humour signifient très peu de chose
Moral pieces sont très belles
The judgment of Hercules est un morceau excellent
The progress of taste signifie moins
Economy est un avis très bien écrit et très utile
The ruined abbey est un très beau coup d'oeil sur l'influence
de la superstition en Angleterre
Love and honour est une très belle histoire d'une Espagnole
amoureuse d'un anglais
The scoolmistress est un tableau charmant par sa
naïveté et sa vérité.
Pope Essai on Man
J'ai relu encore cet ouvrage. C'est un très beau style en général.
Il y a des pensées remarquables par leur hardiesse et
leur justesse. C'est un bel ouvrage.
Addison Cato
C'est une très belle tragédie. Il y règne beaucoup d'élévation
de sentimens de beaux vers et surtout le caractère de
Caton qui présente des situations très belles et attachantes.
Le caractère du Jeune Juba est aussi beau
son amour pour la fille de Caton y est bien placé
mais l'amour des deux Catons pour Lucia et le mariage [onl.]
à la fin de la pièce ne me paraissent qu'un remplissage.
Koppen über Homerus
Ce petit ouvrage quoique imprégné de l'esprit Germain renferme
de fort belles idées sur Homère sa vie ses Dieux ses carac-
tères quelques principes y sont fort bien exposés comme
l'origine des religions des Grecs de leurs Rois etc.
∙J'ai lu les notes qui se rapportent au 1er livre. Elles
sont en grande partie grammaticales mais contiennent
aussi beaucoup d'éclaircissemens historiques et
géographiques.
Lundi 7 Décembre 1812
Rien de bien intéressant. On continue encore de tems en tems à
répandre de mauvaises nouvelles sur les affaires de l'Emp. Chacun
est en extase des Cosaques. Au reste les esprits des hommes sont
bien différends. J'ai parlé à des personnes à Harlem qui trouvaient
l'incendie de Moscou par les Russes un acte de grandeur.
Quant à l'état intérieur de la ville tout est tranquille. La police
se fait craindre le peuple obéit. Point de murmures rien. On reçoit
de tems en tems les nouvelles concernant ceux qui ont péri à
l'armée parmi lesquels le fils du prince de plaisance. Si l'on
doit en croire les Rapports la police étendrait ses soins jusqu'aux
particularités les plus minutieuses. On a défendu à un libraire
d'exposer une estampe où l'on voyait Louis 16 guillotiné. Un
perruquier avait devant sa boutique un buste qui ressemblait
fort à l'empereur il a dû le retirer. On dit que l'hist. de la [onl.]
Konijnenberg a pareillement été défendue.
Ainsi l'on évite tout ce qui pourrait causer quelque émotion
quelque réflexion et nous ne sommes pas dans ces tems dont
parle Tacite où il était permis de penser ce qu'on voulait et
de dire ce qu'on pensait.
Lange a fait deux discours à Felix sur un sujet bien
singulier c.à.d. sur les Syrènes. On a beaucoup admiré son
éloquence.
Avant hier c'était St. Nicolas. C'est bien la plus sotte fête qu'on
puisse s'imaginer. Une foule considérable de gens en besogne
les boutiques des vendeurs de friandises élégamment décorées
des surprises représentent tous les objets dont on se sert dans
la vie des fruits des fleurs ustensiles verges boîtes etc. etc. choses
qui coûtent une infinité d'argent et qui ne signifient ni
ne sont bonnes à rien. Puis une infinité de bonbons qui ne
sont pas moins chères des dames quelquefois de jolies filles
pour donner encore plus d'appât à la marchandise et même
chez quelques-uns des rafraîchissemens des liqueurs des
glaces etc. enfin tout ce que peut rassassier le gourmand
le plus décidé. Enfin voudrait-on croire que dans une ville
protestance civilisée comme Amsterdam on trouvât encore
assez de gens du peuple et même d'une classe
plus élevée qui font croire à leurs enfans que St. Nicolas prend[?]
des chaînes est assis sur un cheval blanc descend par la
cheminée qu'ils doivent lui adresser des prières etc. et mille
bêtises pareilles.
Hier c'était la grande fête de l'anniversaire du couronnement
de sa Majesté. Premièrement de pareilles fêtes attiraient
un intérêt général. Maintenant personne n'en parle.
Hier au matin il y a eu service en son honneur. Mais l'après
on a prêché tout ordinairement sans s'inquiéter de rien
et on a bien fait. Mon grand-père a prêché sur une apparente
contradiction de St. Luc et de St. Paul et il a recommandé la
lecture fréquente des ste. écritures. C'était un fort bon sermon.
Le soir quelques illuminations qui ne signifiaient rien
comme à l'ordinaire.
Littérature
Robertson. History of America 3 v.
C'est un fort bel ouvrage. C'est dommage qu'il ne soit pas achevé
car cette partie-ci ne contient que l'histoire de l'Amérique
Espagnole. Robertson n'est un historien philosophe judicieux
il narre avec précision élégance il intéresse le lecteur mais
on n'y trouve ni l'éloquence des anciens ni le style et les
beaux tableaux de Hume ou ses anecdotes et petis traits
et encore moins ses portraits.
Rotgans. Willem de 3de. 4o
N'ayant jamais lu cet ouvrage j'avais cru que ce serait un
véritable poème épique mais ce n'est aussi pour ainsi dire
qu'une vie en vers et l'hist. de Guille 3. depuis sa naissance
jusqu'à la paix de Rijswijck. Ce que me rebute le plus dans
ses ouvrages c'est l'ordre historique qu'on suit et la monotonie
qui y règne par les continuelles descriptions qui se ressemblent
de sièges de batailles sur mer et sur terre etc. Et les batailles
des modernes qui se ressemblent beaucoup et où l'on ne
voit pas comme dans ceux des anciens des héros grecques
égal aux Dieux et supérieurs à tous les autres guerriers
n'offrent pas le coloris poétique des combats d'Homère ou
de Virgile.
