Constantijn Huygens
aan Amalia van Solms
17 oktober 1646
n0187
Bron: LHASA, A7b, 109A, 81-82

Transcriptie

Au camp de Venlo, le 17e octobre 1646

Son Altesse receut hier par un tambour de Breda la lettre que Votre Altesse prins la peine d'escrire en faveur du capitaine Ravensway et sera bien ayse de faire réflexion sur ceste entremise aux occasions de son avancement, mais dit que pour encor les affaires ne s' y disposent guère icy.

La conjecture que Votre Altesse aura trouvée dans ma dernière d'hier de quelqu'apparante sortie des assiégez après leur secours venu, ne fut pas vaine. Ils en firent une tout de bon hier après-disner au nombre de bien 6 ou 7 cent hommes. Et quoyque Monsieur Eerenrester? qui commandait aux approches eust bien faict le mesme estat et attendu leur venue plus de deux heures de suitte comme ils parurent, ils se jettèrent si vertement dans la trenchée, qui est estroicte et non pourveue de corps de gardes qu'ils repoussèrent nos gens jusques à près d'une baterie neufve avancée de 4 ou 5 cens pas devant la première, d'où ayant encor esté rejoignez ils ne laissèrent pas d'y venir encor une autre fois, jusques à ce qu'à la troisiesme. Monsieur de Wijnberge, qui estoit en garde, les chassa aveq ses 12 compagnies à ne plus revenir. Ce fut là un bonheur que justement ceste trouppe fraische se trouva sur les lieux et un second que les 8 ou 9 compagnies que je dis hier devont[?] appuyer la garde des approches, y furent envoyées deux ou 3 heures devant le temps ordonné, de sorte qu'aveq la garde de la trenchée, qui estoit de 12 compagnies, celle de Wijnbergen d'autant et cesdites 8 ou 9, il s'y en trouva ensemble jusqu'à 32 ou 33. Mais comme le canon de la ville et du fort dominoit furieusement par tout, les officiers eurent grand peine à faire sortir les soldats du bas de la trenchée, où ensuitte il y eut grande presse et confusion entre amis et enemis, de sorte qu'il y a eu assez de monde tué de part et d'autre. Mais les enemis demeurerèrent si longtemps maistres de la teste de nos travaulx, que non seulement ils eurent le loisir de retenir leurs morts, mais mesme de dépouiller tous les nostres. Deux lieutenants Anglois y ont esté tuez de nostre costé. Les capitaines Gesan[?] et Herbert blessez, comme aussi le coronel Aylva d'un coup de canon au bras sans que l'os soit rompu. Il se trouva là par hazard et se reposant au penchant d'une colline, après quelques devoirs qu'il eut aydé à y rendre, comme il est fort vaillant gentilhomme, ceste bale le vint trouver où il n'y avoit aucune apparence qu'elle pust donner.

Le prince de Ligne vint hier loger au deça de la Meuse, à Harten, village à 3/4 d'heure au-dessus de Rurmonde, et comme quelques advis conformés font croire qu'il pourroit marcher plus en deça. Son Altesse trouva bon hier au soir, d'ordonner à Monseigneur le Prince Guillaume de desloger de Baerle et de se trouver aujourd'huy vers le midy aveq toute la cavallerie icy devant notre pont pour adviser en après quel quartier on luy pourroit faire prendre. Ainsi à l'heure que j'escris la cavallierie s'envient et donne du passetemps au fort à luy tire en passant quelques volées de canon.

Le quartier de Monsieur de Brederode fut trenché avant-hier et le nostre hier les materiaulx nous estant venus plus abondamment par convoys de diverses garnisons.

J'envoye ceste lettre droict à La Haye, sur ce que je puis juger que Votre Altesse s'y trouvera maintenant par des rapports divers et incertains. J'eusse bien souhaitté d'en estre informé exactement comme Votre Altesse me l'avoit faict espérer, afin de ne manquer point en mes adresses.

Pour le temps froid et rude qu'il fait Son Altesse ne laisse pas de se porter à l'accoustumée et disne tous les jours en publicq.

Il vient de courir un bruict parmi les paisans que ces trouppes icy de l'enemi s'estoyent mandée à revenir contre les François en Flandre.

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