Constantijn Huygens
aan Amalia van Solms
12 augustus 1646
n0167
Bron: LHASA, A7b, 109A, 39-40

Transcriptie

Au Camp à St. Gillis, le 12e aoust 1646

Votre Altesse aura veu dans ma dernière d'hier comme nous devions encor marcher en ce pais le mesme jour, mais cela fut remis jusques à ce matin, quand nous avons prins tout autre routte que celle qu'on se représentoit hier vers les forts de l'Escault et sommes venus droit icy à une grosse heure de Hulst, d'où doresenavant nous pourrons tirer nos vivres sans péril ny incommodité.

Autre résolution soudaine vint hier à estre exécutée; c'est que voyant que les trouppes Françoises ne pouroyent estre employées en ce pais de la manière qu'on avoit espéré en qu'elles pourroyent rendre plus de service au Roy en son armée, il fut trouvé bon que Monsieur le Mareschal de Grammont les y ramenèroit, et pour faciliter son passage Monsieur le Comte Maurice eut ordre de l'escorter jusques au delà du canal de Bruges aveq environ un tiers de nostre cavallerie. Ordres furent envoyez de plus à Kien, commissaire des vivres, de leur fournir au Mourspuy la plus grande quantité de pain qu'il luy seroit possible. Ce Mareschal estant parti la-dessus vers le soir pour marcher en diligence et au desceu des enemis, nous avons esté tout estonnez ceste apres-dinee d'entendre qu'il n'avoit passé jusqu'à Steken, où il s'estoit arresté pour n'avoir pu trouveur soudainement à Hulst des chariots ou charrettes capables de mener son pain, que Kien avoit prest en abondance, quoyque luy, Kien mesme, se fust offert caution pour le retour des dittes charettes ou chariots. Enfin, pour ceste cause ou autre (car on en raisonne diversement) le voyage de ces messieurs, qui avoit rejouy tout le monde, est rompu et comme les enemis en peuvent estre très bien advertis, il n'y a plus lieu de penser à le faire par ce chemin-là. Reste celuy de la mer, qui a esté en délibération à ce soir et le sera encor plus demain.

Durant ces entrefaictes et nostre siège du chasteau de Teemsche, le vice-admiral de Zelande et le capitaine Cabelliau, qui avoyent occupé le fort du Boeregat, ne nous voyans pas paroistre sur les digues au jour assigné, qui fut vendredi, se sont trouvez dès hier au matin saluez par les enemis de 8 à 10 pièces de canon qui les ont foudroyé à outrance jusques à ce devant disner que nous n'avons plus ouy tirer. Ainsi donnant d'heure à autre advis par lettres de l'estat où ils se sont trouvez sans apparence de pouvoir résister contre de plus grande efforts qu'ils voyoyent les enemis leur préparer, ils ont eu ordre de quitter la prinse et de se retirer aveq leurs gens en chalouppes. Nous ne pouvons encor sçavoir quelle issue ils ont eue de leur guerre, sinon que du costé des enemis il vient nouvelle qu'après avoir faict sauter ce fort et quelques redouttes, ils se sont retirez; dans demain on sçaura le tout, car le vice-admiral à esté envoyé quérir pour autre chose.

Son Altesse, quoyqu'enrumée extrèmement et enrouellée de la voix, en sorte qu'on a grand peine à l'entendre parler aujourd'huy, n'a pas laissé de faire toute ceste marche à cheval, non plus que de s'assembler aveq des députez des Estats sur le soir, après s'estre un peu rafreschi dans le lict. Je laisse au docteur Verstraten à discourrir du dedans de ses infirmitez, comme il doibt et peut mieux que nul autre. Au dehors seulement nous y trouvons une esmotion de colère si forte et si fréquente que ses valets de chambre ont grand peine à s'acquitter sans confusion des debvoirs qu'ils sont tenues de luy rendre. Le flux de ventre cesse et n'entendons plus parler.

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