Une grande difficulté parmi les poètes épiques a toujours été
le merveilleux, surtout chez les poètes modernes. Celui des
anciens était sans doute le plus fait pour la poésie mais
on vit naturellement l'incohérence de s'en servir dans des
sujets modernes. Le Tasse a pris la féerie à laquelle l'on
croyait encore dans son temps. D'autres à l'exemple
de Milton ont pris des anges et des démons. Voltaire a personifié
la discorde le fanatisme etc. Mais cet auteur-ci a conçu
l'idée bizarre de mêler tous ces merveilleux ensemble. Chez
lui on voit tantôt et le plus souvent tous les dieux du
pagatisme Mars Bellone Jupiter Éole Phebus Galatée Bacchus etc.
et tantôt des fleuves et même des états. La Tamise avec
ses nymphes. La vierge de la Hollande etc. tantôt la religion
qui s'adresse à Guillaume 1 et une foule d'êtres pareillement
métaphysiques et enfin le dieu des chrétiens Michael
et Satan avec tous leurs adhérents. C'est sans doute
une grande faute dans le poème [onl.] encore que le merveilleux
de Chateaubriand.
Au reste que dire de ce poèmene. Sans doute il faut convenir
que la versification en est brillante qu'il y a de très beaux
vers et par-ci par-là de jolis tableaux. Mais en général
les morceaux se resemblent trop. Il y a trop de répétitions
1. dans les éternelles peintures de l'amour conjugal de
Guillaume et de son épouse 2. dans les traversées qu'il fait
par mer 3. dans les sièges et en général l'ordre historique
y est ponctuellement observé ce que devait être ainsi dans
un ouvrage contemporain. La description des batailles est
quelquefois fort animée et belle. L'ouvrage entier est divisé
en 8 livres. Le second où le chambellan Bentink raconte
les événemens de 1672 et tout ce que arriva à Guillaume
avant son mariage est sans doute le meilleur et contient
de fort beaux tableaux. Les imitations des auteurs latin
sont aussi quelquefois déplacées comme lors de l'expédition
de Louis 14 en Hollande il fait pleurer à l'habitant de
la Betuwe ses vignes et ses olives. Passe encore pour l'exalta-
tion de Guillaume 3 qui est quelquefois poussée trop loin
comme lorsque il nomme les ordres qui Guillaume
donne à ses officiers honiglekkernij. La description des exploits
en Irlande l'est aussi.
Résumons. C'est un ouvrage où l'amateur véritable de la
poésie pourra trouver plusieurs morceaux qui lui
plairont parmi beaucoup d'autres qui n'auront pas le
même sort mais ce ne sont pas de pareils poètes qu'on
peut donner librement en mains aux amateurs superficiels
aux gens du monde aux femmes. Tandis qu'on ne risquera rien
en leur donnant la Henriade les oeuvres de racine ou
d'autres ouvrages pareils et ceci contribue à diminuer mon
étonnement que nos anciens poètes ne soient pas plus
fréquentés par ceux qui n'ont pas une envie de recherche
et une patience à l'épreuve.
Loosjes laatste togt van de Ruiter
On pourrait aussi demander quelle espèce d'ouvrage est ceci.
Mais M. Loosjes lui-même dit ne pas savoir la classe. Aussi
quand un ouvrage est bon peu importe dans quelle classe
on puisse le ranger. L'ouvrage par lequel Loosjes s'est acquis
le plus de réputation est sans doute son inimitable Maurits
Lijnslager. Ceci est pour ainsi dire un Maurits Lijnslager
en vers. On y retrouve pareillement une mine inépuisable
de connaissances touchant notre histoire nos coutumes
la topographie de notre pays, etc. des rencontres fortuits
de grand homme. Le caractère du héros est
fort bien peint et la versification presque toujours
s'élève dans plusieurs morceaux. Pour compléter il faut
ajouter qu'il s'y trouve de tems en tems de très beaux
tableaux. Cependant l'ouvrage ne plaît pas beaucoup. Il
n'y a point de merveilleux si l'on en excepte quelques
songes de De Ruiter ou de Haan mais en général les tableaux
se rapprochent trop de la condition ordinaire sont plutôt
des peintures d'après nature que des tableaux poétiques.
Il y a des morceaux qu'on lit avec intérêt mais en général
trop de prolixité trop de détails. La poésie ne doit
peindre que les grands traits. Une analyse détaillée de
l'ouvrage conformait mon jugement. C'est la Minerve de
Phidias et celle de son rival. Trop de détails intéressans
dans une histoire diminuent l'éclat du héros dans un poème.
Aussi souvent les conversations sont trop familières. Le
caractère du jeune de Witte qui accompagne de Ruiter
est très beau. L'esprit se sent souvent comme à la [onl.]
de la grandeur de nos ancêtres. Le caractère de de Haan
son songe etc. est digne de l'Épopée. La visite de Guill. 3
à de Ruiter est une belle idée. En général c'est un ouvrage
qui renferme toutes les beautés et les défauts communs
aux ouvrages de M. Loosjes. Le poète conduit son héros
jusqu'au moment où joint avec les autres vaisseaux de
l'escadre il se propose à partir pour le lieu de sa
destination.
Annales du Lundi
Dylius voulut à toute force avoir des morceaux grecs ou la
traduction des épithètes de la magistrature d'Amsterdam. Il
n'a pas eu le courage de renvoyer Mad. van Strick. Il dîne chez
Waller pour 14 sous où il reçoit un mauvais dîner avec Boers-
ma étudiait son oncle et tante et deux messieurs Gouverneur.
Il a raconté d'un voyageur qui au milieu de l'hiver
était enfermé avec sa voiture dans la neige sur le chemin
de St. Petersburg. J.d.V. a voulu gager que ce n'était
pas vrai. D. dit qu'une obligation sur la Russie de f 1000 vaut
à 33 pc. 68 fr. La grande réconciliation a eu lieu. [onl.]
a voulu avoir des portraits que D. avait acheté.
L'oncle s'est mêlé de cette négociation et a lui-même
dicté à D. un billet très soumis qu'il devait envoyer
à son superbe adversaire qui lui-même avait à son
tour été chassé de chez Meyer. On a parlé en allusion
de la fête et D. a dit qu'il parlerait lorsque le tems
en serait venu. Lui reprochent au nom de la fille de
M. Walré la négligence de ne lui avoir pas encore
donné des copies du vers de W. son père il a eu
l'infamie de dire Est-ce que cela signifiait donc
tant?
Samedi 14 Décembre 1812
Encore des nouvelles vagues. L'on racontait que l'empereur était
ad patres et que Son Exc. le prince de Plaisance était parti
incognito pour Paris. Mais les soins paternelles de la police n'ont
pas voulu que les habitans de la bonne ville fussent dupés
par de pareils bruits. Le prince de Plaisance a fait hier
à cheval un tour dans la ville et un commissaire de
police a annoncé à la bourse au milieu d'une foule terrible
que l'empereur (les 20 je crois) était avancé jusqu'à Wilna.
Cependant quelque infidèle quelque mécréant a affiché
ce matin au Palais que le palais était à vendre par ce que
l'empereur était mort.
Hier au soir par une carte de permission je fus à Felix. C'était
un beau spectacle cette belle salle entièrement illuminée
et entièrement remplie surtout des dames, d'autres dames
encore dans les fenêtres ouvertes sur les corridors un orchestre
rempli tout cela était fort joli. On commença par une
symphonie qui me fit beaucoup de plaisir. Enfin après
beaucoup de musique Mr. Klein commença son vers. C'était
encore du beau genre l'idéal des arts et surtout l'influence
des femmes sur les arts. Ce vers était fort long et fut deux
deux fois interrompus par la musique. Les vers était beaux
mais c'étaient des lieux communs en grande quantité. Le
premier homme la création de la femme etc. et enfin
des grands mots en quantité kunst natuur idealen in
hoger kringen zweven. Il nous peignait la femme comme
l'idéal du beau vonkelende ogen golvende boezems des
regards inspirateurs etc. Je crois qu'il n'en finirait jamais
enfin l'on en vint aux exemples. La bonne Debutade puis
Aspasie Petrarque et Laura. Puis d'un saut il arriva à nos
femmes hollandaises in dat miskend gewest in die moerige aard.
Il y avait de tems en tems beaucoup de vers un peu libres en
fait de politique. Nous vîmes passer en revue Tesselschade
van Merken. Koolaart Lannoy Leskailje Schuurman Ruysch
Troost Merian Koerten Blok etc. etc. etc. Mais il fallait avoir tous
ces gens en tête. Puis nous eûmes une petite harangue aux
artistes vainqueurs. Enfin après encore beaucoup de
musique il distribua les prix en prose ce qu'il varia
avec beaucoup de goût. Il fit une louange de Felix
et enfin encore un petit vers lyrique qui disait aux femmes
que l'amour des arts n'éteignait pas celui pour les dames
et qui finissait avec Voor de liefde en voor de kunst.
On joua la finale et toutes les dames s'évadèrent pour
s'emparer de places où ils puissent à leur aise boire du
punch et du chocolat.
Hier en revenant de la bourse une affiche frappa nos
yeux qui annonçait un tableau de l'incendie de Moscou
nous y allâmes. Ce n'était pas mal peint mais cela ne
frappait pas beaucoup. On disait que cela avait été peint
d'après nature à la distance d'une demie lieue de Moscou.
Annales du marché
Depuis quelque tems on n'a plus vu arriver des changemens
considérables. Les arrivemens ont été si fréquents qu'il y a
beaucoup de grains enmagasinés et peu d'ardeur pour
acheter. Ceci fait pour ainsi dire chavirer les prix.
127 H. 396 mais on ne peut vendre à ce prix
122 H. Rogge 283 gl.
Le Colzad balance aussi d'après qu'il gèle ou dégèle comme l'a
fait alternativement toute la semaine. Mais à présent il
gèle considérablement les grains ne sont pas favorables.
On a défendu l'exportation du département de la Lippe.
On a beaucoup commencé cette année à vendre op levering
tant le seigle que l'huile. Ce commerce a été si considérable ici
que souvent une cargaison en arrivant ici devait passer par
seize mains avant d'arriver au dernier ressort. Mais cependant
il s'en est ensuivi peu de disputes à cause que chacun
presque y a gagné. On ne sait pas encore pour sûr si un pareil
commerce est légitime sur les loix françaises ou non.
∙Les arrivemens de Hambourg ont été considérables. H. et D. Rahusen
surtout en ont reçu une quantité énorme. Beaucoup de
ces expéditions ont été conduite sur un certain Meyer qui
envoyait ici des vaisseaux qui souvent étaient d'une vingtaine
de consignataires différens. Ceci occasionnait naturellem.
beaucoup de confusion et de fraix. Dans peu il est arrivé
beaucoup de colzad de Oost Frise et des Deelen et beaucoup
de seigle de l'Overijssel. Ce qu'on nomme Bovenlandsche tarwe
vient pour la plupart du département de la Lippe qui
maintenant a été fermé.
Cours d'expérience chez Van Varik lec. 2
L'étendue, La divisibilité et l'impénétrabilité
Exp. divi. Divisions des couleurs dans l'eau
- des odeurs
Imp. |
Les piston d'un perspomp Imp. de l'air en enforçant un grand verre (Hol. glas) dans l'eau fermé ou ouvert en haut La même expérience avec une chandelle L'air reste dans un vase et défend l'entrée de l'eau par un entonnoir. |
La manière d'expliquer de ce sieur n'est par surprenante il
tire ses lumières de Buys et des physiciens français Brisson
Sigaud.
Après il nous montra dans un microscope excellent qu'il
avait les bloedvaten d'une pouce et les (yeux (oogkassen d'une
chevrette qui en a 1500.
Lundi 16 Décembre 1812
∙Quelqu'un revenu de Paris où il avait passé quelques années
racontait que la corruption était au plus haut degré dans
cette grande ville comme c'est ordinairement le sort de toutes
les capitales. N'en parlait-on de notre cause à Paris oui dit-
il vous vous êtes mal adressés, ce n'est pas la justice de la cause
mais le crédit de l'avocat qui fait décider les causes. Si l'avocat a
l'espérance de gagner un petit profit il invite les juges
à déjeuner et leur explique alors la cause et ceux-ci disent
ah il est juste qu'il gagne sa cause. C'est un bon garçon, il nous
traite bien.
Voici une anecdote assez récente. Une certaine cargaison considérable
pour le compte de Mr. Gevers à Rotterdam. La cargaison en est confisquée
puisque le vaisseau avait fait encore un voyage sur la même
licence. On parvient cependant d'une manière directe à mettre
sous les yeux une lettre où on lui disait qu'il était dans
l'erreur et que ce défaut devait seulement être imputé au vaisseau
et que la cargaison ne pouvait être incommodée pour cela. L'em-
pereur s'écrie: Comment m'aurait on encore dupé? Il somme
[onl.] le Ministre un tel entre. Il lui met la lettre devant
les yeux. Le ministre fait faire un nouveau rapport. La
cargaison est libre. Rara inter gurgite nantes.
Le même se plaignait fort de la société à Paris du peu d'amica-
lité qui y régnait et du peu de foi qu'on pouvait prêter aux
gens.
Hier à l'église chez J. Kops.Zalig zijn de reinen van harten want
zij zullen God zien. Bonnes remarques. Sermon édifiant.
Tout est gelé. Therm. 18 degrés et partout où l'on piste
les yeux on voit une quantité innombrable de patineurs.
Nabij Buiten Stadlander sont les rendez-vous et même
la jeune Beauté essaye son pas timide sur le mince crystal.
De tous côtés de la glace. Jusqu'aux moindres fossés tout
est rempli de patineurs. C'est le général sujet de la
conversation. Il y a deux bandes générales une de patineurs et
une de coureurs. On demande Avez vous vu celle-ci ou celle-là.
Ne patinez-vous pas. Ne l'osez-vous pas, ne le voulez-vous
pas. Les patineurs louent la bonne ou la mauvaise
qualité de la glace et voilà tout.
Littérature
Rotgans Gedichten
Un énorme in quarto ôterait presque le courage d'en entamer
la lecture cependant je l'ai entamée et j'ai parcouru
cet ouvrage avec beaucoup de plaisir.
Viennent premièrement cent à cent cinquante pages
remplies d'histoires traduites d'Ovide ou d'autres anciens
avec une morale quelquefois un peu forcée mais souvent exprimée
dans de beaux vers.
Parmi les Zegezangen quoique il y en ait quelques et surtout
les deux premières qui soient d'une longueur démesurée
on y trouve de bons morceaux p.e. Mislukte koningsmoord
et op de verovering van Namen.
Son vers sur la campagne de Goudenstein en est assez joli
mais la Mythologie y entre un peu trop.
Sa description de la campagne de Heemstede est un
chef d'oeuvre en son genre de la manière dont Delille a
peint les jardins Anglais le peintre peint ici une
campagne ancienne avec ses fontaines son parc et cette
peinture assez étendue est fort belle.
Les Bruiloftsdichten quoiqu'ils pèchent par les défauts
inévitables de pareilles poésies, sont vraiment fort beaux
et variés.
Puis encore de Lijkdichten que je n'ai pas parcourus
avec beaucoup d'attention.
L'épître à M. Vollenhoven est très belle et poétique.
Suivent deux tragédies Eneas et Turnus et Scilla. Je
préférreais la dernière. La première cependant contient
de grandes beautés. Le caractère de Turnus et celui d'Amate
ont une touche vigoureuse. Mais malheureusement
l'intérêt se porte beaucoup plus sur lui que sur Enée.
Le dénouement de Scilla est fort beau. Le contraste d'un amour
légal et d'une passion effrénée dans Ismène et Scilla
est excellent. Le triomphe sur soi-même par Minos est
un fort beau trait. Le prince Tokus joue un rôle un
peu passif. Scilla a de beaux momens. Ajoutez à cela
un style superbe et une versification plus belle
et plus soignée qu'on l'entend jamais sur notre théâtre.
La dernière tragédie surtout transportée sur notre scène
plairait à tous les gens de goût.
Le Boerenkermis est presque le seul morceau de cette espèce
que nous ayons dans notre langue. Sans doute par le sujet
et le style il est inférieur au Latin mais d'un autre côté
il est impossible de lire cet ouvrage sans beaucoup de
plaisir. Il n'en y trouve que peu d'endroits réprouvés par
le bon goût tandis qu'on remarque partout le nature
et le style complètement bien imité. Sa représentation de
la comédie m'a plu le moins. Mais la description de la compagnie
qui va dîner chez un vieillard et de leur réception, celle
des champions qui doivent traverser l'anneau avec leurs
lances celle du malheureux paon qui doit être assommé
et du poète qui survient la conversation de l'auteur
avec une vielle femme et avec le Sous-baille. La représenta-
tion donnée par les rederijkers. Les petites remarques semées
ça et là me plaisent fort enfin je serais porté à donner au
poète une place très remarquable parmi les contemporains
comme un de nos meilleurs poètes épiques tragiques et
comiques.
Mardi 15 Décembre 1812
Annales du Lundi
La première partie de la soirée fut assez pacifique. Enfin D. eut la
maladresse de casser une soucoupe on voulut lui faire entendre
qu'il devait de la glace en expiation. Il offrit deux bouteilles de
vin de la fête. Malgré tout ce qu'on dit il ne voulut pas avoir
deux comptes de rôtisseur dans une année. Il dit qu'il déménagerait
et nous promîmes de venir inaugurer sa nouvelle maison. On badine
de part et d'autre. L'oncle acheta effectivement de D. le profit
de cette année par f 5050 et l'accomodement du premier achat
fut annulé. Mais on recommença aussitôt à faire des chicanes.
Lundi 21 Décembre
Il ne s'est rien passé de bien important dans la semaine
dernière. Aujourd'hui un terrible bulletin raconte les pertes
énormes des Français.
Il se trouve en ce moment ici un certain Mr. Castega qui
sait parcourir milliers de vers. Il n'y a aucune pièce
de quelque mérite qu'il n'ait vu jouer et dans beaucoup
il a figuré lui-même comme acteur. Il récite supérieurement
bien il enseigne la déclamation à Langhorst il a appris
à Mad. Richard la manière de jouer le rôle d'Elmire dans
le Tartuffe. Il a été enchanté du jeu de mad. Wattier il
lui a fait ses complimens dans sa loge en y joignant
cependant quelques remarques.
Une chose qui a excité assez de sensation, c'est la mort
d'une mère et d'une fille dans les prisons de cette ville. On dit
que cela a été de dénument, de faim et de misère. Des rapports
en ont été dressés.
Il continue encore à faire assez froid. La misère est très
grande. Le maire a fait afficher de la chaire une nouvelle
souscription pour des billets de soupe économique.
Hier nous eûmes un fort bon sermon de M. van Goeuns
sur la guérison du valet du centenier à Capernaum.
Une voix sonore et claire quoiqu'un peu monotone un
exposé distinct et des réflexions justes.
Au second service M. van Gelder entrant
avec les deux Diacres qui devaient collecter vit en bas de
l'église deux femmes bourgeoises et sur la
Gallérie 3 à 4 autres personnes. Il fit chanter après quoi
comme le nombre des fidèles n'avait pas augmenté
il dit que cela ne lui valait pas la peine de prêcher
que cependant comme ils étaient venus avec des bons sentimens
il prierait. Il fit en effet une prière après quoi il fit
chanter encore et tout le monde s'en alla. Une vieille femme
une de celles qui avaient été en bas de l'église dit en pleurant
en sortant à l'un des diacres que depuis tant d'années
qu'elle avait été membre de l'église elle n'avait jamais
été témoin d'une pareille scène.
Mon grand-père est devenue possesseur d'un ouvrage in-folio titulé
Barlaeus de gestis princi. Auriaci in Brasiliam. C'est un
ouvrage d'une très belle impression sur du beau papier
rempli de fort bonnes estampes et dans un style digne
de Tite Live. Cet ouvrage est fort peu connu. Ni Bosscha
ni Kemper ne le connaissaient. Wagenaar n'en connaissait
qu'une édition en 8o.
Il s'est aussi amusé pendant cet hyver dans les ouvrages de
Witsen. À la suite du Geschiedenis der zeevaart on trouve
plusieurs descriptions de batailles dans un style digne de Hooft et de Brandt.
Mon oncle de Vos a vu chez M. Koesveld un superbe cabinet
de tableaux une superbe collection de l'école Italienne
d'Avinci, Guido etc. et puis à l'école espagnole de Murillo et
d'autres maîtres dont il n'avait jamais vu quelque
chose.
Cour de Physique
Une lecture longue à 1 1/2 et fort ennuyeuse sur la combinai-
son des corps et la porosité.
1. Le mercure qui dans le vide entre par les pores dans le bois
2. Le mercure qui filtre par les pores du cuivre dans le vide
3. Le merc. qui entre dans les pores d'un oeuf
Annales du marché
Le prix restent à la même hauteur environ. Peu d'idée
pour acheter peu de disposition à vendre plus bas.
27 H. puik M. T. 395 gl.
Le seigle est monté
122 H. 295 gl.
Par les achats des fabriquants d'huile le colzad monte. Vries
2 Altenaas 61 Gren. 62 L.
Littérature
Cora d. Nomsz
J'étais curieux de lire cet ouvrage après la lecture
du plan de Cora par Walré et des considérations de ses
amis à ce sujet. Mais cette pièce-ci ne m'a pas beaucoup
plue. Il n'y a que trois actes. Il s'en faut beaucoup qu'on
a su tirer toutes les beautés du sujet et cet ouvrage ne
remplit pas encore le désir de posséder une belle pièce sur
Cora.
De Tott. Mémoires v. 1. 2. 3
Le 1. vol. contient des descriptions des Turcs et de Constanti-
nople et le 2. son ambassade à la cour Ottomane. Les
deux derniers surtout sont très intéressans. On aime à voir
quelqu'un dans un pays étranger en action plutôt que
toujours des froides observations. Le 4. vol. contenant des
détails sur Smyrne, les pyr. n'a pas piqué ma curiosité.
Mercier portrait des rois de France 1. 2.
Un bon ouvrage historique qui présente beaucoup de faits
dans une analyse rapide.
Siegenbeek Museum 1.
C'est la suite d'un pareil ouvrage nommé Euterpe.
1. Discours sur Lambert ten cate: un des nos premiers grammairiens
qui étudia beaucoup l'analogie de notre langue avec
les langues Gothiques Celtiques etc. et qui donna de grandes
lumières sur la dérivation la flection des verbes. C'était un homme
probe, religieux, le protecteur et l'amateur des vers,
l'ami de Van Huysum et de Xavery par Tollius prof.
2. sur Laurent de Médicis. Le style de ce traité est beaucoup
meilleur et contient des détails fort intéressans sur ce
grand homme.
Puis les pièces suivantes que je n'ai pas lues.
Sur les choeurs de la Médée et d'Euripide par ten Brink sur Bossuet
comme orateur Nisus et Euryale trad. de Virgile p. Siegenbeek.
Van der Wilp Gedichten
Stichtelijke gedichten. Il y en a de fort beaux. La providence
considérée dans l'exemple de Jacob contient de très beaux
vers. Paulus à Athènes quoiqu'il soit un peu long
renfermée de bons morceaux. La trad. de l'hymne de Débore
et autres trad. de poésie hébraïque sont des bonnes pièces.
Le vers sur le massacre des enfans à Betlehem est aussi
fort beau.
Les Mengelwerken sont pour la plupart comme c'était
alors la mode des vers d'occasion mais celles-ci renferment
beaucoup d'esprit poétique une belle versification
et de très jolies idées entr'autres le vers sur la paix
d'Aix la chapelle et sur un cabinet de tableaux.
Huidekoper Gedichten 1 v. 4o
Ces poésies attestent un auteur civilisé et instruit.
Maarsseveensche Tempe renferme de jolies idées.
Le kabinet der nederlandsche dichters est une fiction agréable.
Le reste du volume ne contient presque que des bruiloftsdichten.
Puis que je ne suis pas grand amateur de pareilles poésies
je ne les ai pas lues toute mais il faut convenir que
quant à celles que j'ai lues elles respirent une aisance
une facilité et une variété qui ne s'y trouve presque nulle
part et qu'en ce genre Huidekoper peut être placé à la
tête des poètes de son siècle.
Annales du Lundi
D. parle de Lacédémonien et dit qu'un roi de Lacédémone étant
dans une ville de ses états.
Il fit voir une médaille frappée à Berlin pour distribuer aux
pauvres qui faisaient vacciner leurs enfans on y voyait un
enfant vacciné une rose à la main. D. blâma l'ordonnance
et l'exécution de cette médaille.
D. a reçu d'Aroy une lettre remplie de complimens flattans.
Van Goeuns interrogé raconta que Logger était un homme
très aimable et galant envers les dames.
On avait aussi appris que M. Muntinge était un homme très
complaisant qui amusait volontiers une société. Comme
le pauvre dut souffrir.
Jeudi 24 Décembre
Enfin contre toute apparence le grand homme est arrivé à Paris
au moment où personne ne s'y attendait. Quelles en seront les
suites. Je l'ignore mais je crains fort qu'en tout cas il ne
veuille avoir de l'argent et des hommes et ce sont deux
points assez difficile à accorder.
Vendredi 25 Décembre 1812
Je fus à Felix où Mr. van Goeuns fit un discours sur Boèce.
Il fit premièrement un exposé de sa vie très bien écrit.
Ensuite quelques détails sur sa philosophie et ses ouvrages.
Il cita à cette occasion un morceau prosaïque de l'ouvrage
peut-être un peu trop long. Il en cita ensuite plusieurs
vers suivant les diverses traductions que nous en
avons dans divers âges de notre poésie. Il y en a deux
dans un patois flamande et hollandais qui datent
du 15me siècle et qui ne sont que des imitations
barbares.
Dirk Volk. Coornhert en publia deux traductions avec
un intervalle de 39 ans. La dernière est infiniment supé-
rieure et il dit lui-même que ses deux traductions se
ressemblent comme un chat et un canard.
Gargon ministre à Middelburg en donna une autre traduction
en 1722. Il était vraiment poète témoin la partie poétique
de cet ouvrage sa belle traduction des psaumes et du cantique
des cantiques et son Walcherse Arcadia.
Enfin Bilderdijk en traduisit la partie poétique dans notre
temps.
Les trois traductions avaient chacune leur mérite et celle
de Gargon gagnait en exactitude ce que celle de Bilderdijk
gagnait en éloquence.
Boèce était un homme de distinction. Il fut deux fois consul
et se distingua par sa probité et ses talens. Il traduisit
en latin la plus grande partie des phil. grecs Platon
Aristote. Il était grand mathématicien et technique trad.
aussi Archimède en joignant à tous les auteurs qu'il tradui-
sait des notes et explications. Il fut accusé de n'être pas
Arien orthodoxe (d'avoir des correspondance défendues avec
l'empereur Justinien) d'avoir voulu sauver le sénat romain.
Il fut enfermé dans une tour dans le nord de l'Italie où
il resta enfermé deux ans pendant lesquels il écrivit ses
consolations et enfin il fut décapité par ordre de Théodorice.
Sa philosophie était un mélange de nouveau platonisme
de Christianisme et de Stoïcisme. Il écrivit aussi des
traités théologiques. Ses ouvrages forment 1 vol. in fo.
Sa prose renferme des barbarismes d'après le goût de son
siècle de la latinité. Il fut deux fois marié. Sa dernière
épouse fut telle de Symmachus qui fut aussi tué par
les ordres de Théodorice.
Son ouvrage à été traduit dans presque toutes les langues
vivantes et dans quelques-unes plusieurs fois.
Le roi Alfred la traduit en langue saxonne et la reine Elizabeth
en Anglais.
Littérature
Helmers De Hollandsche Natie
Un poème en 6 chants que j'ai lu avec beaucoup de
plaisir. Le 1. ch. conte la moralité le 2. l'héroïsme sur terre
3. l'héroïsme sur mer 4. la navigation 5. les sciences 6. les arts.
Il faut convenir que ce poème renferme de grandes beautés
mais en général on y retrouve les beautés et les défauts
ordinaires de ce poète. Quelquefois trop d'emphase trop
de déclamation c'est ce qu'on trouve surtout dans
les deux derniers chants.
De tems en tems on trouve de très belles comparaisons
de beaux épisodes p.e. celui de Bijling quoique un peu
trop modernisé l'arrivée d'une flotte victorieuse la découverte
de la nouvelle hollande par Tasman l'épisode d'Adeka
on y trouve aussi encore des apparitions en foule. Le
génie des mers paraît aux hollandais au cap de bonne
espérance (imitations de Camoens) le génie apparaît à
Tasman dans la nouvelle hollande un génie apparaît
à Helmers pour l'engager à chanter les exploits sur
mer des Hollandais. Lorsqu'il fait mourir quelqu'un
il dit denkt aan zijn gade en sterft. Cette idée est répétée
très souvent. Cependant on peut dire que c'est un ouvrage
digne de la lecture de tout amateur de sa nation et
de la poésie.
Voit T. 15. No. 12. 13. 14. 15. 16.
Dorn Seiffen. Over de helden van Homerus
Un portrait assez éloquent de chaque héros de l'Iliade
d'après ce qui en est mentionné par Homère. Celles de
Nestor et Hector m'ont plu le plus. Je trouve que Diomède
n'a pas été si bien peint. C'est un ouvrage d'où celui qui
connaît Homère ne pourra pas tirer beaucoup d'idées neuves
et qui n'intéresse aucunement tous ceux qui ne
connaissent pas ce grand poète.
Les enfans. Contes 2 v.
Quoique ce soit proprement un ouvrage destiné aux enfans
je l'ai lu avec beaucoup de plaisir. Ce n'est pas le style
des conseils à ma fille mais c'est un très bon ouvrage.
La plupart des contes sont fort intéressans et respirent
la plus saine morale mais comme dans tous les ouvrages
français nulle part des motifs de religion. Une des plus jolies
est l'histoire d'un Louis d'or avec toutes ses suites.
Barron. Hist. of England v. 7. 8. 9. 10
J'ai lu cet ouvrage pour compléter mes connaissances de
l'histoire d'Angleterre. Mais lire cet histoire après Hume
c'est comme si l'on prend de la bièrre fraîche après
du vin de Bourgogne. C'est un auteur presque dans le
genre de notre Wagenaar plutôt chroniqueur que historien.
Cependant les derniers volumes qui décrivent les opérations
de la guerre de 7 ans sont écrits d'une manière plus
intéressantes et donnent de toutes les expéditions
faites alors par les Anglais un narré fort agréable.
Cette histoire va jusqu'à la signature des préliminaires
en 1762. Vid. Hist. d'Angl. Ext. 2.
Je fus Samedi soir au spectacle. On donnait Rodogune.
Il est assez connu que les quatre premiers actes de cette
pièce ne signifient pas trop et que c'est le 5er acte surtout
où se concentre l'intérêt. Mais quoique les premiers actes
languissent en quelque sorte toutes celles où paraissait
Cléopâtre s'animaient car Mad. Ziezenis joua ce rôle supérieurement.
Sa première apparition sur le théâtre fut superbe. Sa harangue
à ses fils ses fureurs sa mort tout cela était d'une
beauté inimitable. Snoeck joua très bien le rôle d'Antioche.
Mad. Hilverdink joua Rodogune assez bien. Everts
ne me plut aucunement. En effet il faut avouer
que le 5. acte de la pièce produit beaucoup d'effet.
Le nouv. ballet était fort joli. Il y avait de fort jolies
scènes et situations. Mad. [onl.] jouait très bien le
rôle d'une femme jalouse qui veut empoisonner
une autre et l'est elle-même. Graive était l'auteur
du ballet. Les crix tumultueux du parterre le
rappellèrent et il rentra au milieu des applaudisse-
mens les plus terribles.
Annales du Lundi
Premièrement assez pacifique. Au dessert le médecin
rendit à C. Walrée les vers de son père du papier
anglais dans une enveloppe charmante avec une lettre
pleine de complimens que J. de Vos lut quoique contr. son attente
il n'y trouva rien concernant l'invitation. Enfin après
de vives alternations les trois participiens vendaient à
Dylius leurs [onl.] pour un dédit raisonnable.
On répand encore des nouvelles les une plus effrayantes
encore que les autres. Selon les uns l'armée française a
capitulé l'empereur n'est plus en état de faire une campagne
les Russes sont à Wilna, Dantzig etc. etc. l'empereur devra
abdiquer et je n'en crois encore rien.
Cours de physique
1. du sel mêlé dans l'eau lorsqu'on y jète de
l'acide du vitrol le sel s'évapore. C'est la meilleure
précaution contre l'épidémie.
2. Lorsqu'on allume un feu de souffre sur un petit sou
cette pièce se dévide en deux parties non homogènes
et l'on reçoit un sou d'argent et un de cuivre.
3. Du sel ammoniac et de la chaux qui séparément n'ont
point d'odeur donnent une odeur détestable quand
ils sont mêlés.
4. Du blanc d'oeuf mêlé avec de l'acide de vitriol produit
la coagulation en corps.
5. Du sel avec un peu d'eau. On y jète de l'alkohol dissant
le sel ceci étant chauffé l'Alkohol s'évapore et le sel
tombe au fond.
6. De l'eau entièrement saturée avec du sel peut encore adopter
du sucre.
7. De l'eau saturée avec du sel peut encore prendre 1/3 de
plus quand elle est chauffée.
8. De l'eau et de la Magnésie ne se mêlent pas mais bien
lorsqu'on y mêle de l'acide sulfurique.
9. De l'huile et de l'eau ne se mêlent pas mais bien lorsqu'on
y joint de la soude. Ainsi se forme le savon.
10. Du cuivre pulvérisé est dissou par l'acide de salpêtre
11. De l'eau forte ne peut pas dissoudre la cire.
12. formation du gas inflammable avec du zinc et du vitriol.
Jeudi 31 Déc.
J'ai passé encore une soirée délicieuse au théâtre on
donnait Gijsbregt van Amstel. A. Snoeck était Gijsbregt
et Mad. Wattier Badeloch. Ceci changeait entièrement
la pièce. Avec quelle énergie de quelle manière sublime
Mad. Wattier jouait-elle ce rôle. Dans le 4o acte quand
tous ces récits se font les autres acteurs sont là comme
des poupées sans mouvemens mais ici ils prenaient
part à tout ce qu'on disait et le jeu de Snoeck et de Mad. Wattier
pendant tout le rôle du bode était superbe.
Rien n'égalait aussi la manière dont Mad. Wattier récita
ces vers
Waar wiert opregter trou
C'était au dessus de toute louange.
Comme elle récita bien le premier récit de son
songe quelle belle scène joua t-elle avant même que
son mari entrât.
La scène où Gijsbregt dit
Ik kan bescheidenlijk en klaar 't geklikkak horen
En 't ramlen van het staal
produit un très bel effet.
Kloris en Roosje pièce plate et triviale est cependant
assez supportable par la manière originale
dont Majofsky y joue.
∙220[?]
Livres lus
22 Wagenaar Vaderlandsche Geschiedenis 2e vl. 18 v.
23 Quelques traits de la vie de Frederic le grand 1v.
24 Bâtir 4e deel
24 Hugo de Groot en Maria v. Reigersbergen door Loosjes 1v.
26 Haller [onl. Gotisch] 1 v.
26 Meissner Alcibiades 4 v.
27 Weisse [onl. Gotisch] 2v. 37, 38
27 Schiller Wallenstein
27 -[Gotisch]
27 -Turandat
Shakespear Henry 5 62
- V. 13 p's 62
28 Hagedorn Gedichten 3 v.
Schiller [onl. Gotisch] 2v. 34.35.36
Kleist Gedichten 1 v. 60, 61
[onl.] Gedichte 2 v. 67,68,69.
Deutschlande [onl. Gotisch] 4 v. 40, 41, 48, 50
Eschenburg [onl. Gotisch] 2 v. 45, 46, 47, 48, 51, 52, 53
Kotzebue [onl. Gotisch] 45
Fielding Journey to the next world 1 v. 69.
Schiller [onl.Gotisch ] der 30 jr. krieg 2 v. 45
Huchenholz [onl. Gotisch] der 7 jr. krieg 3 v. 54.
Matthison Gedichten 1 v. 54
Heinrich [onl. Gotisch] 2 v. 55, 56
Geschiedenissen der ver. Nederlanden T. 11 25, 73
Vert.[?] Weber [onl. Gotisch] 2 v. 73
[onl. Gotisch] 73
1812
De drie Mannen 78
Kants Sieg Euterpe 79, 80
Kotzebue Johanna van Montfaucon 89
Loots Werken 1 v. 89, 90
Le règne de Louis XI 1 v. 90
Reis van Mungo Park 3 v. 90
Vondel Treurspelen 2 v. 91
Pope's works 4 v. 94, 95, 103
De Vos Leven en Character van Hulshof 101
Hulshoff Lykrede op de Vries 110
Dryden's works 4 v. 111, 114, 115, 132
Shakespaere Richard 3, Henry 8 e.a. king John, Richard 2 112
Cowley Denham 1 v. 115
V. der Palm Bijbel voor de Jeugd 1 v. 116
Bilderdijk Fingal 2 v. 116
Bouilly Conseils à ma fille 2 v. 124
Histoire de Laren 14 v. 127
Gibbon 1 en 2 131
Cornelius Nepos 131
Butler Hudibras 132
Bagatelles où Promenades à petersbourg 134
Vondel Gedichten 1 v. 134, 135, 136
Bilderdijk Mengeldichten 4 v. 136, 146, 147
Poésies de Mad. de Salm 1 v. 141, 142, 143
Gesch. v. Ligthoofd 1 v. 143, 144
Young Works 4 v. 145, 146, 154
Histoire des Wahabis 1 v. 150
Heriadan Barbarossa 150
Justinus 144
Laudatio Jani Dousae 150, 151
Hulde aan G. Hesselink 153
Addison Works 1 v. 155
Poot Gedichten 3 v. 157, 158, 159
Waller Poems 1 v. 165
Delille la conversation 1 v. 166
Bilderdijk Winterbloemen 2e v. 166, 167
Lantier Les voyageurs en Suisse 3 v. 177.
Hoffham Theorie der Ned. Poezy, 178
De Nuptiis Thetis et Pelie 178
Delille Les trois règnes de la nature 180
Akenside poems 1 v. 181
Loosjes Ebba Niels 183
Vellejus Paterculus 184
Gray
Lyttelton
[met accolade achter Grais en Lyt:] Poems 1 v. 185, 186
Bilderdijk Nieuwe Mengelingen 2 v. 186, 187
Garth Poems 1 v. 187, 188
Les dejeuners de mon cher oncle 2 v. 193, 194
Leven van Juffr. Brummelkamp 194
Beautés et tabl. pittoresques de la Nature 195
Hume History of England 12 v. 195
Cats 1[?] v. 197, 198
Hist. de Mesd. de St. Jeanvier 198
Cras ad Boschuim 199
Atala 199, 200
Florus 202
Lettres de Temple 2 v. 201
Swift works 2 v. 204
Mémoires de Temple 1 v. 245
Millevoye Charlemagne 204
La Cretelle Tome 5e: 245
Dripaty Lettres sur l'Italie 3 v. 241
Voss Louise 241
Reinbeck reize 2 v. 241
Legouvé Mérite des femmes 242
Levensbeschr. van mannen en vrouwen 1 v. 242
Blumauer Gedichte 253
Oeuvres de Piron Tome 2 254
Lannoy Dichtwerken 1 v.
- Nagelaten Dichtwerken S[?] 254, 255
Schermer Gedichten 255
Mosheim kerkelijke Geschiedenis 14 v. 258
Vertot Revolutions de Portugal 258
Racine le fils la religion 252
Milton Poems 259, 266
Curtius 266
Koolaart Gedichten 266
Marmontel les Inca's 268, 279, 2 vol.
Swift Travels of Gulliver 268
De Kruyff gedichten 268
Lessing Trauerspiele 269
Manlius 269
Regnard Les Menechmes, le légataire universel 270
Shakespeare Death of Cesar 270
Wetsteen het gelukkig ongeval 270
De venetiaansche drielingen 270
[onl. Gotisch] 1 v. 270
Délassemens de l'homme sensible 270
Henneboo gedichten 271
Kuyper Dichtoefeningen 271
Rhulières Anarchie de Pologne 272, 4 v.
Gay Poems 273 2v.
Ipex[?] gedichten 273
Spandau Gedichten 273
Jonker Fransen oorlog 276
Stijl opkomst en bloei der Nederlanden 276
Michaux Printemps d'un proscrit 276
De beer Poortugaal Ledige uuren Dichtpoogingen 276
Shenstone Works 280
∙Pope essay on man 280
Addison cato 280
Robertson History of America 282 3v.
∙Rotgans willem de 3e 282 283
∙Loosjes laatste togt van de Ruiter v. 1 283
Rotgans Gedichten 287
Nomsz Cora 290
De Sott[?] Mémoires vol. 1 et 2 291
Mercier portraits des rois de France 291
Siegenbeek Museum v. 1 291
Van der Wilp gedichten 291
Huidekoper Gedigten 292
Helmers de Hollandsche natie 293
Dornseiffen Over de helden van Homerus 294
Les enfans contes 2 v. 294
Barron hist. of England 7, 8, 9, 10, 294
∙[leeg]
Indifférence
Disposition pour M.R.
Julie
Le[?] Première entrevue avec S.
Sentiment naissant
Vuide
Des vers
Nouvelles entrevues
La barque, le bras
La double confidence
La leçon italienne
Continuation de la confidence
La promenade manquée
La promenade les mendians
La soirée délectable
∙[- onl.]Les poèmes
L'entrevue à la longue
Les Parens
Scoupçons divers et intéressans
la Prophétie sympathique
le caractère du prétendu
ses infidélités
Le père ce qu'il dit
La confidence au rival
L'aventure surprenante
à Overveen
La lettre où les sentimens
par écrit
quelque danger d'infidélité avec
M.B.
∙[-Les trois ménages
∙H.N. et C.B.
∙P.B. et J.S.]
Julie se marie
Indifférence Noce de Julie
Entrevue avec S. à S.V.
indifférence de F.
Scoupçons de Mad. G.
La promenade et la rencontre
avec F.
La première visite à Harlem
Les vers de traan
Craintes
Dénouement de l'affaire de F.
Le vers de Herstelling
Sécurité tranquile
confiance avec H.G. Le secret
ne lui est pas découvert
2e visite à Harlem
Des nuages. Le mystère
La confidence de l'amour de
∙N.B. situation terrible
calme rétabli. Discours posé
Situation critique de H.G. comme
il s'en tire
Résolution Lettre à Mad. G.
conférence vers le sage[?]
L'être amicale de Mad. G.
Incertitude affreuse
Explosion
fin